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Marc Lavoie Université d’Ottawa
Les apports de l’approche stock-flux à l’analyse post-keynésienne (ou les apports de l’analyse post-keynésienne à l’approche stock-flux Marc Lavoie Université d’Ottawa
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Préliminaires “ I have found out what economics is; it is the science of confusing stocks with flows ” J’ai découvert ce qu’est l’économie; c’est la science qui confond les stocks et les flux Déclaration verbale, attribuée à Michal Kalecki (circa 1936), telle que relevée par Joan Robinson (1982).
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Origines: Cohérence stock-flux
Deux écoles de pensée liant explicitement stocks et flux: Godley et Cripps (1982) à Cambridge, Cambridge Economic Policy Group, New Cambridge school (années 1970). Auquel on peut rajouter Lance Taylor à la New School University, SAM, 2004 Tobin (1982) et ses associés à Yale, the ‘pitfalls approach’ (1969) L’école de New Haven Auquel on peut ajouter le PK Tom Palley
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Un cadre comptable cohérent (comme l’aurait voulu Denizet)
Matrice des bilans Théorie du portefeuille Contrainte de richesse Contraintes d’addition Matrice des transactions (emplois, ressources) Flux des dépenses et revenus, incluant les paiements d’intérêt Flux d’acquisition des actifs (financiers) Contrainte de budget Intégration, bilan en t /transactions/ bilan en t+1
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Idées générales Tobin (1982, Nobel Lecture)
Les modèles macroéconomiques doivent suivre la trajectoire des stocks; Les modèles devraient avoir plusieurs actifs et taux de rendement; Les modèles doivent inclure les opérations financières et monétaires; Les modèles doivent inclure les contraintes sectorielles de budget, ainsi que les contraintes d’addition dans les équations de portefeuille.
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Autres caractéristiques clés
Il ne peut y avoir de trous noirs (Godley). Tout flux doit aller et provenir de quelque part (Godley). Il y a une dynamique intrinsèque, qui intègre la comptabilité stocks-flux (Turnovsky 1977). Il y a une dynamique temporelle, pour éviter que le temps ne se télescope (Hicks, 1965).
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Restrictions comptables SFC (Taylor 2004)
Les flux sectoriels sont liés entre eux Les flux donnent naissance aux changements dans les stocks Ces restrictions comptables réduisent le nombre de degrés de liberté macroéconomique, par exemple: tous les pays ne peuvent être en surplus de balance de paiement; la somme du déficit gouvernmental et du déficit du compte courant est nécessairement égale à l’épargne privée nette de l’investissement
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Le cadre cohérent contraint les résultats possibles
Ce cadre comptable et les restrictions qu’imposent la cohérence stocks-flux “retirent plusieurs degrés de liberté aux configurations possibles des structures de paiement au niveau macroéconomique, rendant ainsi soluble la tâche de construire des théories permettant de ‘clore’ les relations comptables sous la forme de modèles complets”. (Taylor 2004) “The fact that money stocks and flows must satisfy accounting identities in individual budgets and in an economy as a whole provides a fundamental law of macroeconomics analogous to the principle of conservation of energy in physics” (Godley and Cripps 1983).
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Origines causales de l’approche SFC
Pour ce qui est de Tobin et surtout Godley, l’approche SFC est la réponse keynésienne aux avancées du monétarisme et aux critiques des monétaristes à l’encontre des théories keynésiennes, à savoir le rôle passif de la monnaie et des agrégats financiers en général. C’est aussi la réaction des post-keynésiens américains (Davidson, Minsky) face aux théories keynésiennes et aux modèles de croissance post-keynésiens des années 1950 et 1960. En sus, Godley, dans des années de forts taux d’inflation, veut un modèle qui intègre l’inflation,tant sur les stocks que sur les flux, de façon cohérente.
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Autres antécédents PK Dans le passé, plusieurs auteurs PK ont attaché beaucoup d’importance à la cohérence stock-flux, notamment: Peter Skott (1989) Alfred Eichner (1987) Paul Davidson (1968, 1972) Hyman P. Minsky (1972, 1986)
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Eichner 1987 Dans son manuel, publié de façon posthume, Eichner, qui est pourtant surtout connu pour ses travaux sur la théorie des prix, consacre plus d’une centaine de pages à la création monétaire, la création de prêts, les opérations de la banque centrale, à partir d’une approche fondée sur les variations de bilans. Eichner est l’un des premiers, en 1985, à comprendre que les interventions des banques centrales sont avant tout « défensives ». Elles ont pour objectif de compenser les flux de paiements entre la banque centrale et le secteur bancaire: “Les achats et les ventes des titres du gouvernement ont pour objectif principal de compenser les flux entrants et sortants du système financier et monétaire national.” Eichner 1987 Eichner se réfère aux travaux de Godley et Cripps (1983) et de Copeland (1949).
