Léonie posa rageusement la boîte de santons sur la table.

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2 Léonie posa rageusement la boîte de santons sur la table.
Comment sa sœur osait-elle lui parler ainsi ? Sous prétexte qu'elle lui avait dit pendant le repas de famille que cette teinte de cheveux ne lui allait pas du tout elle ose lui faire une scène au téléphone ! Lui dire qu'elle ne pensait qu'à critiquer et ne voyait jamais rien de bien ! Elle avait rudement bien fait de lui raccrocher au nez ! Mais de quoi elle se mêlait, à vouloir faire la morale !

3 Elle considéra l'ange. Pour sûr, lorsqu'il allait faire les commissions de Dieu, il devait en profiter pour donner des conseils ou redresser des torts ! Elle réfléchit, emplie d'espoir. Aux bergers ! Aux bergers qui n'allaient jamais au temple, ils ont bien dû faire des reproches ! Elle a oublié, c'est sûr ! elle se souvient seulement de la phrase : "nous vous annonçons une grande nouvelle : un Sauveur est né !" C'est tout ? Pas de remarques pour qu'ils s'améliorent ? Si même les anges font mal leur travail, où allons-nous ?

4 Léonie commença à arranger la crèche : un peu de paille, la mangeoire…
Ses petits-enfants allaient venir. Etait-elle contente ou contrariée de les recevoir ? Ils étaient si mal élevés ! Ce n'était pourtant pas faute des conseils et critiques qu'elle faisait à sa belle-fille ! Mais celle-ci n'en faisait qu'à sa tête. Ah ! il était beau, le résultat ! Enfin, tout de même, oui, elle était contente d'avoir les enfants pour quelques heures. Ils n'y étaient pour rien, s'ils étaient mal éduqués ! Et son fils, le pauvre, ne pouvait pas s'occuper de cela ! Il travaillait tant !

5 Une idée soudaine la frappa, et elle resta le santon en l'air : sa belle-fille aussi travaillait ! Elle faisait autant d'heures que son fils ! Fallait-il donc qu'elle croit son fils aussi coupable que sa femme ? L‘éducation, c'est le domaine des mères, après tout ! Elle se souvint, avec un certain malaise, qu’à la mort de son mari, c'était sa maman qui avait pris en main ses propres enfants : elle ne pouvait à la fois travailler au dehors et assurer leur éducation. Heureusement, elle avait toujours pu compter sur son aide et sa compréhension.

6 Aide ? Compréhension ? Combien de fois avait-elle proposé à ses enfants de les aider, les avait-elle écoutés sans joindre de commentaires ? Elle chassa vite cette idée et posa le berger. Et d'ailleurs, que portait-il donc, ce berger ? Quelle drôle d'offrande à présenter à un nouveau-né ! Il est vrai qu'il avait dû prendre ce qu'il avait sous la main. C'était un pauvre, et loin de chez lui… Léonie le considéra avec plus d'attention. Il n'avait pas hésité, sur la foi de voix tombées du ciel, à se mettre en route, partageant ses trésors et abandonnant son troupeau à la garde du chien…

7 Ah ! Voilà Saint Joseph ! Léonie s'est toujours demandé s'il avait eu raison de faire confiance à ses rêves, et de prendre Marie quand même. Elle eut honte de cette réflexion. Comment douter ainsi ? Ne savait-elle que douter ? Une phrase de sa sœur lui revint en mémoire : "Tu ne penses qu'à critiquer et ne vois jamais rien de bien". Elle posa brusquement le santon dans l'espoir de faire taire en même temps la petite voix qui commençait à résonner en elle.

8 Une étable. Mais à quoi pensait Dieu
Une étable ! Mais à quoi pensait Dieu ? Son fils, notre Sauveur, dans une étable ! Se pourrait-il que Dieu perde la tête, par moments ? Encore une fois, Léonie se reprit et s'étonna de ces paroles sacrilèges : c'était donc un peu vrai, elle ne voyait que le mal en toute chose ?

9 Elle oublia sa réflexion en sortant le premier des mages
Elle oublia sa réflexion en sortant le premier des mages. Suivre une étoile ! Il fallait bien être astrologue pour avoir une idée pareille ! Mais aussi, ils avaient bien failli ne pas arriver, tous les trois ! Cer-tainement, c'est pur hasard qu'ils soient parvenus à desti-nation ! Les savants sont toujours fous, tout le monde sait cela ! Mais non, ce n'est pas une critique, juste une constatation !

