Lusure au XIIIe siècle « Aujourdhui, on entend par usure un intérêt exorbitant et oppressif qui dépasse de loin le taux légal ou celui exigé par les banques.

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Transcription de la présentation:

Lusure au XIIIe siècle « Aujourdhui, on entend par usure un intérêt exorbitant et oppressif qui dépasse de loin le taux légal ou celui exigé par les banques et dautres institutions de crédit. Mais tel nest pas le sens que les scolastiques donnaient au mot « usure ». Daprès eux, était considéré usure tout gain dérivant dun prêt en raison même du prêt ou encore tout gain perçu avec lintention principale de tirer profit dun prêt. Raymond de Roover, La pensée économique des scolastiques. Doctrines et méthodes, Montréal, Paris, 1971, p. 77. « Aujourdhui, on entend par usure un intérêt exorbitant et oppressif qui dépasse de loin le taux légal ou celui exigé par les banques et dautres institutions de crédit. Mais tel nest pas le sens que les scolastiques donnaient au mot « usure ». Daprès eux, était considéré usure tout gain dérivant dun prêt en raison même du prêt ou encore tout gain perçu avec lintention principale de tirer profit dun prêt. Raymond de Roover, La pensée économique des scolastiques. Doctrines et méthodes, Montréal, Paris, 1971, p. 77.

Une discussion exemplaire: celle du théologien Thomas dAquin Lusure est-elle un péché ? Somme théologique, deuxième partie de la deuxième partie, q. 78, art. 1 Lusure est-elle un péché ? Somme théologique, deuxième partie de la deuxième partie, q. 78, art. 1 Deux réponses possibles: Deux réponses possibles:

Première réponse: Oui! Les témoignages bibliques: « Le Psaume (19, 8) dit de la loi divine qu'elle est parfaite parce qu'elle condamne le péché. Mais la loi divine autorise un certain prêt à intérêt selon le Deutéronome (23, 19): « Tu n'exigeras de ton frère aucun intérêt, ni pour un prêt d'argent, ni pour du gain, ni pour autre chose. Tu ne pourras recevoir un intérêt que d'un étranger. » Bien plus, il est promis une récompense pour ceux qui auront observé cette loi (Dt 23, 19): « Tu prêteras, en percevant des intérêts, à beaucoup de nations, mais toi-même tu n'auras pas à emprunter. » Ce n'est donc pas un péché de percevoir un intérêt. » (Ad 2) « Le Psaume (19, 8) dit de la loi divine qu'elle est parfaite parce qu'elle condamne le péché. Mais la loi divine autorise un certain prêt à intérêt selon le Deutéronome (23, 19): « Tu n'exigeras de ton frère aucun intérêt, ni pour un prêt d'argent, ni pour du gain, ni pour autre chose. Tu ne pourras recevoir un intérêt que d'un étranger. » Bien plus, il est promis une récompense pour ceux qui auront observé cette loi (Dt 23, 19): « Tu prêteras, en percevant des intérêts, à beaucoup de nations, mais toi-même tu n'auras pas à emprunter. » Ce n'est donc pas un péché de percevoir un intérêt. » (Ad 2)

Première réponse: oui (suite) Dans les relations humaines, c'est la législation civile qui détermine ce qui est juste. Or elle autorise à percevoir un intérêt; donc le prêt à intérêt ne paraît pas illicite. (Ad 3) Dans les relations humaines, c'est la législation civile qui détermine ce qui est juste. Or elle autorise à percevoir un intérêt; donc le prêt à intérêt ne paraît pas illicite. (Ad 3)

La solution de Thomas sappuie: sappuie: 1. Sur des témoignages bibliques 2. Sur des distinctions tirées du droit romain 3. Sur des considérations empruntées à Aristote

1) Citations bibliques… il est écrit dans le livre de l'Exode (22, 25): « Si tu prêtes de l'argent à quelqu'un de mon peuple, au pauvre qui vit avec toi, tu ne seras pas à son égard comme un créancier, tu ne l'accableras pas d'intérêts. ». il est écrit dans le livre de l'Exode (22, 25): « Si tu prêtes de l'argent à quelqu'un de mon peuple, au pauvre qui vit avec toi, tu ne seras pas à son égard comme un créancier, tu ne l'accableras pas d'intérêts. ».

