4. Les politiques commerciales des pays en développement.

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Transcription de la présentation:

4. Les politiques commerciales des pays en développement

On peut distinguer 2 périodes : : rôle central aux politiques commerciales nationales - à partir de 1980 : « ouverture »

4.1. Politiques commerciales et stratégies d’industrialisation Les années 1950 à fin 1970 ont été marquées par les politiques volontaristes de croissance industrielle mises en œuvre par certains PED. Deux modèles émergent : -le modèle d’Industrialisation par Substitution d’Importations (ISI) -le modèle d’Industrialisation par Substitution ou Promotion d’Exportations (IPE) Dans les deux cas, un rôle central est donné à la politique commerciale.

Le modèle ISI (Amérique latine)  Objectif : construire une industrie nationale - en remplaçant progressivement les produits importés, satisfaisant la demande domestique, par une production locale ; - ensuite exporter

 Moyen : protection des secteurs jugés prioritaires suivant l’argument de la « protection de l’industrie naissante » ou « protectionnisme éducateur »  il faut isoler temporairement l’industrie naissante de la concurrence internationale jusqu’au moment où ses coûts de production seront comparables.

Rappel : plus que le taux nominal de protection, c’est le taux effectif de protection qui importe (= proportion dans laquelle la valeur ajoutée sectorielle augmente grâce à la structure tarifaire)

 Résultat : L’échec, souvent avancé de cette stratégie est expliqué par les éléments suivants : -système complexe (mélange de systèmes de droits de douane, licences d’importation et de taux de change multiple pour faciliter les importations « prioritaires » et décourager les autres), - difficile à gérer par des institutions publiques faibles

 source de corruption, de rentes, d’inefficacité, de gaspillage  coûts élevés  impossibilité de construire une industrie efficace, compétitive car biais anti-exportation Remarque : La politique commerciale ne fait pas la politique industrielle  problèmes des choix des investissements et de leur financement (endettement)

Le modèle IS/PE (Asie orientale)  Objectif : industrialisation par intégration à l’espace industriel mondial / exportations.

 Moyen : Dans ce cas, la politique commerciale ne doit introduire aucun biais anti-exportation, mais au contraire soutenir les exportations  ensemble de mesures pour soutenir la compétitivité d’une industrie nationale, puisqu’il s’agit de soutenir l’industrialisation par insertion au marché industriel mondial.

 Résultat : Généralement reconnu positif. Deux remarques : (1) Nécessité de la prudence dans l’appréciation de cette stratégie, en particulier en suivant le parcours des pays d’Asie de l’Est : - politique commerciale active : protection pour les secteurs pas encore prêts à affronter la concurrence internationale et promotion pour les secteurs capables d’exporter.

- Stratégie des entreprises intégrée à une politique économique  institutions fortes. L’ironie du consensus actuel sur la libéralisation du commerce est qu’il cite l’Asie de l’Est comme l’exemple des vertus de l’ouverture et du libéralisme ; pourtant ces pays apparaissent fondamentalement comme peu ouverts et interventionnistes.

(2) Beaucoup de PED exportateurs de produits manufacturés le sont par l’implantation de firmes étrangères  leur politique commerciale est alors largement dictée par les impératifs de l’internationalisation de la production de ces groupes étrangers, qui n’a pas toujours à voir avec une réelle industrialisation du pays.

4.2. Une libéralisation commerciale à « marche forcée » pour certains PED Remarque : Depuis le début des années 1980 on observe deux mouvements contradictoires : - les pays industrialisés pratiquent un protectionnisme plus ou moins déguisé vis à vis des PED qu’ils accusent souvent de « concurrence déloyale ».

-de nombreux PED ont été obligés de libéraliser leur commerce extérieur (démembrement des barrières douanières, dissolution des offices publics de commercialisation des exportations), dans le cadre de la conditionnalité des prêts du FMI et de la BM. Seuls certains pays d’Asie de l’Est et du Sud-est ont pu appliquer une approche sélective et graduelle de la libéralisation.

Libéralisation commerciale / ouverture aux importations Depuis 1980, la libéralisation accélérée et généralisée des importations par de nombreux PED n’a pas été réalisée dans le contexte de négociations multilatérales, mais dans le cadre de la conditionnalité des programmes d’assistance financière des OFI.

Suite aux recommandations des OFI, à la fin des années 1990, les tarifs douaniers ont diminué environ de moitié par rapport à 1980 en Amérique latine, Afrique, ou dans certains pays d’Asie. La fréquence de mise en œuvre de barrières non tarifaires a également fortement diminué dans la plupart des régions en développement.

Fait remarquable : de nombreux PED parmi les plus pauvres (Haïti) sont beaucoup plus ouverts que les grandes puissances industrielles, et cette ouverture s’est parfois effectuée à une vitesse étonnante ; pour quels résultats ? ? -augmentation des importations -déstructuration des activités traditionnelles, bouleversements des modes de production et de consommation, aggravation de la pauvreté et des inégalités -mesures commerciales inégales : un système, deux règles.

