Les infections nosocomiales Notion et régime
Textes Article 6111-6 du CSP Modifié par Décret n°2010-1408 du 12 novembre 2010 - art. 1 Les infections associées aux soins contractées dans un établissement de santé sont dites infections nosocomiales
Notion 2007, le comité technique des infections nosocomiales et des infections liées aux soins (CTINILS) a proposé la définition générale suivante : Une infection est dite associée aux soins si elle survient au cours ou au décours d’une prise en charge (diagnostique, thérapeutique, palliative, préventive ou éducative) d’un patient, et si elle n’était ni présente, ni en incubation au début de sa prise en charge
Notion Le CTINILS a proposé que n’entrent pas dans la définition des IAS : - les colonisations asymptomatiques : urinaires, cathéter sans symptôme, isolement d’un micro- organisme sur une cicatrice, un escarre ou un ulcère sans signe inflammatoire, colonisation bronchique chez un malade ventilé, sans fièvre et sans image radiologique, - les infections materno-fœtales, sauf dans certains cas comme l’infection liée à des germes hospitaliers ou consécutive à une colonisation maternelle constatée mais non traitée ou les entérocolites ulcéro-nécrosantes du nouveau-né de forme épidémique.
Notion La loi ne définit pas l’infection nosocomiale. L’article R. 6111-6 du CSP dispose seulement que « les infections associées aux soins contractées dans un établissement de santé sont dites infections nosocomiales ». La jurisprudence adopte la définition proposée par le CTILNS en rappelant invariablement que présente un caractère nosocomial, au sens des dispositions du second alinéa du I de l’article L. 1142-1 du CSP, une infection survenant au cours ou au décours de la prise en charge d’un patient et qui n’était ni présente, ni en incubation au début de cette prise en charge.
Les infections nosocomiales. Jurisprudence. Dans une affaire d’infection materno-foetale à bacille pyocyanique, bactérie que l’on trouve partout mais qui est très fréquemment à l’origine d’infections acquises à l’hôpital, le Conseil d’Etat a retenu que devait être indemnisé le décès d’un enfant lors de son accouchement, du fait d’une septicémie dont le germe s’est révélé identique à celui trouvé sur sa mère, dès lors qu’il n’était pas établi que la mère aurait été contaminée avant son admission à l’hôpital. (Conseil d’Etat 12 mars 2014 N°359473)
Infections nosocomiales inévitables ? La vulnérabilité du patient immunodéprimé au risque de complications infectieuses ne constitue pas une cause étrangère du développement d’une infection dans les suites d’un acte invasif tel qu’une infiltration pratiquée dans un établissement hospitalier. (CE 4 juillet 2012 n°341418) De même ne présente pas de caractère d’extériorité susceptible d’exonérer l’hôpital de sa responsabilité de plein droit, le fait que l’infection ait été acquise lors d’une réanimation prolongée avec intubation et ventilation rendant « inévitable » la survenue d’infections pulmonaires (CE 17 février 2012 n°34326)
Etat antérieur et infection CE, 30 déc. 2014, n° 366415 (l’état antérieur ne remet pas en cause le caractère nosocomial de l’infection) La cour administrative d'appel a relevé qu'il résultait de l'instruction, notamment des deux rapports d'expertise mentionnés ci-dessus, que cette infection avait été provoquée par une stase lymphatique consécutive au prélèvement de la veine saphène effectué au cours de l'intervention du 19 octobre 2004, qu'elle était " sans rapport causal avec l'intervention elle-même ", dès lors que le foyer chirurgical n'avait pas été touché par l'infection et n'avait pas constitué la porte d'entrée du germe, et qu'elle avait été favorisée par l'état du patient, notamment sa surcharge pondéral qu'en écartant ainsi la qualification d'infection nosocomiale tout en constatant que le prélèvement de la veine saphène avait provoqué la stase lymphatique à l'origine de l'infection, et alors que celle-ci était survenue au décours de la prise en charge médicale et que la circonstance qu'elle avait été favorisée par l'état du patient n'était pas de nature à lui ôter son caractère nosocomial, ni d'ailleurs à la faire regarder comme résultant d'une cause étrangère, la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit
Une approche large… Une infection engendrée par une péritonite elle-même causée par une intervention destinée à remédier à une éventration abdominale, présentait un caractère nosocomial. (CE 26 novembre 2012 n° 344862) Une infection qui s’est développée dans les suites de l’implantation d’un greffon préalablement contaminé par un germe infectieux présente un caractère nosocomial. (CE 30 juin 2017 n° 401497)
Endogène et exogène Un élément indifférent. - Cass. 1ère civ., 14 juin 2007 La responsabilité de plein droit pesant sur le médecin et l'établissement de santé en matière d'infection nosocomiale n'est pas limitée aux infections d'origine exogène ; que seule la cause étrangère est exonératoire de leur responsabilité - CE 21 juin 2013 Ces dispositions font peser sur l'établissement de santé la responsabilité des infections nosocomiales, qu'elles soient exogènes ou endogènes, à moins que la preuve d'une cause étrangère soit rapportée, seule une infection survenant au cours ou au décours d'une prise en charge et qui n'était ni présente, ni en incubation au début de la prise en charge peut être qualifiée de nosocomiale
