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Publié parAngeline Martel Modifié depuis plus de 9 années
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Le soin de soi Motivation et pratiques d’autorégulation de la santé
Béatrice VICHERAT Centre de Recherche Education et Formation EA 1589 Séminaire doctoral Janvier 2015
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Etre acteur de sa santé tout au long de sa vie
Habitudes de vie 70 % considèrent que faire attention à son comportement permet de réduire considérablement les risques de développer un cancer 30 % déclarent avoir mis en place des actions spécifiques pour s’en préserver Tout au long de leur vie, les individus sont amenés à prendre des décisions concernant leur santé ou celle de leurs proches. Et même lorsqu’ils ne sont pas confrontés à la maladie, ils doivent être capables d’adopter des comportements favorables à la santé et de s’y tenir car le capital génétique n’est pas seul à déterminer l’état de santé, celle-ci étant « largement déterminée par les habitudes de vie et les conditions environnementales » Ainsi, de nombreux travaux épidémiologiques ont démontré que les comportements individuels défavorables à la santé tels qu’une consommation excessive de tabac, d’alcool, une alimentation déséquilibrée ou encore la sédentarité exposent les individus à des facteurs de risques responsables de pathologies connues pour être les premières causes de décès dans de nombreux pays (cancers, maladies cardiovasculaires, etc.) Pour autant, un sondage réalisé en 2012 par la Fondation ARC nous dévoilait que si sept Français sur dix sont conscients que « faire attention à son comportement permet de réduire considérablement les risques de développer un cancer » ils ne sont que trois sur dix à déclarer avoir mis en place des actions spécifiques pour s’en prémunir Dans un tel contexte, que sait-on vraiment des raisons qui motivent les individus à prendre un jour la décision d’arrêter de fumer ? De reprendre une activité sportive régulière et de s’y tenir ? Ou encore de veiller à équilibrer son alimentation ? Existe-t-il dans leurs histoires personnelles des évènements biographiques qui nous éclairent sur ces choix ? Sommes-nous plutôt en présence d’une pluralité de raisons d’agir qui se combinant les unes aux autres nous permettent de mieux comprendre les comportements adoptés ? Sondage Fondation ARC 2012
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La notion de bonne santé
Bien être 49 % Absence de maladie 36 % Maintien des capacités 15 % Etre en bonne santé, cela signifie quoi selon vous ? C’est cette question que nous avons posée lors de nos entretiens exploratoires à une quinzaine de personnes et nous avons été surpris de voir que pour 49 % d’entre eux, la bonne santé est associée à la notion de bien être, bien plus qu’à celle d’absence de maladie ou de maintien des capacités. Ainsi ce sont l’énergie, l’hygiène de vie, l’équilibre et le bien être qui sont évoqués spontanément plus près d’une personne sur deux. Etre bien dans sa tête, bien dans sa peau. Avoir envie de faire des choses. Se sentir bien dans un corps sain. Avoir le moral Ce qui nous renvoie à la définition de l’OMS « La santé est un état de complet bien être physique, mental et social, qui ne consiste pas seulement en l'absence de maladie ou d'infirmité » OMS, 1946
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EQUILIBRE ESPRIT / CORPS EDUCATION THERAPEUTIQUE DU PATIENT
Mise en perspective Bien Etre CULTE DU CORPS Restez jeune ! Soyez mince ! EQUILIBRE ESPRIT / CORPS Développement personnel Quête de sens Injonction Autonomie EDUCATION THERAPEUTIQUE DU PATIENT Soyez acteur de votre santé ! SANTE Pratiques d’autorégulation Pour autant nous avons cherché à mettre en perspective ce que nous recherchions, c’est-à-dire de quelle façon les individus s’autorégule au quotidien pour se maintenir en bonne santé tant le champ de la santé est vaste et la frontière entre bien être et santé est parfois difficile à délimiter. Nous avons également souhaité observer uniquement ce qui est fait spontanément et non sous l’emprise d’une pression extérieure Cette mise en perspective nous permet de situer le champ des pratiques d’autorégulation notamment par rapport à d’autres champs qui ne font pas partie de ce travail de recherche comme le développement personnel, l’injonction à rester jeune et beau ou encore à l’éducation thérapeutique du patient. Ce qui nous intéresse ici est uniquement ce que mettent en place les individus en bonne santé pour se maintenir en bonne santé. Ce qu’ils font spontanément et librement. Santé
