Poitiers, le 16 janvier 2014 Une théorie en apparente contradiction avec les résultats de l’expérience : le magnétisme Sabine Rommevaux, CNRS, SPHERE
Pierre le Pélerin de Maricourt De magnete (1269) Première description satisfaisante des phénomènes magnétiques : attraction, répulsion, bipolarité et orientation Nord-Sud. Recours à l’expérience Application à la boussole, à l’horloge magnétique et au moteur magnétique (mouvement perpétuel)
De sex inconvenientibus (Des six inconvénients) traité anonyme du XIVe siècle sur la détermination des rapidités des différents types de mouvement rédigé sous forme de questions reprend et discute les thèses des maîtres d’Oxford
Est-ce qu’un aimant suffit à altérer un morceau de fer posé au dessous de lui ?
Mouvement du fer vers l’aimant grâce à une disposition causée par l’aimant dans le fer En effet, l’aimant du fait de sa propriété est apte à altérer le fer et à induire cette disposition, puisque ce fer étant suffisamment altéré par cette disposition rejoint assurément l’aimant et se tourne vers l’aimant où qu’il soit.
Et il ne convient pas pour cette raison que l’air, bien qu’il ait été altéré par l’aimant, soit semblablement mobile vers l’aimant, puisque l’air et le fer ne sont pas semblablement altérés par l’aimant. Et l’air n’est pas susceptible de recevoir une telle disposition.
Est-ce qu’un aimant suffit à altérer du fer posé au dessous de lui ? Je prouve premièrement que non car, s’il en était ainsi, il s’ensuivrait de nombreux inconvénients. Le premier est que, alors que du fer est interposé entre deux aimants, que ce fer est également distant de chaque aimant et que les aimants possèdent des puissances attractives égales, le fer posé au milieu sera néanmoins mû vers l’un d’eux mais nullement vers l’autre. Deuxièmement : alors que du fer totalement uniforme est altéré de manière égale par deux aimants, que le milieu est disposé de tout côté de manière égale relativement à la possibilité de son altération [au fer] et que les aimants sont égaux en extension et en intensité, ce morceau de fer sera néanmoins mû vers l’un d’eux et fuira l’autre. Troisièmement : a est un aimant qui altèrera du fer b, et le fer b altèrera du fer c, et l’aimant a altèrera le fer b selon un plus grand rapport que le fer b le fer c, et néanmoins le fer b altèrera le fer c infiniment plus rapidement que l’aimant a le fer b. Quatrièmement : quelque mobile est mû naturellement durant un temps en aucun instant duquel il tend à se mouvoir. Cinquièmement : quelque mobile sera mû naturellement durant un temps en n’importe quel instant duquel il sera mû violemment. Sixièmement et dernièrement : quelque mobile tend à être mû naturellement mais pas vers quelque lieu naturel.
Six inconvénients Inconvénients 1 à 3 : si on admet que l’aimant seul peut faire se mouvoir le fer, alors, dans certains cas, à résistances égales, des puissances égales produisent des mouvements différents. Inconvénients 4 à 6: si considère un morceau fer accolé ou conjoint à un aimant qui se meut vers le haut durant un certain temps, quelle est la nature de ce mouvement, est-il naturel ou violent ?
Est-ce qu’un aimant suffit à altérer du fer posé au dessous de lui ? D’une opinion contraire est l’auteur du traité De magnete où par des expériences les plus certaines, il enseigne que l’aimant, si un fer lui est superposé selon sa partie septentrionale à la partie méridionale de la pierre, altère le fer et attire à lui le fer et que si la partie méridionale du fer est posée sur la partie méridionale de la pierre de cette manière ou que la partie septentrionale du fer sur la partie septentrionale de la pierre, on verra cet aimant repousser ce fer, donc etc.
