Les fractures dans le substratum rocheux
Le potentiel aquifère d’un massif rocheux La circulation de l’eau souterraine dans un massif rocheux se fait principalement par les fractures qui se développent après la mise en place de la roche (porosité secondaire). Pour obtenir un bon aquifère, il ne suffit pas que le massif soit beaucoup fracturé (bonne porosité). Il faut aussi une bonne connectivité entre les fractures pour permettre l’écoulement de l’eau (bonne perméabilité). Ces coulées de basalte, qui se sont fracturées en colonnes en refroidissant ont un bon potentiel aquifère.
Photo Richard Granger, technicien au département Rappels Nous avons déjà vu quelques façons de fracturer une roche ou d’y créer des plans de faiblesse qui risquent de céder si la roche est soumise à des forces et déformée. Les strates d’une roche sédimentaire peuvent se séparer les unes des autres (fractures parallèles aux couches) et elles peuvent aussi se segmenter en blocs (fractures perpendiculaires aux couches). Photo Richard Granger, technicien au département
Photo ci-contre : Arthur Goldstein, Université Colgate La roche d’un pluton, solidifiée à quelques kilomètres de profondeur, peut se fissurer en pelures d’oignon quand l’érosion enlève le poids du recouvrement. Dans le cadre du métamorphisme orogénique, un lit de roche fragile peut plisser en développant un clivage de fracture. Ces fractures permettent l’écoulement de l’eau en autant que les fluides du métamorphisme ne les remplissent pas de minéraux. schistosité Photo ci-contre : Arthur Goldstein, Université Colgate
Strates de grès métamorphisées en quartzite avec schistosité Une roche chaude et ductile qui s’aplatit et qui devient feuilletée (schistosité ou foliation) est imperméable. Mais, des fractures parallèles à la schistosité peuvent s’ouvrir plus tard quand la roche devenue froide et fragile subit une nouvelle déformation. Nous considérons aujourd’hui une nouvelle façon de fracturer les roches fragiles et de rendre schisteuses les roches ductiles, les failles. Nous revenons aussi sur l’idée de fracturer ou d’aplatir des roches en les plissant. Strates de grès métamorphisées en quartzite avec schistosité
Les failles Un terrain comprimé ou étiré peut se raccourcir ou s’allonger en se séparant en deux compartiments qui vont glisser un sur l’autre. Si la roche est fragile, le glissement se fait le long d’une ou plusieurs cassures. On parle alors de faille ou de zone de failles. Une faille est une cassure accompagnée d’un glissement. surface de faille compartiments Milieu : raccourcissement d’un terrain comprimé par le jeu d’une faille. Droite : allongement du même terrain par le jeu d’une zone de failles.
Question Cette faille a-t-elle permis au terrain de s’allonger ou de se raccourcir ? Comment le savez-vous ? Réponse : Si on replace les morceaux à leur position originale, on constate que le terrain s’est allongé. Photo de J.R. Stacy, USGS : http://libraryphoto.er.usgs.gov/free1.htm
Si la roche est ductile, le glissement se fait sans cassure Si la roche est ductile, le glissement se fait sans cassure. La roche déformée acquiert une schistosité en forme de . On parle de zone de cisaillement. ~ étirer aplatir cisailler compartiments La bande témoin est aplatie horizontalement, étirée verticalement et cisaillée au centre. Photo de C. Brunet, CNRS : www.cnrs.fr/cw/dossiers/dosgeol
Rejet Quand un terrain casse et que les deux compartiments glissent, cela secoue le sol et des vibrations sont transmises de proche en proche par la roche. C’est un tremblement de terre (ou séisme). Imaginez une boule qui se trouve sur la surface de faille avant la rupture. La rupture la casse en deux morceaux. La distance qui sépare ces morceaux après le glissement est le rejet du glissement. Pont endommagé par les secousses Chute créée par la faille Photo GEES : http://geoinfo.usc.edu/gees/RecentEQ/Taiwan/Report/Briges/Bridges.html rejet
Le rejet varie de quelques centimètres à quelques mètres lors d’un glissement. L’accumulation des glissements sur la même faille peut cependant donner un rejet total de plusieurs dizaines de kilomètres. C’est par ce processus que se créent les rifts, les chaînes de montagnes, les plateaux… et que ce segment d’une pile de roches sédimentaires a chevauché le segment voisin ! L’érosion a taillé le mont Rundle (Banff, Alberta) dans des terrains sédimentaires charriés. faille
Les types de faille Chacun des types de faille que nous allons décrire se prolonge en profondeur par une zone de cisaillement associée. Un terrain étiré s’allonge par le jeu d’une faille normale. Le compartiment situé au-dessus de la surface de faille glisse vers le bas. On dit que c’est « normal » parce que c’est ce que fait un objet posé sur une pente à cause de l’attraction de la Terre. casse ici Faille et zone de cisaillement normales schistosité se déforme là
Montagnes créées par une faille normale ayant joué des dizaines de fois. Un terrain comprimé se raccourcit par le jeu d’une faille inverse. Dans ce cas, le compartiment supérieur glisse vers le haut. casse ici se déforme là Faille et zone de cisaillement inverses schistosité
On peut voir sur la crête Vimy, dans les Rocheuses, une petite section (épargnée par l’érosion) d’une des failles inverses qui a permis l’édification de ces montagnes.
