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Univernté du temps libre 9 décembre 2010
Les enjeux de l’écriture biographique Bernard ZONGO Professeur de lettres – Docteur ès lettre - Formateur – Ecrivain - Essayiste « zongo form’activ » - autoentrepreneur 07/11/ :27:42 conférence UTL - Les enjeux de l'écriture biographique
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INTRODUCTION Le biographique : écrire sur soi (autobiographie), écrire pour/sur l’autre (biographie/autobiographie) choix générique : l’écrit autobiographique à l’exclusion des biographies problématiques de l’écrit sur soi : les pièges de la mémoire, mensonges et vérité, quels genres pour se dire (journal intime, mémoires, mémoires)? Découpage du temps (temps de la narration/temps de l’histoire), le vrai et le vraisemblable 07/11/ :27:42 conférence UTL - Les enjeux de l'écriture biographique
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Conférence – « Les enjeux de l’écriture biographique » PLAN
INTRODUCTION genres et formes du biographique l’autobiographie : Sartre, Les mots (1964); Zongo, Le serpent sous la peau (2009) le journal intime: Anne Frank, Journal (1950) l’essai : Montaigne, Essais (1580) l’autoportrait : Norman Rockwell, Le triple autoportrait (1960) Le mémoire: Simone de Beauvoir, Mémoires d’une jeune fille rangée (1958) II. Intentions et projets Faire revivre et témoigner: Albert Cohen, Le livre de ma mère (1954) S’expliquer et se justifier : Rousseau, Les Confessions ( ) Juger : Saint-Simon, Mémoires (1714) Comprendre et méditer : Chateaubriand, Mémoires d’Outre-Tombe (1848), Zongo, Le Serpent sous la peau (2009) III. Enjeux et difficultés Réalité et vérité : Stendhal, Vie de Henry Brulard, posthume, 1890), Zongo, Le Serpent sous la peau (2009); Zongo, Meurtrissures (2005) B. Temps, mémoire et écriture : Chateaubriand, Mémoires d’Outre-Tombe (1848) CONCLUSION
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I. genres et formes du biographique
Auteurs et œuvres Problématique A) Autobiographie Rousseau, Les Confessions Stendhal, Vie de Henry Brulard Sarraute, Enfance Sartre, Les mots Zongo, Le Serpent sous la peau Reconstitution sincère de la vie personnelle B) Journal intime ou Journal personnel ou Cahiers ou Carnets Cahiers, Paul Valéry Carnets d’écolier, Claude Ollier Anne Frank, Journal Retransciption d’événements ou d’impressions non destinée à la publication C) Essai Montaigne, Essais Restitution d’expériences vécues ou réflexion sur la vie D) Autoportrait Michel Leiris, L’Âge d’homme Norman Rockwell, Le triple autoportrait, Regard embelli sur soi-même E) Mémoires et chroniques Simone de Beauvoir, Mémoires d’une jeune fille rangée Saint-Simon, Mémoires Chateaubriand, Mémoires d’outre-tombe Ecrits sur l’histoire et l’évolution des mentalités
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I. genres et formes du biographique A) l’autobiographie
POSTULAT : Le pacte autobiographique Qu'est-ce que le pacte autobiographique ? « C'est l'engagement que prend un auteur de raconter directement sa vie (ou une partie, ou un aspect de sa vie) dans un esprit de vérité. » Le pacte autobiographique s'oppose au pacte de fiction. L'autobiographe, lui, vous promet que ce que qu'il va vous dire est vrai, ou du moins est ce qu'il croit vrai. Il se comporte comme un historien ou un journaliste, avec la différence que le sujet sur lequel il promet de donner une information vraie, c'est lui-même. Il est impossible de dire qu'un romancier ment : il ne s'est pas engagé à vous dire la vérité. (Philippe Lejeune, Le Pacte autobiographique (1975)
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I) genres et formes du biographique A) l’autobiographie – Sartre, Les Mots, 1964
TEXTE 1/ Jean-Paul -Charles-Aymard-Léon-Eugène Sartre ( ) , Les Mots, 1964 « Un jour, j’avais sept ans, mon grand-père n’y tint plus : il me prit par la main, annonçant qu’il m’emmenait en promenade. Mais, à peine avions-nous tourné le coin de la rue, il me poussa chez le coiffeur en me disant : « Nous allons faire une surprise à ta mère ». J’adorais les surprises. Il y en avait tout le temps chez nous. Cachotteries amusées ou vertueuses, cadeaux inattendus, révélations théâtrales suivies d’embrassements : c’était le ton de notre vie. Quand on m’avait ôté l’appendice, ma mère n’en avait pas soufflé mot à Karl pour lui éviter des angoisses qu’il n’eut, de toute manière, pas ressenties. Mon oncle Auguste avait donné l’argent ; revenus clandestinement d’Arcachon, nous nous étions cachés dans une clinique de Courbevoie. Le surlendemain de l’opération, Auguste était venu voir mon grand-père ; « Je vais, lui avait-il dit, t’annoncer une bonne nouvelle ». Karl fut trompé par l’affable solennité de cette voix : « Tu te remaries ! – Non, répondit mon oncle en souriant, mais tout s’est très bien passé. – Quoi, tout ? », Etc., etc. Bref les coups de théâtre faisaient mon petit ordinaire et je regardai avec bienveillance mes boucles rouler le long de la serviette blanche qui me serrait le cou et tomber sur le plancher, inexplicablement ternies ; je revins glorieux et tondu. Il y eut des cris mais pas d’embrassements et ma mère s’enferma dans sa chambre pour pleurer : on avait troqué sa fillette contre un garçonnet. Il y avait pis : tant qu’elles voltigeaient autour de mes oreilles, mes belles anglaises lui avaient permis de refuser l’évidence de ma laideur. Déjà, pourtant, mon œil droit entrait dans le crépuscule. Il fallut qu’elle s’avouât la vérité. Mon grand-père semblait lui-même tout interdit : on lui avait confié sa petite merveille, il avait rendu un crapaud ; c’était saper à la base ses futurs émerveillements. »
