Chikungunya Repères pour la pratique Dr F Staikowsky (SAU-SMUR, GHSR) Dr A Bourdé (SAMU-SMUR-SAU, CHD) Dr P Morbidelli (Urgences-SMUR, HGM) Dr M Weber ( Urgences, ASE)
Chikungunya : Quel bilan biologique ? Utilité d’un bilan biologique ? Diagnostic positif et différentiel Retentissement de la fièvre et de l’anorexie (électro-lytes, fonction rénale) Retentissement sur une co-morbidité Élimination d’une forme exceptionnelle ou à risque évolutif (hépatite, insuffisance rénale, myocardite) Aide aux choix thérapeutiques Surveillance si anomalie initiale (BH, fonction rénale)
Chikungunya : Quel bilan biologique ? Un bilan biologique minimaliste systématique : Ionogramme sanguin et fonction rénale (retentissement de la déshydratation induite par la fièvre et l’anorexie parfois majorée par la poursuite des diurétiques). Bilan hépatique : transaminases (augmentation modérée x 2 à 3 N, risque évolutif propre ou sur hépatopathie pré-existante). Inflammation : CRP (le plus souvent < 50 mg/l). NFS et plaquettes (lymphopénie, thrombopénie modérée). Selon orientation clinique : Lipasémie (pancréatite ?), troponine (myocardite ?) Sérologie virale, RT-PCR : inutiles dans une forme typique.
Chikungunya : Repères thérapeutiques Mesures générales : Hydratation : utiliser les structures relais, mobiliser les SIAD (voie SC) Alimentation adaptée aux goûts et aux difficultés à déglutir (aphtes). Soins de bouche (aphtes) Mobilisation / kinésithérapie Structures relais : familles, association, aides à domicile, inter-vention des services sociaux (aide-ménagères, portage de repas), SIAD Réévaluation des traitements chroniques (diurétiques, hypogly-cémiants, antihypertenseurs) : arrêt, poursuite, surveillance rappro-chée ?
Chikungunya : Repères thérapeutiques Traitements symptomatiques : Littérature pauvre sur ce sujet dans le cadre du chikungunya : Absence d’étude de cohortes et d’études contrôlées. Quelques études in vitro dans des domaines très spécialisés (anti-viraux, vaccin, immunisation passive …). Le risque thérapeutique est le développement d’une iatrogénie majeure (hépatite médicamenteuse, syndrome de Lyell, immuno dépression induite …) dans un contexte où un facteur immunitaire semble important et défavorable. Tenir compte des possibilités d’automédication ou d’abus de con-sommation.
Chikungunya : Repères thérapeutiques Antalgiques de niveau 1 (non morphiniques) Paracétamol : peu d’effets indésirables, mais le risque d’hépatite impose la prudence en particulier en cas d’hépatopathie alcoolique préexistante ou de consommation excessive d’alcool. Anti-inflammatoires non stéroïdiens (cités dans le rapport de la mission d’appui à la lutte contre le chikungunya à la réunion 2006). Les effets indésirables nombreux et variés imposant une extrême prudence dans ce contexte : Insuffisance rénale aiguë, hépatotoxicité Atteintes cutanées (immuno-allergiques, toxidermies …) Majoration du risque hémorragique (thrombopénie), hémorragie digestive Risque de sepsis grave Salicylés : mêmes remarques que pour les AINS.
Chikungunya : Repères thérapeutiques Antalgiques de niveau 2 (morphiniques faibles) Pour les associations avec le paracétamol : cf. paracétamol. Codéine : en association au paracétamol, efficacité supérieure au paracétamol seul, avec ses effets secondaires opiacés propres (somnolence, vertiges, nausées, vomissements, constipation). Dextropropoxyphène : l’efficacité de l’association au paracétamol ne semble pas supérieure au paracétamol seul, avec en plus des effets secondaires liés aux propriétés opiacées et à des effets cardiaques directs du DPX. Tramadol : effets secondaires des opiacés. Nefopam : utilisable PO, tolérance médiocre.
Chikungunya : Repères thérapeutiques Antalgiques de niveau 3 (morphiniques forts) Les effets des opiacés sur le fonctionnement des centres respira-toires ont une traduction clinique chez l’insuffisant respiratoire chronique ou en cas de surdosage. A déconseiller chez le sujet présentant une hyperréactivité bron-chique. Plus grande sensibilité chez les personnes âgées. Effets indésirables : digestifs (nausées, vomissements, constipa-tion), somnolence, confusion, histaminolibération, urinaires (reten-tion, dysurie) … Association d’antalgiques : pour diminuer les effets indésira-bles et pour une action additive.
