Mon moral n'a cessé de baisser depuis le 9 août, jour où Michael Brown un garçon de 18 ans sans histoires qui venait d'obtenir son diplôme de fin de lycée et devait entrer à l'université la semaine dernière, a été exécuté par un policier. Selon les témoins, Michael Brown avait les mains en l'air et suppliait qu'on le laisse en vie lorsqu'il a été achevé de "plusieurs balles". J'ai également lu les articles sur les Noirs sans armes qui ont été abattus par des policiers – le premier dans un supermarché Wal-Mart dans l'Ohio parce qu'il avait un pistolet-jouet dans la main, le deuxième à Los Angeles lors d'une "interpellation" alors qu'il obéissait à l'ordre qui lui avait été donné de se coucher par terre. La liquidation physique de personnes noires ou de couleur peut être très pénible. Des personnes interpellées sans raison – et qui obéissent aux instructions des agents – sont brutalisées si elles s'opposent à leur arrestation Des policiers mettent le feu à des logements et braquent leur pistolet sur la tête des habitants. Des policiers terrorisent des citoyens qui ont formé un attroupement. Il n'y a là rien de nouveau. Rien qui sorte de l'ordinaire. Ce qui arrive aujourd'hui à Ferguson, Missouri, arrive tous les jours dans l'Amérique noire. "Deux mois après la mort d'un adolescent noir non armé abattu par un officier de police, à l'origine de plusieurs semaines d'émeutes raciales dans une banlieue de Saint-Louis, des affrontements ont eu lieu dans la ville jeudi soir. Ils faisaient suite à la mort par balle d'un jeune Noir, tué mercredi par un policier blanc. Vonderrit D. Myers Jr., 18 ans, a été abattu le 8 octobre par un policier dont l'identité n'a pas été dévoilée et qui n'était pas en service au moment des faits. Les circonstances de sa mort sont controversées. "Dans le quartier mixte de Shaw, jeudi, les versions des faits différaient comme le jour et la nuit", écrit le Los Angeles Times. D'après la police, une altercation physique a eu lieu et l'adolescent a ensuite tiré à trois reprises sur le policier, qui a répondu par 17 coups de feu. Mais des habitants du quartier, ainsi que la famille du jeune Myers, assurent qu'il n'était pas armé. "Je lui ai vendu un sandwich et juste six minutes plus tard, il était tué par balle... Il n'était pas armé quand il était ici", déclare Berhe Beyent, gérant du magasin devant lequel a commencé l'incident. Lequel ajoute : "Il n'avait pas de hoodie", un sweat à capuche évoqué par la police dans son compte rendu de l'incident.
L'adolescent, qui se trouvait avec deux autres jeunes hommes, était connu des autorités et devait être jugé pour usage illégal d'une arme et résistance aux forces de l'ordre lors d'une arrestation. Après les événements, mercredi soir, quelque 200 personnes seraient descendues dans la rue, conspuant la police et bloquant la circulation. Jeudi, vers 18 heures, une foule s'est rassemblée sur le lieu de l'incident pour prier et allumer des bougies. Une manifestation dans l'ensemble pacifique a ensuite eu lieu dans le quartier. Des drapeaux américains ont été brûlés ou piétinés. Vers 10 heures, les choses ont dégénéré : des policiers ont chargé après qu'un officier a été blessé. Du gaz lacrymogène, un véhicule blindé et des dizaines de véhicules de police ont ensuite été mobilisés pour disperser les manifestants, dont la plupart ont quitté les lieux vers 1 heure du matin, précise le quotidien local St. Louis Post-Dispatch. La mort de Vonderrit D. Myers Jr. intervient juste avant un "week-end de résistance" organisé dans la région de Saint-Louis pour protester contre les pratiques des forces de l'ordre suite à la mort de Michael Brown, l'adolescent noir de 18 ans tué le 9 août dernier à Ferguson, dans la banlieue de Saint-Louis, note The New York Times. "La police se prépare à un week-end de manifestations", informe le St. Louis Post-Dispatch : 6 000 à 10 000 manifestants de tout le pays devraient prendre part pendant plusieurs jours à des marches, des rassemblements et des actes de désobéissance civile, selon un porte-parole de la manifestation.
Jeudi 13 novembre au soir, plusieurs dizaines de personnes se sont réunies dans l'entresol d'une église pour décider de ce qu'elles feront si le grand jury décide de ne pas inculper Darren Wilson, l'agent de police blanc qui a abattu Michael Brown, un jeune Noir non armé, il y a trois mois. Parmi les idées avancées : descendre en masse au siège des autorités du comté à 7 heures du matin le lendemain de l'annonce. Depuis août, les manifestants – dont certains appartiennent à des organisations établies et d'autres à de nouvelles organisations comme Hands Up United et Lost Voices – affluent pour protester non seulement contre la mort de Michael Brown mais aussi contre la question plus vaste du profilage racial et du comportement de la police. La décision du Grand Jury est attendue dans les tous prochains jours et les diverses organisations se préparent à protester contre un non-lieu que certains jugent inévitable. Elles mettent au point des "règles d'engagement" pour les contacts avec la police, font circuler de longues listes d'équipement (comprenant, entre autres, bandages et lunettes incassables) et établissent des "espaces sûrs" où les manifestants pourront se réfugier pour échapper au froid – ou aux gaz lacrymogènes.