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Etude compréhensive Enquête quantitative Enquête qualitative
138 personnes de plus de 18 ans – 53 % de femmes et 47% d’hommes Sous forme de questionnaire en ligne Enquête qualitative 15 personnes de plus de 18 ans - 45 % de femmes et 55 % d’hommes Sous forme d’entretiens semi dirigés Etude compréhensive 24 personnes entre 40 et 55 ans - 50 % de femmes et 50 % d’hommes Entretiens biographiques L’étude compréhensive que nous avons menée fait suite deux autres enquêtes : D’une part une enquête quantitative sous forme de questionnaire en ligne ayant pour objectif de comparer les croyances (Ce que je pense devoir faire pour rester en bonne santé) et les pratiques (Ce que je fais réellement) tout en les mettant en parallèle avec l’évaluation par le sujet de ses propres capacités (Si je le voulais, je pourrais facilement …) D’autre part des entretiens exploratoires pour comprendre les liens entre les pratiques, le discours sur les pratiques, les représentations et les trajectoires L’objectif de cette étude compréhensive étant de comprendre non seulement comment les individus exercent une influence personnelle sur leur santé, mais également quelles en sont les limites et quels sont les facteurs qui à l’inverse semblent favoriser leur implication dans la gestion de leur santé. Nous avons centré notre étude sur le mitan de la vie et privilégié une approche biographique car elle conçoit les individus comme des acteurs porteurs d ́une histoire et ayant la capacité d’interpréter la réalité
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Le mitan de la vie Prendre soin de soi
Manifestation des signes de vieillissement physique Changements psychologiques Transformation de la perception du rapport à soi et aux autres Prise de conscience du temps qui passe Bilan, crise ou questionnement « L’individu s’engage, aux alentours de la quarantaine, vers un temps de transition où, éclairé par l’expérience de sa vie, il commence à vouloir vivre davantage pour lui-même » Aubret, 2008 C’est sur le mitan de la vie que nous avons souhaité centrer notre étude. C’est-à-dire entre 40 et 55 ans car on assiste à : … Prendre soin de soi
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Etude compréhensive De quelle manière et sous quelles formes les individus au mitan de leur vie exercent-ils une influence personnelle sur leur santé ? Comment ils utilisent les signes que leur corps leur adresse pour adapter leur comportement Comment ils s’appuient sur leur connaissance du monde qui les entoure pour faire des choix Notre question de départ étant de e quelle manière et sous quelles formes les individus au mitan de leur vie exercent-ils une influence personnelle sur leur santé nous a conduit à explorer différentes facettes du processus d’autorégulation tels que : Quelle perception ont-ils des capacités dont ils disposent pour s’impliquer efficacement Comment ils se servent de leurs expériences passées pour adopter des comportements spécifiques
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Modèle de causalité triadique réciproque
Théorie sociocognitive de Bandura Histoire de vie Connaissances Compétences Croyances Prises de conscience Facteurs personnels Environnement Comportement C’est le modèle proposé par Bandura de causalité triadique réciproque qui nous est rapidement apparu comme le plus propice à analyser les comportements de santé tant notre étude nous livre de nombreux témoignages sur cette articulation entre facteurs personnels, environnementaux et comportementaux. Porteurs d’une histoire, de compétences acquises au fil du temps et de « dispositions à penser, à sentir et à agir », les individus nous ont démontré qu’ils possèdent la capacité d’agir non seulement sur eux-mêmes mais également sur leur environnement tout en étant confrontés en permanence aux contraintes et aux opportunités que les contextes dans lesquels ils évoluent leur imposent. Leurs comportements de santé sont à la fois fonction de la situation se présente à eux – ce qu’elle exige ou sollicite de leur part – et de leurs dispositions acquises au cours de leur expérience. Les choix qu’ils sont amenés à faire tout au long de leur existence pour se maintenir en bonne santé peuvent alors s’expliquer à la fois par ces trois facteurs qui s’autoalimentent en permanence Incitation à être acteur de sa santé Transformation du rapport à la santé Dépenses de santé en hausse Avènement des nouvelles technologies avec Internet et le Quantified Self Pratiques de santé Choix Autorégulation