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I. genres et formes du biographique A) l’autobiographie – Zongo, Le serpent sous la peau
TEXTE 2/ Bernard Zongo, Les tribulations d’un professeur franco-étranger « - Pourquoi vous faites lire Les Petits enfants du siècle aux élèves ? ce n’est pas de la littérature ! - Vous donnez trop de livres à lire aux élèves, on n’a pas que ça à acheter ! - Vous pensez finir le programme ? Les camarades de ma fille qui sont dans une autre classe ont déjà étudié 4 séquences et vous n’en avez fait que 2 ! - A quoi ça sert de faire apprendre des citations d’auteurs aux enfants ? - Vous donnez trop de devoirs ! Les enfants n’ont pas que ça à faire ! - Quand allez-vous donner des devoirs à faire à la maison ? - Vous êtes sûr de respecter le programme ? - Quand vous parlez, mon fils ne vous comprend pas ! Il me dit que vous parlez comme un africain, mal. - Vous ne savez pas corriger les copies ! Je ne comprends pas pourquoi ma fille n’a jamais la moyenne avec vous alors qu’elle redouble sa classe ! - Pourquoi vous n’organisez jamais de sortie avec les élèves ? - J’espère que vous ne ferez pas de sortie cette année ! ça coûte cher aux parents ! - Il paraît qu’il y a trop le bazar dans votre classe ! vous ne savez pas tenir la classe. - Vous employez des mots trop compliqués pour les gosses ! vous ne pouvez pas parler normalement ? Parlez comme eux, ils vous comprendront ! - L’année dernière vous avez fait acheter des livres que vous n’avez même pas étudiés ! ce n’est pas normal ! - Quand est-ce que vous allez commencer les épreuves du bac ? nos enfants ne seront jamais prêts ! - Pourquoi vous faites étudier des auteurs étrangers aux enfants ? Anouilh, Ionesco, Senghor, c’est pas français, ça ! c’est des gens de votre pays ? »
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I. genres et formes du biographique A) l’autobiographie – Zongo, Le serpent sous la peau
TEXTE 3/ Bernard Zongo, Le Serpent sous la peau, 2009 « Comme tous les matins, avant de se rendre à la messe de 6h30 à la grande cathédrale située à une demi-dizaine de kilomètres du domicile, à pied, elle déposa une pièce de 100 f à mon chevet. C’était mon argent de poche quotidien. Je me demande aujourd’hui si ce rituel n’avait pas pour finalité de surveiller et donc de garantir l’intégrité sexuelle de son fils. Elle avait chassé à coups d’insultes, de malédictions et de menaces tout une ribambelle de jeunes filles qui venaient me rendre visite. Aucune de ces filles ne méritait son fils. Je savais qu’elle reviendrait de la messe aux alentours de 8h30. Je m’efforçai de me réveiller avant son retour. J’avais décidé de dramatiser mon départ du foyer familial. Dès le matin de bonne heure donc, je me mis à vider les livres de ma bibliothèque et à les empaqueter dans de vieux cartons. Mon père aussi était matinal. Il s’aperçut de mon manège et ne pouvant supporter davantage cette mise en scène de la rupture, il décida de partir de la maison. Lorsque j’entendis les pas de ma mère entrant dans la cour, je me composai un visage déconfit. Je m’efforçai de rougir mes yeux avec des larmes de circonstance, m’aidant d’ailleurs de quelques gouttes de salive déposées sur les paupières. Elle était trop sensible pour ne pas s’émouvoir en me voyant dans cet état.
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I. genres et formes du biographique B) le journal intime – Anne Frank, Journal
TEXTE 4/ Extrait du Journal d’Annelies Marie Frank (Anne Frank) « Samedi 20 juin 1942 C'est une sensation très étrange, pour quelqu'un dans mon genre, d'écrire un journal. Non seulement je n'ai jamais écrit, mais il me semble que plus tard, ni moi ni personne ne s'intéressera aux confidences d'une écolière de treize ans. Mais à vrai dire, cela n'a pas d'importance, j'ai envie d'écrire et bien plus encore de dire vraiment ce que j'ai sur le cœur une bonne fois pour toutes à propos d'un tas de choses. Le papier a plus de patience que les gens : ce dicton m'est venu à l'esprit par un de ces jours de légère mélancolie où je m'ennuyais, la tête dans les mains, en me demandant dans mon apathie s'il fallait sor tir ou rester à la maison et où, au bout du compte, Je restais plantée là à me morfondre. Oui, c'est vrai, le papier a de la patience, et comme je n'ai pas l'intention de jamais faire lire à qui que ce soit ce cahier cartonné paré du titre pompeux de « Journal », à moins de rencontrer une fois dans ma vie un ami ou une amie qui devienne l'ami ou l'amie avec un grand A, personne n'y verra probablement d'inconvénient. »
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I. genres et formes du biographique C) L’essai – définition
En littérature, un essai est : Une œuvre de réflexion débattant d'un sujet donné selon le point de vue de l’auteur. l’essai peut être polémique ou partisan. C’est un genre littéraire qui se prête bien à la réflexion philosophique, mais il y a également des essais dans d’autres domaines : essais historiques, essais scientifiques, essais politiques, etc. Exemples : Descartes, Discours de la méthode Simonne de Beauvoir : Le Deuxième sexe Sartre : Qu’est-ce que la littérature ? Zongo : Mensonges et vérités sur la question noire en France - ma réponse à Gaston Kelman
