140 ans de sculpture à La Rochelle
Le poilu Joachim Costa sculpteur Le monument aux morts de la grande guerre Joachim Costa sculpteur
Discours et inauguration, le 19 novembre 1922 Joachim Costa Mais là, à deux pas, une sculpture semble crier « Assez ! ». Cette sculpture, bouche fermée, comme un bloc de mutisme toise l’assemblée. On se tait. Chapeau bas Messieurs. Le plâtre du « poilu » - c’est ainsi qu’il se nomme - fait forte impression cette année là. Un chef-d’œuvre, c’est certain ! 1919 est une année où la commande de monuments aux morts est sur toutes les lèvres. Front baissé, « le poilu » cherche sa place. C’est à La Rochelle, au bout du mail, que Joachim Costa pourra l’installer, . Imaginez le Salon en 1919. L’ambiance n’est pas à la joie, pourtant on entend quelques rires courtois. Les habitués se retrouvent parmi les peintures et les sculptures exposées. La guerre, la Grande, est finie. Les visions héroïques parcourent au grand galop les toiles et les pierres de nos artistes. On se pâme, en corset serré, devant ces actes de bravoures magnifiés. Le champagne coule enfin. Discours et inauguration, le 19 novembre 1922
Ce poilu n’est pas un héros, c’est un homme qui fait le gros dos, c’est un homme revenu de tout, de la Marne et de Verdun, comme Joachim Costa, son sculpteur. Ce jeune homme a trente ans. Il a été appelé dès 1914 dans un régiment d’infanterie. Joachim Costa durant quatre ans fut de toutes les batailles. Valeureux combattant de la Marne, il fut décoré de la Croix de guerre au nom de ses actions héroïques…
Son « poilu » est un autoportrait, non pas de lui-même, mais de tous ses amis morts là-bas. Voyez ces bas-reliefs aux pieds du poilu, gravures légères du métal, comme des clichés pris à l’improviste : des poilus partagent le café, fument la pipe, évoquent l’ami perdu, évitent de penser à leurs familles, à ce que chacun aurait pu être si la guerre… Son « poilu » de La Rochelle reste sans doute son œuvre la plus impressionnante.
Dans les années 20, Costa participe au groupe de « La Douce France » Dans les années 20, Costa participe au groupe de « La Douce France ». Il recherche une vérité propre à la matière. Avec quelques amis, il prône la « taille directe ». Jusqu’alors, le sculpteur bâtissait un plâtre puis, si ce dernier avait la chance de plaire aux autorités, il recevait un bloc de marbre en récompense et un contrat pour « reproduire » en pierre, cette sculpture présentée en plâtre. « La taille directe » est le fruit d’une démarche différente. Plus de phase préliminaire, l’artiste dessine puis « attaque » directement la pierre, parfois une bille de bois, sans modèle préétabli. La taille de Joachim Costa est franche, les volumes ne s’encombrent pas de détails parasites. L’idée est claire comme la forme est puissante. Joachim Costa publira successivement plusieurs recueils et articles pour défendre cette conception nouvelle de la sculpture : « Modeleurs et tailleurs de pierre, nos traditions », Editions de la Douce France, (1921), « A propos de la sculpture en taille directe », dans La Revue Française, 5 juillet 1925, « Les derniers jours de Bourdelle », dans la revue L’amour de l’art (1931), et « La pierre et le bois » pour l’Encyclopédie française Larousse (1935)… Photographie de Joachim Costa sculptant une femme en taille directe. Sur le bloc de pierre, il a dessiné ses lignes générales. Pour seul modèle il dispose d’une peinture, placée derrière lui. Architecte Jean Béraud, Fondeur Alexis Rudier