Anesthésie pour césarienne Dr S. LAMMENS Anesthésie-Réanimation
Évolution des pratiques: enquêtes de périnatalité 1998 et 2003 Nombre de naissance 740 000 760 300 Age maternel < 30 ans 55,4% 52,1% <0,001 > 30 ans 44,5% 48% Grossesse multiple 1,6% 1 ,7% Césariennes 17,5% 20,2% Césarienne avant le début du travail 9,2% 12,5% Césarienne pendant le travail 8,3% 7,7% Anesthésie (% de femmes) Analgésie péridurale 58% 62,6% Rachianesthésie 8,5% 12,3% Anesthésie générale 2,6% 1,7% Aucune 29,5% 22,5%
Techniques anesthésiques pour la césarienne
Analyse de la littérature Anesthésie générale Délai induction-extraction le plus court Plus de complications maternelles Moins d’hypotension que l’ALR Retentissement sur le nourrisson : APGAR plus bas à 1 et 5 minutes vs ALR American society of anesthesiologists’ practice guidelines for Obstetric anesthesia: Update 2006 http://www.asahq.org/publicationsAndServices/OBguide.pdf
Analyse de la littérature Anesthésie Péridurale Délai induction-extraction le plus long Moins bonne qualité d’anesthésie que la rachi Rachi-anesthésie Délai induction-extraction plus court que la péri Péri-Rachi combinée Pas de données suffisantes pour comparer à la rachi American society of anesthesiologists’ practice guidelines for Obstetric anesthesia: Update 2006 http://www.asahq.org/publicationsAndServices/OBguide.pdf
Les recommandations de l’ASA Choix de la technique dépendant de : Facteurs de risque Choix de la patiente L’anesthésie générale « pourrait être » le meilleur choix dans les situations d’urgence. Pour la rachi, les aiguilles « pointe crayon » sont préférables American society of anesthesiologists’ practice guidelines for Obstetric anesthesia: Update 2006 http://www.asahq.org/publicationsAndServices/OBguide.pdf
La pratique Technique d’anesthésie utilisée pour la césarienne (Etats-Unis 2001, centres > 1500 accouchements) AG Péri Rachi Péri-Rachi césarienne programmée 3 22 67 8 urgence 15 36 45 4 Bucklin BA. Anesthesiology 2005;103:645-53
Anesthésie générale
Tsen LC. Int J Obstet Anest 1998;147-52 Anesthésie générale En France, moins de 5% des césariennes sous AG (20% en 1988) dont 40% en urgence Principales causes de l’AG sont : Contre-indication à l’ALR ou manque de temps : 86% refus de la parturiente: 3,5% échec de l’ALR Tsen LC. Int J Obstet Anest 1998;147-52
Mortalité liée à l’anesthésie: comparaison entre AG et ALR Nombre de morts maternelles par million d’AG ou ALR péri-partum Périodes AG ALR Risque relatif 1979-1984 20 8,6 2,3 1985-1990 32,3 1,9 16,7 1991-1996 16,8 2,5 6,7 4097 décès 129 directement attribuables 82% de césariennes 2,3 16,7 Hawkins JL. Anesthesiology. 1997;86:277-84. Hawkins JL. Clin Obstet Gynecol. 2003;46:679-87.
Une pratique à risque ! 1997000 accouchements, 425000 césariennes (21%) 120 décès sur 161 ont un rapport direct ou indirect avec l’anesthésie
Une pratique à risque ! 7 décès ont un rapport direct avec l’anesthésie (dont 1 survenu plusieurs années après) 4 AG pour césarienne 20 patientes pour lesquels la gestion anesthésique périopératoire a contribué au décès
Gestion des voies aériennes supérieures ! 6 décès sur les 7 imputés à l’anesthésie sont en rapport avec un problème intubation ventilation 3 intubations oesophagiennes 2 échecs d’intubation 1 inhalation 1 choc anaphylactique grade 4 (succinylcholine) A chaque fois, anesthésiste en formation ou inexpérimenté
Gestion des voies aériennes supérieures ! Intubation: 5 à 8 x plus difficile (Cou court, protrusion de la mâchoire, oedéme parois trachéales, macroglossie, hypertrophie mammaire) 1 intubation difficile sur 300 césariennes sous AG (vs 1/2000) (anesthésistes confirmés vs débutants) Lyons G. Anesthesia 1985;40:759-62 Diminution des césariennes sous AG (1981 : 83%; 1994 : 23%) de l’incidence de l’intubation impossible (1/1984 à 1/250) Hawthorne L. Br J Anaesth 1996;76:680-4. Problème de formation
Une pratique à risque ! Donc : Mais parfois inévitable ! L’anesthésie générale est la principale responsable des décès maternels au cours de l’accouchement ! Principale cause = intubation Suivie par Syndrome de Mendelson Mais parfois inévitable ! Une organisation rigoureuse permet de limiter les risques.