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I. genres et formes du biographique C) L’essai – Montaigne, Essais, 1580
TEXTE 5/16 - Montaigne ( ), Essai, « Des Cannibales », 1580 Livre I , chapitre 31 « Des cannibales » ( extrait) « Or je trouve , pour revenir à mon propos, qu’il n’y a rien de barbare et de sauvage en cette nation , à ce qu’on m’en a rapporté ; sinon que, chacun appelle barbarie ce qui n’est pas de son usage ; comme de vrai, il semble que nous n’avons d’autre mire de la vérité et de la raison que l’exemple et l’idée des opinions et usances du pays où nous sommes. Là est toujours la parfaite religion, la parfaite police, parfait et accompli usage de toutes choses. Ils sont sauvages de même que nous appelons sauvages les fruits que nature, de soi et de son progrès ordinaire, a produits : là où , à la vérité , ce sont ceux que nous avons altérés par notre artifice, et détournés de l’ordre commun, que nous devrions plutôt appeler sauvages. En ceux là sont vives et vigoureuses les vraies et plus utiles et naturelles vertus et propriétés, lesquelles nous avons abâtardies en ceux-ci, et les avons seulement accommodées au plaisir de notre goût corrompu. Et si pourtant, la saveur même et délicatesse se trouve à notre goût excellente, à l’envi des nôtres, en divers fruits de ces contrées là sans culture. Ce n’est pas raison que l’art gagne le point d’honneur sur notre grande et puissante mère Nature. Nous avons tant rechargé la beauté et richesse de ses ouvrages par nos inventions, que nous l’avons du tout étouffée. Si est-ce que, partout où sa pureté reluit, elle fait merveilleuse honte à nos vaines et frivoles entreprises. »
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I. genres et formes du biographique D) l’autoportrait – définition
- On ne peut parler d'autoportrait qu'en présence d'une figure nettement individualisée et désignée. - On distinguera plusieurs modalités : 1° l'autoportrait situé, c'est-à-dire inséré dans une composition où il peut apparaître dans un groupe (in assistenza), avec ou sans signe distinctif ou même dissimulé dans un accident du tableau (cryptoportrait), ou au contraire mis en valeur (portrait d'honneur) ; 2° le portrait délégué ou symbolique, où l'artiste donne ses traits à un personnage sacré, historique ou fabuleux, ce qui peut ramener à la formule précédente ou répondre à une composition spécifique, ou conduire à un travestissement original (Michel Leiris) 3° le portrait de groupe, soit professionnel, soit familial, soit commémoratif ; 4° le portrait détaché ou au naturel, où l'artiste se représente au travail ou sans appareil professionnel (Norman Rockwell), dans une mise en scène qui peut aller du fond neutre ou de l'atelier à un décor plus ou moins élaboré ou même fantastique.
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I. genres et formes du biographique D) l’autoportrait – 1
I. genres et formes du biographique D) l’autoportrait – 1. Leiris, L’Âge d’homme, 1939 TEXTE 6/ Michel Leiris ( ), L’Âge d’homme, 1939 « Agé de cinq ou six ans, je fus victime d'une agression. Je veux dire que je subis dans la gorge une opération qui consista à m'enlever des végétations; l'intervention eut lieu d'une manière très brutale, sans que je fusse anesthésié. Mes parents avaient d'abord commis la faute de m'emmener chez le chirurgien sans me dire où ils me conduisaient. Si mes souvenirs sont justes, je m'imaginais que nous allions au cirque; j'étais donc très loin de prévoir le tour sinistre que me réservaient le vieux médecin de la famille, qui assistait le chirurgien, et ce dernier lui-même. Cela se déroula, point pour point, ainsi qu'un coup monté et j'eus le sentiment qu'on m'avait attiré dans un abominable guet-apens. Voici comment les choses se passèrent: laissant mes parents dans le salon d'attente, le vieux médecin m'amena jusqu'au chirurgien, qui se tenait dans une autre pièce en grande barbe noire et blouse blanche (telle est, du moins, l'image d'ogre que j'en ai gardée); j'aperçus des instruments tranchants et, sans doute, eus-je l'air effrayé car, me prenant sur ses genoux, le vieux médecin dit pour me rassurer: "Viens, mon petit coco! On va jouer à faire la cuisine." À partir de ce moment je ne me souviens de rien, sinon de l'attaque soudaine du chirurgien qui plongea un outil dans ma gorge, de la douleur que je ressentis et du cri de bête qu'on éventre que je poussai. Ma mère, qui m'entendit d'à côté, fut effarée. Ce souvenir est, je crois, le plus pénible de mes souvenirs d'enfance. Non seulement je ne comprenais pas que l'on m'eût fait si mal, mais j'avais la notion d'une duperie, d'un piège, d'une perfidie atroce de la part des adultes, qui ne m'avaient amadoué que pour se livrer sur ma personne à la plus sauvage agression. Toute ma représentation de la vie en est restée marquée: le monde, plein de chausse-trapes, n'est qu'une vaste prison ou salle de chirurgie; je ne suis sur terre que pour devenir chair à médecins, chair à canons, chair à cercueil; comme la promesse fallacieuse de m'emmener au cirque ou de jouer à faire la cuisine, tout ce qui peut m'arriver d'agréable en attendant n'est qu'un leurre, une façon de me dorer la pilule pour me conduire plus sûrement à l'abattoir où, tôt ou tard, je dois être mené. »
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Norman ROCKWELL (3 fév.1894 – 8 nov. 1978) : le peintre humaniste