2) Une distinction capitale tirée du droit romain: Entre biens « fongibles » et biens non fongibles :

Les biens fongibles: Les biens fongibles: Leur jouissance implique leur consommation ou destruction Leur jouissance implique leur consommation ou destruction Exemples: les biens périssables (aliments, boissons) Exemples: les biens périssables (aliments, boissons) Les biens non fongibles: Les biens non fongibles: Leur jouissance nimplique pas leur consommation ou leur destruction Leur jouissance nimplique pas leur consommation ou leur destruction Exemples: un appartement, un champ Exemples: un appartement, un champ

3) La thèse dAristote En Politique I, 10 (1258a), Aristote explique que largent est un simple instrument déchange qui na aucune valeur propre. En Politique I, 10 (1258a), Aristote explique que largent est un simple instrument déchange qui na aucune valeur propre. Thomas reprend cette thèse à son compte. Thomas reprend cette thèse à son compte. Doù:

Conclusion: La perception dintérêt sur largent constitue un exemple dusure et est, à ce titre, injuste et, par conséquent, doit être proscrite. La perception dintérêt sur largent constitue un exemple dusure et est, à ce titre, injuste et, par conséquent, doit être proscrite.

Voici la réponse au complet de Thomas: 1. Recevoir un intérêt pour de l'argent prêté est de soi injuste, car c'est faire payer ce qui n'existe pas; ce qui constitue évidemment une inégalité contraire à la justice. Pour s'en convaincre, il faut se rappeler que l'usage de certains objets se confond avec leur consommation; ainsi nous consommons le vin pour notre boisson, et le blé pour notre nourriture. Dans les échanges de cette nature on ne devra donc pas compter l'usage de l'objet à part de sa réalité même; mais du fait même que l'on en concède l'usage à autrui, on lui concède l'objet. Voilà pourquoi, pour les objets de ce genre, le prêt transfère la propriété. Si donc quelqu'un voulait vendre d'une part du vin, et d'autre part son usage, il vendrait deux fois la même chose, ou même vendrait ce qui n'existait pas. Il commettrait donc évidemment une injustice. Pour la même raison, l'on pécherait contre la justice si, prêtant du vin ou du blé, on exigeait deux compensations, l'une à titre de restitution équivalente à la chose elle-même, l'autre pour prix de son usage (usus); d'où le nom d'usure (usura).

2. En revanche, il est des objets dont l'usage ne se confond pas avec leur consommation. Ainsi l'usage d'une maison consiste à l'habiter, non à la détruire; on pourra donc faire une cession distincte de l'usage et de la propriété; vendre une maison, par exemple, dont on se réserve la jouissance pour une certaine période; ou au contraire céder l'usage de cette maison, mais en garder la nue-propriété. Voilà pourquoi on a le droit de faire payer l'usufruit d'une maison et de redemander ensuite la maison prêtée, comme cela se pratique dans les baux et les locations d'immeubles.

3. Quant à l'argent monnayé, Aristote remarque qu'il a été principalement inventé pour faciliter les échanges; donc son usage (usus) propre et principal est d'être consommé, c'est-à-dire dépensé, puisque tel est son emploi dans les achats et les ventes. En conséquence, il est injuste en soi de se faire payer pour l'usage de l'argent prêté; c'est en quoi consiste l'usure (usure). Et comme on est tenu de restituer les biens acquis injustement, de même on est tenu de restituer l'argent reçu à titre d'intérêt.

Incertitude de Thomas au sujet de largent en tant que bien fongible ? « … Celui qui sème n'a pas encore effectivement la moisson; il ne la possède qu'en puissance; de même, celui qui a l'argent n'en a le profit qu'en puissance; l'un et l'autre peuvent rencontrer toute sorte d'obstacles. » somme théologique, II,II, q. 62, ad 1 et 2. « … Celui qui sème n'a pas encore effectivement la moisson; il ne la possède qu'en puissance; de même, celui qui a l'argent n'en a le profit qu'en puissance; l'un et l'autre peuvent rencontrer toute sorte d'obstacles. » somme théologique, II,II, q. 62, ad 1 et 2.

« Quelqu'un cède sa propriété à autrui en lui concédant l'usage de ce bien, à charge pour le cessionnaire de le rendre. Si cet usage est concédé gratuitement, il s'appelle usufruit pour tout ce qui peut produire un fruit; prêt ou avance pour tout ce qui est incapable d'en donner, comme l'argent, les instruments, etc. Si l'usage n'est pas gratuit, on a une location ou un bail ». Somme théologique, II,II, q. 61, art. 3 « Quelqu'un cède sa propriété à autrui en lui concédant l'usage de ce bien, à charge pour le cessionnaire de le rendre. Si cet usage est concédé gratuitement, il s'appelle usufruit pour tout ce qui peut produire un fruit; prêt ou avance pour tout ce qui est incapable d'en donner, comme l'argent, les instruments, etc. Si l'usage n'est pas gratuit, on a une location ou un bail ». Somme théologique, II,II, q. 61, art. 3