L'objet dans l'art
L'objet a toujours été présent dans la peinture Dans les natures mortes de Lubin Baugin, par exemple. Nature morte à l'échiquier, XVIIè siècle
Mais c’est au 20e siècle qu’il connaît un nouvel essor. L’objet ou des fragments d’objets envahissent le tableau. George Braque et Picasso sont les premiers artistes à coller directement des morceaux de papier dans leurs tableaux en Georges Braque, papiers collés, 1912
Picasso, lui, fut le premier à coller d'autres matériaux que le papier: de la toile cirée, de la ficelle,... Picasso, nature morte, 1912
Dans ce tableau, Picasso a découpé une forme de guitare dans du papier. Mais les morceaux de papier ne reconstituent pas entièrement l'image d'une guitare. Elle est en plusieurs parties. On a l'idée de la guitare sans que la guitare soit vraiment dessinée. Sa forme est éclatée. Picasso, Guitare, 1913 L'objet déstructuré
C’est le geste radical d’appropriation de Marcel Duchamp qui ouvre la voie à d’autres attitudes artistiques. Par sa seule volonté d’artiste, il fait d’un objet du quotidien, une œuvre d’art. Il développe ainsi le concept du ready made (= tout fait) remettant en cause la nature même d’une œuvre d’art. L’objet sort ainsi du cadre de la peinture et envahit le monde réel. Porte-bouteilles, 1914 Fontaine, 1916 Donner une dimension artistique à un objet ordinaire
Assembler des objets Sur un tronc de caroubier peint en rouge, Miro, artiste du surréalisme, accroche des ferrailles trouvées au hasard de ses promenades, qui le fascinent: un ressort, une chaine, un bruleur à gaz sont superposés pour représenter un couple de mariés ! Joan Miro, l'objet du couchant, 1935/36
Plus tard, Jean Tinguely assemblera lui aussi des objets récupérés. Tinguely met en scène des danses sauvages et provocantes dans une véritable profusion de déchets produits par la civilisation et la consommation. Morceaux de fer et fils métalliques, fragments de plastique, plumes de toutes les couleurs, bandes de caoutchouc, fourrures, jouets, objets banals et quotidiens se retrouvent montés ici en de fragiles assemblages. La juxtaposition de tous ces éléments disparates, qui n’ont rien à voir les uns avec les autres, produit un effet à la fois bizarre et déroutant. Tinguely, Baluba n°3, 1959
Dans les années 80, Name June Paik détourne les écrans de télévision en les utilisant dans des sculptures, un peu comme Tinguely. Les télés et autres écrans deviennent un violoncelle, ou un robot !
L'objet-matériau: intégrer un objet dans un tableau Ici, l'objet, une chaise, est à la fois dans le tableau et en dehors, c'est le lien entre l'oeuvre et le spectateur. Elle est le prolongement de la peinture dans le réel. Robert Rauschengerg, Pilgrim, 1960
Tony Cragg a utilisé des objets de la vie quotidienne en plastique de couleur pour créer la forme d'un autre objet. En faisant cela, il veut montrer que les matériaux des artistes d'aujourd'hui sont les vrais objets du quotidien. Tony Cragg, Palette, 1985
Spoerri réalise des tableaux-pièges. Il prend « la réalité telle qu’elle est sans changer la moindre miette de pain. » Il fixe des situations qui se sont produites accidentellement pour qu’elles restent permanentes. Daniel Spoerri, Relief de repas, 1960
Claes Oldenburg: sa version du Pop Art, art populaire qui se veut à la portée donc de tout public, consiste à imiter des objets quotidiens, liés à l’univers de la marchandise alimentaire ou vestimentaire, qu’on achète dans les boutiques. Les répliques qu’Oldenburg propose de ces objets sont agrandies, avec une mise à nu de la matière et une exacerbation de la couleur. Sucettes géantes, hamburger, casquettes, vestes, façonnés en plâtre et peints grossièrement avec des coulures, envahissent l’espace. Claes Oldenburg, shuttlecocks, 1994 Bicyclette ensevelie, 1990, parc de la Villette Pink cap, 1961
Ce lapin de plus d'un mètre n'est pas un ballon, mais une sculpture en acier inoxydable!!! Le jouet ordinaire est transformé en pièce de musée que l'on admire... Jeff Koons, Rabbit, 1986
Accumulation d'objets Dans cette œuvre, Arman accumule de vieux objets identiques, les fixe sur un support et les dispose dans une boîte fermée par une vitrine, avec la même méticulosité qu’un collectionneur de papillons. Mais ici il ne s’agit pas d’insectes. Le principe est celui de la profusion infinie du même objet, de la répétition qui tend à déborder du cadre et fait appel à la dimension du all-over. Arman, Accumulation de brocs, 1961
Compression d'objets César centre son travail sur la compression d'objet. A l'aide d'une presse hydraulique, il compresse des objets divers comme des voitures, des canettes... Cet acte d'appropriation se veut un défi à la société de consommation. César, sculpture compression de canettes, 1991
Emballer L'objet Avec Joseph Beuys, l'objet est dissimulé mais occupe quand même toute la scène. Dans un autre esprit, les artistes Christo et Jeanne-Claude, sa femme, emballent des monuments dans le monde entier. Joseph Beuys, Infiltration homogène pour piano à queue, 1966 Christo, Reichstag empaqueté, 1994
L'objet mis en scène Un canapé sur congélateur : La Bocca/Bosch est une sculpture constituée de deux objets superposés, celui de dessous étant le socle de l'autre. À cette différence près, qu'ici, l'objet de dessus est une œuvre d'art avant d'être placée par Lavier sur un congélateur. C'est un canapé créé en 1971 par une agence de design italienne en hommage à Marilyn Monroe. Mais son histoire remonte à une étape plus ancienne puisque l'agence italienne s'est inspirée d'un canapé créé par Salvador Dali d'après la bouche de l'actrice américaine de l'entre- deux-guerres Mae West. Bertrand Lavier, La Bocca/Bosch, 2005