L’expertise en responsabilité médicale en neurochirurgie Professeur Daniel Le Gars Amiens
Qu’est ce qu’une expertise? Acte médical et technique au service de la justice Ce n’est pas un jugement ni une condamnation
Qu’est-ce qu’un expert? Un médecin ayant de l’expérience dans son domaine de compétence Un médecin ayant suivi une formation juridique
Responsabilité médicale Evolution de la responsabilité: on est passé d’intouchable à un excès à l’américaine mais stabilisation des procédures (CCI: 2100/an) Le virage de 2002: la loi Kouchner -avant, basée sur la faute, preuve incombant au malade Après: -communication du dossier au patient -création CNAMed, C(R)CI et ONIAM -reconnaissance aléa: accident médical non fautif -harmonisation de la prescription: 10 ans à compter de la consolidation
Responsabilité médicale: devant quelle juridiction? Règlement à l’amiable: assurances (règlement en 11 mois) Juridiction ordinale: manque à la déontologie CCI: commission conciliation et d’indemnisation (règlement 1 an et 7 mois) Juridiction civil: libéral, nominatif Juridiction administrative: hospitalier, établissement (Règlement 3 ans et 6 mois) Juridiction pénale
La CCI (Commission de Conciliation et d’Indemnisation) Saisie simple et pas de frais (avocat, conseil) Dossiers triés avant expertise: 1/3 rejetés Recevabilité (1/3): DFP 24% Arrêt activité professionnelle>6 mois continu ou 6 mois discontinu sur 12 Atteinte grave vie quotidienne DFT 50% pendant Rapidité Expertise: seul ou collège d’experts, délocalisée Payeurs: ONIAM ou Assureurs (faute) Autres procédures possibles parallèlement
L’expertise: l’éviter! Rigueur dans son activité professionnelle (on revoit parfois les mêmes en expertise!) Tenu du dossier impeccable: traçabilité donc écrits Information « éclairée »: Résultat prévisible (« courir comme un lapin ») Risques complications…sans créer l’angoisse Les preuves de l’information Formulaire? Dessins Lettre devant et au malade Délai de réflexion Suivi, disponibilité et information…surtout s’il y a des problèmes: l’omerta et la fuite font le lit du contentieux!
On n’a pas pu l’éviter: faire face Être disponible même si c’est désagréable… Préparer le dossier: un dossier mal préparé indispose l’expert et le faire parvenir à l’expert L’expert, lui, a préparé le dossier… Être à l’écoute et à la disposition de son administration et/ou de son assurance et de ses conseils Être représenté (ou mieux être soi-même présent à l’expertise) Bien se comporter à l’expertise: parler peu , faire preuve de compréhension vis à vis de la « victime » (qui elle est parfois agressive!)
La séance d’expertise Oblige à se déplacer (délocalisation) Prend du temps (rarement inférieur à 2h) Revoir le malade et/ou sa famille: moment désagréable… Contradictoire donc du monde On refait l’histoire, on analyse les pièces (dossier médical, dossier infirmier, radios+++, etc.), donc dossier volumineux Un bon expert a préparé l’expertise Souvent expertise collégiale (2 experts) Discussion et argumentation avant la prise de décision
Le rapport d’expertise Un vrai travail se rapprochant d’un article médical par son volume et la rigueur du raisonnement Donner des statistiques et des références bibliographiques Répondre précisément et clairement aux questions de la mission (mission type): faute?, Aléa?, infection nosocomiale?, consolidation?, DFT?; DFP? On est souvent relancé par la CCI pour préciser certains points
Après l’expertise Pas de pré-rapport en CCI Pas de dires en CCI (observations pendant l’expertise) Passage en CCI: être représenté, parfois présence utile mais moins qu’en expertise Jugement: intérêt d’en connaître le résultat et de lire le rapport (pédagogie) L’ONIAM (devenu un payeur regardant!) Parfois poursuite dans les autres juridictions (TA, Civil) si la CCI n’a pas réglé le problème: le rapport de la CCI est toujours au dossier pour l’autre juridiction
