Le Réalisme Gustave COURBET (1819-1877)

Le Réalisme: réaction à l’escapisme romantique Si le romantisme et le classicisme étaient réaction au nom de la raison et de la nature contre le caractère artificiel du baroque et du rococo appréciés par l’aristocratie, le réalisme apparait au moment où le romantisme, compagnon des révolutions bourgeoises du XVIIIème et XIXème siècle, s’égare dans l’exotisme, toujours à la recherche de l’émotion plus forte.

Delacroix, Liberté guidant le peuple, 1830

Delacroix, La Mort de Sardanapale, 1834

Delacroix, Chevaux arabes, 1860

Alors que le néoclassicisme trouve ses commanditaires et consommateur dans la nouvelle classe privilégié du capitalisme, la bourgeoisie. INGRES, Portrait de Louis Bertin, 1832

Madame Antonia Devaucay de Nittis, 1807 Mme Ingres, Madame antonia devaucay de nittis, 1807 Madame Antonia Devaucay de Nittis, 1807 Mme Ingres

Ingres, La grande odalisque, 1814

Courbet, Pierre-Joseph Prudhon et ses enfants en 1853, 1865-67 Le réalisme sera souvent associé au socialisme et aux luttes des exploités du capitalisme en général. Le nom fut donné au mouvement par Gustave COURBET (1819-1877), peintre français, qui forgea le terme et en fit son programme. Prudhon: « La propriété, c’est le vol. » Socialiste, anarchiste Courbet, Pierre-Joseph Prudhon et ses enfants en 1853, 1865-67

Gustave COURBET (1819-1877) Né à Ornans dans une famille de paysans aisés, Courbet commence comme peintre romantique néobaroque vers 1840. Autoportrait (homme désespéré), 1843-45 Autoportrait (homme blessé), 1844-45

Le programme réaliste En 1846, le poète Charles Baudelaire réclame « un peintre qui exprimât l’Héroïsme de la vie moderne », et Courbet, son ami, en fait son crédo artistique, seul à l’époque. L’exagération romantique de la sensibilité et de l’imagination ne sont qu’un échappatoire devant les réalités de l’époque, l’artiste moderne devrait se baser sur son expérience personnelle, affirme Courbet.

Les Casseurs de pierre (1849) est la première peinture traduisant le programme réaliste . Cette peinture nous présente pour la première fois dans un grand format des corps anonymes au travail. De ces deux travailleurs, l’un est visiblement trop jeune pour le dur travail qu’il fait, et l’autre trop vieux: c’est une critique du monde du travail. La toile reçut la forte approbation de Prudhon, socialiste et anarchiste. La technique reste celle des Le Nain et Rembrandt, dont il admirait l’œuvre, et le naturalisme de Caravage. Courbet, Les Casseurs de pierre, 1849

Courbet, Un Enterrement à Ornans, 1849, 315x668 cm Un enterrement à Ornans choque: son grand format était alors réservé aux scènes historiques, mythologiques ou religieuses. Cette remise en question de la hiérarchie des genres fait assimiler l’art de Courbet à l’art « socialiste ». Les réactions sont violentes: « Le Laid en grandeur nature! » … Courbet, Un Enterrement à Ornans, 1849, 315x668 cm

Les réactions « Le Laid en grandeur nature ! » Un enterrement à Ornans fut présenté au Salon de peinture de 1850 où, malgré la médaille de deuxième classe qui l’a récompensé, il fut très mal accueilli par les critiques outrés de voir une si grande œuvre (6,68 mètres sur 3,15 mètres), traiter d'une « anecdote » populaire avec une telle gravité. Ce format panoramique était alors réservé aux grandes scènes historiques, mythologiques ou religieuses. Cette remise en question de la hiérarchie des genres va choquer les critiques. Pour la plupart d'entre eux, la peinture de Courbet fut assimilée à un art « socialiste ». Les réactions furent violentes : « Est-il possible de peindre des gens si affreux ? » demandent des bourgeois dans un dessin d'Honoré Daumier. La critique décrit les personnages comme « d'ignobles caricatures inspirant le dégoût et provoquant le rire ». « Imaginez-vous la copie la plus scrupuleuse et la plus impitoyable de toutes les trivialités de figures, d'attitudes, de costumes, de physionomies qu'on puisse glaner à chaque pas dans la vie privée, et particulièrement en province. Ce n'est pas la restauration du laid, c'est la poursuite et la recherche de l'ignoble. »

