Complications graves des antirétroviraux J. Francès DESC réanimation médicale Mai – Juin 2005
Généralités Virus de l’immunodéficience humaine (VIH) Famille des rétrovirus humains: VIH-1 et VIH-2. -Matériel génétique constitué d’ARN secondairement rétrotranscrit en ADN proviral par la transcriptase inverse. -ARNv ADNv circulaire pénétrant dans l’ADNc: réplication virale.
Généralités -tropisme CD4 et macrophages, peau, muqueuses, médullaires, SNC. -Diagnostic par sérologie (ELISA) confirmé par Western Blot (séroconversion de 3 à 8 sem). -Ag p24: primo-infection puis disparition. -85% des patients sont au stade SIDA à 15 ans d’évolution.
Antirétroviraux Médicaments agissant sur les principales étapes de l’occupation dans les cellules immunitaires: - transcriptase inverse - protéases Association d’ARV indispensable pour contrôler les résistances. But thérapeutique: rapport efficacité/ toxicité cellulaire élevé
Antirétroviraux Urgence du trt donc souvent accès précoce avec peu de recul (pas de véritable phase IV, peu de recherche sur effets secondaires et limite du système de pharmacovigilance). Depuis 1996, apparition de nouvelles molécules permettant de nombreuses associations.
Antirétroviraux Analogues nucléosidiques inhibiteurs de la transcriptase inverse (NRTi): Absence du groupe hydroxyle en 3’ nécessaire à la liaison entre chaque base arrêt de l’élongation de l’ADNv. -zidovudine/AZT (retrovir®) - zalcitabine/ ddC (hivid®) -Stavudine/ d4T (zerit®) - 3TC + AZT (combivir®) -Didanosine/ ddi (videx®) - 3TC + AZT + abc -Lamivudine/ 3TC (epivir®) (trizivir®) -Abacavir/ abc (ziagen®)
Antirétroviraux Inhibiteurs non nucléosidique de la transcriptase inverse (NNRTi): Action par fixation directe sur la transcriptase inverse. - efavirenz (sustiva®) -névirapine (viramune®) -Delavirdine (rescriptor®)
Antirétroviraux Inhibiteurs de la protéase (PI); Modification post traductionnelle des précurseurs gag (nucléotide) et pol (transcriptase inverse). - saquinavir (invirase®) - Ritonavir (norvir®) -Nelfinavir (viracept®) - Amprénavir (agénérase®) -Indinavir (crixivan®) - Lopinavir (kaletra®)
Antirétroviraux Inhibiteur nucléotidique de la transcriptase inverse: ténofovir (viréad®)
Antirétroviraux Schéma thérapeutique: 2 NRTi + 1 PI ou 1 NNRTi Surveillance (OMS 2002): - indispensables: sérologie VIH, Hb ou Hte - recommandés: NFS, transaminases, créatininémie, azotémie, glycémie et ßHcg. - souhaitables: bilirubine, amylase, lipase, CD4 - facultatif: charge virale
Complications graves des ARV Hyperlactatémie et acidose lactique Hépatotoxicité Hypertriglycéridémie Pancréatite aiguë Complications cardiaques hypersensibilité
Acidose lactique 1)Définition: acidose lactique (AL) : lactates > 5 mmol/l, RA < 20mmol/l et Ph < 7.35 type A = anaérobiose (chocs) type B = aérobiose (NRTi) 1.7 à 25.2 cas /1000 patients / an avec mortalité = 30 à 60 %. Hyperlactatémie (HA): lactates = 2.5 à 5 mmol/l avec RA et Ph normaux. asymptomatique, prévalence = 15 à 35 %
Acidose lactique 2)Incidence:
Acidose lactique 1er cas décrit en 91 d’une AL + hépatite fulminante sous didanosine (Lai, Crit Care Med 1997,25) 3)FDR d’AL: - stavudine (d4T) (John, AIDS, 2001,15) -Durée du trt par NRTi et didanosine (Coghlan,Clin Infect Dis, 2001,33) -Lipodystrophie, dyslipidémie, hyperglycémie (Boubaker, Clin Infect Dis, 2001,33) -sexe féminin, grossesse et BMI élevé (Falco,Clin Infect Dis, 2002,34) -HA = faible valeur prédictive d’une AL (Moyle AIDS,2002,16)
Acidose lactique
4)Physiopathologie: Mitochondropathie par inhibition de la DNA polymérase nécessaire à la réplication de l’ADN mitochondrial. Déplétion de l’ADNm + synthèse protéique mitochondriale + dysfonction de la chaîne respiratoire (chute du complexe IV). mitochondries + anomalie morphologique + apoptose cellulaire. (Coté,N Engl J med 2002,346) (Tolomeo,J Clin Patho 2003,56)
Acidose lactique - si hyperlactatémie, cle rénale, hépatique et musculaire = HA. - AL secondaire à une cle hépatique des lactates (stéatose….). - Atteinte des mitochondries dans le foie (stéatose), pancréas (pancréatite), muscle (myosite), cœur, nerfs (neuropathie périphérique), graisse (lipodystrophie),os (ostéopénie) et moelle.
