Les troubles du comportement alimentaire. Notions essentielles

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Transcription de la présentation:

Les troubles du comportement alimentaire. Notions essentielles Dr Pascal Guingand, psychiatre

Les troubles du comportement alimentaire Chez l’adolescent, une manière de s’alimenter anormale, une préoccupation excessive pour l’alimentation, le poids, peuvent se transformer en véritable troubles du comportement alimentaire (TCA), qu’il faut considérer comme des maladies. Les deux formes principales sont :  L’anorexie mentale Il s’agit d’une conduite active d’amaigrissement, par restriction alimentaire et activité physique essentiellement. Le sujet se sent toujours trop gros, a une peur panique de prendre du poids. L’anorexie donne une illusion de liberté, d’autonomie, de puissance, alors qu’elle mène tout droit vers la mort. La boulimie Ingestion, en dehors des repas, d’une quantité importante d’aliments ni choisis, ni désirés, donc sans plaisir ni faim. C’est une sorte de frénésie du remplissage. Pendant la crise, le malade perd tout contrôle. Elle est toujours associée à des conduites visant à ne pas prendre de poids : vomissements, laxatifs, diurétiques, activité physique, restriction alimentaire entre les crises.

Les autres troubles du comportement alimentaire Anorexie-boulimie Association des deux troubles, c’est-à-dire amaigrissement et vomissements. Hyperphagie boulimique (binge eating disorder) C’est comme une boulimie, à ceci près que les aliments ingérés sont choisis et désirés, et qu’il n’y a pas de conduites d’amaigrissement compensatoire. Conséquence : obésité. Grignotage pathologique Manger par petite quantité sans s’en rendre compte (type consommation alimentaire devant la télévision : on regarde des « conneries » en bouffant des « cochonneries ») Orthorexie : « addiction à la nourriture saine » Recherche obsessionnelle de l’alimentation parfaite.

Les statistiques Quelques chiffres Début des troubles 0,5 à 1 % des adolescentes sont anorexiques (4/1000 pour la population générale) 3 à 12 % sont boulimiques Au moins 20 % des personnes en surpoids souffrent de d’hyperphagie boulimique ou de grignotage pathologique. La prédominance féminine est nette : 8 à 9 cas sur 10 pour l'anorexie et la boulimie, 6 sur 10 pour le binge eating disorder. Début des troubles  Anorexie mentale : entre de 12 et 25 ans essentiellement. Boulimie : entre 20 et 35 ans essentiellement.

Un contexte favorisant Le culte du corps parfait Une véritable pression sociale s’exerce sur la forme, le poids et l’alimentation : la graisse en trop, le ventre trop gros, voilà l’ennemi ! Il s’agit un culte narcissique : la maigreur des femmes plait… aux femmes surtout, nettement moins aux hommes ! Surmédiatisation des dangers de l’alimentation Vache folle, listériose, nitrates, grippe aviaire… sur des bases fausses puisque l’alimentation n’a jamais été aussi surveillée. Marteler : alimentation = poison peut chez certaines favoriser l’entrée dans un contrôle alimentaire pathologique (anorexie mentale, orthorexie). Difficultés personnelles et familiales Typiquement : une jeune femme souffrant d’un manque ancien de confiance en elle et qui a, depuis quelques temps, le sentiment de n’être pas aimé, de ne pas compter pour ou plusieurs personnages de l’entourage proche (ami qui vient de la quitter, mère, père, grand-mère etc.).

Un facteur déclencheur Souvent on va retrouver : La remarque d’un(e) proche, du type  : « T’as vu tes fesses ! », « Ouah, le boudin !», voir le simple conseil « Là, ma fille, il faut vraiment que tu commences à faire quelque chose !» etc. Une « gentille » remarque de ce genre peut précipiter durablement la jeune fille dans un état d’angoisse et de haine d’elle-même, qu’elle ne pourra « solutionner » qu’en maltraitant son corps. Un échec scolaire ou au niveau d’une activité investie Le manque de confiance entraîne chez ces jeunes filles un fonctionnement en tout ou rien : « Si je ne réussis pas parfaitement, c’est que je suis nulle ». Une rupture sentimentale Qui conjugue le sentiment d’abandon avec celui de n’avoir pas été à la hauteur en temps que femme.

Une porte d’entrée Un « petit régime amaigrissant » « Un petit régime, ça n’a jamais fait de mal à personne, toute mes copines en ont fait un, et quand je vois Laetitia, depuis qu’elle fait son régime, elle a l’air vraiment bien dans sa peau ! » Au moment où elle fait le choix de faire ce régime, ni l’adolescente ni son entourage ne sait dans quel engrenage elle met le doigt. Car le fait de pouvoir se faire maigrir va venir d’un seul coup représenter la solution à l’ensemble des problèmes dont elle souffrait, sans forcément savoir, d’ailleurs, qu’elle en souffrait. Plus ou moins consciemment, elle se dit : « On peut plus me reprocher d’être grosse. » « Moi qui n’ai pas confiance en moi, qui ai l’impression de n’arriver jamais à rien faire de bien, de ne jamais savoir ce que je veux, là je sais ce que je veux (maigrir) et je réussis par moi-même quelque chose de difficile, où beaucoup de gens échouent. Je me sentais très dépendante des autres, de ma mère en particulier, maintenant je me sens indépendante. » « En voyant que je maigris, que les gens qui comptent pour moi, et dont j’ai peur d’être abandonnée, vont s’intéresser à moi. »

