Un peu de maths (et d’info)

Slides:



Advertisements
Présentations similaires
Structures de données avancées : MLH (Multidimensional linear hashing)
Advertisements

Fonctions & procédures
CHAPITRE 2 Nombres entiers, initiation à l’arithmétique- Nombres rationnels.
ARITHMETIQUE Bernard Izard 3° Avon PG I - DIVISEURS
Calcul mental 3ème 2 Septembre 2010
Enseigner l’arithmétique en série L
Algorithme des différences Fraction irréductible
Facteurs, multiples et factorisation!
Améliorer les performances du chiffrage à flot SYND
Mr: Lamloum Med LES NOMBRES PREMIERS ET COMPOSÉS Mr: Lamloum Med.
Les charmantes fractions
PGCD : sous ce sigle un peu bizarre se cache un outil bien utile dans les simplifications de fractions, mais aussi dans bien des problèmes de la vie courante…
Approche par les problèmes en TS spécialité maths
Sémantique axiomatique
1.2 COMPOSANTES DES VECTEURS
Le codage des nombres en informatique
Nombres entiers. Ensembles de nombres
CHAPITRE 1 Arithmétique
Chapitre 1 PGCD de deux nombres.
Division euclidienne - décimale
Les Algorithmes Cryptographiques Symétriques
LES NOMBRES PREMIERS ET COMPOSÉS
ARITHMETIQUE : NOMBRES PREMIERS, PGCD
Chiffrement de Lester Hill
263 = 15 × = + × ARITHMETIQUE I DIVISEURS ET MULTIPLES
Calculs et écritures fractionnaires
DIVISION 1. Division euclidienne - Méthode
RACINES CARREES Définition Développer avec la distributivité Produit 1
1.1 LES VECTEURS GÉOMÉTRIQUES
EXERCICES D’ARITHMETIQUES
Résoudre une équation du 1er degré à une inconnue
Programmation linéaire en nombres entiers : les méthodes de troncature
IFT Complexité et NP-complétude Chapitre 0 Rappels.
Mathématiques.
ASI 3 Méthodes numériques pour l’ingénieur
Mise en forme en Mathématiques
Les charmantes fractions
Quand le français est plus important que les calculs en mathématiques
MATHÉMATIQUES DISCRÈTES Chapitre 2 (section 4)
sécurité des systèmes informatiques INTRODUCTION
Elaboré par : Seif MESDOUA Mme M.DRIDI
Eléments d’arithmétique dans l’ensemble des naturels
Arithmétique Modulaire
ASI 3 Méthodes numériques pour l’ingénieur
Fabienne BUSSAC EQUATIONS (1) 1. Définition
Arithmétique Classe 3e.
Les Entiers Relatifs La règle des entiers relatifs
Le chiffrement asymétrique
Le chiffrement symétrique
Cours de mathématiques économiques
Cela signifie encore que n divise toute expression de la forme ka + k’b où k et k’ sont des entiers. Exemple: 7 divise 14 et 21 donc il divise ,par.
CHAPITRE 3: LES NOMBRES.
Inéquations du premier degré à une inconnue
ITI1520 Lab #8: Récursivité Gilbert Arbez, Mohamad Eid, Daniel Amyot, Sylvia Boyd, Diana Inkpen et Alan Williams.
Les Algorithmes Cryptographiques Asymétriques
Multiprécision.
Pr BELKHIR Abdelkader USTHB
Algorithme Calcul du PGCD Euclide.
Mathématiques Discrètes Chapitre 2 (section 3)
Vert orange jaune. vert orange jaune A) ARITHMETIQUE Liste des diviseurs de 48: 1;2;3;4;6;8;12;16;24;48.
Algorithme des différences
La racine carrée.
Algorithme des différences Fraction irréductible
Leçon Nombres entiers et rationnels
Réalisation d’un logiciel de Chiffrement RSA.
DIVISION I DIVISION EUCLIDIENNE 1° Activité
Chapitre 4 La représentation des nombres.
Chap. 3 Récursion et induction. Les définitions par récurrence consistent à construire des objets finis, à partir d'autres, selon certaines règles. Les.
Division euclidienne - décimale
Un peu de maths (et d’info) IFT6271--Hiver e cours Louis Salvail.
Transcription de la présentation:

Un peu de maths (et d’info) IFT6271--Hiver2014 2e cours Louis Salvail

Pourquoi? Nous commençons par étudier les outils cryptographiques nécessaires (mais pas suffisants) pour la mise au point de mécanismes de sécurité performants. Ces outils sont des constructions mathématiques qui sont facilement représentables sur les ordinateurs. La sécurité de la plupart des méthodes cryptographiques intéressantes repose sur la difficulté de résoudre certains problèmes mathématiques. L’informatique théorique permet d’analyser la difficulté algorithmique pour la résolution de ces problèmes mathématiques.