Ouverture / croissance / réduction de la pauvreté ? Les gains associés au libre échange sont traditionnellement soulignés par les analyses du commerce international ; ils sont généralement supposés exprimer une plus grande efficacité économique porteuse de croissance ; elle-même vecteur central de la réduction de la pauvreté.

Or : -la libéralisation commerciale n’est pas en soi source de croissance, ni de réduction de la pauvreté ; cela dépend des structures économiques et sociales. -la libéralisation commerciale peut augmenter les inégalités et la pauvreté.

 La libéralisation des importations de produits agricoles Dans de nombreux pays, la libéralisation rapide des importations de produits agricoles (subventionnés dans leur pays d’origine) précipite la chute des prix (favorable à certains consommateurs) et donc la disparition des petits producteurs  des pays autosuffisants en production alimentaire deviennent importateurs  dépendance + problème de devises pour financer ces importations..

Exemples : - Haïti En 1995, le FMI a forcé Haïti à réduire ses tarifs douaniers sur le riz de 35% à 3%, entraînant une augmentation des importations de plus de 150% entre 1994 et Aujourd’hui, les trois quarts du riz consommés en Haïti viennent des Etats-Unis. D’un coté, une partie de la population urbaine a bénéficié d’un riz meilleur marché De l’autre, les petits producteurs locaux, incapables de rivaliser avec les importations à bas prix ont été exclus des marchés locaux  perte de revenu  les plus fortes concentrations de pauvreté et de malnutrition se trouvent dans les régions rizicoles.

- Ghana, Les pressions exercées par la Banque mondiale et le FMI afin d’encourager une déréglementation ont causé une hausse des importations de riz. Cela a incité le parlement à approuver en 2003 une majoration des prix de soutien pour le riz local. Mais le FMI fit pression sur le gouvernement pour qu’il revienne sur son engagement.

- Pérou Dès le début des années 1990, un programme de libéralisation des importations agricoles est mis en place  les importations de blé ont été multipliées par deux. Or les importations de blé, accroissent la concurrence des prix à laquelle sont confrontés les petits agriculteurs qui produisent des aliments traditionnels  modification des habitudes de consommation  déstructuration et marginalisation de l’agriculture traditionnelle. L’ouverture aux importations bouleverse des institutions déjà fragiles …

 La libéralisation des importations dans l’industrie Encore une fois, de grandes différences entre pays et entre secteurs. Dans beaucoup de cas, les secteurs faisant appel à une main d’œuvre abondante étaient très protégés  la libéralisation conduit à réduire ces emplois non qualifiés, à réduire les salaires, alors que la création d’emploi, les possibilités d’exportation se concentrent dans des secteurs requérant de hautes compétences.

Exemple de l’Inde (après 1991). Entre 1991 et 1994, les tarifs moyens sur les importations sont passés de 125% à 50%. L’industrie textile a été un des secteurs les plus affectés. Entre 1994 et 1996, nombreuses fermetures de filatures  suppressions d’emplois  détérioration des conditions de travail… Dans le même temps essor des secteurs de nouvelles technologies employant une main d’œuvre qualifiée, voire très qualifiée IDE). Les gagnants ne compensent pas les perdants.

Si la protection vis à vis des importations ou des entraves aux exportations peuvent engendrer de fortes inefficacités sources de blocage de croissance et de développement, une libéralisation commerciale rapide et brutale, qui ne serait pas intégrée au sein d’une politique nationale plus vaste risque d’être dévastatrice pour les personnes et les secteurs les plus fragiles des économies en développement.

Exemple du Mexique / ALENA : - la libéralisation du commerce n’assure pas en soi la croissance - le Mexique souffre du manque d’investissement effectué dans l’éducation, la formation, les infrastructures, l’innovation + des institutions faibles exposées à la corruption - l’ALENA n’est pas vraiment un « accord » de libre échange puisque, en particulier dans l’agriculture, les Etats Unis ont maintenu leurs subventions et, par ailleurs, ils ont maintenu un certain nombre de BNT empêchant les produits « mexicains » d’entrer sur leur territoire.

Effets budgétaires L’ouverture brutale projette des économies fragiles et peu structurées dans la concurrence internationale. Alors que dans le même temps, la baisse des droits de douane prive l’Etat de ressources et donc affecte la capacité des gouvernements à financer les dépenses publiques et à fournir des services indispensables.

Or, dans certains pays, les recettes douanières représentent un pourcentage important des revenus de l’Etat

La libéralisation du commerce exigerait que les PED changent radicalement la structure de leur système fiscal pour trouver d’autres sources de revenus ; problème : lesquelles ? Exemples de plusieurs pays d’ASS qui, au début des années 1980 ont mis en œuvre une réduction des droits de douane. Cette perte des recettes douanières sans contrepartie, ni d’autres recettes fiscales, ni surtout de gain de croissance, a abouti à de très dures conséquences budgétaires. Pour redresser les comptes publics, la réduction des droits de douane a été abandonnée et l’ouverture remise à plus tard.