L’unification italienne. 1859-1870. - Les premières tentatives. - L’aide française nécessaire. - La formation du royaume d’Italie. - La Vénétie et la Question romaine. - le nouvel Etat-nation. Frédéric TUAILLON – janvier 2004
Le risorgimento retour La volonté unitaire italienne prend forme dès la fin du XVIIIème siècle avec le risorgimento. Ce nationalisme s’affirme ensuite lors des révolutions libérales et nationales de 1848 qui touchent alors tous les Etats de la péninsule italienne, les duchés de Parme, Modème et Lucques, le grand duché de Toscane, la Vénétie-Lombardie autrichienne, les royaumes sardes et de Naples. Malgré la brutale réaction de la plupart des princes à leur retour au pouvoir grâce à l’aide autrichienne, les unitaires sortent renforcés de leur échec ; d’abord parce qu’ils ont trouvé dans le royaume de Piémont-Sardaigne une volonté libérale (Constitution de 1848) et unificatrice, et, dès lors que Cavour est au pouvoir, un abri ; ensuite parce qu’ils savent désormais qu’il faut abattre l’Autriche avec une aide extérieure pour faire l’unité... retour
retour Les Etats de la péninsule italienne avant l’unification. 200 km Lombardie Vénétie Royaume de Pémont- Sardaigne Parme Modène Lucques Etats pontificaux Grand duché de Toscane Royaume de Naples ou des Deux- Siciles Royaume de Pémont- Sardaigne 200 km retour
retour L’alliance française. L’aide française devient officielle avec le traité de Turin de janvier 1859 signé entre l’empereur Napoléon III, favorable aux nationalités et notamment à l’unification italienne, et le roi de Piémont-Sardaigne Victor-Emmanuel II. Cette alliance est l’aboutissement des tractations entreprises par le premier ministre du royaume du Piémont, Camillo Benso, comte de Cavour ; celui-ci a notamment rencontré l’empereur des Français le 21 juillet 1858, alors qu’il “prenait les eaux à Plombières-les-Bains”. Cavour y obtient l’assurance d’une aide française en cas de conflit avec l’Autriche ; pour ce soutien, la France devant recevoir le comté de Nice et la Savoie. Dès lors, les Piémontais multiplient les provocations envers l’Autriche, et la guerre éclate après le rejet par le Piémont d’un ultimatum autrichien en avril 1859 demandant le désarmement du royaume sarde. Les troupes franco-piémontaises, dirigées par Napoléon III en personne, sont victorieuses lors de deux batailles contre les armées autrichiennes dirigées par l’empereur d’Autriche François-Joseph, en juin 1859. La première, gagnée de justesse, est celle de Magenta, dans l’ouest de la Lombardie, le 4 juin ; la seconde à lieu à Solférino, au sud du lac de Garde, vingt jours plus tard. Les combats très meurtriers de cette dernière bataille pèsent sur la décision de l’empereur français de cesser les hostilités, au grand dam des Piémontais ; c’est de la vision des mêmes horreurs que naît la volonté du Suisse Dunant de créer une aide aux blessés, la Croix rouge. Après la signature d’un armistice le 8 juillet, les deux empereurs se rencontrent à Villafranca Di Vérona le 11 juillet et signent le 12 des préliminaires de paix . La France qui a obtenu de l’Autriche la Lombardie la rétrocède au Piémont. Mais les Autrichiens conservent la Vénétie, ce qui pousse Cavour à démissionner pour montrer son hostilité à l’accord de paix. De son côté, Napoléon III renonce à revendiquer Nice et la Savoie temporairement... retour
retour La marche vers l’unité italienne 200 km Magenta 4 juin 1859 Solférino 24 juin 1859 Lombardie Vénétie Royaume de Pémont- Sardaigne Milan Expédition des Mille de Garibaldi Parme Turin Modène Castelfidardo 18 septembre 1860 Batailles Lucques Florence Grand duché de Toscane Etats pontificaux Rome Naples Royaume de Pémont- Sardaigne Royaume de Naples ou des Deux- Siciles Palerme 200 km retour
La constitution du royaume d’Italie. Des révoltes éclatent avec les revers autrichiens de juin 1859, dans le grand duché de Toscane, dans les duchés de Parme et de Modène et aussi dans les légations, territoires pontificaux du Bolonais et de la Romagne. Des plébiscites au début de 1860 confirment la volonté d’annexion au royaume sarde des populations de ces territoires. L’attitude bienveillante de la France lui permet, quant à elle, d’annexer enfin le comté de Nice et la Savoie en avril 1860, après consultation des habitants sur ce rattachement. En mai 1860 débute un des hauts faits de l’épopée garibaldienne, l’expédition des Mille dans le royaume de Naples. Soutenus en sous-main par le Piémont et sur place par des patriotes, les Chemises rouges de Garibaldi conquièrent facilement la Sicile, puis, laissant l’île sans gouvernement bien établi, attaquent la partie continentale du royaume ; Naples est entre leurs mains le 7 septembre 1860. Les succès de Garibaldi inquiètent en Italie ; d’abord Cavour car il sait que le chef de guerre est proche des idées du républicain Mazzini ; ensuite le Pape car le condottiere menace désormais Rome. Rassurés par la neutralité française, le roi de Piémont-Sardaigne Victor-Emmanuel et son premier ministre Cavour décident de stopper l’avancée des garibaldiens en passant par les territoires de la papauté. Le pape de son côté lance ses volontaires à la reconquête des territoires des Etats de l’Eglise qui ont fait sécession. La rencontre avec les forces piémontaises tourne court pour les pontificaux avec la défaite de Castelfidardo le 18 septembre 1860 ; Les Piémontais poursuivent leur route vers le sud et ils atteignent Naples où Garibaldi reconnaît Victor-Emmanuel ( 26 octobre 1860). Un plébiscite confirme peu aprés l’annexion du Royaume de Naples. En Janvier 1861, une assemblée est élue au suffrage censitaire et siège à partir de février à Turin ; elle proclame le Royaume d’Italie le 14 mars 1861 avec Victor-Emmanuel, roi d’Italie sous le nom de Victor-Emmanuel III. Camillo Benso, comte de Cavour, meurt le 6 juin 1861... retour
