Revivre l’âme de Grenade la belle, la délicate, sur les pas de Boaddil et de Washington Irving (1237- Baladorama personnel non commercial de Bernard GEORGES Photos de l’auteur et glanées du web
L’Alhambra ou Al Hamra (la Rouge), tire son nom de la colline rougeâtre où il fut édifié, au pied de la Sierra Nevada (l’enneigée) A vécu sa période de gloire 250 années, entre 1237 et 1492 S’ils peuvent être surpris par la magnificence délicate de l’Alhambra, les 7000 visiteurs quotidiens qui se pressent à la file entre ses murs, ne peuvent être sensibles à son âme secrète., ne faisant qu’effleurer du regard des murs et des lieux qui ne ne peuvent leur parler des moments intenses qu’ils ont abrités…
Maintenant, quelques mots sur BOADDIL Dans ce parcours j’essayerais de la retrouver en compagnie de Wahington Irving, un américain qui y habita en solitaire 3 mois, en 1832. A une époque où les visiteurs étaient rares et où les palais étaient seulement habités par des chauves-souris et de pauvres habitants y ayant construit des logements de fortunes.… W.Irving a écrit les « contes de l’Alhambra » et a fait de nombreuses recherches historiques détruisant les rumeurs, broderies historiques, notamment sur le pauvre Boaddil à qui on attribue injustement crimes et lâcheté. W. Irving devint par la suite ambassadeur américain en Espagne Maintenant, quelques mots sur BOADDIL
Il est le 25ième et dernier émir de Grenade Il est le 25ième et dernier émir de Grenade. Il est surnommé Az-Zughbî[2] (l'infortuné), ou El Chico[4] (Le Jeune) par les Castillans, ou El Moro. On lui attribue faussement le meurtre des fameux Abencérages, commis sans doute par son père, un homme très cruel, Mulhacen. L’histoire de ce dernier ressemble à celle de ROXALANE en Turquie: il s’épris d’une belle captive chrétienne dont il eut des enfants et celle-ci tenta d’éliminer la première épouse ainsi que son fils BOADDIL, qui put s’échapper, grâce à des écharpes de soie, de la tour où il était prisonnier. La vie de BOADDIL est très mouvementée. Il dut lutter contre son père, d’autres groupes musulmans et les armées chrétiennes. Isabelle la catholique avait juré de ne point changer de vêtements et ne plus se baigner avant la conquête de Grenade. Des centaines de milliers de tués au nom de la Vérité et de Dieu furent le fruit de son influence sur FERDINAND, sans compter la naissance de la sinistre Inquisition.
Boaddil fut injustement méprisé pour ne pas avoir lutté jusqu’à la mort avec ses habitants et soldats .Il eut eu à mon sens le réalisme et au contraire le mérite d’éviter un bain de sang et des massacres inutiles en traitant avec Ferdinand, qui lui concéda certains droits et la vie sauve des conquis. Boaddil lui remis les clés de la ville et s’exila au Maroc où il mourut alors que Ferdinand trahit certaines de ses promesses, le Roi très catholique enlevant par ailleurs une de ses filles (Aixa) pour célébrer sa conquête, en faire sa maitresse et un enfant avant de la claustrer dans un couvent… Triste fin pour un royaume tolérant, épris de poésie, d’arts, de philosophie, de plaisir de vivre, féru demédecine et mathématiques La gazelle fut un symbole Des émirs de Grenade Armes attribuées à Boaddil
L’Alhambra au soleil couchant L’Alhambra au soleil couchant.. Nos regards remplacent les innombrables qui balayèrent ce paysage avant de se dissoudre dans l’espace-temps des éphémères…
Avec la marmaille des habitations et des vies quotidiennes, au pied de sa création, fruit du labeur séculaire des humbles et ignorés…..
7 palais, cours et jardins imbriqués Les jardin du Generalife Château de Charles Quint
Au pied de la Sierra Nevada Pensée récurrente et fascinante, pour l’auteur, et pour de nombreux endroits remarquables: celle de penser qu’un homme (généralement) a imaginé puis dit face à une colline , un pic, ou un autre lieu : « là sera une demeure, le fruit de ma pensée!!! »
Le palais du Partal est certainement l'un des plus anciens de L'Alhambra. début du XIV° siècle. Il n’en subsiste que ce corps de bâtiment très élégant, intégré dans le mur de la citée et surplombant les vieux quartiers de Grenade. La partie antérieure de la demeure et la tour sont surnommées "tour des dames". Des gravures anciennes le montre délabré avec l’aspect d’une ferme
Siège du tribunal royal et transformée en chapelle c’est la plus ancienne des pièces du palais. « Entre et demande, ne crains pas de réclamer la justice, tu y as droit »
Cette céramique marque l’étonnement et la formidable aventure de la découverte du Nouveau Monde qui frappa autant les esprits que la conquête de la lune aujourd'hui. « Plus Ultra » qui figure jusque sur les murs et plafonds de bois, semble avoir un double sens: « Au delà de la fin du Monde » et Un autre monde est au delà du nôtre (un autre monde qui nous est offert)
Partie ancienne (IXième s..) S Sept palais Nasrides Partie ancienne (IXième s..) Tour des dames
Charles Quint a peut être contribué à sauver l’Alhambra mais le palais qu’il se fit construire juste en son mitan, est un « orgueilleux intrus » ( W.Irving) , et contraste par sa massive pesanteur parvenue, avec la grâce et l’élégance, subtile, lumineuse des palais anciens
A une époque où en France médiévale on construit de massifs châteaux-forts, en Espagne, des palais d’une très grande grâce, d’une délicatesse subtile sont édifiés pour un art de vivre raffiné, une civilisation tolérante et de plaisir de vivre, faisant une grande place aux arts et au savoir.
