LE SACRE DE NAPOLEON Jacques-Louis David G. BESSET, Collège Marcel Aymé, Dagneux (01)
Ce tableau est un des plus célèbres de l’histoire de France, il se trouve aujourd’hui au Louvre où il est une des œuvres les plus imposantes (après « Les noces de Cana » de Veronése, dont David s’est vraisemblablement inspiré) Le sacre a lieu le 2 décembre 1804 dans la cathédrale Notre Dame de Paris mais le tableau n’est achevé qu’en 1807
Les noces de Cana de Veronese
Le couronnement raconté par Mme de Remusat (amie intime de Joséphine) « Il y eut d’abord de grandes discussions sur le couronnement particulier de l’empereur. La première idée était que le pape placerait cette couronne de ses propres mains, mais Bonaparte refusait l’idée de la tenir de qui que ce fût. On détermina enfin que l’Empereur se couronnerait lui-même et que le ape donnerait seulement sa bénédiction. Toute la cour se livra sans relâche aux apprêts des cérémonies du couronnement et on fit secrètement des répétitions de la cérémonie. Rien ne fut négligé dans l’éclat des fêtes. Les princes devaient porter un habit en blanc et or;l’empereur en habit long, ressemblant assez à celui de nos rois, un manteau de pourpre semé d’abeilles, et une couronne formée d’une branche de laurier comme celles des Césars. Puis vint la cérémonie. Arrivé à Notre Dame l’empereur revêtit ses grands habits, sa petite taille se fondait sous cet énorme manteau d’hermine. Toute la cérémonie fut très imposante et belle. Le moment où l’impératrice fut couronnée excita un mouvement général d’admiration. Elle marcha si bien vers l’autel, elle s’agenouilla d’une manière si élégante…Quand il fallut marcher de l’autel au trône, elle eut un moment d’altercation avec ses belles sœurs qui portaient son manteau avec tant de répugnance que je vis l’instant où l’impératrice ne pourrait point avancer. L’empereur adressa à ses sœurs quelques mots secs qui mirent tout le monde en mouvement. Le pape durant toute cette cérémonie eut un peu l’air d’une victime résignée mais noblement »
Le sacre de Napoléon : une mise en scène Qui est le peintre? De quel autre tableau célèbre est-il le peintre? Quel nom porte ce tableau? Est-ce vraiment ce qui est représenté? Pourquoi? 1) C’est David, le peintre officiel de Napoléon 2) Révolutionnaire, il a peint le Serment du jeu de paume 3) Le tableau s’appelle le Sacre de Napoléon 4) En fait il s’agit du couronnement de Joséphine (sa femme) par Napoléon 5) Napoléon a refusé la première version de David qui le montrait en train de se couronner lui-même (et non le pape pour prouver sa supériorité) pour éviter d’affirmer trop visiblement un retour à l’absolutisme
La cathédrale de Notre Dame, peinte par David est méconnaissable…. La scène représente le couronnement de l’impératrice par l’empereur Celle-ci est soumise à son mari comme le prévoit le code civil
6) Quel est le centre du tableau( le plus important) ?