Nombres entiers et premiers Les nombres que nous allons utiliser par la suite sont des nombres entiers (positifs). Le nombre entier a est divisible par le nombre entier b si a=kb pour k un autre nombre entier: a/b=k. Les nombres premiers sont au centre de la plupart des protocoles cryptographiques. Un nombre entier n est premier s’il n’admet que deux diviseurs distincts : 1 et lui-même. Tout nombre entier n peut s’écrire de façon unique par un produit de puissances de nombres premiers : n=p1a1 p2a2 ... ptat

PGCD Le PGCD entre les entiers a et b est le plus grand commun diviseur de a et b. k=PGCD(a,b) -> k⋅i=a et k⋅j=b pour i,j des entiers. De plus, il n’existe pas d’entier k’>k, i’ et j’ tels que k’⋅i’=a et k’⋅j’=b. Exemples: PGCD(5,25)=5: 5⋅5=25 PGCD(14,35) = 7: 14=2⋅7 et 35=5⋅7, PGCD(21,55) = 1. Lorsque les entiers n et m sont tels que PGCD(n,m)=1 on dit alors qu’ils sont relativement premiers.

Arithmétique modulaire Un registre d’ordinateur est une horloge avec 2k valeurs possibles pour k=8,16,32,64,... Quelle heure sera-t-il dans 12 heures? Quelle heure sera-t-il dans 25 heures? Quelle heure sera-t-il dans 23 heures? 36 12 Quelle heure sera-t-il dans 34 heures? Quelle heure sera-t-il dans n heures, sachant qu’il est t heures? Rép: n+t mod 12

Arithmétique modulaire (II) L’expression n mod m désigne le reste de la division entière de n par m: 39 mod 5 = 4 -> 39=7*5 + 4, 7 mod 124 = 7 -> 7=0*124 + 7. Si on ajoute le nombre entier v à un registre d’ordinateur de k bits contenant la valeur initiale n, le registre contiendra alors la valeur : n+v mod 2k. k=8 1 Les valeurs 0,1,2,...,2k-1 peuvent être représentées.

Groupe additif Zm On peut voir les valeurs possibles mod m comme l’ensemble des valeurs Zm = {0,1,2,...,m-1}. L’addition mod m de deux éléments a et b dans Zm est toujours dans Zm puisque a+b mod m est par définition dans Zm. De plus, comme l’addition de nombres naturels, chaque élément a∈Zm admet un autre élément b∈Zm tel que : a+b = 0 mod m. On peut appeler -a cet élément b. Exemple : 3+4=0 mod 7 et donc 4=-3 mod 7.

Multiplication modulaire Voyons le comportement de a⋅b mod m pour a,b∈Zm : Z6 -> 1*3=3 mod 6, 2⋅3=0 mod 6, 3⋅3=3 mod 6, 4*3=0 mod 6, 5⋅3=3 mod 6. Z5 -> 1⋅3=3 mod 5, 2⋅3=1 mod 5, 3⋅3= 4 mod 5, 3⋅4=2 mod 5. Z5 a la propriété que pour tout a,b∈Z5 il existe un et un seul k∈Z5 tel que a⋅k=b mod 5. Cette propriété est vérifiée dans Zp pour n’importe quel nombre premier p. Dit autrement, pour tout a∈Zp, il existe k∈Zp tel que a⋅k=1 mod p. Cet élément k, dénoté a-1, est appelé son inverse. a⋅k mod p induit une permutation de Zp-{0} lorsque k visite ces éléments.

Un peu de pratique 1579+1580 mod 1581 = ? 1579+2= 0 mod 1581 -> 1579 = -2 mod 1581, 1580+1=0 mod 1581 -> 1580 = -1 mod 1581, 1579+1580 mod 1581=-2-1 mod 1581 = -3 mod 1581 = 1578 mod 1581. 1579⋅1580 mod 1581 = -2⋅-1 = 2 mod 1581. Voyons un chiffrement dans Z26 (les lettres de l’alphabet) : La clé secrète est k∈Z26 : Chiffrement 1 : a∈ Z26 -> a+k mod 26, Déchiffrement? Chiffrement 2 : a∈ Z26 -> a⋅k mod 26, Déchiffrement? Supposons que les messages n’ont que 23 lettres différentes et supposons que k∈ Z23. Pouvons-nous déchiffrer le chiffrement 2?