La cour de l’Alberca, pavée de marbre blanc,précède la tour des "Comares", la plus haute tour de l'Alhambra, qui abrite la célèbre grande salle des ambassadeurs. Elle a un long bassin dont la surface d’eau est aussi lisse qu’un miroir (Le Taj Mahal copiera 3 siècles plus tard..) « Passage magique, où on se trouve transporté dans une autre époque » là où tout est « luxe , calme et volupté. « L’eau est la vie mystérieuse, le fluide cristallin coulant en silence ou dans la musique de ses vasques dans les veines des palais et des jardins…
De là on entre dans la Cour des Lions (en réhabilitation actuellement): « aucune ne donne une idée plus complète de la beauté du lieu et de sa magnificence primitives. En son centre s’élève la fontaine si fameuse dans les chants et romances. » Ses vasques d’albatre répandent toujours leurs gouttes adamantines et les 12 lions rejettent leur flots de cristal comme au temps de Boadbil…il est difficile de croire que ces peristyles, colonnettes, guipures si fragiles ont résisté aux tremblements de terre, aux violences des guerres et pillages… »
Des niches nimbées d’excroissances en stucco rappellent une grotte où Mahomet aurait trouvé refuge
La Cour des Lions
Juste en face, la salle des Abencérages Juste en face, la salle des Abencérages. Illustre famille de chevaliers assassinés en cet endroit, près de la fontaine de marbre. On dit que on entend souvent dans la nuit un brouhaha, indistinct, l’écho des esprits des Abencérages venant réclamer vengeance. « On nous montra de larges traces de sang, restées parait-il ineffaçables.. » Chateaubriand a tiré un roman de cet épisode tragique en l’attribuant à Boadbil alors que l’auteur du massacre fut plus certainement son père.
« J’écris ces lignes parmi tous ces témoins du passé, à la fraiche du petit matin, dans la salle fatidique des Abencérages. J’ai devant moi la fontaine sanglante et son hardi jet d’eau lance sa poussière humide jusques sur mon papier. Comme il est difficile de concilier cette violence et ce sang avec la douceur et la paix de ce cadre! Tout y est délicat et charmant et la lumière même se répand discrètement en passant par la lanterne d’une coupole teinte et ciselée comme par des mains de fée…l’aigle hirondelle plonge dans la cour en gazouillant au dessus des toits.il n’est guère besoin de se forcer pour yvoir une belle sultane pensive errer dans cette retraite de raffinement » W Irving 1832
La salle des Abencérages….
Le salon des ambassadeurs aux murs richement orné de stucs et d’arabesques et dont la coupole est en bois de cèdre. On se prend à rêver à tout ce quii s’est passé là. Les murs, les niches sont couverts toute la salle est toute couverte d'inscriptions décoratives, : de poèmes, de louange à Dieu, à l'émir, ou de textes du Coran
La salle de la Justice donne sur la Cour des Lions La salle de la Justice donne sur la Cour des Lions.Fameuse parce que c’est la que Ferdinand, Isabelle la Catholique et le cardinal d’Espagne célébrèrent La prise de l’Alhambra, en présence, dit-on, de Christophe Colomb (qui aurait aussi assisté au départ de Boadbil).… « On voit encore la croix sur le mur où fut érigé l’autel…on imagine les prélats mitrés,, les moines aux cranes rasés,, les chevaliers bardés d’acier, les courtisans vêtus de soie, parmi les croix, les crosses et les étendards… La salle de leur victoire est maintenant désolée et déserte. Les chauve-souris y tournoient sous les voûtes crépusculaires » W Irving
Au nord-est, on peut voir les palais nasrides qui ont été construits de 1238 à 1492. Ces palais ont une réputation mondiale car ils ont inspiré de grands poètes et sont à l'image des Contes des mille et une nuits. Dans les palais nasrides se trouve la salle des Ambassadeurs où l'on recevait les personnes importantes. Il y a aussi deux patios (cour) importants dans les palais nasrides : il y a el patio de los Leones (la cour des Lions) où se trouve une belle fontaine ornée de douze lions qui symbolisent le pouvoir de l'empire musulman à cette époque. Il y a aussi el patio de los Arrayanes (la cour des Myrtes) où il y a un grand bassin et deux longues haies de myrtes qui bordent le bassin.