I) genres et formes du biographique D) l’autoportrait – 2. Rockwell, Le Triple autoportrait, 1960 Norman ROCKWELL (3 fév.1894 – 8 nov. 1978) : le peintre humaniste La mosaïque de Norman Rockwell Cette mosaïque fut offerte aux Nations Unies, à l'occasion du 40ème anniversaire en 1985 par Mme Nancy Reagan, alors première Dame des Etats-Unis. La mosaïque est basée sur la peinture de l'artiste américain Norman Rockwell, intitulée La Règle d'or. Rockwell voulait illustrer comment la Règle d'or est un thème commun dans la majorité des religions à travers le monde. Elle représente des gens de toute race, conviction et couleur avec dignité et respect. La mosaïque porte une inscription signifiant "Comporte-toi avec les autres comme tu voudrais qu'ils le fassent avec toi." Cette oeuvre a été réalisée par des artistes vénitiens spécialisés dans l'art de la mosaïque. Mosaïque 07/11/ :27:42 conférence UTL - Les enjeux de l'écriture biographique
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I. Genres et formes du biographique
D) l’autoportrait – 2. Norman ROCKWELL (3 fév.1894 – 8 nov. 1978) : le peintre humaniste La mosaïque de Norman Rockwell Mosaïque La règle d'or 07/11/ :27:42 conférence UTL - Les enjeux de l'écriture biographique
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I. Genres et formes du biographique
D) l’autoportrait – 2.Norman ROCKWELL (3 fév.1894 – 8 nov. 1978) : le peintre humaniste Reproduction : 1985 (40è annivers. ONU Tableau de Rockwell (1961) 07/11/ :27:42 conférence UTL - Les enjeux de l'écriture biographique
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Couvertures du Saturday Evening Post (Journal)
I. Genres et formes du biographique D) l’autoportrait – 2.Norman ROCKWELL (3 fév.1894 – 8 nov. 1978) l'illustrateur de presse Couvertures du Saturday Evening Post (Journal) 07/11/ :27:42 conférence UTL - Les enjeux de l'écriture biographique
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conférence UTL - Les enjeux de l'écriture biographique
I. Genres et formes du biographique D) l’autoportrait – 2.Norman ROCKWELL (3 fév.1894 – 8 nov. 1978) TRIPLE AUTOPORTRAIT, Norman Rockwell - 13 février 1960 07/11/ :27:42 conférence UTL - Les enjeux de l'écriture biographique
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Picasso, (1881-1973) – Le peintre espagnol
I. Genres et formes du biographique D) l’autoportrait - Norman ROCKWELL (3 fév.1894 – 8 nov. 1978) TRIPLE AUTOPORTRAIT, Norman Rockwell - 13 février 1960 Ce Triple autoportrait de Norman Rockwell entretient une intertextualité avec d’autres peintres : l’autoportrait d’Albert Dürer, peintre , graveur et mathématicien allemand ( ) – Autoportrait avec gants Rembrandt ( ) – peintre hollandais - Autoportrait au béret (1665)- - Picasso ( ), peintre espagnol Picasso, ( ) – Le peintre espagnol Van Gogh ( ), autoportrait 07/11/ :27:42 conférence UTL - Les enjeux de l'écriture biographique
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Intertextualité (1) : - Albrecht DÜRER - (1471-1528)
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Intertextualité (2) : Albrecht DÜRER : (1471-1528) Autoportrait avec gants - 1498
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Intertextualité (2) : - Albrecht DÜRER (1471-1528): Autoportrait avec gants - 1498
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Intertextualité (3) : – Rembrandt (1606-1669) – peintre hollandais - Autoportrait au béret (1665)
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Intertextualité (3) : tableaux de peintres – Rembrandt ( ) – peintre hollandais - Autoportrait au béret (1665)- Rembrandt 07/11/ :27:42 conférence UTL - Les enjeux de l'écriture biographique
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Intertextualité (3) : tableaux de peintres – Rembrandt ( ) Rembrandt dit aux trois moustaches (autoportrait eau-forte, vers 1633) - Bibliothèque nationale. Cliché Hachette 07/11/ :27:42 conférence UTL - Les enjeux de l'écriture biographique
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Intertextualité (4) : Picasso (Diego Jose Francisco de Paula Juan Nepomuceno Crispin Crispiniano de la Sentissima Trinidad Ruiz Blasco Picasso y Lopez) ) – Le peintre espagnol 07/11/ :27:42 conférence UTL - Les enjeux de l'écriture biographique
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Intertextualité (4) : Van Gogh (1853-1890) – Autoportrait initial
07/11/ :27:42 conférence UTL - Les enjeux de l'écriture biographique
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TRIPPLE AUTOPORTRAIT: Van Gogh
Portrait initial Portrait recréé - inversé 07/11/ :27:42 conférence UTL - Les enjeux de l'écriture biographique
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Intertextualité (4) : Van Gogh (1853-1890) Autoportrait
Autoportrait au chevalet (1889)
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I. genres et formes du biographique E) mémoire
Les mémoires (masculin pluriel) : œuvres historiques et parfois littéraires ayant pour objet le récit de sa propre vie considérée comme révélatrice d’un moment de l’Histoire. Plus précisément, il s’agit d’un recueil de souvenirs qu’une personne rédige à propos d’événements historiques ou anecdotiques, publics ou privés. Exemples : Saint Simon ( ) : Mémoires, œuvre rédigées en , et publiées en Souvenirs et critique d'un homme qui a vécu à Versailles sous Louis XIV. Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe : autobiographie de François-René de Chateaubriand ( ) – titre initial : Mémoires de ma vie – œuvre publiée en 12 volumes. Charles De Gaulle : Mémoires de guerre est une œuvre littéraire qui s'étend sur trois tomes. Chacun correspond à une étape précise de la Seconde Guerre mondiale :L'Appel, (1954), L'Unité, (1956) et Le Salut, (1959). 07/11/ :27:42 conférence UTL - Les enjeux de l'écriture biographique