Évaluation des formes modulaires Lorsque nous additionnons ou multiplions mod m, nous pouvons réduire mod m avant ou après l’opération sans changer le résultat : (a+b) mod m = [a (mod m) + b (mod m)] (mod m) (a⋅b) mod m = [ a (mod m) ⋅ b (mod m)] (mod m) Exemple: Est-ce que le nombre 13456515 est divisible par 3? La méthode magique dit que 1+3+4+5+6+5+1+5= 30 et puisque 3+0 = 3 est divisible par 3 alors 13456515 est divisible par 3. 10r mod 3 = 1 pour toute valeur r. Pourquoi? x1x2...xt mod 3 = x1⋅10t-1+x2⋅10t-2+ ... +xt⋅100 (mod 3) = x1⋅10t-1 mod 3+ ... +xt⋅100 mod 3 (mod 3) = x1 mod 3+x2 mod 3+... +xt mod 3 (mod 3)

Le groupe multiplicatif Zn* Zn*={a: PGCD(a,n)=1}, autrement dit Zn* contient tous les nombres inférieurs à n qui sont relativement premiers à n. Le groupe Zn* est un groupe dans lequel il fait bon multiplier : a,b∈Zn* -> a⋅b mod n ∈ Zn*, pour chaque a∈Zn*, il existe a-1∈Zn* tel que a⋅a-1=1 mod n. On nomme inverse de a cette valeur a-1. Le chiffrement du message a∈Zn* avec clé k∈Zn*: a⋅k mod n est maintenant déchiffrable.

L’algorithme d’Euclide calcule Calculer le PGCD Euclide Naissance : Grèce, env. -325 L’algorithme d’Euclide calcule PGCD(a,n), a<n en temps correspondant au nombre de chiffres dans le représentation décimale de a. Étant donné deux nombres a et n, comment trouver leur PGCD(a,n)? Un des plus vieux algorithmes connus en théorie des nombres permet de le faire rapidement. Il s’agit de l’algorithme d’Euclide... Une extension de cet algorithme permet aussi, étant donnés a et m, de calculer a-1 t.q. a⋅a-1= 1 mod m.

Exponentiation modulaire Comme nous allons le voir lorsque nous parlerons des systèmes à clefs publiques, l’exponentiation modulaire est une opération très importante. Tandis qu’il est facile et efficace de calculer y=ax mod n, il est difficile de calculer son inverse (c.-à-d. calculer x étant donnés y, a et n). Souvenons-nous que ax mod n = a⋅a⋅...⋅a mod n. x fois!

Exponentiation rapide Rappelons-nous l’évaluation des formes modulaires: 312 mod 7 = (32 mod 7)6 = (2 mod 7)6 mod 7= (23 mod 7)2 mod 7= 12 mod 7 = 1 mod 7. Attention: ax mod m ≠ ax mod m mod m, par exemple nous avons 25 mod 3 mod 3 = 1, mais 25 mod 3 = 2! Pour l’exponentiation rapide, nous utilisons la méthode suivante : a29 = a⋅a28 = a⋅(a14)2=a⋅((a7)2)2=...=a⋅((a⋅(a⋅a2)2)2)2 comparé à a29=a⋅a⋅a⋅a⋅a⋅a⋅a⋅a⋅a⋅a⋅a⋅a⋅a⋅a⋅a⋅a⋅a⋅a⋅a⋅a⋅a⋅a⋅a⋅a⋅a⋅a⋅a⋅a⋅a 7 multiplications 28 multiplications

Le groupe RSA Il s’agit du groupe multiplicatif ZN*= { a | PGCD(a,N)=1 } où N=pq pour p et q premiers. La fonction φ(N) = |ZN*| = (p-1)(q-1) est le nombre d’éléments dans ZN*. Z15*={1,2,4,7,8,11,13,14}. Euler a montré que (sa généralisation du théorème de Fermat), pour tout a et N tels que PGCD(a,N)=1, aφ(N) mod N = 1. Chaque élément a∈ZN* admet un inverse a-1∈ZN*: a⋅a-1 mod N = 1. (une conséquence d’Euler) a-1= aφ(N)-1 mod N

Logarithmes discrets Le logarithme discret est en quelque sorte l’inverse de l’exponentiation modulaire : Étant donné (y,a,n), trouver x tel que ax = y (mod n). La valeur a est souvent appelée la base du logarithme. Exemples : logarithme en base 2 de 3 (mod 13): 21=2,22=4,23=8,24=3... Réponse : 4. logarithme en base 3 de 4 (mod 13): 31=3,32=9,33=1,34=3⋅33=3,35=32 ⋅33=9,...! Réponse : aucun. En général il est (supposé) difficile de calculer les logarithmes discrets... ça demande beaucoup, beaucoup de multiplications!

Arithmétique sur des bits Les ordinateurs fonctionnant avec une représentation des nombres en binaire, les opérations sur des registres de bits sont très efficaces. C’est pourquoi la plupart des systèmes de chiffrement efficaces sont définis par des opérations sur des registres de bits dont la taille est constante. L’arithmétique des ordinateurs est basée sur Z2={0,1} : l’addition : a,b∈Z2, a⊕b = a+b mod 2, la multiplication : a,b∈Z2, a⋅b=a∧b = a⋅b mod 2.

