Ce dimanche-là (32 ème dimanche du temps ordinaire) la liturgie nous offrait deux exemples de veuves. Je ne sais pas si vous avez remarqué, mais le plus souvent la bible fait la différence entre la veuve et la riche veuve. La veuve, en effet, était en ce temps-là la pauvre par excellence. Le mari décédé, plus dargent dans le ménage. Le travail des femmes était inconnu, et les retraites et réversions de retraite également ! La veuve, si elle navait pas des enfants adultes pour soccuper delle, navait absolument aucune ressource. Même pas dexistence légale !
Si Jésus, sur la croix, a dit à Jean en lui présentant Marie : voilà ta mère, cest dabord pour assurer à celle-ci une vieillesse digne. Les exégètes ont vu dans la phrase que Jésus adressa alors à sa mère en désignant Jean : Femme, voilà ton fils… la remise de léglise entière entre les mains de Marie. Cela me parait tout à fait logique, mais nenlève rien à cette dernière préoccupation de Jésus qui ne voulait pas abandonner sa mère dans la précarité des veuves de son temps. Il a voulu lui préserver une place dans la société. Cest pourquoi lévangéliste note : à partir de ce moment, lapôtre la prit chez lui.
Mais cest là une digression. Revenons aux veuves de ce dimanche-là ; La première habitait Sarepta, je pense dans la Syrie actuelle. Cétait une païenne, mais qui a reconnu de suite en Elie un homme de Dieu. Elle glane du bois, car elle na plus de provisions. Résignée, elle a décidé, avec le peu qui lui reste – quelques poignées de farine et un peu dhuile – de faire un dernier pain. Ensuite, elle et son jeune fils se coucheront et attendront la mort. Pourtant, elle fait aussitôt confiance à cet étranger qui a laudace de lui demander loffrande de tout ce qui lui reste. Elle accepte de lui offrir ce pain qui était pour son fils et elle celui de la dernière chance.
Nous sommes top habitués aux textes. Nous ne voyons plus cette étrangère glanant quelques bouts de bois, la misère et la résignation au cœur, et quun étranger oser interpeller pour lui demander ses dernières ressources. Un étranger, mais en plus le serviteur dun dieu étranger ! Jessaie de mimaginer, pauvre, sans soutien, ayant tout perdu, nayant plus en main que ma dernière tartine de pain, et passant devant un S.D.F. Ces gens qui nont même plus de nom, rien que trois initiales… Je lui dirai peut-être que nous sommes frères de misère, et cela sarrêtera là !
Et cette femme, cette veuve, cette étrangère, acceptant de croire en la promesse dun dieu quelle ne connaît même pas, en tout cas qui nest pas le sien, acceptant de jouer sa vie et celle de son fils… Nous sommes si timorés pour suivre Dieu sur les chemins où il veut nous entraîner ! Nous pensons que nous comprenons mal ce quil attend de nous. Pire, nous pensons que certains domaines lui sont étrangers, et ne regardent que nous…
Nous nous persuadons si volontiers que Dieu est étranger à certains pans de notre vie ! Dieu, cest à léglise. Je vais à messe. Peut-être que jévite de me disputer avec mes voisins. Mais ensuite… Dieu au ciel et moi dans ma vie ! Comment arriver à réaliser que Dieu est chez lui, "à son affaire" dans le moindre recoin de nos vies, dans le moindre recoin de nos cœurs ! Nous devons apprendre la confiance sans condition de la veuve de Sarepta.
Jésus lui-même attire notre attention sur une autre veuve. Il est au Temple avec ses disciples, et regarde le mouvement de la foule. Il voit ceux qui viennent déposer des offrandes dans le tronc. Lorsque loffrande était importante, elle était saluée dune retentissante sonnerie de trompette, et tout le monde pouvait alors admirer le généreux donateur, le complimenter et le citer en exemple. Cela remplissait les caisses du Temple dargent, et le cœur des donateurs dorgueil et de suffisance.
Ne soyez pas scandalisés ! Lorsque jétais jeune (il y a 40 ans de cela, ce nest pas si loin…) jai entendu, dans une paroisse bretonne, proclamer en chaire la liste des personnes qui avaient donné pour lâme dun défunt, et la somme que chacune avait donné… Enfin ! Revenons à Jésus, à ses apôtres, et à la veuve. Les dons étaient déposés au vu et au su de tout le monde. Cette pauvre femme, qui navait que quelques piécettes, aurait dû se dire que cela ne changerait rien au Trésor du Temple, et quelle se rendait ridicule aux yeux de tous en déposant si peu dans le tronc.
Mais non. en toute simplicité, en toute humilité, elle dépose simplement ce quelle a. Je ne sais pas si elle sest attiré les sarcasmes des fidèles, mais tout de même il fallait le regard damour de Jésus pour percevoir limmense valeur de son don. Elle aussi a donné ce quelle avait pour vivre. en fut-elle récompensée comme la veuve de Sarepta, le récit ne le dit point. Mais les donateurs dont on saluait la magnificence du don à coups de trompettes éclatantes sont depuis longtemps oubliés. Et laction de cette humble veuve reste célèbre.
Elle aussi essaie de nous entraîner sur les chemins dune générosité totale, sans calcul, sans craintes. Mais en plus de cela, elle nous apprend lhumilité, le mépris du quen dira-t-on, lorsquil sagit de servir Dieu. Largent déposé dans le trésor du Temple servait à lentretien de celui-ci, bien sûr, mais aussi à secourir les pauvres. (et même à payer Judas le traitre, mais cest une autre histoire !) Peut-être, en attirant lattention sur ce don dérisoire, Jésus voulait-il aussi dire à toutes les générations que le plus petit acte damour fait pour nos frères avait une immense valeur… Je ne sais pas, peut-être que je mégare encore…
Voilà deux petits faits divers sans importance, deux veuves misérables et sans aucune notoriété. Mais les leçons quelles nous donnent sont chemin de vie pour notre béatitude éternelle.
Photos prises sur Internet, retravaillées avec PhotoFiltre. Texte : Jacky musique : « toute ma vie » (cantique) Diaporama de Jacky Questel, ambassadrice de la Paix