Un terrain comprimé ou étiré peut aussi se raccourcir ou s’allonger sans qu’il y ait de mouvement vertical. La surface de faille est alors verticale et le rejet est horizontal. C’est une faille de décrochement. traction compression casse ici se déforme là schistosité cassure Faille et zone de cisaillement de décrochement
En marchant sur cette roche, la présence d’un filon révèle l’existence d’un petit décrochement qui, autrement, passerait inaperçu.
Question Quel est le rejet approximatif de cette faille de décrochement ? Dans quel sens le glissement a-t-il eu lieu ? Réponse : Pour une personne placée sur un des compartiments, l’autre compartiment s’est déplacé vers la droite. Le rejet est environ égal à la moitié de la largeur d’une voie. Si celle-ci est de 4 m, le rejet est d’environ 2 m. Photo de Patty Craw, DGGS : http://wwwdggs.dnr.state.ak.us/earthquake.html
Les plis Un massif rocheux comprimé peut aussi se raccourcir en se plissant comme un tapis qu’on pousse. Ces plis créent des cassures dans les roches fragiles et de la schistosité dans les roches ductiles. Sans bande témoin dans la roche, il est impossible de savoir qu’elle est plissée. Une strate, une couche de cendres volcaniques, un dyke, une veine de quartz, une ancienne schistosité… peuvent servir de bande témoin.
Image radar NASA Gauche : Plis formés lors de l’édification des Appalaches de la Pennsylvanie, aujourd’hui très usés. Droite : La forme des plis avant érosion, dans une feuille de papier.
Charnière et flancs Un pli peut prendre un grand nombre d’attitudes dans l’espace et il existe une vaste terminologie pour décrire tout cela. Nous allons nous contenter de deux éléments de cette terminologie. La partie d’un pli où la courbure est maximale est la charnière; de part et d’autre de la charnière on trouve les flancs. Parmi tous les types de plis, nous allons en décrire deux qui caractérisent bien respectivement le comportement des roches fragiles et des roches ductiles. charnière flancs flanc charnière flanc
Le pli isopaque Considérons une pile de strates fragiles. Pour fléchir une des strates, il faut nécessairement la casser : la roche se fracture donc, principalement dans la charnière. Pour fléchir la pile, les strates doivent aussi se décoller les unes des autres pour permettre un glissement relatif dans les flancs. Cela donne donc un réseau de fractures. L’épaisseur initiale des strates (mesurée perpendiculairement à elles) est conservée et on obtient un pli isopaque, un pli d’égale épaisseur dans la charnière et dans les flancs. Pile de strates Glissement dans les flancs épaisseur constante
Exemples de plis isopaques et de la fracturation associée. Photo de R.J. Varga : http://www.wooster.edu/geology/GEO313/Images/Folds/fold_images.html Photo de M.R. Mudge, USGS : http://libraryphoto.er.usgs.gov/free1.htm Exemples de plis isopaques et de la fracturation associée.
Question Ce pli dans l’annuaire du téléphone est de type isopaque puisque les pages conservent leur épaisseur. Comme la flexion se fait-elle dans le détail ? Réponse : Chaque feuille est assez mince et souple pour fléchir sans se déchirer. Mais, pour réussir à fléchir la pile de feuilles, chacune doit glisser sur ses voisines. On le constate en comparant le bord droit de l’annuaire, bien droit, et le bord gauche, en biseau. Initialement, les deux bords étaient droits.
Le pli semblable 1 Une strate ductile comprimée, elle, va fléchir sans casser. Les segments de la strate peuvent en effet s’aplatir et glisser les uns par rapport aux autres (figure ci-contre) pour donner un pli semblable. Ce qui est semblable c’est la courbure. Elle est exactement la même sur la face supérieure et sur la face inférieure de la strate. Celle-ci est donc plus mince dans les flancs que dans la charnière. 2 segment témoin 3 En recopiant la même courbe on fabrique un pli semblable. courbe choisie
Il n’y a pas de fractures, mais l’aplatissement de la roche se fait par une réorganisation des minéraux. Cette recristallisation peut donner naissance à un feuilletage (schistosité), à peu près perpendiculaire à la compression. La schistosité a souvent une forme en éventail. Pli semblable avec une charnière plus épaisse que les flancs (flèches jaunes). Et schistosité en éventail (traits rouges). Photo de Maurice Gidon, site Géol-Alp.
Question Voyez-vous un pli dans cette migmatite de la Côte-Nord ? De quel type est-il ? On voit un pli semblable, avec sa charnière plus épaisse que ses flancs, formé quand la roche était très chaude et molle.
FIN