Arithmétique sur des registres de bits Soient a=a1,a2,...,ak et b=b1,b2,...,bk des registres de k bits (c.-à-d. ai,bj∈Z2 pour tout 1≤i,j≤k). Nous définissons : a⊕b := a1⊕b1, a2⊕ b2,..., ak⊕bk Nous définissons Bk comme étant l’ensemble des chaînes de k bits. L’addition dans Bk est semblable à celle dans Z2k mais est plus facile (efficace) à réaliser, car nous n’avons pas à nous préoccuper des retenues.

Problèmes difficiles Certains problèmes mathématiques sont réputés difficiles à résoudre sur un ordinateur. C’est-à-dire qu’aucun algorithme efficace n’est connu à ce jour pour les résoudre. Ceci n’exclut pas qu’un algorithme efficace puisse être trouvé. On dit d’un algorithme qu’il est efficace si le nombre d’étapes de calcul t(n) nécessaires pour traiter une entrée de n bits de long, est tel que t(n)<poly(n) pour un polynôme poly(n), pourvu que n soit suffisamment grand.

Retour sur l’exponentiation calcul de ax (mod n) Exp_iterative(a,x,n) y=a; pour i=1 a (x-1) faire y=a*y mod n fin_pour retourne y Exp_rapide(a,x,n) r=1 Tant que x <> 0 faire Si (x mod 2)=1 alors r = r*a mod n x=x-1 a=a*a mod n x=x/2 retourne r Si x est long de t chiffres, alors la boucle Pour sera exécutée jusqu’à 10t fois. De plus, multiplier a⋅y n’est pas gratuit! Si x est long de t chiffres, alors la boucle Tant que sera exécutée jusqu’à lg(10)⋅t fois avec 2 multiplications à chaque fois.

Des problèmes de calcul modulaire faciles Addition a+b mod m. Multiplication a*b mod m. Exponentiation ab mod m. Trouver le PGCD(a,b) de deux nombres entiers a et b. Par l’algorithme d’Euclide. Étant donné a et m, trouver a-1 tel que a⋅a-1=1 mod m lorsque a∈Z*m (Euclide modifié).

Des problèmes de calcul modulaire faciles (II) Vérifier qu’un nombre N est premier, Test probabiliste très performant (Rabin-Miller) Tirer un nombre premier p aléatoire de k>0 bits. Tirer un nombre Q aléatoire de k bits, Vérifier si Q est premier (Rabin-Miller), Si c’est le cas, alors retourner Q, Sinon, recommencer... Il y a environ x/ln(x) nombres premiers entre 0..x

Des problèmes de calcul modulaire supposés difficiles Le problème de factorisation : Étant donné un entier N, donner ses facteurs premiers. Étant donné N=pq, trouver φ(N)=(p-1)(q-1). Le problème RSA: Étant donnés e et N=pq pour p et q premiers inconnus, trouver d tel que e⋅d=1 mod φ(N). Le problème de Diffie-Hellman : Étant donnés g et p premiers, gx mod p, gy mod p trouver gxy mod p. supposé difficile si p=2q+1, q premier, et si g=h2 mod p pour h un générateur.

Principes qui régissent la sécurité des systèmes modernes Les cryptosystèmes modernes ont leur sécurité exprimée en ces termes : « À moins que l’adversaire ne passe un temps déraisonnable à calculer, le système X est sûr. » En fait, la sécurité de ces systèmes est habituellement exprimée en des termes plus faibles : « En supposant que le problème Y ne peut être résolu en temps raisonnable, le système X est sûr. » Les chiffres modernes pratiques à clé secrète ont une sécurité ad hoc. Le problème Y sous-jacent n’est pas bien défini. Ceci serait sûr en pratique! Ceci est sûr en pratique que si Y était difficile

L’Américain Lehmer en inventa une aussi en 1926! RSA L’Américain Lehmer en inventa une aussi en 1926! RSA est un problème proche du problème de factorisation. Le problème de factorisation est à l’étude depuis longtemps. Il y a près de 90 ans (1919), les Français Pierre et Eugène Carissan construisaient une machine à factoriser appelée machine à congruences. Elle pouvait factoriser des nombres de moins de 13 chiffres décimaux en 18 minutes. En 2005, la factorisation du problème RSA de 200 chiffres a été réussie (20 000 $): Question ouverte pour 212 chiffres ($30 000)

La machine de Lehmer!

Nous allons maintenant voir comment fonctionne les chiffres à clé secrète modernes. Nous verrons les principes de construction importants. Nous en verrons deux qui sont utilisés aujourd’hui : DES et AES.