Etudes minéralogiques en conditions extrêmes Minéralogie Physique
Rappels L'intérieur de la Terre est constitué d'une succession de couches de propriétés physiques différentes: au centre, le noyau (17% du volume terrestre) = noyau interne solide et noyau externe liquide le manteau (81% du volume terrestre) =manteau inférieur solide et manteau supérieur plastique, mais dont la partie tout à fait supérieure est solide , la croûte (ou écorce) < 2% en volume solide.
Connaissances apportées par la sismologie La brusque interruption de propagation des ondes S à la limite entre le manteau et le noyau indique que le noyau externe est liquide. L'augmentation progressive de la vitesse des ondes P et S dans le manteau indique une augmentation de densité du matériel à Mesure qu'on s'enfonce dans ce manteau. La chute subite de la vitesse des Ondes P au contact manteau- noyau est reliée au changement d'état de la matière (de solide à liquide), mais les vitesses relatives continuent d'augmenter, indiquant une augmentation des densités.
Quelle sont les matériaux présents à l’intérieur de la Terre Et leurs modifications de structures et de propriétés sous l’influence de P et /ou T? Compréhension du comportement des matériaux constitutifs de l’intérieur des planètes Résultats obtenus : permettent de contraindre les modèles de structure, de composition chimiques et minéralogique et la dynamique des planètes Pour la Terre, le domaine des pressions et températures accessibles: -entre 0 et 500 Gpa (3,6 millions d’atm. = centre du noyau) -entre 0 et 5000K
Les techniques expérimentales
I) La cellule à enclume de diamant
Le diamant gemme est un matériau transparent à divers rayonnements électromagnétiques (IR aux RX). L’échantillon est comprimé entre les tables de deux petits diamants Résultats : On peut établir les équations d’état thermodynamique, la nature des transitions de phases, les propriétés acoustiques, les propriétés spectroscopiques et électriques sous pression et température de phases minérales ou amorphes
Passage des différents Rayonnements à travers la cellule Le passage des rayonnements électromagnétiques (RX,visible, IR…) à travers les diamants permet de sonder le comportement du minéral à haute pression et Température (in situ). Les échantillons amorphes peuvent aussi être analysés après trempe. L'échantillon sous pression est chauffé par des fours entourant les diamants (T < 1500K) ou par focalisation du faisceau d'un laser de puissance pour atteindre des tempatures >1500 K jusqu’à 5000K.
Cellule à enclume de Diamant - Montage
Photo des diamants à l’intérieur de l’assemblage de la cellule
Le minéral a étudié est placé entre les deux diamants dans un petit Trou de 200 mm percé dans une feuille de métal (joint)
Zone de l ’échantillon entre les diamants L’échantillon placé dans le trou, On ajoute des petits rubis pour Mesurer la pression grâce à L’évolution de leur fluorescence On remplit ensuite le trou où est placé l’échantillon avec un milieu transmetteur de pression, gaz rares, liquide Organique ou solide mou on comprime l’ensemble entre les diamants.
Petits rubis < 20mm
Cellule montée sur un diffractomètre de rayons X
Diffraction et cellule à enclume en diamant Les anneaux synchrotrons (tels que l'ESRF à Grenoble) permettent de générer des faisceaux de rayons X de quelques micromètres de diamètre, collimatés ou focalisés, qui sont particulièrement bien adaptés aux expériences de haute pression et haute température. Le rayonnement incident est généralement transmis au travers du diamant ``arrière'' jusqu'à l'échantillon qui diffracte alors au travers du diamant situé entre lui et le détecteur.
Expériences pouvant être envisagées Domaine de pression accessible: de quelques kbars à plusieurs centaines de GPa. Le record se situe aux environs de 500 GPa, soit 5 millions d'atmosphères, la pression au centre de la graine du noyau terrestre étant de 360 GPa. Basses températures de l'ordre de dizaines de Kelvin accessibles en plongeant la cellule dans un cryostat. Pour des températures moyennes (T ambiante à 1500 K), on utilise la méthode dite du ``chauffage externe'', fortement utilisée en géophysique pour la mesure des équations d'état des systèmes tels que la pérovskite (Mg,Fe)SiO3 ou magnésiwüstite (Mg,Fe)O, principales composants du manteau inférieur. La cellule est placée dans un four. Pour des températures plus élevées, chauffage dit ``laser''. On focalise un laser de forte intensité (type YAG ou CO2) sur l'échantillon On peut alors monter jusqu'à plusieurs milliers de degrés.