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I. genres et formes du biographique E) mémoire
TEXTE 7/ Simone de Beauvoir ( ), Mémoires d’une jeune fille rangée, 1958 « Demain j'allais trahir ma classe et déjà je reniais mon sexe; cela non plus, mon père ne s'y résignait pas: il avait le culte de la jeune fille, la vraie. Ma cousine Jeanne incarnait cet idéal: elle croyait encore que les enfants naissaient dans les choux. Mon père avait tenté de préserver mon ignorance; il disait autrefois que lorsque j'aurais dix-huit ans il m'interdirait encore les Contes de François Coppée; maintenant, il acceptait que je lise n'importe quoi: mais il ne voyait pas beaucoup de distance entre une fille avertie, et la Garçonne dont, dans un livre infâme, Victor Margueritte venait de tracer le portrait. Si du moins j'avais sauvé les apparences ! Il aurait pu s'accommoder d'une fille exceptionnelle à condition qu'elle évitât soigneusement d'être insolite: je n'y réussis pas. J'étais sortie de l'âge ingrat, je me regardais de nouveau dans les glaces avec faveur; mais en société, je faisais piètre figure. Mes amies, et Zaza elle-même, jouaient avec aisance leur rôle mondain; elles paraissaient au "jour" de leur mère, servaient le thé, souriaient, disaient aimablement des riens; moi je souriais mal, je ne savais pas faire du charme, de l'esprit ni même des concessions. Mes parents me citaient en exemple des jeunes filles "remarquablement intelligentes" et qui cependant brillaient dans les salons. Je m'en irritais car je savais que leur cas n'avait rien de commun avec le mien: elles travaillaient en amateurs tandis que j'avais passé professionnelle. Je préparais cette année les certificats de littérature, de latin, de mathématiques générales, et j'apprenais le grec; j'avais établi moi-même ce programme, la difficulté m'amusait; mais précisément, pour m'imposer de gaieté de cœur un pareil effort, il fallait que l'étude ne représentât pas un à-côté de ma vie mais ma vie même: les choses dont on parlait autour de moi ne m'intéressaient pas. Je n'avais pas d'idées subversives; en fait, je n'avais guère d'idées, sur rien; mais toute la journée je m'entraînais à réfléchir, à comprendre, à critiquer, je m'interrogeais, je cherchais avec précision la vérité: ce scrupule me rendait inapte aux conversations mondaines. Somme toute, en dehors des moments où j'étais reçue à mes examens, je ne faisais pas honneur à mon père; aussi attachait-il une extrême importance à mes diplômes et m'encourageait-il à les accumuler. Son insistance me persuada qu'il était fier d'avoir pour fille une femme de tête; au contraire: seules des réussites extraordinaires pouvaient conjurer la gêne qu'il en éprouvait.»
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II. intentions et projets
Auteurs et œuvres A) Faire revivre et témoigner Albert Cohen, Le livre de ma mère (1954) Albert Camus, Le Premier homme (posthume 1994) Jorge Semprun, L’écriture ou la vie (1994) B) S’expliquer et se justifier Montaigne, Essais (1580), « Au lecteur » Rousseau, Les Confessions ( ) C) Juger Saint-Simon, Mémoires (1714) Simone de Beauvoir Mémoires d’une jeune fille rangée, III, (1958) D) Comprendre et méditer Chateaubriand, Mémoires d’Outre-Tombe (1848) Malraux, Antimémoires (1967) Zongo, Le Serpent sous la peau 07/11/ :27:42
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II. Intentions et projets A) faire revivre et témoigner
TEXTE 8/ Le livre de ma mère, Albert Cohen « O mon passé, ma petite enfance, ô chambrette, coussins brodés de petits chats rassurants, vertueuses chromos, conforts et confitures, tisanes, pâtes pectorales, arnica, papillon du gaz dans la cuisine, sirop d’orgeat, antiques dentelles, odeurs, naphtalines, veilleuses de porcelaine, petits baisers du soir, baisers de Maman qui me disait, après avoir bordé mon lit, que maintenant j’allais faire mon petit voyage dans la lune avec mon ami un écureuil. O mon enfance, gelées de coings, de bougies roses, journaux illustrés du jeudi, ours en peluche, convalescences chéries, anniversaires, lettres du Nouvel An sur du papier à dentelures, dindes de Noël, fables de La Fontaine idiotement récitées debout sur la table, bonbons à fleurettes, attentes des vacances, cerceaux, diabolos, petites mains sales, genoux écorchés et j’arrachais la croûte toujours trop tôt, balançoires des foires, cirque Alexandre où elle me menait une fois par an et auquel je pensais des mois à l’avance, cahiers neufs de la rentrée, sac d’école en faux léopard, plumiers japonais, plumiers à plusieurs étages, plumes sergent-major, plumes baïonnette de Blanzy Poure, goûters de pain et de chocolat, noyaux d’abricots thésaurisés, boîte à herboriser, billes d’agate, chansons de maman, leçons qu’elle me faisait repasser le matin, heures passées à la regarder cuisiner avec importance, enfance, petites paix, petits bonheurs, gâteaux de maman, sourires de maman, ô tout ce que je n’aurai plus, ô charmes, ô sons morts du passé, fumées enfuies et dissoutes saisons. Les rives s’éloignent. Ma mort approche. »
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II. intentions et projets B) s’expliquer et se justifier