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Copeland 1949 Morris A. Copeland est le créateur aux USA des comptes de flux financiers (les flow of funds). Copeland était un institutionaliste américain, selon qui la Théorie générale de Keynes était une modification de la théorie néoclassique et non son abandon. Copeland était persuadé que la comptabilité des flux financiers était incompatible avec la théorie quantitative, et donc avec les doctrines mises de l’avant par le mainstream.
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Davidson 1968, 1972 Davidson (1968) remarque que Tobin (1965):
n’a pas de fonction d’investissement indépendante; et que son choix de portfeuille porte sur la monnaie et des actifs réels, plutôt que sur la monnaie et des actifs financiers Il propose une théorie « q » de l’investissement, avant Tobin, basée sur la distinction stocks/flux
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Minsky (1972, 1986) Toute l’œuvre de Minsky, notamment sa thèse de la fragilité financière, est construite autour de la compatibilité ou l’incompatibilité entre les flux de revenus et les flux de paiements (les « cash flows ») sur les stocks d’actifs et de dettes. Minsky est aussi bien conscient des interrelations entre les bilans et les opérations des différents secteurs, notamment le principe de Copeland selon lequel toute transaction requiert quatre entrées. Minsky voit son interprétation de la théorie keynésienne comme une « théorie de la détermination des contraintes budgétaires effectives », comme le rappelle Mouakil (2006). On a donc là tous les éléments d’une approche macroéconomique SFC
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Les apports SFC à la théorie PK
Formalisation cohérente des intuitions de Minsky Formalisation cohérente du marché boursier Introduction systématique de normes stock-flux Intégration du réel et du financier Intégration de la monnaie comme flux (théorie du circuit) et comme stock (Keynes, choix de portefeuille) SFC donne un sens au temps historique de Joan Robinson
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Minsky et la bourse La modélisation SFC a donné lieu à une série de modèles intégrant les marchés boursiers et testant l’hypothèse de la fragilité financière de Minsky, notamment à partir du modèle Lavoie/Godley : Taylor 2004, Mouakil 2006 et 2008, Van Treek 2007, Skott et Ryoo 2007 Certains de ces modèles intègrent non seulement l’endettement des entreprises, mais aussi l’endettement des ménages (un sujet d’actualité) dans un cadre SFC (notamment Van Treek 2007 et Zezza 2007, et aussi Godley et Lavoie 2007, ch. 11). Il faudrait aussi des modèles qui tiennent compte des actifs financiers des entreprises En général, les résultats permettent de relativiser l’importance de l’hypothèse de la fragilité, montrant qu’elle est vérifiée sous certaines conditions seulement.
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L’intégration du réel et du monétaire
Thème depuis toujours préoccupant pour les hétérodoxes, pour qui l’économie est une analyse monétaire dans laquelle à la fois les facteurs réels et monétaires ont un impact à long terme, au contraire de l’analyse réelle, comme le dirait Schumpeter. La méthode SFC permet cette intégration de façon rigoureuse. La méthode SFC permet d’étudier en plus grand détail le rôle et l’impact des banques et autres institutions financières, ainsi que l’impact de la politique monétaire (Le Héron et Mouakil 2008). La méthode SFC permet de mieux comprendre certaines propositions des circuitistes, et d’expliquer adéquatement la fermeture du circuit (Zezza 2006).
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Le temps historique La méthode SFC donne un sens au temps historique de Joan Robinson. Les simulations permettent de suivre le passage du court terme au long terme, en allant au-delà de l’étude de la stabilité dynamique. Elle décrit le réaménagement des stocks de dettes et d’actifs consécutifs à la modification d’un paramètre de comportement. Elle permet de décrire l’équivalent monétaire de la traverse de Hicks (1965). Parce que l’analyse intègre correctement les stocks tangibles et financiers, elle peut donner lieu à des effets d’hystérésis, car l’évolution des stocks pendant la transition va avoir un impact sur l’équilibre final. L’introduction d’anticipations de type « chartalistes ou extrapolatives » va aussi avoir un impact sur l’équilibre de long terme
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Développements futurs
L crise financière actuelle démontre la nécessité d’avoir des modèles qui intègrent le réel et le financier, les flux et les bilans. Pour l’instant, deux problèmes à la diffusion de la méthode SFC Trouver des moyens de simplifier une présentation souvent trop lourde: quelques efforts et suggestions par Taylor (2004), Mouakil (2006), Dos Santos (2007). Le besoin de calibrer adéquatement les modèles SFC: quelques efforts, par exemple Thévenot (2006).
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