Jean Menotti Laboratoire de Parasitologie-Mycologie (EA-3520)

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Transcription de la présentation:

Pneumocystis : transmission, épidémiologie moléculaire, pathogenèse et concept de colonisation Jean Menotti Laboratoire de Parasitologie-Mycologie (EA-3520) Hôpital Saint-Louis / Université Paris-Diderot jean.menotti@sls.ap-hop-paris.fr

Genre Pneumocystis Micromycètes atypiques (classe des Ascomycètes) Etroite spécificité d’hôte : P. jirovecii : homme P. carinii et P. wakefieldiae : rat P. murina : souris P. oryctolagi : lapin Liaison spécifique aux pneumocytes de type I Prolifération dans les alvéoles pulmonaires  pneumonie à Pneumocystis (PCP) : infection sévère chez les sujets immunodéprimés

Genre Pneumocystis Cycle :

Primo-infection par Pneumocystis Jirovec 1952 : Pneumocystis retrouvé chez des prématurés et enfants malnutris (orphelinats) Etudes sérologiques : primo-infection par Pneumocystis précoce chez l’enfant (Cushion 1998) Taux de séroconversion  avec l’âge (Vargas 2001 ; Respaldiza 2004) Primo-infection précoce chez le rat nouveau-né (Isenhour 2002) Parmi 33 femmes enceintes au 3e trimestre, 5 présentaient de l’ADN de P. jirovecii versus aucune de 28 femmes pas enceintes : exposition précoce par une source maternelle? (Vargas 2003) ADN de P. jirovecii détecté au cours d’épisodes de bronchiolites chez l’enfant (Totet 2003, 2004) Mais plusieurs études ont montré que les Pneumocystis étaient fréquemment acquis et éliminés par le système immunitaire, plutôt que acquis durant l’enfance et persistant durant la vie de l’hôte (Chen 1993 ; Vargas 1995 ; Latouche 1997 ; Keely 1995, 1996, 1997)

Concept de colonisation Détection de Pneumocystis ou de son ADN chez un hôte qui ne présente pas de signe de pneumonie Mise en évidence grâce au développement des méthodes moléculaires de détection (PCR, PCR en temps réel) .

Colonisation chez des enfants non immunodéprimés

Colonisation chez des patients HIV+ Estimation du portage : 9 à 69% (Takahashi 2002 ; Huang 20003 ; Morris 2004 : portage chez 42 de 91 (46%) échantillons autopsiques de patients non décédés de pneumocystose) Tabac associé à un risque accru de portage (Morris 2004) Colonisation persistante ou intermittente d’ADN de P. jirovecii chez des patients HIV+ (Wakefield 2003). Chez les 7 patients qui ont présenté une colonisation asymptomatique après un épisode de PCP, un changement de génotype par rapport à celui de l’épisode initial a été observé.

Colonisation chez des patients immunodéprimés VIH- Facteurs de risque de colonisation par P. jirovecii : transplantation, hémopathie maligne, traitement par corticoïdes (Peterson&Cushion 2005)

Colonisation chez des patients présentant une pathologie pulmonaire chronique Facteurs de risque de colonisation par P. jirovecii : BPCO, asthme, pathologie pulmonaire chronique, mucoviscidose, connectivite (Peterson&Cushion 2005) Sur 141 patients présentant une BPCO, une mucoviscidose ou un cancer du poumon, >21% étaient colonisés par Pneumocystis (Probst 2000) Autres études : 2,6 à 35% de colonisation (Sing 1999 ; Visconti 2000 ; Matos 2003) Fumeurs : risque accru de colonisation par Pneumocystis (Vidal 2006)

Colonisation chez des sujets immunocompétents Forte prévalence de la colonisation par P. carinii chez les rats immunocompétents (Icenhour 2001)

Réponse inflammatoire à la colonisation par Pneumocystis Chez des singes infectés par le SIV et inoculés avec des Pneumocystis spécifiques des primates non humains, l’inoculation est suivie d’un afflux de LT CD8+ et de neutrophiles, qu’elle ait résulté en une PCP fulminante ou en une colonisation asymptomatique (Board 2003)  la colonisation pourrait stimuler l’inflammation pulmonaire et conduire à des lésions pulmonaires  Colonisation = cofacteur impliqué dans le développement de certaines pathologies pulmonaires ?

Transmission par voie aérienne chez la souris Dumoulin et al., 2000 Des souris immunocompétentes Balb/c colonisées par P. murina sont capables de transmettre l’infection par voie aérienne à des souris SCID préalablement non infectées

Transmission par voie aérienne chez la souris Transmission par voie aérienne d’une souris SCID à une souris immunocompétente Balb/c, puis entre 2 souris immunocompétentes Balb/c, la 2e pouvant contaminer une souris SCID Présence d’ARNm hsp70 et cdc2 (cyclin-dependent Ser-Thr kinase)  P. murina capable de se répliquer dans les poumons d’hôtes immunocompétents  hôtes immunocompétents parasités transitoirement peuvent constituer des réservoirs pour Pneumocystis Chabé et al., 2004

Transmission inter-humaine Transmission nosocomiale entre patients HIV+ et greffés rénaux (Rabodonirina 2004) : 6 patients infectés par une souche de même génotype (ITS1, rDNA 26S nucléaire, mt26S rDNA, -tubuline) que les patients sources .