Organisation rigoureuse ! Prévention du syndrome de Mendelson Diminution de la motricité gastro-intestinale Augmentation du vol et de l’acidité du liquide gastrique Diminution du tonus du SIO Citrate de sodium + antiH2 Ormezzano X. Br J Anaesth. 1990;64:503-6. Induction Séquence Rapide
Compression aorto-cave Dailland P. « Anesthésie Obstétricale ». Éd Arnette 2003.
Organisation rigoureuse ! Préoxygénation SYSTEMATIQUE Diminution CRF (15-20%) Augmentation du volume de fermeture 3 à 5 minutes FiO2 100% ou 4 capacités vitales
Organisation rigoureuse ! Induction Thiopental 3-4 mg/kg ou propofol 2,5 mg/kg À priori, pas de différence pour le nouveau-né Gin T.Acta Anaesthesiol Sin. 1994;32:127-32. Succinylcholine 1,5 mg/kg
Organisation rigoureuse ! Entretien Morphiniques : après clampage du cordon Sauf si prééclampsie ou cardiopathie (pic hypertensif) Alfentanil 10 μg/kg Sauf rémifentanil !
Rémifentanil à l’induction Ngan Kee WD. Anesthesiology. 2006;104:14-20. 40 patientes Rémifentanil 1 μg/kg
Rémifentanil à l’induction Bouattour L. Ann Fr Anesth Reanim. 2007;26:299-304. 40 patientes Rémifentanil 0,5 μg/kg
Organisation rigoureuse ! Entretien Curares non dépolarisants Pas de passage de la barrière foeto-placentaire Oxygène / N2O ? Si souffrance fœtale, 100% FiO2 Sinon, N2O possible Hallogénés Sensibilité accrue durant la grossesse Diminution dose-dépendante de la contraction utérine
Algorithme décisionnel en cas de difficultés d’intubation Césarienne urgente Découverte après l’induction Maintien du Sellick et ventilation masque FI02 100% Ventilation efficace Oxygénation adéquate Ventilation inefficace Oxygénation inadéquate Souffrance foetale Souffrance foetale Masque laryngé et maintien du Sellick Ou Ventilation au masque Oxygénation OK Masque laryngé Oxygénation inefficace Extraction en urgence Abord trachéal direct
Anesthésie locorégionale
Rachianesthésie La technique de choix Aiguille de 27G (moins de 0.5% de céphalées post rachi) forte stimulation péritonéale → niveau sensitif supérieur anesthésique (la perte du toucher léger) doit atteindre T5 Injection intrathécale: Bupivacaîne hyperbare 0,5%= 10 à 12,5 mg Sufentanil 2,5 à 10 µg Morphine 100 µg Hypotension artérielle sévére non prévenue → ↓ débit utéroplacentaire avec hypoxémie foetale (si durée >4min) → trouble conscience, inhalation contenu gastrique
Rachianesthésie La technique de choix Inconvénients Efficacité : loi du tout ou rien Délai d’installation bref Bloc moteur complet Moins d’AL que péri. Inconvénients Hypotension maternelle Nausées-Vomissements Céphalées
Rachianesthésie : en pratique Bupivacaïne hyperbare 10 à 15 mg, durée d’action 90 min. Sufentanil 2,5 à 5 µg, durée d’action 2 à 5 heures. Morphine 100 à 200 µg, durée d’action 12 à 18 heures.
Rachianesthésie : en pratique Prévention de l’hypotension DLG Remplissage : 10 à 20 ml/kg Park GE. Anesth Analg. 1996;83:299-303
Rachianesthésie : en pratique Prévention de l’hypotension DLG Remplissage : 10 à 20 ml/kg Park GE. Anesth Analg. 1996;83:299-303 Vasopresseurs Ephédrine = le plus utilisé Mais retentissement sur la vascularisation utérine (pH ombilical plus faible) Phényléphrine
Rachianesthésie : prévention hypoTA éphédrine ou phényléphrine ? Cyna AM. Techniques for preventing hypotension during spinal anaesthesia for caesarean section. Cochrane Database Syst Rev. 2006 Oct 18;(4):CD002251.