La structure crystallographique et les diagrammes de phases des minéraux peut être étudiée par diffraction des rayons X et Spectroscopie Raman pour obtenirles équations d'état, reliant les proprités telles que par ex:volume, pression et temperature. L'élasticité et les vitesses de déplacement d'ondes (sismiques par exemple) peuvent être analysées grâce à la spectroscopie Brillouin, et la diffraction des rayons X. la structure de ces matériaux est étudiée par spectroscopie d'absorption X.
II) Les presses multi-enclumes
Volume d’échantillon plus important, pression plus hydrostatique (pas de gradient) mais des pression moins élevées
Schéma du Montage Multi-enclume Problème des Calibrants de la Pression pour ces Mesures Composés sans Transition de phase
Photo d’une presse multi-enclumes Cubes de carbure de tungstène Photo d’une presse multi-enclumes
Apport de ces recherches à la connaissance des matériaux en relation avec les propriétés géophysiques
Détermination des phases à haute pression cohérente avec données géophysiques.
Chemins P et T pour l’étude du diagramme de phases de Co2SiO4 200 400 600 800 1000 1200 30 40 50 60 70 80 90 100 Temperature (°C) Pressure (Kbar) 68.5 66 62.34 a b g + triple point 68.1 kbar 1000°C Phase beta 840 860 880 900 920 940 960 980 1000 58 60 62 64 66 68 70 72 74 Temperature (°C) Pressure (Kbar) g ® a transition a® g Olivine Spinelle Chemins P et T pour l’étude du diagramme de phases de Co2SiO4 Presse multi-enclumes 200 400 600 800 1000 1200 32 40 48 56 64 72 80 88 Temperature (°C) Pressure (Kbar) 80.33 79.67 g ® b transition 200 400 600 800 1000 1200 30 40 50 60 70 80 90 100 Temperature (°C) Pressure (Kbar) 78.73 77.06 g ® b transition Galoisy ,1993
Evolution du diagramme de RX en fonction de P,T 200 400 600 800 1000 1200 30 40 50 60 70 80 90 100 Temperature (°C) Pressure (Kbar) 78.73 77.06 g ® b transition 70Kb, 1000°C Ambiante, 95Kb Evolution du diagramme de RX en fonction de P,T Galoisy,1993
Diagramme de Mg2SiO4 En fonction de P et T Différentes études Presse multi-enclumes Diffraction des RX
Spectre Raman En fonction de P,T (CED) Diagramme de phase Installation à l’intérieur du joint Spectre Raman En fonction de P,T (CED) Diagramme de phase Perovskite phase boundaries, Chudinovskikh,boehler (2004)
Evolution de la structure de GeO2 en fonction de T (CED) Passage de la structure quartz ([4]GeO2) à la structure Rutile ([6]GeO2) Farges et al., 1995
Etude par spectroscopie d’absorption des RX (CED) Des changements de coordinences du Ge dans le Composé GeO2 - SiO2 Majérus et al. 2004
Historique Adams et Nicholson étudient en 1901 la déformation plastique de la calcite et de la dolomite à haute pression et basse température dans des enceintes réalisées en feuille d'acier au nickel. Vogt en 1912 montre que la stabilité de certains minéraux ne peut être obtenue qu'à haute pression. Bernal en 1936 suggère que la profondeur de la discontinuité correspondant à la transformation olivine - spinelle est d'environ 400 km. Leipunsky en 1939 calcule le domaine de stabilité du graphite et du diamant à partir des données thermodynamiques Birch prédit en 1952 des changements de phases majeurs à certaines profondeurs critiques dans le manteau supérieur. Coes invente en 1953 une presse à confinement en milieu solide pour les études des minéraux à haute pression et température. Bundy et al. réalisent en 1955 la synthèse à haute pression du diamant. Weir et al. inventent en 1959 la presse à enclume de diamant. Bell puis Khitarov et al. travaillant indépendamment effectuent en 1963 une détermination expérimentale du point triple des silicates d'alumine Al2SiO5.
Ringwood et Major réalisent en 1966 une démonstration expérimentale de la transformation olivine-spinelle corrélée avec la discontinuité sismique observée dans le noyau à la profondeur de 400km. Akimoto et Fujisawa effectuent en 1966 la démonstration de la transformation olivine-spinelle pour les compositions riches en fer. Liu établit en 1974 que la structure pérovskite est prédominante dans le manteau inférieur. Mao et Bell ont atteint en 1976 au laboratoire une pression de 1 mégabar vérifiée grâce à l'échelle de pression statique calibrée du rubis. Herndon émet en 1979 l'hypothèse que le noyau interne (graine) de la Terre est fait de siliciure de nickel. Chopin fait en 1984 la première découverte de coesite dans une roche métamorphique. Mao et al. réalisent en 1989 les premières expériences de laboratoire à des pressions telles que celle régnant dans le manteau.