10 C'est vrai, si elle essaie de voir les choses "de l'autre côté", et pas du côté négatif, qu'il leur a fallu bien du courage pour partir ainsi vers l'inconnu, à la suite d'une étoile, en emportant des trésors pour un roi qu'ils ne connais-saient pas… Quelle tête ils ont dû faire en voyant cette famille si pauvre et si humble ! Moi, se dit Léonie, j'aurais rebroussé chemin, et remporté mes cadeaux ! Quelle idée tout de même de faire confiance à une étoile ! Allons bon ! Voilà son côté négatif qui revient ! Y aurait-il quelque chose de vrai dans ce qu'a dit sa sœur ???

11 Une porteuse d'eau. De l'eau. Encore une drôle d'idée
Une porteuse d'eau. De l'eau !!! Encore une drôle d'idée. C'est de lait qu'ils auraient eu besoin, ces pauvrets ! De nouveau, une douce voix intérieure : "mais non, du lait, j'en avais pour mon bébé ! Mais de l'eau, quelle denrée rare et précieuse ! Nous en avions grandement besoin !" Léonie commence à être ébranlée. Ses pensées reviennent vers ses petits-enfants, sa belle-fille. Heureusement, elle a toujours été gentille avec elle !

12 Pourtant, qu'on le prenne comme on veut, un berger qui amène une poule à l'étable ! Enfin !Avec quoi, comment veut-il que ces pauvres gens, dans une étable, la fassent cuire ??? Comment pour-rait-on trouver du positif à un cadeau aussi ridicule ? Au même moment, Léonie croit entendre la voix de Marie : "Une poule, quelle chance, nous aurons des œufs frais ! Merci, gentil berger !" Comment s'était passée sa dernière visite ? Elle se souvient avec un certain malaise que, avant même de la saluer, elle lui a reproché d'être en retard. Et le petitou qui avait du chocolat sur la figure ! La maman avait répondu gentiment : "il goûte, belle-maman ! J'attendais d'être ici pour le laver.«  Léonie réfléchit, fronce le sourcil, cherche, elle ne se souvient pas d'avoir jamais dit un mot gentil à sa belle-fille, et son malaise s'accroit.

13 "Et toi, Marie, dit-elle en prenant le santon au manteau bleu, tu as dû rudement râler, lorsque tu as vu que cet enfant Fils de Dieu allait naître dans une étable ! Tu en as voulu à ton Dieu, n'est-ce pas ? Mais non, Marie "sans péché" ne peut pas s'être mise en colère… Sans doute a-t-elle fait confiance, tout simplement.

14 C'est trop ! Tout tourbillonne dans la tête de Léonie, dans son cœur surtout…
Se pourrait-il… Se pourrait-il que sa sœur n'ait pas tout à fait tort ? Disons les choses franchement : qu'elle ait raison ? "Je vais la rappeler et je vais m'excuser", se dit Léonie. Parfaitement ! M'excuser. Tout ça à cause de vous !" Dit-elle avec un brin de rancune aux santons impassibles. Un coup de sonnette. Elle va ouvrir. Sa belle-fille est là – c'est vrai, elle sourit toujours ! pense Léonie – avec les enfants.

15 "Entrez vite ! Pas trop fatiguée, Amina ?" dit-elle en embrassant sa belle-fille. Pas d'erreur : c'est bien un soupir de soulagement que celle-ci a poussé. Merci à ce Noël, fête de la paix. Léonie sait bien qu'elle aura bien des luttes à soutenir, mais elle y mettra l'entêtement qu'elle mettait à juger les autres. Elle commence déjà à se rendre compte que la vie, somme toute, sera bien plus douce pour son entourage… et surtout pour elle !!! Elle aura reçu cette année-là, et elle donnera, le plus beau, le plus vrai des cadeaux de Noël !!!

16 - Images de sources diverses.
Texte de Jacky Musique : Christmas Medley – - Interprétation d’André Rieux Diaporama de Jacky Questel, ambassadrice de la Paix