Expertises en responsabilité médicale en CCI (5 ans:2011/2015) 2011-2015 56 expertises: 34 rachis 19 crâne 3 atteintes NP après anesthésie Pendant le même temps: 2 expertises au TA: 1 rachis opéré et 1 retard prise en charge thrombose du tronc basilaire. Pas de faute 0 au civil
Les grands motifs de mise en cause (1) Rachis et chirurgie du rachis (34): 10 mauvais résultats fonctionnels: état antérieur 8 infections du site opératoire (nosocomial) 6 déficits post-opératoires (aléas) 3 complications générales et/ou anesthésiques per ou post chirurgie rachidienne 3 infections rachidiennes primitives 2 hématomes épiduraux (perte de chance) 1 fracture vertébrale non diagnostiquée 1 fuite LCR avec conséquences encéphaliques 4 décès: Épidurite infectieuse primitive(50% perte chance sur le décès) Arrêt cardiaque per-arthrodèse lombaire embolie gazeuse. Aléa Hémorragie sur ponction de spondylodiscite primitive. Aléa Sondylodiscite post-op: anévrysme mycotique aortique. Nosocomial
Les grands motifs de mise en cause (2) Crâne (19) 11 avec un problème neurochirurgical (3DCD) 1 problème radiologie interventionnelle vasculaire 7 non directement neurochirurgical: 3 traumatisme crânien DCD/ sujets âgés 4 AVC (3 problème antico). Evolution de l’état antérieur sauf 1 (10% de perte de chance pour retard diagnostic). 1 DCD
Les grands motifs de mise en cause (3) Crâne (19) 11 problèmes NC Retard diagnostic tumeur cérébrale: 1(DCD) Mauvais résultat tumeur cérébrale opérée: 4 (2 DCD) Déficit post-chirurgie fonctionnelle: 2 Infection DVE: 2 (1 chirurgie MAV, DCD, 1 sur tumeur fosse post) Problème d’hydrocéphalie et de valve: 2
Retard diagnostic tumeur cérébrale: 1 (DCD) Retenu: perte de chance de 80% Mis en cause: -2 MG: mis hors de cause -un CH non universitaire: ¾ de la responsabilité -un CHU: ¼ de la responsabilité
Mauvais résultat tumeur cérébrale opéré 4 (2 DCD) -une tumeur pinéale: DCD post-op immédiat. Aléa -une tumeur orbitaire: cécité post-opératoire. Faute -un médulloblastome de l’adulte, forme hémorragique: DCD. Evolution prévisible de la pathologie. -un kyste épidermoïde de l’incisure tentorielle: évolution prévisible de la pathologie.
Déficit post-chirurgie fonctionnelle: 2 Surdité et paralysie faciale après chirurgie conllit artère-nerf: aléa Hématome sur pose électrode Parkinson: aléa
Infection nosocomiale: 2 DVE DVE sur MAV ayant saigné, opéré et embolisé: DCD: tout mis sur le compte du nosocomial DVE sur tumeur de la fosse postérieur: 1/3 aléa (séquelles post-op) 2/3 infection nosocomial
Problème d’hydrocéphalie et de valve: 2 Problème complexe et à rechute sur plusieurs années: hydrocéphalie post-TR, chiari, syringomyélie. Multiples interventions. Plusieurs CHU différents. Etat antérieur retenu Retard au diagnostic d’une hydrocéphalie: perte de chance de 50%: 40% radiologue libéral 10% CHU urgences
Un problème de radiologie interventionnelle vasculaire Embolisation d’un anévrysme d’hyper-débit sur MAV de découverte fortuite Rupture per-procédure Infarctus malin, coma, hémiplégie gauche Craniectomie décompressive Aléa
7 non directement neurochirurgical: 3 traumatisme crânien DCD/ sujets âgés: évolution de l’état antérieur 4 AVC (3 problème antico dont un HIC opéré à J15). Evolution de l’état antérieur sauf 1 DCD (10% de perte de chance pour retard diagnostic)
Etre expert un jour? Passer de l’autre coté de la barrière (et parfois être des 2 cotés) Se former: DU, DIU Commencer par des choses simples: expertise SS, TASS CCI: formation par la CNAMed Se faire inscrire sur les listes d’experts…mais on peut être désigné sans y figurer Fait partie du rôle social du médecin