Comment resituer l’exploration et le traitement de l’infertilité en 2007 dans une démarche historique ? La naissance de la clinique fut fondée sur le : « où avez-vous mal ? ». L ’art clinique est devenu un : « que désirez-vous ? » Michel Foucault Le « dur désir de durer » Paul Eluard
Comment situer l’exploration et le traitement de l’infertilité en 2007 dans une démarche historique ? Au cours de l’évolution de l’humanité, les progrès scientifiques n’ont pas suffi à l’homme à comprendre ni maîtriser la complexité de sa procréation. Si l’acte de donner le jour est concret, celui de concevoir reste abstrait, sa médicalisation renouvelant le monde fantasmatique qui l’entoure au lieu de l’appauvrir. Le « dur désir de durer » Paul Eluard
A partir du néolithique, et de l’apparition de l’écriture, il y a trace d’une pensée qui relie la procréation au concept d’origine du monde A partir du VI ème siècle av. J.C., et Hippocrate, la génération de l’homme est rapportée à l’effet de semences, dont la nature est discutée (le sang menstruel semble impliqué dans le développement de l’embryon).
A la Renaissance, l’anatomie des organes génitaux se précise, mais leur fonctionnement reste mystérieux deux théories opposées s’affrontent jusqu’au XVIIIème : –la préformation (l’être vivant est prééxistant en miniature dans l’oeuf), –l’épigénèse (il se forme peu à peu à partir d’une substance amorphe). A la fin du XVII ème s’opposent ovistes et animalculistes, et la réalisation, au XVIIIème, des premières inséminations artificielles, ne suffit pas à démontrer la nécessité de l’homme et de la femme pour concevoir un enfant. Le « dur désir de durer » Paul Eluard
Le XIX ème : naissance du concept de cellule (1827). Le rôle du sperme est réhabilité, la nature cellulaire de l’ovule, de l’embryon, puis du spermatozoïde (1860) reconnue. Se succèdent –les bases de l’embryologie (filiation des cellules entre elles), –les thèses sur l’évolution, –l’observation, en 1875, de la fécondation d’un oeuf d’oursin d’où naît la compréhension de la conception chez les êtres sexués
Vers 1880, les chromosomes et les noyaux des cellules apparaissent fondamentaux dans le processus de reproduction, et les lois de Mendel sur l’hérédité sont connues du monde savant vers 1900, 30 ans après leur publication Le XXème siècle est celui –du perfectionnement de la connaissance des chromosomes, –la découverte puis la synthèse des hormones, –la compréhension du cycle féminin et de sa période de fertilité, des mécanismes de l’implantation, –et la mise au point des traitements hormonaux à but contraceptif ou inducteur de l’ovulation, –la chirurgie de la stérilité, –la fécondation in vitro –L’ICSI
Les techniques d'aide médicale à la procréation ont vingt ans. Elles constituent un prolongement de la révolution initiée, vingt années auparavant, dans la maîtrise de la fertilité par la contraception. Dans les premiers temps, encore si proches, les couples stériles et leurs médecins avaient la sensation de vivre une expérience exceptionnelle, tout en contribuant, chacun à sa place, à une avancée scientifique formidable. Seuls étaient mis en avant les succès croissants obtenus, et l'extraordinaire espoir lié aux limites toujours repoussées des possibilités thérapeutiques. Les décisions étaient prises, les indications posées, les traitements proposés, les thérapeutiques mises en œuvre, en fonction de l'expérience, de la compétence… et de la conscience de chacun.
Ce n'est que secondairement que se sont exprimés, tant des doutes et réticences face aux excès ou dérives potentielles liés aux possibilités techniques, que l'amertume face aux échecs invincibles, et aux manques de ces mêmes techniques.
On a alors pensé organisation, code de bonne conduite, livre blanc des bonnes pratiques, réglementation. La réflexion médicale a tenté de proposer une gestion des pratiques, ce qui a peu à peu semblé insuffisant. Tous les acteurs sociaux, usagers, médias, institutions juridiques…, se sont sentis impliqués dans les conséquences des actes divers d'aide à la procréation et ont souhaité participer à l'élaboration de leur encadrement
En 1978, Louise Brown, née par césarienne le mercredi 26 juillet à 23h 45 à l’hôpital d’Oldham, dans les faubourgs de Manchester, était le seul bébé conçu par FIV parmi les cent- vingt-deux millions d’enfants nés cette année-là. Aujourd'hui, il est admis que six couples sur dix consultent à un moment ou à un autre de leur vie reproductive pour un problème d'infertilité Parmi les naissances annuelles en France, 1,5% est issue de la technique
Depuis le colloque "Génétique, procréation et droit" en 1984, jusqu'au vote des lois dites de bioéthique du 29 juillet 1994, et la révision des lois en 2005, 20 ans de discussion ont tenté de cerner ce qui était permis ou interdit en matière d'aide médicalisée à la reproduction, de dons de gamètes et d'embryons etc.
La loi de bioéthique de 1994 Conditions relatives au couple demandeur (Art. L ) " L'homme et la femme formant le couple doivent être vivants, en âge de procréer, mariés ou en mesure d'apporter la preuve d'une vie commune d'au moins deux ans et consentant préalablement au transfert des embryons ou à l'insémination. » !
Diversité géographique de la définition de l'"éthiquement correct" A l'heure où dans l'hexagone est rediscutée la loi de bioéthique, on peut par ailleurs constater les immenses divergences d'un pays à l'autre dans la conception de l'"ethically correct". Selon les états, existent ou non des lois et des sanctions en cas de non-application. Une majorité de pays a établi une réglementation de l'aide médicale à la procréation, d'autres n'en ont aucune, tels la Belgique, la Finlande, la Grèce, Hong-Kong, l'Inde, et le Portugal.
Diversité géographique de la définition de l'"éthiquement correct" L'accès à l'AMP est réservée aux seuls couples mariés en Allemagne, Hongrie, Pologne et Turquie. Au Brésil, aucune condition de statut marital ou social n'est requise. En Israël, Russie, Pays-bas, Espagne, Grande-Bretagne et Pays- Bas, l'AMP est acceptée chez des femmes seules. Au Canada, les professionnels ont libre choix d'accepter ou non de traiter des femmes seules, des couples homosexuelles (admises également en Grande-Bretagne).
Diversité géographique de la définition de l'"éthiquement correct" La préoccupation générale quant au nombre des grossesses multiples pose le problème de la limitation du nombre d'embryons transférés : inexistante en France et aux USA, fixée à 2 au Danemark en Suisse et Grande-Bretagne, 3 en Allemagne et au Japon, 4 au Brésil et en République tchèque. Transfert sélectif d’un embryon : (Belgique, Suède)
Diversité géographique de la définition de l'"éthiquement correct" La durée maximale de conservation des embryons est également variable, de dix ans en Finlande, Israël, Espagne, Taïwan, cinq ans en Grande-Bretagne, Suisse et Argentine, jusqu'à un an seulement en Autriche, Suisse et Danemark. Le devenir des embryons congelés diffère également : ainsi, en Irlande, Autriche, Norvège et Israël, les embryons non "utilisés" par le couple ne peuvent être donnés, ni à un autre couple, ni pour la recherche.