L'accueil des migrants : une expérience qui déplace Une invitation à la relecture dans la foi Service national de la pastorale des migrants et des personnes itinérantes
Pourquoi la relecture? Relire permet de prendre de la distance et de grandir à travers les évènements que nous vivons. Elle invite à faire récit et à passer des « faits » bruts à une expérience. Les migrations sont un « lieu théologique »: un « lieu fréquenté par Dieu, un lieu où nous pouvons Le chercher et Le rencontrer. » (Cardinal Montenegro) Une relecture dans la foi invite à cerner les traces de Dieu dans notre engagement et à grandir. Nous vivons une expérience avec d’autres, en Eglise…
Relire: un chemin par étapes Point de départ : Qu’est-ce que j’ai fait ? Relire… Qu’est-ce que cela m’a fait ? Et ma foi ? Qu’est-ce que cela a permis aux personnes accueillies? Puis : Qu’est-ce que j’en fais ?
1. Qu’est-ce que j’ai fait ? Me rappeler les différents aspects de notre mobilisation: L’aide matérielle (logement, nourriture, vêtements…), l’accompagnement psycho-social et juridique, l’accompagnement vers l’insertion (cours de français, scolarisation des enfants… ) Temps gratuits, rencontres, repas, sorties… Et la foi? Quelles propositions pour soutenir les migrants dans leur vie de foi? Quelles propositions spirituelles (pour les chrétiens comme pour les croyants d’autres religions)?
2. Relire… Relire, c’est surtout voir ce qui a bougé : en moi, dans ma foi, dans la vie des personnes accompagnées? Qu’est-ce que cette expérience éveille en moi ? Qu’est-ce qu’elle me fait devenir ?
a) Qu’est-ce que cela m’a fait? L’accueil des migrants ne laissent pas indifférent: Quels sentiments et réactions ai-je éprouvé: joie, colère, découragement, élan, peur, confiance, déception ? Faire mémoire et accueillir les sentiments, les souvenirs… Comment la rencontre avec l’autre m’a-t-elle enrichi ? Accueillir le vécu avec humilité: mes capacités, mais aussi mes limites et mes déceptions. Qu’est-ce qui a été difficile? Qu’est-ce qui a été déplacé en moi ? Les différences culturelles sont un défi particulier. Ai-je fait l’expérience d’être déboussolé par telle attitude, geste, parole?
b) Et ma foi? Nous croyons en un Dieu qui s’est fait chair en Jésus Christ, en un Dieu qui aime ce monde et chaque être humain. Notre foi doit façonner notre vie de tous les jours. Puis, notre vie et nos expériences peuvent façonner à leur tour notre foi. Comment l’expérience de l’accueil et de la rencontre a fait bouger ma vie de chrétien ?
Est-ce que Dieu m’a fait signe au cœur de ces expériences auprès des migrants? De quelle manière? Quelle parole de la Bible a résonné en moi? Quel écho dans ma prière? Est-ce que ma relation avec le Christ a changé ? Est-ce que la rencontre avec des migrants croyants m’a façonné dans ma propre foi?
c) Qu’est-ce que cela a permis aux personnes accueillies? Me rappeler les résultats concrets de nos activités : l’hébergement digne d’une famille, des repas réguliers, l’obtention du statut de réfugié, la scolarisation des enfants, l’apprentissage du français…
Je peux m’interroger sur d’autres dimensions, plus de l’ordre des relations, de la reconnaissance, du sens: 1. Être une personne en relation: Est-ce que les personnes ont pu nouer des relations? Dans la durée? Est-ce qu’elles ont pu se sentir considérées ? Regardons Jésus: il prend au sérieux chaque personne; « Tu as du prix à mes yeux » (Is 43, 4)
2. Être sujet: Est-ce que nos actions ont permis aux personnes d’être des acteurs, des sujets, de « donner » à leur tour ? Est-ce la personne accueillie qui s’exprime, décide ? Quelles relations entre accueillants et accueillis? Est-ce toujours dissymétrique, avec celui qui donne et celui qui reçoit ? Comment les personnes accueillies m’ont-elles enrichi ? Regardons Jésus: il demande aux personnes: « Que veux-tu que je fasse pour toi? » (Luc 18, 41)
3. Donner un sens… Quels espace d’écoute, de partage pour poser des mots sur le vécu, d’y chercher un sens? La Bible garde mémoire de beaucoup de récits, par exemple celui des disciples d’Emmaüs (Luc 24, 13-35): au-delà de la souffrance et du désespoir c’est une parole de vie, une parole d’espérance!
4. Exprimer en symboles et célébrer Quels espaces pour exprimer sa foi? Pour l’expression symbolique (certains symboles sont typiquement chrétiens, d’autres accessibles à toute personne, indépendamment de sa conviction religieuse)? Avons-nous proposé des célébrations? Regardons Jésus dans l’Evangile: ses paroles vont souvent de pair avec des gestes.
Qu’est-ce que j’en fais ? Qu’est-ce que nous en faisons ? Regarder vers l’avenir: Dans quelle direction Dieu m’invite-t-il à avancer? Je suis attentif à ma « boussole intérieure » pour reconnaître: qu’est-ce qui me porte vers la joie, la paix, la liberté ? Et à l’inverse: qu’est-ce qui me trouble, me rend triste, me pousse à m’enfermer ? Vers où me porte mon espérance ?
Après tout ce parcours de relecture: Quelle conviction m’habite ? Quels points d’appui pour le futur ? Quel besoin de partage et d’accompagnement? Quels changements, ajustements, nouvelles perspectives me semblent importants ? La Parole de Jésus Christ nous situe toujours du côté de la vie, de l’espérance…