TEXTE 9/ Rousseau, Les Confessions, ( ) Intus, et in cute (« Je te connais à fond et sous peau ») « Je forme une entreprise qui n'eut jamais d'exemple et dont l'exécution n'aura point d'imitateur. Je veux montrer à mes semblables un homme dans toute la vérité de la nature ; et cet homme ce sera moi. Moi seul. Je sens mon cour et je connais les hommes. Je ne suis fait comme aucun de ceux que j'ai vus ; j'ose croire être fait comme aucun de ceux qui existent. Si je ne vaux pas mieux, au moins je suis autre. Si la nature a bien fait ou mal fait de briser le moule dans lequel elle m'a jeté, c'est ce dont on ne peut juger qu'après m'avoir lu. Que la trompette du Jugement dernier sonne quand elle voudra, je viendrai, ce livre à la main, me présenter devant le souverain juge. Je dirais hautement : "Voilà ce que j'ai fait, ce que j'ai pensé, ce que je fus. J'ai dit le bien et le mal avec la même franchise. Je n'ai rien tu de mauvais, rien ajouté de bon, et s'il m'est arrivé d'employer quelque ornement indifférent, ce n'a jamais été que pour remplir un vide occasionné par mon défaut de mémoire ; j'ai pu supposer vrai ce que je savais avoir pu l'être, jamais ce que je savais être faux. Je me suis montré tel que je fus ; méprisable et vil quand je l'ai été, bon, généreux, sublime, quand je l'ai été : j'ai dévoilé mon intérieur tel que tu l'as vu toi-même. Être éternel rassemble autour de moi l'innombrable foule de mes semblables ; qu'ils écoutent mes confessions, qu'ils gémissent de mes indignités, qu'ils rougissent de mes misères. Que chacun d'eux découvre à son tour son cour aux pieds de son trône avec la même sincérité ; et puis qu'un seul te dise, s'il l'ose : Je fus meilleur que cet homme-là. »
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II. intentions et projets C) juger
TEXTE 10/ Saint Simon ( ) – Mémoires (1714) « L´abbé Dubois était un petit homme maigre, effilé, chafouin, à perruque blonde, à mine de fouine, à physionomie d´esprit, qui était en plein ce qu´un mauvais français appelle un sacre, mais qui ne se peut guère exprimer autrement. Tous les vices combattaient en lui à qui en demeurerait le maître. Ils y faisaient un bruit et un combat continuel entre eux. L´avarice, la débauche, l´ambition étaient ses dieux; la perfidie, la flatterie, les servages, ses moyens; l´impiété parfaite, son repos; et l´opinion que la probité et l´honnêteté sont des chimères dont on se pare, et qui n´ont de réalité dans personne, son principe, en conséquence duquel tous moyens lui étaient bons. Il excellait en basses intrigues, il en vivait, il ne pouvait s´en passer, mais toujours avec un but où toutes ses démarches tendaient, avec une patience qui n´avait de terme que le succès, ou la démonstration réitérée de n´y pouvoir arriver, à moins que, cheminant ainsi dans la profondeur et les ténèbres, il ne vit jour à mieux en ouvrant un autre boyau. Il passait ainsi sa vie dans les sapes. Le mensonge le plus hardi lui était tourné en nature avec un air simple, droit, sincère, souvent honteux. Il aurait parlé avec grâce et facilité, si, dans le dessein de pénétrer les autres en parlant, la crainte de s´avancer plus qu´il ne voulait ne l´avait accoutumé à un bégayement factice qui le déparait, et qui, redoublé quand il fut arrivé à se mêler de choses importantes, devint insupportable, et quelquefois inintelligible. Sans ses contours et le peu de naturel qui perçait malgré ses soins, sa conversation aurait été aimable. Il avait de l´esprit, assez de lettres, d´histoire et de lecture, beaucoup de monde, force envie de plaire et de s´insinuer, mais tout cela gâté par une fumée de fausseté qui sortait malgré lui de tous ses pores et jusque de sa gaieté, qui attristait par là. Méchant d´ailleurs avec réflexion et par nature, et, par raisonnement, traître et ingrat, maître expert aux compositions des plus grandes noirceurs, effronté à faire peur étant pris sur le fait; désirant tout, enviant tout, et voulant toutes les dépouilles. On connut après, dès qu´il osa ne se plus contraindre, à quel point il était intéressé, débauché, inconséquent, ignorant en toute affaire, passionné toujours, emporté, blasphémateur et fou, et jusqu´à quel point il méprisa publiquement son maître et l´État, le monde sans exception et les affaires, pour les sacrifier à soi tous et toutes, à son crédit, à sa puissance, à son autorité absolue, à sa grandeur, à son avarice, à ses frayeurs, à ses vengeances. Tel fut le sage à qui Monsieur confia les moeurs de son fils unique à former, par le conseil de deux hommes qui ne les avaient pas meilleures, et qui en avaient bien fait leurs preuves. »
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II. intentions et projets 6 D) comprendre et méditer
TEXTE 11/16 - Chateaubriand ( ) - fin des Mémoires d'Outre-Tombe (4ième partie, livre XII, 10, extrait), 1848 « Grâce à l'exorbitance de mes années, mon monument est achevé. Ce m'est un grand soulagement; je sentais quelqu'un qui me poussait; le patron de la barque sur laquelle ma place est retenue m'avertissait qu'il ne me restait qu'un moment pour monter à bord. si j'avais été le maître de Rome, je dirais comme Sylla que je finis mes Mémoires la veille même de ma mort; mais je ne conclurais pas mon récit par ces mots comme il conclut le sien: "J'ai vu en songe un de mes enfants qui me montrait Métella sa mère, et m'exhortait à venir jouir du repos dans le sein de la félicité éternelle." Si j'eusse été Sylla, la gloire ne m'aurait jamais pu donner le repos et la félicité. Des orages nouveaux se formeront; on croit