La question romaine et la Vénétie. Deux ensembles territoriaux dans la péninsule restent hors des frontières du nouveau Royaume d’Italie en 1861 : D’une part la Vénétie toujours aux mains des Autrichiens, et d’autre part le Latium avec Rome, derniers éléments des Etats de l’Eglise alors protégés par des troupes françaises. C’est d’abord la question romaine qui embarrasse le nouvel Etat italien. Rome doit être, pour les unitaires, la capitale du royaume, mais le pape ne veut pas perdre tout son pouvoir temporel, et il est soutenu par les catholiques notamment français, même si la brochure de la Guerronière, le Pape et le Congrès, dont la publication en décembre 1859 est voulue par Napoléon III, dévoile une vision différente de l’empereur sur la question. La pression diplomatique française oblige malgré tout les armées italiennes à empêcher les coups de force sur Rome, comme celui que tente Garibaldi en1862 et qui est stoppé à Aspromonte. Le nouveau royaume accepte même une convention avec Napoléon III en septembre 1864 qui stipule que la France s’engage à évacuer ses troupes de Rome dans les deux ans, que les Italiens ne doivent pas chercher à occuper le dernier territoire papal, et que Florence devient la capitale italienne. Deux années plus tard, au nord-est de la péninsule, l’opportunité se présente de s’emparer de la Vénétie autrichienne à travers la lutte qui oppose la Prusse à l’Autriche pour la primauté dans la confédération germanique. Le Royaume d’Italie s’engage en effet au côté de la Prusse dans la guerre de 1866 contre l ’Autriche, et, malgré deux défaites contre les Autrichiens, Custozza en Vénétie en juin et Lissa au large des côtes dalmates en juillet, il reçoit la Vénétie à l’issue du conflit. Quant aux territoires qui restent au Pape, les tentatives des patriotes se succèdent pour s’en emparer ; la marche de Garibaldi sur Rome en 1867 pousse Napoléon à réenvoyer des troupes qui stoppent en novembre les garibaldiens à la bataille de Mentana. Dans son rapport à Napoléon, De Failly, commandant des troupes franco-pontificales, rapporte que « les fusils chassepots ont fait merveille »... Finalement, c’est la défaite des anciens alliés français qui permet l’annexion de Rome par le royaume d’Italie ; en effet, le corps expéditionnaire français quittent Rome au début de la guerre franco-prussienne de 1870-1871 et les armées italiennes s’emparent de la Ville éternelle le 20 septembre 1870. Un plébiscite en octobre sanctionne l’intégration du territoire romain au royaume d’Italie malgré le refus intransigeant du pape Pie IX... retour
retour Le royaume d’Italie et l’achèvement de l’unification 200 km Custozza 24 juin 1866 MILAN Vénétie TURIN Le Royaume d’Italie en 1861 Batailles pour l’achèvement de l’unification FLORENCE Mentana 3 novembre 1867 Etats pontificaux ROME NAPLES Sardaigne Aspromonte 28 août 1862 PALERME Sicile 200 km retour
retour Le nouvel Etat-nation. L’unité italienne s’achève lorsque Rome devient vraiment capitale du royaume avec l’installation du roi et du parlement dans cette ville au début de 1871. L’unification a été réalisée par la force et le pragmatisme. La lutte a opposé les patriotes, rassemblés autour du Piémont, à l’Autriche et aux anciens pouvoirs italiens. Le pragmatisme s’est révélé par l’alliance avec Napoléon III favorable aux idées nationales, puis par le choix du soutien à la Prusse contre l’ennemi commun autrichien, et enfin par l’attente du moment propice pour terminer l’unité au détriment du pouvoir temporel du Pape. Pourtant le nouvel Etat-nation est loin de celui imaginé par les précurseurs italiens de l’idée nationale. En effet, le choix d’un Etat centralisé à la française, sans politique volontariste pour promouvoir un sentiment national fort dans les masses italiennnes, heurte les particularismes locaux. La cohésion de la nation italienne n’existe pas en 1871, ni sur le plan politique (très peu de votants ; les catholiques ne doivent pas participer pour obéir au Pape), ni sur le plan social (deux années d’école primaire ; pauvreté extrême notamment au sud), et les contrastes économiques avivent les tensions entre le nord développé et le Mezzogiorno, ancien royaume de Naples, où, dans un cadre agraire latifundiaire, sévit le brigandage contre les nouvelles autorités. Enfin, les nationalistes trouvent un terreau favorable dans les nombreuses frustrations pour développer un nationalisme revendicatif sur les terres irrédentes (Trentin, Istrie, Dalmatie)... retour