CYCLE INFERNAL L’amour est une ligne brisée Il monte et il descend, Comme les vagues de l’ocean Sans bruit, à la lueur de la nuit. Il trinque avec la mort, tout en inspirant la vie. Avant même de se rendre compte Qu’on est ramené aux tréfonds de l’abîme, Dans les méandres de nos amours ensanglantées, On se retrouve au plus haut point Du sommum des sentiments humains; Encouragé par un coeur, Jusque là inconnu, De nos prières et de nos jubilations. En moins de temps qu’il ne faut pour en jouir, On ressent déjà les effets secondaires D’un remède qui ressemble au mal Comme deux gouttes d’eau. Et le cycle continue…
EUX Quand les feux de l’amour déchirent leur coeur Comme les éclats de verres Décapitent les paroles insensées Des lèvres d’un imbécile, L’irresistible passion les embrase: Ils copulent ou convolent. Comme si tout n’était que chair et sang. Puis les vagues de l’oubli les emportent, Loin, très loin. Dans l’infiniment petit. Dans un monde ou tout se ressemble. Ils se retrouvent perdus, sans passé ni avenir, et le présent n’est que ruine de l’âme. Quand l’amour se fraie un chemin Dans les coeurs énigmatiques Des amoureux de la peur. Ils ne se posent même plus de question Et se laissent bercer par les refrains tendres D’une musique lointaine. Se dresse alors une passivité démoniaque, Possédant leur corps et leurs âmes, Jusqu’à l’ennui. Eux, ne sont ni ange, ni démon, Rien moins que… Ce que notre amour ne doit pas être.
LE MASQUE Quand on est au prise Avec sa propre réalité, On devient tout à coup soi-même. Le reste du temps, On danse un bal costumé Où tous pour soi, soi pour tous Est son unique devise. L’unicité de l’être est une grande illusion. Tout est dans le geste Et l’expression de l’autre soi-même. On ne fait tomber le masque Que pour en porter un autre.
ENFIN LIBRE La lumière du jour M’est apparue comme un sauveur Et libère mon esprit De l’angoisse passagère. Je ne me souviens plus Si j’ai pleuré; Seules les larmes laissent des traces. Mes pleurs sont des blessures de l’âme: Elles naissent, puis disparaissent, Pour renaître à nouveau.
DES MOTS POUR TOUT DIRE Que m’arrive-t-il? Moi si loquace, si pugnace. Je ne retrouve même plus les lettres de mon nom. Sui-je devenu muet Ou mes pensées se sont envolées, U sommet du mont blanc, Inaccessible à ma mémoire. Qui sait, si mes mots pourront un jour Conter mon histoire. Mon amertume ne se mesure plus À la quantité de larmes Qu’elle arrache à mon cœur, Mais au nombre de jours Que j’y passerai encore sans toi. Si mes mots m’ont quitté, C’est parce que Mon silence m’a devancé. Il dit tout pour ne rien dire, Il ne dit rien pour tout dire.
SOLITUDE Si tu me voies passer, Ne me regarde même pas. Si je m’invite chez toi, Ne me retiens surtout pas. Si par surprise Je te prends de force. Si tu ne peux rien faire Contre mon pouvoir Et ma force de désespoir, Souris-moi. Cela me foudroie Et me rend malheureuse. Tue-moi d’amour ou d’amitié. Alors, seule, je rendrai l’âme, Pour mieux revivre ailleurs. Je suis la solitude.
LE LENDEMAIN Partir, tel est le but de l’homme. Nous ressentons constamment Le désir de fuir, D’aller toujours plus loin. Mais nous avons beau marcher, Courir, voler, que sais-je; Planter notre destin sur le mont Everest, Nicher notre avenir Au cœur de l’Himalaya, Percher nos souvenirs sur le Kilimandjaro, ou plonger nos rêves dans le Niagara, nous partirons toujours, car nous portons en nous la peur primale du lendemain.
ECHO Le vide reste suspendu Entre l’infiniment petit Et l’infiniment grand. Accroché à un bout de ciel bleu, Comme un géant perdu Dans un univers de nains. Je l’aborde avec mon cœur, Il me lance un regard figé. Je lui parle de ma vie, Il me répond avec ma voix. Ma peur m’est retournée Avec le même frisson; Et mes éclats de rires Se sont vite décuplés. En écoutant mes pleurs Qui me reviennent comme un boomerang, Je me rend soudain compte Qu’au delà d’une pensée, Je vis comme un homme.