Acidose lactique 5)Présentation clinique: -Aspécifique -Acidose lactique, TA élevé Transaminases, CPK,LDH, Amylase, lipase.
Acidose lactique 6)Traitement: -arrêt ARV (NRTi +++) Trt des DMV (VM, bicarbonates, CVVH) -Cofacteurs: riboflavine (précurseur des cofacteurs), thiamine (coenzyme de pyruvate deshydrogénase ), L- carnitine (cofacteur du transport d’AG), Co enzyme Q (porteur d’è) Revue de 11 cas rapportés = baisse de la mortalité. -Après guérison NNRTi + IP. (Calza, J Clin Nut, 2005, 24)
Acidose lactique chute lente de la lactatémie sur plusieures semaines ou mois. Mortalité de 57 % FDR mortalité = PH, lactates > 10, AZT. FDR survie = d4T, lamivudine, cofacteurs et antioxydants. (Calza, J Clin Nut, 2005, 24)
Acidose lactique Toxicité majorée si: - metformine - acyclovir - vidarabine - interféron - ac valproïque - tétracyclines - aspirine, AINS - corticoïdes - amiodarone
Hépatotoxicité 1)Impact clinique: -incidence de 6 % en 96 à 32 % en 99 (Bica,Clin Infect Dis,2001,32) -2 % de DC sur hépatite aiguë fulminante (surtout si anomalie hépatique antérieure) -Nevirapine +++ (prévention transmission mère-eft) (Nunez, drug safety,2005,28)
Hépatotoxicité 2)Définition: -ALAT 8X nle -PAL 1.5Xnle - bilirubine peut Se voir après hépatite (régénération). (Nunez, drug safety,2005,28)
Hépatotoxicité AIDS clinical trials group scale of liver toxicity -Grade 1 = 1.25 à 2.5 x la nle -Grade 2 = 2.6 à 5 -Grade 3 = 5.1 à 10 -Grade 4 = > 10 (National instituteof allergy and infectious disease,1996) Diagnostics différentiels: -hépatites virales - lymphome, kaposi, médicaments, OH, drogues.
Hépatotoxicité 4)Incidence et FDR: -2 à 18 % d’incidence -FDR:. Coinfection HBV et HCV (génotype 3). IP (ritonavir ++). NRTi (ddi, AZT, d4T++: mitochondropathie). NNRTi (nevirapine++: hypersensibilité). OH, âgé, transa élevées avt trt, femme, monotrt antérieur, élévation des CD4 après initiation. (Nunez, drug safety,2005,28)
Hépatotoxicité 5)Mécanismes: - nevirapine Abacavir -NRTi
Hépatotoxicité 6)Traitement: *si bas grade = attitude attentiste *si haut grade = arrêt des ARV hypersensibilité: pas de réintroduction (nevirapine, abacavir) et CTC si atteinte cutanéo-muqueuse mitochondropathie: cofacteurs arrêt drogues ou OH Si HBV ou HCV : mesurer charge virale avt trt ARV (si élevée, traiter par INF ou ribavirine) (Nunez, drug safety,2005,28)
Hypertriglycéridémie sévère Fréquente surtout avec IP. Pas de guidelines spécifiques lors du ARV. Trt nécessaire mais peu de données sur l’efficacité des différentes thérapeutiques hypolipémiantes. Syndrome lipodystrophique: - hyperTg +- hyperCt - insulinoR (15%) - DNID (8-10%) - lipodystrophie 50% des patients après 12 à 18 mois de trt. (Carr, Lancet,2000, 356)
Hypertriglycéridémie sévère Mécanismes: inhibition des protéines régulatrices des lipides et adipocytes (homologie partielle avec protéase HIV1). FDR: - BMI bas avant trt - durée du ARV - peptide C et Tg élevés après 1 an de ARV - 2 IP (ritonavir et saquinavir), stavudine - hetero ou homozygote pour Apo E2 Conséquences: baisse de l’observance et des MCV. (Carr, Lancet,2000, 356)