Et puis ça s’emballe… Plus elles maigrissent, plus la peur de grossir devient insoutenable, avec toujours la même crainte : « Si je ne contrôle plus de façon stricte, alors je ne contrôle plus rien, et je vais devenir énorme ». Ça fait un raccourci dans leur tête : « Une goutte d’huile et je prends 50 kg ». La peur de la prise de poids est donc une peur panique de perdre le contrôle absolu sur leur corps, d’où elles tirent un sentiment jusqu’alors inconnu de puissance. Le regard sur elles-mêmes est perturbé, de façon quasi-délirante : dans la glace, elles se voient grosses, toujours trop grosses… C’est donc une fuite en avant pour garder le bénéfice initialement ressenti, avec toujours plus de contrôle, d’isolement, de replis sur soi, et l’angoisse que ça leur échappe devient absolue. Cette angoisse est supérieure au mal-être physique, elle est supérieure à la raison, elle est supérieure aux angoisses de l’entourage.

Tout est bon pour ne pas craquer Dérive boulimique Certaines comprennent qu’en se faisant vomir, elles peuvent continuer à contrôler tout en mangeant lorsque la sensation de faim devient insoutenable. Pour d’autres, ça ne procède pas d’une stratégie, elles sont soudain débordées par la faim, s’autorisent un petit bout de fromage, puis un morceau de pain, puis… le reste de pâtes dans la poubelle, puis absorbent tout ce qui leur tombe sous la main et dans un grand vécu de honte, un sentiment de souillure, vont se faire vomir aux toilettes. L’anorexie : ma sécurité, ma prison À ce stade la jeune fille est enfermée dans une prison, voudrait à certains moments s’en sortir, à d’autres non, ça lui fait trop peur, en tout cas elle ne sait plus comment faire pour changer le cours des choses. À ce stade, il est impératif qu’elle entre dans le circuit de soin.

Le traitement Les étapes indispensables pour entrer dans le processus de soin : Accepter qu’il s’agit d’une maladie Tant que l’anorexique n’est pas malade, mais « toute-puissante », elle ne peut pas entrer dans le processus de soin. Décider d’agir et s’en donner les moyens Comme pour toute conduite addictive, il faut un jour décider d’arrêter, consulter des spécialistes (généraliste formé, nutritionniste, diététicien, psychiatre, psychologue…) et mettre en place avec eux une stratégie de soin, puis valoriser au quotidien ses petites victoires, et surtout… Persévérer ! Car le traitement est long et les moments de découragement fréquents.

Mise en œuvre du traitement Actuellement, on essaye de travailler au moins sur trois niveaux. La porte d’entrée dans le soin dépendra de la situation : Mise en place d’un contrat nutritionnel, ± complété de techniques comportementales Démarche psychothérapique individuelle Actions de soutien en direction de l’entourage, voir thérapie familiale La victoire sur l’ombre mortifère de l’anorexie est à ce prix

L’approche nutritionnelle Elle fixe, par palier, des objectifs de poids à atteindre, en déterminant le mode et le type d’alimentation pour y parvenir. Elle constitue une aide précieuse : les malades, qui disent ne plus savoir « comment manger », attendent beaucoup des spécialistes de la nutrition, dont le savoir « rassure ». En cas d’échec ou parfois d’emblée, l’hospitalisation est nécessaire, avec éventuelle renutrition initiale par sonde. L’approche nutritionnelle peut-être renforcée par des techniques cognitivo-comportementales. Travail sur les fausses croyances concernant la manière dont on digèrent, sur la composition des aliments, sur les effets de tel ou tel composant alimentaire…  Désamorçage des cercles vicieux cognitifs. Il existe des ouvrages qui permettent de faire ce travail soi-même.

L’approche psychothérapique Individuelle Elle est indispensable. Elle va permettre de travailler le manque de confiance, la difficulté à se séparer de la mère et à quitter l’enfance, le besoin d’être différent, mais également de travailler sur la féminité, le désir, le regard des hommes, la sexualité… Familiale Souvent très utile pour déculpabiliser, dédramatiser, repérer les répercutions du problème sur le fonctionnement familial, repérer ce qui renforce le problème (forçage alimentaire par exemple). Parfois, un seul entretien suffit à rassurer profondément la patiente sur le fait qu’elle est effectivement aimée et considérée par tel ou tel membre de sa famille, et le symptôme disparaît en quelques semaines.

Les groupes de soutien À Strasbourg Groupe de patients Groupes de parole, d’expression psycho-corporelle, animé par des professionnels et/ou d’anciens patients formés. Groupes de parents Animés par des professionnels et/ou des parents d’anciens malades formés. À Strasbourg ARTTA organise à des rencontres de soutien aux familles de personnes souffrant d’anorexie et de boulimie (Hôpital Civil, une réunion par mois). 06 85 82 35 59 / 06 13 16 73 86 Ces groupes sont utiles pour désangoisser, déculpabiliser, et permettre aux patients et à l’entourage de ne pas perdre espoir. Actuellement, les forums Internet spécialisés TCA jouent pour une part cette fonction. Mais attention à l’addiction aux forums !!