Est-ce qu’un aimant suffit à altérer du fer posé au dessous de lui ? En réponse à cet article qui demande si l’aimant etc., je dis que oui. Au premier argument opposé, je dis que… Pour le deuxième inconvénient, j’admets le cas et je dis que … etc.
attraction de B pesanteur attraction de A […] chacun de ces aimants altère le morceau de fer c selon le même rapport, et a reçoit une aide importante du fait de l’inclination naturelle du fer c vers le centre du monde, selon le trajet vers a, et b ne reçoit pas d’aide. Et n’importe quelle aide de cette sorte pousse au mouvement du fer c, donc le morceau de fer c sera mû vers a et non vers b.
Cette conclusion n’est pas un inconvénient, car toutes les choses ne sont pas égales par ailleurs. En effet, l’aimant a reçoit quelque aide de la disposition du fer, que ne reçoit pas b. Donc si le fer était uniforme, comme les autres choses posées dans ce cas, la conclusion serait un inconvénient.
si ce fer avait des penchants égaux vers a et vers b et subissait des attractions égales de la part précisément de a et de b, les choses étant égales par ailleurs, alors ce fer ne serait mû ni vers a, ni vers b.
si le penchant [vers le lieu naturel, au centre du monde] est plus intense du côté de a et si la vertu attractive [du côté de a] est égale à celle de la part de b ou du côté b, et le penchant et l’attraction poussent au mouvement du fer, donc le fer c est mû du côté de a, en devant s’éloigner de b .
Et que le penchant g soit plus fort que tout penchant qu’aurait c vers cet aimant-ci ou celui-là doit être démontré ainsi : le fer tend à se mouvoir vers son lieu naturel à n’importe quelle distance, mais il ne tend pas à se mouvoir vers l’aimant à partir de n’importe quelle distance, mais seulement à proximité, comme cela apparaît clairement si l’on y regarde de près etc.
Du côté du a on a deux choses qui attirent, l’aimant a et le lieu naturel, dont la plus faible attire à égalité avec b, donc c sera mû vers ces choses qui attirent et non vers b.
Aimant+fer pèsent autant que l’aimant seul attraction poids si ces deux aimants sont placés dans une balance et si du fer a été appliqué à l’un d’eux, alors cet aimant auquel est ajouté le fer pèserait autant que l’autre aimant.
Thomas Bradwardine (env. 1300-1349) Ouvrages de logique, de mathématiques et philosophie naturelle, entre 1324 et 1335 : Traité sur les insolubles Géométrie spéculative Arithmétique spéculative Traité sur le début et la fin du mouvement Traité sur les rapports entre les rapidités dans les mouvements Ouvrage de théologie (1344) De la cause de Dieu contre les pélagiens
Thomas Bradwardine il est aussi facile de lever un aimant avec un morceau de fer accroché à l’aimant – qu’il soit posé au-dessus ou au-dessous, ou qu’il y soit inclus – que l’aimant seul, sans le morceau de fer le fer ne résiste pas à l’élévation de l’aimant et l’aimant, en s’élevant, n’élève pas le fer, mais le fer se meut de lui-même avec l’aimant
De six inconvenientibus une diminution de la forme du corps lourd et du fer provient de l’augmentation de la forme de l’aimant. Aimant Fer attraction poids
Blaise de Parme (mort en 1416) Questions sur la perspective Sur la théorie des planètes Traité sur les poids (entre 1378 et 1382) Commentaires aux traités d’Aristote, notamment sur la Physique (1397) Questions sur le traité des rapports du maître Thomas Bradwardine (début XVe siècle)
Blaise de Parme Est-il plus difficile de porter un aimant auquel est accroché un morceau de fer que l’aimant seul ?
Premier cas le fer est posé sous l’aimant et le poids du fer est compensé par l’attraction de l’aimant (le poids du fer est plus petit que celui de l’aimant) Aimant Aimant attraction Fer poids
Deuxième cas Le poids du fer est plus grand que celui de l’aimant Fer attraction poids Aimant Aimant
Troisième cas Le fer est posé à côté de l’aimant Aimant Aimant Fer poids