Rachianesthésie : prévention hypoTA éphédrine ET phényléphrine Mercier FJ. Anesthesiology. 2001 Sep;95(3):668-74. 39 patientes Remplissage 15 ml/kg 2 groupes vasopresseurs Éphédrine 2mg/min + phényléphrine 10 μg/min Éphédrine 2 mg/min
Rachianesthésie : en pratique Prévention de l’hypotension : conclusion Éphédrine: Certain délai d’action Tachycardie supraventriculaire maternelle Passage transplacentaire important → acidémie foetale Lee A. Anest Analg 2002;94:920-6. Phénylephrine: évite : acidose fœtale, HTA et bradycardie maternelle mal tolérée (prudence: titration) aussi efficace que l’éphrédrine pour la correction tensionnelle Ngan Kee WD. Br J Anaesth 2004;92:469-74 plus puissante que l’éphédrine d’un facteur de 80 Saravanan S. Brit J Anesth 2006;96:95-6
Rachianesthésie : en pratique Prévention des céphalées Aiguilles 27 G, pointe crayon Halpern S. Anesthesiology. 1994;81:1376-83 Lambert DH. Reg Anesth. 1997;22:66-72
Anesthésie Péridurale 60% des parturientes bénéficient d’ une péridurale → Utilisation du cathéter en place AL utilisés lidocaîne 2% adrénalinée Le plus rapidement efficace (10 à 15 minutes), bloc moteur ++ 15-20 ml + Sufentanil 10 µg Ropivacaïne Lévobupivacaïne Passage transplacentaire des AL parfaitement toléré chez le fœtus à terme
Anesthésie Péridurale Morphiniques Sufentanil : 10 à 20 μg Morphine 2 à 4 mg Mais risque de dépression respiratoire retardée Reste discuté
Péri-rachi combinée Uniquement pour césarienne programmée, Avantage : indication: situation à risque hémodynamique (cardiopathie maternelle),durée de l’intervention inhabituellement longue Avantage : effet hémodynamique modeste, niveau supérieur du bloc contrôlable Inconvénient: installation moins rapide que la rachi, risque de brèche dure-merienne
Péri-rachi combinée : en pratique Induction de la rachianesthésie: Bupivacaine 0.5% hyperbare : 5mg Sufentanil 2.5-5µg Morphine 100µg Complement péridural: Dose-test de 3 ml lidocaine 2% adrénalinée Puis injection fractionnée de lidocaine 2% jusqu’à obtention du niveau anésthésique
Choix de la technique
Urgence extrême Semi urgence Césarienne Programmée Causes foetales : Procidence du cordon, Hématome rétro-placentaire Bradycardie fœtale prolongée Hypertonie utérine. Causes maternelles : Placenta praevia hémorragique Rupture utérine. Urgente ALR (rachianesthésie) Sauf si contre-indications Urgence extrême Semi urgence Délai décision-extraction < 10 minutes Délai décision-extraction > 10 minutes Anesthésie générale Rachianesthésie Extension de l’épidurale
Urgences différables : délai supérieur à 30 min Césarienne Urgences graves (non différables) : délai 10-15 min Causes foetales : Souffrance foetale aiguë Ralentissement du rythme cardiaque foetal avec récupération. Causes maternelles : Pré-rupture utérine Éclampsie. Causes mécaniques : Échec d’extraction instrumentale Présentation dystocique enclavée. Urgences différables : délai supérieur à 30 min Causes mécaniques : Arrêt de la dilatation pendant le travail Défaut d’engagement Échec de déclenchement Disproportion foeto-maternelle Causes maternelles Hypertension artérielle +/- équilibrée Entrée en travail d’une femme programmée pour césarienne Causes foetales : Souffrance foetale chronique Iso-immunisation rhésus. Programmée Urgente ALR (rachianesthésie) Sauf si contre-indications Urgence extrême Semi urgence Délai décision-extraction < 10 minutes Délai décision-extraction > 10 minutes Anesthésie générale Rachianesthésie Extension de l’épidurale
Prescriptions postopératoires
Analgésie Douleurs importantes 24 à 48 heures Si rachianesthésie : morphine Sinon : titration morphine Associer plusieurs classes d’antalgiques Paracétamol Néfopam ou tramadol AINS (kétoprofène) PCEA PCA…
Conclusion Anesthésie pour césarienne = pratique à risque Privilégier l’ALR (rachianesthésie = référence) Ne pas hésiter à faire une AG si urgence absolue Tamponner le contenu gastrique Une organisation rigoureuse diminue les risques de l’AG Chirurgie douloureuse Analgésie multimodale Ne pas oublier la thromboprophylaxie (conf de consensus)