Carême... Mercredi des Cendres... Cette période de quarante jours, qui doit nous acheminer jusqu’à la jubilation de Pâques, s’ouvre pourtant sur un rappel qui peut sembler morbide : « souviens-toi que tu es poussière et que tu retourneras en poussière ». Mais cette formule a été remplacée par une autre : « Convertissez-vous et croyez à l’Évangile ». La première formule semble vouloir nous ancrer dans le pessimisme, la deuxième semble nous lancer vers l’action. Et pourtant, sont-elles si différentes ?

« Souviens-toi que tu es poussière et que tu retourneras en poussière ». Sans en avoir l’air, l’important de cette formule est le verbe « être ». Ce qui compte aux yeux de Dieu, c’est ce que nous sommes, non ce que nous avons. C’est ce que nous dit Jésus tout au long de l’Évangile : « tu ne peux servir deux maîtres à la fois » « là où est ton trésor, là aussi est ton cœur ». Où, pour prendre la scène du jugement dernier, Dieu ne demande pas : « que possédez-vous ? » mais « Êtes-vous généreux ? Savez-vous aimer ? Partager ? Êtes-vous compatissant ? »

Ces deux formules nous présentent, en fait, deux aspects de la même exigence : souviens- toi, n’oublie jamais que tu es créature de Dieu, qu’il a façonnée dans son amour. Et montre- toi digne – autant que faire se peut ! – de cet amour. « Convertissez-vous et croyez à l’Évangile ». Nous convertir, nous retourner... C’est chaque jour que nous avons à le faire. Ce temps béni de carême nous est donné pour nous le rappeler et nous y aider.

Je ne suis pas exégète. Je parle juste avec mon cœur. Mais je crois que ce geste même de l’imposition des cendres n’a d’autre but que de nous unir en communauté : tous issus de la même poussière, du limon de la terre, donc tous frères, tous appelés à nous aimer et à nous servir mutuellement, à faire route ensemble... « Souviens-toi... Souviens-toi que nous sommes tous enfants du même Dieu, qui aime du même amour chacune et chacun de nous. Qui ou quoi que nous soyons, nous sommes tous égaux dans son cœur...

Nous ne sommes qu’un peu de poussière, amenés à la vie par beaucoup d’amour. Chaque naissance est une nouvelle création. Chaque naissance est de la part de Dieu un acte de foi et d’espérance en l’humanité. Il y a tout cela dans chacune de ces deux formules, quelle que soit celle que l’on choisit de creuser. Toutes deux nous demandent de profiter de ce carême pour intensifier notre connaissance personnelle, notre rapport aimant avec Dieu. Donc avec ses enfants !

Arrivée à ce point, je vous invite à regarder - discrètement ! - un couple d’amoureux : voyez cette lumière dans leurs yeux, cette joie sur leur visage, ces mains qui se cherchent et se frôlent... Regardez une maman avec son bébé : c’est la même lumière dans ses yeux, la même joie sur son visage, les mêmes mains caressantes... Nous disons que nous aimons Dieu. Est-ce que cela se voit, dans nos yeux, dans notre visage, dans nos mains qui se joignent ou s’élèvent ? Est-ce que cela fait chanter notre vie ?

Mais oui, chanter notre vie ! Nous sommes aimés comme nous sommes, nous sommes compris et pardonnés quoi que nous fassions. Alors, comment ne pas sentir la joie gonfler en nous ? Elle est tantôt calme et sereine comme une source qui gazouille sous les mousses, tantôt impétueuse comme une cascade... Elle fait chanter notre vie. elle est là pour que nous la partagions...

Triste, le carême ? « Quand tu jeûnes, ne te fais pas un visage triste... « Cela voudrait dire, d’abord, que le jeûne n’est plus acte d’amour, mais acte d’obligation ! Quelle horreur ! Et puis... Quel jeûne ? Que veut dire jeûner, à notre époque ? Si nous prenions une résolution originale, pour ce carême ? Par exemple : ne pas laisser une critique passer nos lèvres... ou sourire à ces personnes particulièrement irascibles... ou garder ma bonne humeur dans les relations familiales... À chacune, chacun, de trouver son « jeûne ».

Le principal, c’est de se convertir... C’est-à- dire retourner notre cœur, l’ouvrir à la joie, à l’amour : l’amour de Dieu, l’amour de tous nos frères... Et ne pas oublier les deux principales caractéristiques de l’amour : - l’amour est joyeux, - l’amour est contagieux. Si nous sommes tristes, si les gens autour de nous sont moroses, nous avons intérêt à réexaminer attentivement la qualité de ce que nous appelons « notre amour » !!!

Alors, même si je suis un peu en retard, je vous souhaite un bon, un joyeux carême !!!

Images trouvées sur le Net. Texte : Jacky Musique : Ernesto Cortazar – Leaves in the Wind Diaporama de Jacky Questel, ambassadrice de la Paix