Hypertriglycéridémie sévère Étude sur la relation entre les différents trts ARV et dyslipidémie et évaluation du trt par bézafibrate patients randomisés avec au moins 4 BL à 3 mois d’intervalle avec ARV ou non sur au moins 1 an. -Trt si Tg>3g/l et/ou Ct > 2.20g/l pdt 6 mois non répondeurs au régime bézafibrate (400mg/j). -Suivi prospectif sur tolérance et efficacité. (Manfredi, Journal of infection, 2001, 42)
Hypertriglycéridémie sévère % des patients ont une HTg. Ritonavir> indinavir>saquinavir> NRTi, NNRTi, pas ARV % des patients ont une HCT. -10 % sous ritonavir = HTg sévère (>15g/l) % des dyslipidémiques ont besoin d’un trt. -Après 6 mois de trt par bézafibrate:. – 35 % de Tg maintenue après 6 mois de trt.- 25 % de Ct (Manfredi, Journal of infection, 2001, 42)
Hypertriglycéridémie sévère -bonne tolérance -Bonne observance (90%) Manfredi, Journal of infection, 2001, 42
Hypertriglycéridémie sévère Si Htg > 10 g/l risque de pancréatite aigue. Parfois nécessité de réaliser des plasmaphérèses si Htg sévère symptomatique.
Pancréatite aiguë Étude rétrospective pour déterminer la prévalence de la PA sous IP chez HIV dans 3 CHU de 1990 à à 800 fois plus de PA chez HIV (OH, Htg, drogue..) HTg = 12 à 38 % des étiologies de PA. -30 cas de PA de 90 à cas de PA de 96 à 01 (Zachary,Pancreas,2003,27)
Pancréatite aiguë - étiologies multifactorielles: (Zachary,Pancreas,2003,27)
Toxicité cardiaque Étude observationnelle prospective sur 11 cohortes (Europe,USA,Australie) de 12/99 à 04/2001. FDR et incidence des IDM chez le VIH traité par association d’ARV(NNRTi ou IP) IDM/ patients/an 3.5 événements cardiaques/ 1000p/an. -l’incidence augmente avec la durée du trt : le risque relatif est de 1.26 par année d’exposition. (Data Collection Adverse Effects of DAD, N Engl J Med, 2003, 349)
Toxicité cardiaque -FDR: Âgé, tabagisme, ATCD CV personnel, homme, dyslipidémie et diabète. -Beaucoup de FDR chez cette population jeune (39 ans): tabagisme à 56%, diabète à 3%, HTA à 7 %, dyslipidèmie à 46%. -Le risque absolu d’IDM est bas mais les ARV = de 26% du risque d’IDM /an d’exposition au trt durant les 4 à 6 ères années. (Data Collection Adverse Effects of DAD, N Engl J Med, 2003, 349)
Toxicité cardiaque Coronaropathie devant des FDR (dyslipidémie, insulinorésistance et syndrome lipodystrophique) (Cotter, Prog Cardiovasc Dis, 2003,45) Allongement du QT et torsade de pointe si association de trt interférant avec le cyt P450 (NRTi, methadone, fluconazole,erythromicine…) (Hrovatin,Itzl Heart J Suppl,2004,9) ICC réversible après arrêt des ARV chez un patient HIV aux multiples FDR CV. (Srivastava, Am J Ther,2004,4)
Hypersensibilité Rash, fièvre, prurit, myalgies, arthralgies après 1 à 3 sem de trt. Syndrome de Stevens-Johnson ou syndrome de Lyell chez moins de 0.5% des patients. Hypersensibilité au trt est 100 fois plus f réquente que dans la population générale (3 à 20 %). NNRTi, NRTi (abacavir++), IP(amprenavir++).
Conclusion Comparaison des admissions des VIH en réanimation entre (1 an) et 2001 (6 mois): -double les admissions d’HIV+ -Plus souvent des noirs (52% / 26%) et drogués (75%/ 48%). -Moins souvent admis pour IRA (22% / 54%)devant moins de pneumocystose (3% / 34%) -Plus souvent admis pour une cause non liée au HIV (67% / 12%) -Meilleure survie (71% / 49%) (Narasimhan, Chest,2004,125)
Conclusion Depuis 1996, avec l’apparition des nouveaux ARV, on a une nette amélioration du pronostic du VIH mais au dépend de nombreux effets secondaires plus ou moins sévères.