Cas clinique 3 Module Infectieux
Un homme de 42 ans consulte pour une érosion du gland apparue il y a 8 jours. Il s’agit d’un patient sans antécédents particuliers qui ne prend aucun traitement. A l’examen vous observez une ulcération unique, superficielle, arrondie, de 5 mm de diamètre, à fond propre. Cette érosion est indurée sur les bords à la palpation. Il s’agit d’une ulcération non douloureuse. Il existe par ailleurs une adénopathie inguinale gauche inflammatoire. Cette ulcération est apparue 3 semaines après un rapport sexuel non protégé chez ce patient homosexuel. Le reste de l’examen clinique est normal.
Quel est le diagnostic le plus probable ?
Syphilis primaire
Quels examens complémentaires prescrivez vous pour confirmer le diagnostic et quels résultats sont attendus ?
Mise en évidence du tréponème pâle : - Microscopie à fond noir (nécessite cependant une grande expertise et nombreux faux négatifs) Sérologies de la syphilis Sérologies spécifiques : *TPHA se positive vers J7-J10 (JO=apparition du chancre) *FTA-abs se positive vers J5 J7 Sérologies non spécifiques : *VDRL se positive vers J10-J15 *RPR (Rapid plasma Reagin) : peu utilisé en France
Quels autres examens prescrivez vous ?
Examen 1er jet d’urine : recherche de C Examen 1er jet d’urine : recherche de C. Trachomatis (10 % de formes asymptomatiques chez l’homme) Examen endo urétral : recherche de gonocoque (sujet à risque même si absence d’urétrite) Sérologie VIH avec antigénémie p24 Sérologies hépatites B et C
Décrivez le traitement de cette affection en précisant les avantages et les inconvénients.
Rechercher et traiter le partenaire Benzathine pénicilline G (Extencilline) : 1 injection IM de 2,4 MUI dose unique Gardez le patient sous surveillance pendant 30 minutes Avoir un matériel d’urgence prêt en bon état. Avantages : Traitement minute immédiat : observance garantie Coût très bas Efficacité démontrée sur de grandes séries Passage en syphilis tertiaire exceptionnel Inconvénients : Injection douloureuse Risque d’allergie Rechercher et traiter le partenaire
Quelques heures après l’injection IM, le patient vous téléphone car il présente de la fièvre à 38°, une éruption morbilliforme du tronc et des membres, des céphalées modérées. Quelle peut être l’origine de ces symptômes ?
Il peut s’agir d’une réaction d’Herxheimer : fréquente en cas de syphilis précoce, le plus souvent sans gravité : aggravation des manifestations cliniques, fièvre, céphalées, éruption. Prévenir le patient et lui prescrire un antipyrétique Ne pas confondre avec une allergie aux bétalactamines Sujets à risque : petit enfant, femme enceinte
En cas d’allergie aux bétalactamines, quel traitement est possible ?
Doxycicline 100 mg X 2/j per os pendant 14 jours
Quelle surveillance après traitement instaurez vous ?
Surveillance clinique : Surveillance sérologique : Le chancre disparaît en 3-15 jours Surveillance sérologique : Dosage quantitatif du VDRL à 3 mois, 6 mois, 1 an puis tous les ans jusqu’à négativation : le titre doit être divisé par 4 (2 dilutions) à 3-6 mois et se négativer en un an (syp primaire) à deux ans (syp sec). Le TPHA se négative rarement (sauf chez VIH) et ne doit pas être utilisé pour surveiller une syphilis traitée.
Syphilis Rappels Les données Françaises 96 % : hommes 84 % : homosexuels ou bisexuels avec une prévalence de 2,38 % (0,27 % chez les hétéro) 65 % : moins de 40 ans 54 % : séropositivité pour le VIH Données comportementales : 75 % rapports avec d’autres sujets masculins dans les 3 mois qui ont précédé la syphilis 50 % ont déclaré des fellations non protégées
Agent en cause : Treponema pallidum Modes de contamination : transmission sexuelle transmission maternofoetale : à partir du 4è mois contamination professionnelle : envisageable que si l’examen du sujet syphilitique se fait à main nue
Syphilis primaire Chancre
Stade secondaire : «la grande simulatrice» Correspond à la dissémination bactériémique de la maladie Environ 1/3 des patients non traités au stade primaire développent des symptômes secondaires Les manifestations cutanées sont polymorphes
Les manifestations les plus fréquentes 1ère floraison : Roséole syphilitique 6 semaines après le chancre éruption disséminée composée d’éléments ponctiformes, roses pâles, peu visibles, asymptomatiques, qui régresse rapidement spontanément
2ème floraison : 3 à 6 mois après le chancre éruption papulo-squameuse disséminée avec atteinte palmo-plantaire
Syphilides : Lésions papuleuses Couleur cuivrée Fine desquamation circulaire périlésionnelle : collerette de Biett Visage, tronc Palmo-plantaires : aspect infiltré
Stade tertiaire : 10 % des syphilis non traitées Apparaît plusieurs années après le chancre Réaction immunologique autour des tréponèmes qui aboutit à la formation de «gommes» Les gommes peuvent toucher tous les organes : peau, muqueuses, aorte ( anévrisme et insuffisance aortique), système nerveux (paralysie générale, méningite)
Le diagnostic Le diagnostic repose sur l’interprétation des tests sérologiques Les sérologies syphilitiques : - sérologie spécifique : TPHA (Treponema Pallidum haemagglutination assay) sérologie non spécifique : VDRL (Venereal Diseases Research Laboratory) Le FTA (Fluorescent Treponemal Antibody) : réaction spécifique qui consiste à mettre en évidence des Ac contre le tréponème pâle.
TPHA : se positive autour du 8ème -10ème jour du chancre et atteint rapidement +++ En l’absence de traitement il restera +++ jusqu’à la fin de la vie En cas de traitement suivant l’année du chancre : le TPHA peut se négativer VDRL : se positive autour du 10ème (J10-J15) jour du chancre. Atteint un seuil max au stade secondaire (256 à 1024 U). FTA : se positive vers le 5ème jour du chancre et reste positif en l’absence de traitement
Traitement En cas de syphilis précoce (<1an) : - stade primaire, stade secondaire une seule injection IM d’Extencilline 2,4 MU en cas d’allergie à la pénicilline : doxycycline : 200 mg/j 15 jours
Syphilis tardive (> 1an): Discuter toujours l’indication ou non d’une ponction lombaire en raison de la crainte d’une neurosyphilis latente Examen neurologique soigneux Indications de la PL : signes neurologiques ou signes ophtalmologiques allergie à la pénicilline (l’alternative par les cyclines n’est pas autorisée) échec thérapeutique syphilis tertiaire extraneurologique en cas d’infection VIH pour certains auteurs
Si PL non indiquée ou normale : 3 injections IM d’extencilline 2,4 MU à une semaine d’intervalle Si PL + : 15 j de perfusion de pénicilline