La mémoire.

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Transcription de la présentation:

La mémoire

« l'édifice immense du souvenir » Introduction : « l'édifice immense du souvenir » Marcel Proust (1871-1922) À la Recherche du temps perdu

À la Recherche du temps perdu Roman, ou suite romanesque écrit entre 1908 et 1922 (donc autour de la 1ère GM) publié à partir de 1913 en sept tomes, dont les 3 derniers de façon posthume, jusqu’en 1927.

Le narrateur, jeune homme hypersensible né dans une famille bourgeoise parisienne vers la fin du XIXe siècle, veut devenir écrivain.

Cependant, la tentation mondaine le détourne longtemps de son objectif Cependant, la tentation mondaine le détourne longtemps de son objectif. Attiré par le mirage de l'aristocratie, les lieux de villégiature à la mode, le snobisme, il grandit en même temps qu'il découvre le monde, l'amour, l'homosexualité.

La maladie et la guerre, qui le coupent du monde, lui font prendre conscience de la vanité de la tentation mondaine et de son aptitude à devenir écrivain, pour… retrouver le temps perdu.

1. Du côté de chez Swann 2. À l'ombre des jeunes filles en fleurs (Prix Goncourt) 3. Le côté de Guermantes 4. Sodome et Gomorrhe 5. La Prisonnière 6. Albertine disparue 7. Le Temps retrouvé

« Un amour de Swann », deuxième partie de Du côté de chez Swann, est souvent publié séparément. Passion non partagée du grand bourgeois Charles Swann pour la demi-mondaine Odette de Crécy.

La Recherche possède la « composition harmonieuse d'une symphonie La Recherche possède la « composition harmonieuse d'une symphonie. Nous nous intéressons aux personnages et vivons les amours du narrateur, non pas comme une simple histoire racontée, mais à l'intérieur d'une construction admirable qui atteint la vie dans sa profondeur, où l'enquête psychologique se mêle à l'observation, où la progression vers la découverte finale utilise toute l'épaisseur des éléments déjà donnés. » E. Carassus, université de Toulouse, in Notice biographique, À la Recherche du temps perdu, éd. Bouquins

La démarche de Proust est paradoxale : dans l'étude de sa vie personnelle dans ses moindres détails, dans un milieu très spécifique (la haute bourgeoisie et l'aristocratie française du début du XXe siècle), il accède à l'universel.

« Il y avait déjà bien des années que, de Combray, tout ce qui n'était pas le théâtre et le drame de mon coucher, n'existait plus pour moi (…) »

« Il y avait déjà bien des années que, de Combray, tout ce qui n'était pas le théâtre et le drame de mon coucher, n'existait plus pour moi (…) » Combray : chez tante Léonie (Illiers-Combray, près de Chartres)

« Il y avait déjà bien des années que, de Combray, tout ce qui n'était pas le théâtre et le drame de mon coucher, n'existait plus pour moi (…) » Combray : chez tante Léonie (Illiers-Combray, près de Chartres) « le drame de mon coucher » : amour fusionnel pour sa mère Charles Swann

« (…) un jour d'hiver, comme je rentrais à la maison, ma mère, voyant que j'avais froid, me proposa de me faire prendre, contre mon habitude, un peu de thé. Je refusai d'abord et, je ne sais pourquoi, me ravisai. Elle envoya chercher un de ces gâteaux courts et dodus appelés Petites Madeleines qui semblent avoir été moulés dans la valve rainurée d'une coquille de Saint-Jacques. Et bientôt, machinalement, accablé par la morne journée et la perspective d'un triste lendemain, je portai à mes lèvres une cuillerée du thé où j'avais laissé s'amollir un morceau de madeleine. »

Un contexte morne : « (…) un jour d'hiver, comme je rentrais à la maison, ma mère, voyant que j'avais froid, me proposa de me faire prendre, contre mon habitude, un peu de thé. Je refusai d'abord et, je ne sais pourquoi, me ravisai. Elle envoya chercher un de ces gâteaux courts et dodus appelés Petites Madeleines (…). Et bientôt, machinalement, accablé par la morne journée et la perspective d'un triste lendemain, je portai à mes lèvres une cuillerée du thé où j'avais laissé s'amollir un morceau de madeleine. »