Les manifestations avaient commencé immédiatement après la mort de Michael Brown, le 9 août. Pendant des jours, les gens ont défilé et scandé des slogans, et il y a eu quelques brefs épisodes de violence. Des magasins ont été pillés, les manifestants ont lancé des cocktails Molotov et essayé d'allumer des incendies, selon la police, qui a répliqué par des gaz lacrymogènes et des balles en caoutchouc. Une réaction exagérée selon les manifestants, pour qui la foule était pacifique, à l'exception de quelques éléments. Depuis, les choses se sont calmées mais les manifestations se poursuivent pratiquement tous les soirs. Une cinquantaine d'organisations se sont regroupées dans une coalition baptisée Don't Shoot [ne tirez pas] et les préparatifs vont bon train. Elles ont proposé "19 règles d'engagement" destinées à gérer les rapports avec les forces de l'ordre, entre autres une tolérance pour les "infractions mineures" (par exemple le jet de bouteilles d'eau) et un préavis de 48 heures avant l'annonce de la décision du grand jury. Certaines de ces règles ont été acceptées lors de négociations avec les autorités, d'autres ont été rejetées
Dès l'annonce de la décision du grand jury de ne pas inculper le policier blanc Darren Wilson, des émeutes se sont déclenchées à Ferguson et des manifestations spontanées ont eu lieu de New York à Los Angeles, en passant par Washington, Atlanta, Oakland et Philadelphie. Les photos à la une des sites de journaux américains sont impressionnantes : scènes d'émeutes, bâtiments et commerces incendiés, dispositif policier musclé sur fond de décoration de Thanksgiving. Comme attendu et malgré l'état d'urgence déclaré depuis plus d'une semaine par le gouverneur du Missouri Jay Nixon, malgré l'appel au calme lancé par le président Obama depuis la Maison-Blanche, la décision des jurés de n'engager aucune poursuite contre le policier blanc Darren Wilson qui a abattu le jeune noir Michael Brown à Ferguson le 9 août a dégénéré en une éruption de colère. "Des mois de colère et de frustration ont conduit à davantage de colère et de frustration, note The New York Times, qui décrit le chaos nocturne dans les rues de la ville de Ferguson. "Des magasins pillés et incendiés, des grenades explosives et lacrymogènes, des jets de pierres et même des coups de feu ont retenti dans Main Street", rapporte le journal, qui souligne que, dans le reste du pays, les rassemblements et manifestations spontanés se sont déroulés dans un calme relatif." Dans son éditorial, The Washington Post estime que le débat doit continuer aux Etats-Unis sur "la militarisation de la police, l'usage de la force et le traitement accordé aux minorités et en particulier aux Africains-Américains". Le quotidien de Washington insiste également sur le fait que "les forces de l'ordre dans tout le pays devraient être équipées de caméras embarquées, afin que toutes les arrestations et confrontations soient enregistrées." Le magazine The New Republic prend, pour sa part, le parti d'apostropher directement le président Obama et lui intime de faire le déplacement à Ferguson, afin de "prononcer enfin un véritable discours sur la question raciale".
Des manifestations ont à nouveau eu lieu le 25 novembre dans tout le pays, à la suite de la décision du grand jury de ne pas inculper le policier blanc qui a abattu le jeune Michael Brown. Le débat sur ce verdict continue de faire rage. d'après un sondage cité par le journal, 62 % des Africains-Américains estiment que le policier Wilson est fautif, contre 22 % des Blancs. La colère continue de secouer Ferguson après la décision du grand jury de ne pas inculper le policier blanc Darren Wilson, qui a abattu l'adolescent noir Michael Brown le 9 août dernier. "Plus de 2 000 hommes de la garde nationale et des centaines de policiers ont été déployés dans la région de Saint-Louis pour empêcher que ne se renouvellent les actes de vandalisme, d'incendie et de pillage qui ont eu lieu [lundi 24 novembre]", indique le Los Angeles Times. Malgré ce dispositif, "l'ambiance a tourné au vinaigre" mardi à mesure que la nuit avançait, note le quotidien. Des rassemblements ont eu lieu devant le siège de la police de la ville et devant la mairie, les manifestants criant : "Pas de justice, pas de paix !" et "Nous voulons des réponses !" Des briques ont été lancées sur les fenêtres, une voiture a été incendiée, tandis que la police intervenait avec véhicules blindés et gaz lacrymogènes. Incohérence de l'affaire Dans d'autres villes, les manifestations ont été plus calmes. Mais le débat sur la décision rendue lundi continue d'agiter tout le pays. Un débat encore avivé par la diffusion, le 24 novembre au soir, de l'ensemble des documents qui ont été soumis au grand jury – témoignages, rapports d'experts, photographies. Après avoir consulté ces documents, The New York Times, The Washington Post et le quotidien local St. Louis Post-Dispatch font un même constat : "La seule constante dans l'affaire, c'est l'incohérence", comme l'écrit le quotidien de la capitale. "Aucune image claire de ce qui s'est réellement produit n'émerge de ces milliers de pages rendues publiques par les procureurs de Saint-Louis", souligne le journal. Pour ceux qui prennent la défense de Michael Brown, ces récits "renforcent l'idée que Wilson aurait dû être jugé en procès, de façon que ces éléments contradictoires soient présentés devant un tribunal". "Les récits des témoins sont loin d'être clairs", appuie le St. Louis Post-Dispatch. Au final, "face à des récits contradictoires, le grand jury a fait confiance à Darren Wilson", écrit The New York Times. Le témoignage du policier "était le seul récit direct" de la scène et "semble avoir convaincu certains des jurés". Mais "les questions accommodantes posées au policier et celles, agressives, posées par les procureurs aux témoins dont les récits semblaient contredire la version de celui-ci conduisent certains à se demander si la procédure a été aussi impartiale que le prétend le procureur McCulloch".