prEssentir des calamités qui l'emporteront sur les afflictions dont nous avons été comblés; déjà, pour retourner au champs de bataille, on songe à rebander ses vieilles blessures. Cependant je ne pense pas que des malheurs prochains éclatent: peuples et rois sont également recrus; des catastrophes imprévues ne fondront pas sur la France: ce qui me suivra ne sera que l'effet de la transformation générale. On touchera sans doute à des stations pénibles; le monde ne saurait changer de face (et il faut qu'il change) sans qu'il y ait douleur. Mais, encore un coup, ce ne seront points des révolutions à part; ce sera la grande révolution allant à son terme. Les scènes de demain ne me regardent plus; elles appellent d'autres peintres: à vous, messieurs. En traçant ces derniers mots, ce 16 novembre 1841, ma fenêtre, qui donne à l'ouest sur les jardins des Missions étrangères, est ouverte: il est six heures du matin; j'aperçois la lune pâle et élargie; elle s'abaisse sur la flèche des Invalides à peine révélée par le premier rayon doré de l'Orient: on dirait que l'ancien monde finit et que le nouveau commence. Je vois les reflets d'une aurore dont je ne verrai pas se lever le soleil. Il ne me reste qu'à m'asseoir au bord de ma fosse, après quoi je descendrai hardiment, le Crucifix à la main, dans l'Eternité. »
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II. intentions et projets - D) comprendre et méditer
TEXTE 12/16 Zongo, Le Serpent sous la peau, 2009 « J’écris donc pour comprendre. Tisser le fil d’Ariane qui relie des événements n’offrant aucune signification à titre individuel. Mais dont la mise en réseau permettrait de donner un sens général à l’itinéraire étrange de cette famille, de l’interpréter d’une manière, sinon objective, du moins raisonnablement compréhensible. J’écris donc pour moi-même d’abord. Pour comprendre ma propre place au sein de cette famille, et la manière dont j’ai vécu mon expérience de fils benjamin. Mais pour paraphraser Victor Hugo, parler de soi n’est qu’une autre manière de parler des autres. Et si Montaigne écrivant ses Essais prétendait ne leur « proposer aucune autre fin que domestique et privée », il n’espérait pas moins que son témoignage traversât les siècles et que les leçons qu’il a pu et su tirer de la vie fussent mises au service du genre humain. J’ai besoin de ne pas croire que l’honneur de la famille, traîné dans la fange maintes fois, participe de l’ordre naturel des choses. La foudre ne dévaste pas à périodes régulières les cultures d’un même champ, par hasard. On ne soumet pas aux affres de la prison un honnête homme qui n’a eu d’autres soucis que son indépendance économique, par hasard. On ne contracte pas une maladie mutante et incurable après une dispute avec son demi-frère, par hasard. On ne perd pas un doigt dans des souffrances atroces après avoir chiqué du tabac offert gracieusement par une inconnue, par hasard. »
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III. enjeux et difficultés
Finalités et difficultés Auteurs et œuvres A) réalité et vérité Jules César, La Guerre des Gaules (52-51 av.J.-C.) Stendhal, Vie de Henry Brulard, posthume, 1890) Michel Leiris, L’Âge d’homme (1939) Patrick Modiano, Le livret de famille (1977) George Sand (pseudonyme d'Amandine Aurore Lucile Dupin) – Histoire de ma vie, (1855) Zongo, Le Serpent sous la peau Zongo, Meurtrissures B) Temps, mémoire et écriture Chateaubriand, Mémoires d’Outre-Tombe (1848) Marcel Proust, Le Temps retrouvé (1927) Nathalie Sarraute, Enfance (1983) 07/11/ :27:42
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III. enjeux et difficultés - A) la réalité et la vérité
TEXTE 13/ Stendhal ( ), Vie de Henry Brulard ( ) « J'étais absolument ivre, fou de bonheur et de joie. Ici commence une époque d'enthousiasme et de bonheur parfait. Ma joie, mon ravissement ne diminuèrent un peu que lorsque je devins dragon au 6e régiment et encore ce ne fut qu'une éclipse. Je ne croyais pas être alors au comble du bonheur qu'un être humain puisse trouver ici-bas. Mais telle est la vérité pourtant. Et cela quatre mois après avoir été si malheureux à Paris, quand je m'aperçus ou crus m'apercevoir que Paris n'était pas, par soi, le comble du bonheur. Comment rendrai-je le ravissement de Rolle' ?... A Rolle, ce me semble, arrivé de bonne heure, ivre de bonheur de la lecture de La Nouvelle Héloïse et de l'idée d'aller passer à Vevey, prenant peut-être Rolle pour Vevey, j'entendis tout d'un coup sonner en grande volée la cloche majestueuse d'une église située dans la colline, à un quart de lieue au-dessus de Rolle ou de Nyon, j'y montai. Je voyais ce beau lac s'étendre sous mes yeux, le son de la cloche était une ravissante musique qui accompagnait mes idées et leur donnait une physionomie sublime. Là, ce me semble, a été mon approche la plus voisine du bonheur parfait. Pour un tel moment il vaut la peine d'avoir vécu. Dans la suite je parlerai de moments semblables, où le fond pour le bonheur était peut-être plus réel, mais la sensation était-elle aussi vive ? le transport du bonheur aussi parfait ? Que dire d'un tel moment sans mentir, sans tomber dans le roman ? [...] Le coeur me bat encore en écrivant ceci trente-six ans après. Je quitte mon papier, j'erre dans ma chambre et je reviens à écrire. J'aime mieux manquer quelque trait vrai que de tomber dans l'exécrable défaut de faire de la déclamation comme c'est l'usage. »
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III. enjeux et difficultés - A) la réalité et la vérité