La preuve Circulaire du ministère de la santé du 29 septembre 2000 « Une infection est dite nosocomiale si elle apparaît au cours ou à la suite d'une hospitalisation et si elle était absente à l'admission à l'hôpital . Ce critère est applicable à toute infection. Lorsque la situation précise à l'admission n'est pas connue, un délai d'au moins 48 heures après l'admission (ou un délai supérieur à la période d'incubation lorsque celle-ci est connue) est communément accepté pour distinguer une infection d'acquisition nosocomiale d'une infection communautaire. Toutefois, il est recommandé d'apprécier, dans chaque cas douteux, la plausibilité du lien causal entre hospitalisation et infection. Pour les infections du site opératoire, on considère comme nosocomiales les infections survenues dans les 30 jours suivant l'intervention, ou, s'il y a mise en place d'une prothèse ou d'un implant, dans l'année qui suit l'intervention »
La preuve Pour juger que la névrite vestibulaire constatée au cours du séjour de Mme A au CHU de B ne présentait pas le caractère d’une infection nosocomiale, la cour administrative d’appel s’est fondée sur l’affirmation contenue dans le rapport d’expertise selon laquelle l’inflammation du nerf vestibulaire était liée à une infection virale « sans rapport avec les soins ». Mais, dès lors que la cour avait regardé comme établi que l’inflammation avait été causée par une infection, il lui appartenait seulement de vérifier si celle-ci était présente ou en incubation lors de l’admission et, en cas de réponse négative, de reconnaître son caractère nosocomial et de rechercher si l’établissement apportait la preuve d’une cause étrangère. Ainsi, en se prononçant comme elle l’a fait, la cour a commis une erreur de droit qui justifie la cassation de son arrêt. (CE 8 juin 2017, n° 394715)
Une responsabilité sans faute Avant la loi Kouchner - Des établissements de santé publics comme privés. - Des médecins libéraux
Une responsabilité sans faute Après la loi Kouchner - Uniquement des établissements de santé Article L. 1142-1 du CSP. I. - ------ Les établissements, services et organismes susmentionnés sont responsables des dommages résultant d'infections nosocomiales, sauf s'ils rapportent la preuve d'une cause étrangère.
Une responsabilité de plein droit C’est-à-dire qui ne cède que devant la preuve d’une « cause étrangère » La cause étrangère est un « cas fortuit », ou un « cas de force majeure » (évènement irrésistible, imprévisible, extérieur), le fait d’un tiers, ou encore celui de la victime. Il a été ainsi jugé qu’un patient, victime d’une IN, avait contribué, par la poursuite de son tabagisme, à la réalisation de son dommage, et, ainsi commis une faute, de sorte que l’indemnisation du dommage a été réduit de 10%. (Cass. 1ère civ., 8 février 2017, n° 15-19.716)
Exemples « d’établissement de santé » Cass. 1ère civ., 17 juin 2010 lorsque la preuve d'une infection nosocomiale est apportée mais que celle-ci est susceptible d'avoir été contractée dans plusieurs établissements de santé, il appartient à chacun de ceux dont la responsabilité est recherchée d'établir qu'il n'est pas à l'origine de cette infection Cass. 1ère civ., 12 juil. 2012. M. X..., footballeur professionnel, présentant des douleurs à la cheville, a subi un arthroscanner réalisé par M. Y..., médecin radiologue, le 2 juillet 2002, une infection s'est déclarée et une ponction a mis en évidence la présence d'un streptocoque ; M. X... ayant recherché la responsabilité de M. Y..., de la SCM Clinique radiologique du Parc à laquelle celui-ci appartenait, et de la SA Clinique du Parc.
Modification de la loi Kouchner L. 30 déc. 2002 ( actes de soins réalisés à compter du 1er janvier 2003) Article L. 1142-1-1 du CSP. DFP inférieur ou égal à 25 % = Etablissements DFP supérieur à 25 % = ONIAM Si faute recours de l’ONIAM (art. L. 1142-21 ou action directe de la victime contre le fautif (Cass. 1ère civ., 28 sept. 2016, en matière d’infections nosocomiales, les victimes et les tiers payeurs gardent la possibilité d’agir à l’encontre de l’établissement de santé ou du professionnel de santé, en cas de faute, sur le fondement de l’article L. 1142-1, I, alinéa 1er , du code de la santé publique)
Quid des victimes par ricochet ? Initialement refus d’indemnisation. Puis revirement de jurisprudence : CE 9 décembre 2016, n°390892 Cass. 1ère civ. 8 fév. 2017.
Refus de soin et aggravation Cass. civ. 1, 15 janvier 2015, n° 13-21.180 Le refus d'une personne, victime d'une infection nosocomiale dont un établissement de santé a été reconnu responsable, de se soumettre à des traitements médicaux ne peut entraîner la perte ou la diminution de son droit à indemnisation de l'intégralité des préjudices résultant de l'infection.