Chikungunya : Repères thérapeutiques Les antipaludéens (action antiinflammatoire mise à profit dans la polyarthite rhumatoïde) Nivaquine (sulfate de chloroquine) : 1 étude pilote ouverte sur 10 patients dont 5 sont modérément améliorés, doses compatibles avec les effets secondaires. Brighton SW. Chloroquine phosphate treatment of chronic Chikungunya arthritis. An open pilot study. S Afr Med J. 1984 ; 66(6) : 217-8. Hexaquine (quinine, thiamine) : utilisation dans l’île, efficacité ? Plaquenil (hydrochloroquine) : utilisation dans l’île, efficacité ? Effets secondaires : cutanés, digestifs, hépatiques, psychiques, oculaires, auditifs, sanguins, neurosensoriels …
Chikungunya : Repères thérapeutiques Corticothérapie Efficace sur les douleurs inflammatoires. Quelle incidence d’une corticothérapie en phase virémique (7 premiers jours) ? Effet immunodépresseur surajouté à l’immunodépression supposée liée à l’infection par chikungunya ? Effet rebond à l’arrêt ? Décompensation de tares préexistantes : diabète, insuffisance car-diaque … Myorelaxants
Chikungunya : Repères thérapeutiques Antiviraux : aucune thérapeutique actuellement reconnue in vivo (activité in vitro) Briolant S al. In vitro inhibition of Chikungunya and Semliki Forest viruses replication by antiviral compounds : synergistic effect of interferon a and ribavirin combination. Antiviral Res 2004; 61(2) : 111-7. Andrei G, De Clercq E. Molecular approaches for the treatment of hemorrhagic fever virus infections. Antiviral Res. 1993 Sep;22(1):45-75. Vaccin : au stade expérimental et « confidentiel défense » Levitt NH et al. Development of an attenuated strain of Chikungunya virus for use in vaccine production. Vaccine 1986; 4 (3). : 157-62. Edelan et al. Phase II safety and imunogenicity study of life cikugunya virus vaccine TST-GSD-218. Am J Trop Med Hyg 200 ; 62(6) : 681-5
Chikungunya : Repères thérapeutiques Immunisation passive à partir du sérum de convalescent : une idée à creuser ? Igarashi A et al. Passive immunization of mice with rabbit antisera against Chikungunya virus and its components. Biken J. 1971 ; 14(3) : 353-5. Phytothérapie Possibilité d’induction enzymatique avec baisse de l’efficacité des médicaments usuels et majoration du risque d’hépatite avec le paracétamol. Physiothérapie
Chikungunya : Quand hospitaliser ? Doute diagnostic sur une autre pathologie infectieuse (autre arbo-virose, leptospirose, infection des voies urinaires, paludisme …) Suspicion de formes compliquées Altération état général en lien avec la fièvre, la déshydratation, l’impotence fonctionnelle. Formes exceptionnelles (méningo-encéphalite, hépatite, atteinte cutanée, myocardite). Décompensation d’une co-morbidité (cardiaque : insuffisance coro-naire, IVG ; rénale ; hépatique ; diabétique …). Complications iatrogènes. Maintien à domicile impossible par absence de recours familial et malgré la mise en place ou le renfort d’aides à domicile.
Chikungunya : Le maintien au domicile Quelle surveillance à domicile ? Hydratation et mobilité ; renfort d’heures en aide-ménagères, passages plus fréquents des IDE Antalgie satisfaisante Complications propres à la maladie : forte fièvre, formes cutanée vésiculo-bulleuse ou extensive … Surveillance accrue des co-morbidité : insuffisance cardiaque, insuffisance coronaire, diabète, insuffisance rénale chronique … Surveillance de la tolérance et des effets iatrogènes liés aux thérapeutiques mises en route.
Chikungunya : Conclusion Confrontations des expériences ville - hôpital. Beaucoup d’incertitudes sur les choix thérapeutiques. Nécessité d’études épidémiologiques pour cibler les formes exceptionnelles, les formes chroniques et les rechutes. d’essais thérapeutiques.