Remarquez que, ramené aux dimensions du tableau, l’empereur parait (volontairement) plus grand que dans la réalité Le centre du tableau occupé par Napoléon et la couronne L’Empereur est le seul personnage du tableau à être actif. Tous les autres ne sont que des spectateurs inactifs…
7) Quel élément du tableau est en contradiction avec la réalité? Madame de Rémusat, présente lors de la cérémonie explique que le manteau de l’impératrice était tenue par les sœurs de Napoléon, mais que celles-ci étaient vexées de cette tâche (qui est une forme de soumission) et qu’une dispute éclata avec l’empereur. Pour éviter de les humilier encore plus, Napoléon demanda à David de ne pas les peindre en train de porter le manteau et d’ « inventer » deux personnages pour cela De même, la mère de l’empereur, représentée au centre du tableau, était en fait absente le jour du sacre (tout comme son frère)
Fâché avec son fils, la mère de l’empereur était absente le jour du sacre. A la demande de Napoléon elle a été rajouté par David Les sœurs de Napoléon sont finalement représentées en simples spectatrices A la demande de l’empereur, David invente deux dames d’honneur
Le sacre de Napoléon : un programme politique
8) D’après ce serment, que promet Napoléon? Serment de napoléon le jour de son sacre "Je jure de maintenir l'intégrité du territoire de la République ; de respecter et de faire respecter les lois du concordat et la liberté des cultes ; de respecter et faire respecter l'égalité des droits, la liberté politique et civile, l'irrévocabilité des ventes des biens nationaux ; de ne lever aucun impôt, de n'établir aucune taxe qu'en vertu de la loi ; de maintenir l'institution de la légion d'honneur ; de gouverner dans la seule vue de l'intérêt, du bonheur et de la gloire du peuple français." Comte L.-P. de Ségur : Procès verbal du sacre, 1805 8) D’après ce serment, que promet Napoléon? 9) Le tableau confirme t-il ce serment? 10) Quels éléments le prouvent? 8) Napoléon promet de respecter l’égalité et la liberté, donc les valeurs révolutionnaires 9) Le tableau prouve au contraire qu’il souhaite un retour à une forme d’absolutisme
L’attitude passive et résignée du pape prouve la volonté de Napoléon d’affirmer sa supériorité sur l’Eglise Les symboles religieux montrent la volonté de Napoléon de se les accaparer au détriment du pape (signe du gallicanisme) Les symboles de l’absolutisme : le sceptre, la main de justice, le globe terrestre, la couronne de laurier
Observe ce tableau d’Ingres, Napoléon y exprime la même volonté
Les différents groupes autour de l’empereur : l’affirmation d’une nouvelle façon de gouverner 11) Colorie en vert la famille impériale ; en rouge les membres de l’administration ; en jaune les militaires ; en bleu les religieux et ambassadeurs; en violet le peuple 12) Où se situe le peuple? 13) Quel message veut faire passer Napoléon à travers ce tableau? 12) Le peuple est pratiquement exclut du tableau 13) Ce tableau est une œuvre de propagande : Napoléon veut montrer sa supériorité vis-à-vis du peuple, du pape… Sa volonté de gouverner en souverain Il veut montrer également sa façon de gouverner, en s’appuyant sur sa famille, sur l’armée, sur l’administration (et non plus sur les nobles et le clergé comme sous la monarchie)
La famille de l’Empereur forme le premier cercle
Les membres de l’administration, dont Cambareces et Lebrun les deux anciens consuls
Les maréchaux d’empire auxquels Napoléon (militaire de carrière) apportent la gloire et la reconnaissance (la légion d’honneur)
Les religieux et dignitaires, placés derrière l’empereur, n’ont qu’un rôle symbolique de représentation
Le peuple est le grand absent du tableau dont il est quasiment exclu
Le sacre de Napoléon : l’affirmation d’ambitions territoriales 14)Comment Napoléon affirme t-il son ambition de dominer l’Europe ?
Le pape, dont le territoire est déjà sous l’emprise de Napoléon 6 1 3 La Famille de Napoléon 1 – Joseph Bonaparte, futur roi d’Espagne (1808) 2 – Louis Bonaparte, roi de Hollande depuis 1806 3 – Caroline Bonaparte épouse du maréchal Murat, future reine de Naples (1808) 4 - Pauline (future princesse Borghèse) et Elisa Bonaparte (future grande duchesse de Toscane) 5 – Hortense de Beauharnais, fille de l’impératrice et épouse de Louis, reine de Hollande 6 – Julie Clary, épouse de Joseph ; future reine d’Espagne (1808) 7 – Napoléon Charles Louis, fils d’Hortense et de Louis, futur Napoléon III 8 – Eugène de Beauharnais, fils de l’impératrice et vice roi du royaume d’Italie en 1805. NB : Jérôme Bonaparte, roi de Westphalie en 1807 Les ambassadeurs, dont la présence prouve la « soumission » des états à l’empereur Le pape, dont le territoire est déjà sous l’emprise de Napoléon 6 1 3 4 2 5 7 Murat, époux de Caroline, futur roi de Naples
CONCLUSION Le tableau de David est une œuvre de propagande : C’est une mise en scène et non la réalité historique Elle affirme les ambitions politiques de l’empereur (un retour à l’absolutisme : voir le retour de la censure dans les journaux, le livret ouvrier, etc) en contradiction avec le serment du sacre Elle présente une nouvelle façon de gouverner et une nouvelle élite (place de la famille, des maréchaux…) Elle révèle les ambitions territoriales de l’empereur, la domination de l’Europe (et en particulier du pape) G. BESSET, Collège Marcel Aymé, Dagneux (01)