Je vous transmets ci-après des extraits d’une homélie de Monseigneur Lustiger, lors de la fête du Bon Berger. Il voudrait nous faire toucher du doigt que le déclin de l’église est de notre responsabilité à chacun de nous, et qu’il est vain d’en rejeter la faute sur les institutions. C’est nous qui devons changer !
La véritable crise chrétienne est d’abord la crise d’un peuple, ou d’un moment de l’histoire d’un peuple, d’une culture, ou d’un moment d’une culture, en train de devenir païens. Beaucoup de ceux qui portent le nom de chrétiens sont en fait des païens. Je n’accuse pas, je constate.
Il faut bien savoir par quelle éducation, quelle longue conversion du cœur, de l’esprit, de l’intelligence, des hommes et des femmes découvrent que leur existence prend sens uniquement parce que Dieu existe, que leur dignité vient de Dieu lui-même, et qu’ils doivent agir pour rendre gloire à Dieu. Car la vie humaine ne trouve sa plénitude qu’en recevant les commandements de Dieu, la loi de la vie.
Autrement dit, l’Apôtre Pierre (A.des Apôtres 4, 8-12) ne pourrait tenir aux parisiens d’aujourd’hui le discours qu’il adresse aux juifs de Jérusalem, car ses auditeurs sont incommensurablement plus fondés sur la foi au Dieu unique et véritable que ne le sont nos contemporains.
Nous sommes soumis aujourd’hui à l’épreuve d’un paganisme à l’œuvre dans les consciences de ceux qui furent ou sont chrétiens, mais pour qui Dieu demeure une question au lieu de structurer toute leur vie, de lui donner un sens. Et la phrase de Saint Jean affronté au paganisme de l’antiquité (voilà pourquoi le monde ne peut pas nous connaître) vaut peut-être aussi pour notre monde.
Les enfants de Dieu qui naîtront de la puissance de notre Père des Cieux vont connaître une épreuve de fidélité et de foi qui révèle exactement la nature de la crise dans laquelle nous sommes entrés. Non une crise de l’Eglise, non une crise du clergé, non une crise de l’institution ; ceux qui le pensent se trompent. Car nous sommes devant une crise de foi d’un peuple; Ce qui veut dire que la première vertu demandée au peuple chrétien, c’est la foi.
La foi, non comme une conviction que l’on affiche, mais comme un acte qui transforme le cœur, la liberté, l’intelligence, et qui suppose que le croyant accepte d’être délivré de son incroyance.
La foi, non comme une certitude tranquille et acquise, à linstar des patrimoines culturels, mais la foi comme un combat, qui, telle une épreuve purificatrice et rédemptrice, vous oblige à vous convertir, à »vous retourner ».
Il ne s’agit pas de penser comme on vous a dit de penser, ou comme on a pensé jadis, mais d’entrer dans le mystère du Christ, le mystère même de la rédemption, acceptant que cette foi en Jésus Messie nous juge et nous délivre, mesure notre péché et en même temps nous apporte la lumière libératrice.
La question fondamentale n’est pas de savoir si nous pouvons indexer la croissance ou la décroissance de l’église ; mais de voir, peuple de croyants, dans quelle épreuve nous sommes plongés, avec les hommes qui nous entourent. Épreuve dont l’enjeu est le salut d’une génération, d’une culture, d’un peuple.
Je dis bien : salut, au sens le plus fort du mot ; car notre monde va à sa perte, non d’abord humaine mais éternelle. C’est le sens de la vie qui est en jeu, notre vraie dignité, notre rapport à Dieu. Chacun de nous est obligé de se poser sérieusement la question.
En effet, si la grâce nous est faite, à nous de connaître Dieu, nous devons écouter la voix de l’unique Berger, le Christ. Le signe que nous sommes vraiment les brebis du Christ, c’est que » nous le connaissons comme il nous connaît et que nous écoutons sa voix », trait rarement souligné.
Dans la parabole, le Christ attire notre attention sur le mercenaire : celui qui ne délivre pas, car il ne peut donner sa vie. Arrive l’épreuve, le loup qui s’empare des brebis, et le mercenaire s’en va parce qu’il veut sauver sa vie, et non celle des brebis.
Mesurons-le à nouveau. Dire que la vraie nature de notre combat spirituel est l’épreuve du refus de Dieu, de l’absence de Dieu, de l’ignorance de Dieu,(ils ne connaissent pas Dieu, dit Saint Jean), c’est découvrir l’ampleur, la profondeur, l’urgence de la mission confiée aux chrétiens : délivrer les hommes de la cécité spirituelle et de ce qu’elle entraîne.
En effet, ne pas connaître Dieu, c’est être prisonnier de la mort, n’être pas soi-même, être exilé. C’est ne plus trouver goût au monde ni aux hommes, ne pas savoir ce qu’est la fraternité humaine ni la vraie destinée de l’homme.
Extraits d’une homélie de Monseigneur Lustiger, cardinal. Musique : Bach – Agnus Dei Diaporama de Jacky Questel, ambassadrice de la Paix