TEXTE 14/ Zongo, Le Serpent sous la peau, « Armé d’une sagaie, d’une manchette et d’un carquois doté de mille flèches aux bouts noircis d’une poudre magique, il attendit de pied ferme l’arrivée du troupeau d’éléphants. Il faisait une nuit d’encre. On en dénombrait une bonne vingtaine à vue de silhouette. Bongnègue Kombré sortit du bosquet où il s’était caché, grimpa sur le dos de l’éléphant meneur et lui asséna trois coups de poing dont l’onde de choc secoua tout le village. L’éléphant succomba sur le champ. Il se mit alors à pourchasser le reste du troupeau et en moins d’une demi-nuit, il vint à bout du troupeau entier. Il traîna une dizaine de cadavres d’éléphants par la queue qu’il entassa sur la place du village. Le lendemain, on porta Bongnègue Kombré en triomphe. On banqueta autour d’un gigantesque feu de bois. Chaque famille du village repartit chez elle emportant un morceau de viande conséquent. »
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III. enjeux et difficultés - A) la réalité et la vérité
TEXTE 15/ Zongo, Meurtrissures « Kathy était bien là, comme prévu : majestueuse, royale, splendide et digne. Pour l’occasion, elle s’était parée comme une princesse venant à la rencontre de son prince charmant de retour d’exil. Vous n’auriez pas pu résister devant cette beauté qui semblait venue d’ailleurs. Pas plus que les passagers, pas plus que les agents de service, pas plus que les proches en attente qui tentaient chacun à sa manière d’attirer l’attention de Kathy par des regards insistants et envieux, par des déplacements hasardeux, par des moulinets de bras dénués de sens qui allaient de la tête aux hanches, des hanches aux cuisses. Ses longs cheveux blonds ondulaient sur sa tête comme des gerbes de blé couchées par une bise vespérale, les reflets kaléidoscopiques de ses yeux d’un vert amande étaient amplifiés par des cils repliés en algues marines endormies. Il fallait, pour s’en rendre compte, transpercer les verres translucides de ses lunettes encastrés dans une monture aux contours rectangulaires recourbée au bout en forme de tryskel. Un fin rouge à lèvres déposé avec soin détachait sa bouche du reste du visage et invitait à un baiser langoureux. Son visage entier était une véritable œuvre d’art, illuminé par des sources de lumières tamisées que l’on avait peine à localiser. Elle portait un haut d’un blanc écru décoré de noms de pays d’Afrique, de motifs aquatiques et floraux en bandes, duquel descendait de son cou, comme un feu d’artifice, un collier gothique en sautoir richement décoré de figurines de fruits de mer et de perles cristallines multicolores. Les motifs de son haut en relief offraient à la vue, comme des collines lointaines perçues par temps de brume, la saillie à peine voilée de ses deux seins mûrs. Une veste chanel en lainage armuré effet tweed à col large bordé de franges finissait de dessiner l’allure ferme de son torse. Un pantalon en jean serré obligeait le regard à parcourir ce corps divin de pied en cap. On pouvait alors remarquer l’harmonie de l’ensemble renforcée par la couleur bleu turquoise de la veste, tout en symphonie avec les mocassins Mainfort qui recouvraient ses pieds de mannequin. »
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III. enjeux et difficultés - B) le temps, la mémoire et l’écriture
TEXTE 16/16 - Chateaubriand ( ), Mémoires d’outre-tombe, 1848 « Hier au soir je me promenais seul ; le ciel ressemblait à un ciel d'automne ; un vent froid soufflait par intervalles. A la percée d'un fourré, je m'arrêtai pour regarder le soleil : il s'enfonçait dans des nuages au-dessus de la tour d'Alluye, d'où Gabrielle, habitante de cette tour, avait vu comme moi le soleil se coucher il y a deux cents ans. Que sont devenus Henri et Gabrielle ? Ce que je serai devenu quand ces Mémoires seront publiés. Je fus tiré de mes réflexions par le gazouillement d'une grive perchée sur la plus haute branche d'un bouleau. A l'instant, ce son magique fit reparaître à mes yeux le domaine paternel. J'oubliai les catastrophes dont je venais d'être le témoin, et, transporté subitement dans le passé, je revis ces campagnes où j'entendis si souvent siffler la grive. Quand je l'écoutais alors, j'étais triste de même qu'aujourd'hui. Mais cette première tristesse était celle qui naît d'un désir vague de bonheur, lorsqu'on est sans expérience ; la tristesse que j'éprouve actuellement vient de la connaissance des choses appréciées et jugées. Le chant de l'oiseau dans les bois de Combourg m'entretenait d'une félicité que je croyais atteindre ; le même chant dans le parc de Montboissier me rappelait des jours perdus à la poursuite de cette félicité insaisissable. Je n'ai plus rien à apprendre, j'ai marché plus vite qu'un autre, et j'ai fait le tour de la vie. Les heures fuient et m'entraînent ; je n'ai pas même la certitude de pouvoir achever ces Mémoires. Dans combien de lieux ai-je déjà commencé à les écrire, et dans quel lieu les finirai-je ? Combien de temps me promènerai-je au bord des bois ? Mettons à profit le peu d'instants qui me restent ; hâtons-nous de peindre ma jeunesse, tandis que j'y touche encore : le navigateur, abandonnant pour jamais un rivage enchanté, écrit son journal à la vue de la terre qui s'éloigne et qui va bientôt disparaître. » Les Mémoires d'Outre-Tombe - Chateaubriand
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CONCLUSION
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