Transmission inter-humaine Epidémie dans une unité de transplantation pédiatrique (Höcker 2005) : Patient source : enfant présentant une mitochondriopathie 3 patients ayant acquis 2 isolats de Pneumocystis de génotypes identiques (ITS1, rDNA 26S nucléaire, mt26S rDNA, -tubuline) à ceux hébergés par le patient-source

Structure des gènes de l’ARN ribosomique chez les Eucaryotes . Chez Pneumocystis, pas de répétition en tandem des gènes de l’ARNr nucléaire ADN mitochondrial : gène LSU rRNA

Epidémiologie moléculaire Latouche et al., 1997 Typage moléculaire (ITS1, ITS2 et mtLSU) sur 36 LBA provenant de 16 patients HIV+ présentant une PCP Chez 5 patients sur 6 ayant présenté des épisodes récurrents de pneumocystose, Latouche et al. (1997) ont trouvé des isolats de génotype différent de celui du 1er épisode  pneumocystose = infection de novo plutôt qu’une réactivation .

Epidémiologie moléculaire Hauser et al., 2000 PCR + Single Strand Conformation Polymorphism (SSCP) des gènes de l’ITS1, LSU rRNA nucléaire, mtLSU rRNA et -tubuline 32% des échantillons présentent 2 bandes, correspondant à 1 allèle ; les autres échantillons présentent + de 2 bandes pour au moins 1 des 4 régions génomiques, ce qui suggère l’existence de co-infections par plusieurs souches de P. jirovecii

Epidémiologie moléculaire : ITS Génotypes ITS1 et ITS2 chez des patients colonisés ou présentant une pneumocystose (Nevez 2003) 17 LBA 14 génotypes différents identifiés 3 génotypes retrouvés à la fois chez des patients colonisés et des patients PCP Infections par plusieurs souches chez 2/6 patients colonisés et 6/11 patients PCP L’existence de génotypes communs entre patients colonisés et patients PCP suggère que les populations humaines infectées quelles que soient les manifestations cliniques pourraient constituer un réservoir commun pour Pneumocystis

Epidémiologie moléculaire : ITS Génotypes ITS 1et ITS2 chez 26 enfants non immunodéprimés sans pneumonie sévère (Totet 2003) Même génotype le + fréquemment retrouvé chez les patients immunodéprimés présentant une PCP et chez les enfants non immunodéprimés Infections mixtes par plusieurs souches chez 3 enfants  Compte tenu de la fréquence de P. jirovecii chez des enfants développant des syndromes respiratoires aigus (25%), les résultats du génotypage suggèrent que les enfants sont un réservoir important pour Pneumocystis .

Epidémiologie moléculaire : DHPS Génotypage du gène de la DHPS chez 13 adultes présentant une PCP et 33 enfants immunocompétents : seulement 8% de mutants aux positions 165 et/ou 171 (Totet EID 2004)

Epidémiologie moléculaire : DHPS % de mutants + élevé dans les villes qui présentent une incidence élevée d’infection par le VIH et de PCP (+ forte utilisation de sulfamides favorisant l’émergence de mutants)  mutants liée à  utilisation de sulfamides depuis l’introduction des HAART

Epidémiologie moléculaire : ITS - DHPS Génotypage par séquençage des gènes ITS1, ITS2 et DHPS d’isolats de P. jirovecii provenant de 13 adultes PCP, 8 adultes colonisés et 19 enfants immunocompétents (Totet 2004) ITS1 et 2 : grande diversité de génotypes génotypes principaux identiques existence d’infections mixtes DHPS : mutants présents dans les 3 groupes Caractéristiques communes des isolats provenant des 3 groupes de sujets Quelle que soit la forme de l’infection, les sujets infectés semblent faire partie d’un réservoir humain commun pour P. jirovecii

Voies de transmission

Conclusions Evolution d’une colonisation en PCP ? Rôle pathogène de la colonisation par P. jiroveci (cofacteur d’évolution des maladies pulmonaires) ? ou simple marqueur du processus pathogène sous-jacent ? Prise en charge des patients colonisés : Traitement spécifique Bénéfice collectif : diminution du réservoir Bénéfice individuel ? Isolement des patients colonisés / patients immunodéprimés Transmission inter-humaine par voie aérienne (patients PCP, patients colonisés, enfants… constituent un réservoir commun)

Perspectives Identifier le stade aérien de Pneumocystis, qui n’est pas connu Etudier la présence, la viabilité et la circulation de Pneumocystis dans l’air Quantifier la présence du champignon dans l’air par PCR en temps réel