Son autre tableau refusé à l’Exposition universelle de 1855, Courbet monte une exposition personnelle qu’il nomme le « Pavillon du Réalisme ». La critique de l’époque qualifie l’œuvre de «vulgaire». (où son autre tableau, La rencontre, est accepté). Courbet, Intérieur de mon atelier: une allégorie réelle résumant sept ans de la vie d’un artiste, 1854-1855, 352x587 cm

La Rencontre (Bonjour, Monsieur Courbet), 1854 Son autre tableau, La rencontre, est par contre accepté à l’Exposition universelle… à l’Exposition universelle de 1855. La Rencontre (Bonjour, Monsieur Courbet), 1854

La réponse de Courbet À ces critiques, Courbet répond: « Je tiens que la peinture est un art essentiellement concret et ne peut consister que dans la représentation des choses réelles et existantes (...) de tous les objets visibles ; un objet abstrait, non visible, non existant n'est pas du domaine de la peinture». « Je ne peux pas peindre un ange, car je n’en ai jamais vu ». Courbet décris ainsi son tableau Intérieur de mon atelier: une allégorie réelle résumant sept ans de la vie d’un artiste (1854-1855) : « Le tableau est divisé en deux parties. Je suis au milieu, peignant,», « à gauche, le monde de la vie triviale, le peuple, la misère, la pauvreté, la richesse, les exploités, les exploiteurs, les gens qui vivent de la mort » et « à droite tous les actionnaires, c'est-à-dire les amis, les travailleurs, les amateurs du monde de l'art. »

Gustave Courbet, Les cribleuses de blé, 1854 Notez que c’est surtout la taille des toiles de Courbet, consacrées à représenter la vie de tous les jours qui est nouvelle. Les sujets similaires existaient, mais peint en petit format, c’était les « scènes de genre ». La technique de Courbet reste traditionnelle. Gustave Courbet, Les cribleuses de blé, 1854

Courbet peint aussi les paysages...

Gustave Courbet, Les demoiselles au bord de la Seine, 1856 Et aussi, bien entendu, les femmes… Gustave Courbet, Les demoiselles au bord de la Seine, 1856

Mais quand il fantasme… Gustave Courbet, Femme aux bas blancs, vers 1861

Gustave Courbet, L'Origine du monde, 1866 …il le fait de manière réaliste. Gustave Courbet, L'Origine du monde, 1866

Néoclassicisme, romantisme, réalisme… Ingres, La grande odalisque, 1814 Delacroix, 1827-28, Odalisque Reclining on a Divan Gustave Courbet, L'Origine du monde, 1866 Delacroix, Odalisque, 1827-28

Ces messieurs, leurs affaires, leurs fantasmes…

Dégager l’essentiel: Le Réalisme C’est l’exotisme, l’escapisme, la fuite du temps et des problèmes de leur société aussi bien du néo-classicisme d’Ingres que du romantisme néobaroque de Delacroix et qui fait place à un autre grand mouvement de la fin du XIXème siècle: le Réalisme. Son plus grand représentant est Gustave COURBET (1819-1877), peintre français, qui forge le terme et en fait son programme. Le réalisme, critiqué comme laid, vulgaire, choque car le grand format des toiles, à l’époque réservé aux scènes historiques, mythologiques ou religieuses, que Courbet utilise pour représenter des scènes de la vie actuelle, ordinaire, du monde du travail, remettent en question la hiérarchie des genres (scènes historiques, religieuses, mythologiques ayant le plus de valeur, les natures mortes et scènes de genre en ayant le moins). Le réalisme sera souvent associé au socialisme et aux luttes des exploités du capitalisme en général. Mais si Courbet introduit le nouveau traitement des sujets (la grande taille des toiles montrant la vie de tous les jours et le monde du travail), sa technique reste traditionnelle.