Dramatisation : Caractère contingent, imprévisible de la réminiscence « (…) un jour d'hiver, comme je rentrais à la maison, ma mère, voyant que j'avais froid, me proposa de me faire prendre, contre mon habitude, un peu de thé. Je refusai d'abord et, je ne sais pourquoi, me ravisai. Elle envoya chercher un de ces gâteaux courts et dodus appelés Petites Madeleines (…). Et bientôt, machinalement, accablé par la morne journée et la perspective d'un triste lendemain, je portai à mes lèvres (…). »

Caractère instantané et exceptionnel de cette expérience : « Mais à l'instant même où la gorgée mêlée des miettes du gâteau toucha mon palais, je tressaillis, attentif à ce qui se passait d'extraordinaire en moi. Un plaisir délicieux m'avait envahi, isolé, sans la notion de sa cause. Il m'avait aussitôt rendu les vicissitudes de la vie indifférentes, ses désastres inoffensifs, sa brièveté illusoire, de la même façon qu'opère l'amour, en me remplissant d'une essence précieuse : ou plutôt cette essence n'était pas en moi, elle était moi. J'avais cessé de me sentir médiocre, contingent, mortel. D'où avait pu me venir cette puissante joie ? Je sentais qu'elle était liée au goût du thé et du gâteau, mais qu'elle le dépassait infiniment, ne devait pas être de même nature. D'où venait-elle ? Que signifiait-elle ? Où l'appréhender ? »

Questionnement anxieux : « Mais à l'instant même où la gorgée mêlée des miettes du gâteau toucha mon palais, je tressaillis, attentif à ce qui se passait d'extraordinaire en moi. Un plaisir délicieux m'avait envahi, isolé, sans la notion de sa cause. Il m'avait aussitôt rendu les vicissitudes de la vie indifférentes, ses désastres inoffensifs, sa brièveté illusoire, de la même façon qu'opère l'amour, en me remplissant d'une essence précieuse : ou plutôt cette essence n'était pas en moi, elle était moi. J'avais cessé de me sentir médiocre, contingent, mortel. D'où avait pu me venir cette puissante joie ? Je sentais qu'elle était liée au goût du thé et du gâteau, mais qu'elle le dépassait infiniment, ne devait pas être de même nature. D'où venait-elle ? Que signifiait-elle ? Où l'appréhender ? »

« Mais, quand d'un passé ancien rien ne subsiste, après la mort des êtres, après la destruction des choses, seules, plus frêles mais plus vivaces, plus immatérielles, plus persistantes, plus fidèles, l'odeur et la saveur restent encore longtemps, comme des âmes, à se rappeler, à attendre, à espérer, sur la ruine de tout le reste, à porter sans fléchir, sur leur gouttelette presque impalpable, l'édifice immense du souvenir. »

Disparition du passé : « Mais, quand d'un passé ancien rien ne subsiste, après la mort des êtres, après la destruction des choses, seules, plus frêles mais plus vivaces, plus immatérielles, plus persistantes, plus fidèles, l'odeur et la saveur restent encore longtemps, comme des âmes, à se rappeler, à attendre, à espérer, sur la ruine de tout le reste, à porter sans fléchir, sur leur gouttelette presque impalpable, l'édifice immense du souvenir. »

Contraste entre fragilité et fiabilité de la réminiscence : « Mais, quand d'un passé ancien rien ne subsiste, après la mort des êtres, après la destruction des choses, seules, plus frêles mais plus vivaces, plus immatérielles, plus persistantes, plus fidèles, l'odeur et la saveur restent encore longtemps, comme des âmes, à se rappeler, à attendre, à espérer, sur la ruine de tout le reste, à porter sans fléchir, sur leur gouttelette presque impalpable, l'édifice immense du souvenir. »

« Et comme dans ce jeu où les Japonais s'amusent à tremper dans un bol de porcelaine rempli d'eau, de petits morceaux de papier jusque-là indistincts qui, à peine y sont-ils plongés s'étirent, se contournent, se colorent, se différencient, deviennent des fleurs, des maisons, des personnages consistants et reconnaissables, de même maintenant toutes les fleurs de notre jardin et celles du parc de M. Swann, et les nymphéas de la Vivonne, et les bonnes gens du village et leurs petits logis et l'église et tout Combray et ses environs, tout cela qui prend forme et solidité, est sorti, ville et jardins, de ma tasse de thé. » Suichuka