Dans la nuit du 1er au 2 janvier 1492, guidés par Ibn Kumasa et Abû al-Qasim al-Mulihe, deux vizirs de Boabdil, le grand commandeur de León, Don Gutierrez de Cárdenas et quelques fonctionnaires castillans entrent secrètement dans Grenade par un chemin peu fréquenté. Au petit jour, Boabdil livre les clés de l'Alhambra à Don Gutierrez dans la Tour Comares. La capitulation officielle date donc du 2 janvier 1492[15].
Le comte de Tendilla et ses troupes entrent ensuite dans l'Alhambra en suivant le même itinéraire. La bannière de Castille et la croix sont hissées sur l'une des tours de la forteresse de l'Alhambra qu'on appelle encore aujourd'hui la Tour de la Bougie. Boabdil laisse sa ville et ses palais intacts aux mains de ses adversaires, moyennant un traité de capitulation qui garantit les droits des habitants : ceux-ci peuvent rester en conservant leur religion, leurs autorités juridico-religieuses, leurs biens et même leurs armes (sauf les armes à feu). Boabdil fait excaver les tombes de ses ancêtres Mohammad II, Yusef I, Yusef III et Abu Saad pour qu'elles ne soient pas profanées par les chrétiens. Il les fera transférer dans le cimetière de la mosquée de Mondújar.
Les veines de l’Alhambra sont faites de l’eau qui court en silence ou en bruissant ici et là, dans des cours et jardins intérieurs, ponctuant les cours, et recoins cachés, apparaissant soudain au moment où il le faut dans un art du plaisir de vivre
El Generalife est l'immense jardin qui se trouve à l'est de l'Alhambra El Generalife est l'immense jardin qui se trouve à l'est de l'Alhambra. Dans ces jardins se trouve une flore exubérante : des cyprès, des orangers, des citronniers... On y trouve aussi une multitude de fontaines et des jeux d'eau qui permettent de recréer le paradis sur Terre. En 1252, les jardins sont complétés par un amphithéâtre en plein air. Ici un aperçu de ces jardins où les eaux règnent en maître…. Les jardins parfumés, les marbres brillants, le fontaines cristallines, les oiseaux sautilleurs et bavards d’insouciance, les fleurs multiples pour ne pas dire les odalisques séductrices et les éphèbes michaelangéliques font partie de ce rêve d’un paradis mythique évoqué dans le Coran.
La légende dit que sur le chemin de l’exil, au lieu-dit « le dernier soupir du maure », Boabdil se retourna vers la capitale de son royaume perdu et pleura. Sa mère Aixa Fatima lui lança : « pleure comme une femme ce que tu n’as pas su défendre comme un homme ! ». Dans ses écrits, Christophe Colomb dit avoir assisté à la reddition et au départ de Boabdil. W.Irving raconte que il y a des croyances très tenaces chez les habitants de Grenade. Boaddil avec sa cour et ses chevaliers seraient renfermés dans les nombreuses grottes avoisinantes de la sierra Nevada, attendant le temps du retour. On se prend à penser à ce qu’aurait pu être un monde européen, Musulman, éclairé, raffiné et tolérant à une époque d’inquisition et d’intégrisme aveugle n’ayant cessé de faire couler le sang et de dresser des buchers pendant des siècles.!
J’ai commis cette maladroite et très incomplète invocation à la mémoire de Boaddil dernier émir vilipendé, méprisé de la postérité. Pourtant son courage a été de reconnaître la réalité de la reconquête inexorable, rouleau compresseur du temps,, de traiter et de sauvegarder la vie, la religion et les coutumes des milliers d’habitants de Grenade, malgré les parjures ultérieurs du roi très chrétien Ferdinand.. Il mourut dans un combat obscur au Maroc. Sa pierre tombale , datée de 1497 à Tlemcen, nimbée d’u poème, fut exhibée lors de l’exposition universelle de Paris en 1889,puis perdue. Ainsi en est-il des souvenirs des hommes… dont il faut défendre la mémoire. Mais les vies sauvées se perpétuent dans l’espace-temps….
C’est sans doute le soir et les nuits de pleine lune que l’on peut mieux sentir l’âme de l’Alhambra. Quand les flots de touristes sont partis, après avoir ruisselés comme des gouttes étrangères en des lieux Imperméables et silencieux qui les supportent et restent comme des coquilles vides et pourtant vivantes d’un passé si chargé de moments intenses et tumultueux.
Fin Siempre en el camino… a lo desconocido !..