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Trois pôles en interaction
Facteurs personnels Environnement Comportement L’histoire d’un individu, ses croyances, ses prises de conscience permettent souvent d’expliquer son comportement et les choix qu’il fait vis-à-vis de sa santé. Ainsi la perception qu’il a de sa capacité à prendre en charge sa santé nous éclaire sur le fait qu’il puisse ou non se risquer à s’automédiquer comme Solange, 50 ans, qui s’autorise parfois à administrer seule des médicaments à ses enfants mais précise immédiatement qu’elle se limite à « des trucs assez classiques » car elle ne considère pas « avoir la connaissance et le savoir pour pouvoir aller loin » Les croyances exercent également une influence importante. Elles sont souvent véhiculées par la famille comme pour Christelle, 47 ans, qui court très régulièrement car « chez nous, on bouge, on est convaincu que bouger ça maintient en bonne santé alors je cours et je le fais vraiment parce que c’est bon pour ma santé, mon moral et pour ma forme » Mais ce sont pour beaucoup les expériences vécues A l’inverse, ce sont parfois les comportements qui peuvent induire des transformations dans leurs perceptions notamment en termes d’efficacité ou de compétence comme le souligne Chrystelle, 47 ans qui s’efforce d’avoir une alimentation équilibrée depuis de nombreuses années et qui nous déclare « Je suis convaincue que je peux me maintenir en bonne santé. Je ne sais pas si c’est vrai mais je le vois comme ça. Là-dessus, je suis très sure de moi. Pour moi ce que je mange c’est tellement important pour ma santé » La course pratiquée régulièrement a modifié peu à peu l’aspect physique de Camille, 49 ans, qui nous déclare : « mes jambes sont devenues plus fines et plus musclées ». Mais au-delà de ce bénéfice physique certain, elle nous explique que cela a considérablement transformé l’image qu’elle avait de son corps. Cette nouvelle perception qu’elle en a l’incite alors encore davantage à poursuivre sa pratique sportive continuellement alimentée par son envie de garder un corps svelte et musclé. Franck nous explique quant à lui que ce qui a été déterminant pour arrêter de fumer, fût de reprendre la course régulièrement car cette pratique sportive lui a permis de prendre conscience que « les deux choses étaient fondamentalement opposées. Les dangers physiques du tabac et de l’activité physique. Je me suis dit, c’est vraiment pas raisonnable »
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Trois pôles en interaction
Facteurs personnels Environnement Comportement Lorsque les environnements changent, lorsqu’après un divorce ou une séparation, on se retrouve seul, les comportements de santé peuvent évoluer comme nous le confirme Camille, 49 ans. En évoquant sa consommation de tabac, elle nous déclare tout d’abord qu’elle « se trouve toujours de bonnes excuses pour ne pas arrêter » prenant conscience qu’elle « ne prend pas assez soin d’elle ». Elle relie cependant l’augmentation récente de sa consommation de tabac par sa séparation d’avec son mari : « J’ai augmenté ma consommation de tabac à cause de la séparation » Les contraintes imposées par certains environnements permettent aussi de comprendre comme nous l’explique Christelle, 47 ans qu’il soit parfois difficile quand on a des enfants en bas âge d’adopter une pratique sportive régulière et notamment à quel point une vie de famille avec des jeunes enfants peut être « contraignant notamment au niveau des horaires ». Elle nous explique qu’elle a enfin pu reprendre le sport lorsque ses enfants ont commencé à être plus autonomes. Franck, 41 ans, lui nous déclare qu’après avoir longtemps vécu en couple, il est de nouveau célibataire précisant qu’il « a tous les inconvénients du célibataire », c’est-à-dire « plus de mal à cuisiner pour une personne que pour plusieurs et de ce fait au niveau alimentaire c’est loin d’être le grand équilibre ». Il lui arrive de sauter des repas tout en sachant que « ce n’est pas bien pour sa santé » Au fil du temps, ayant de plus en plus le sentiment d’avoir acquis certaines compétences, les personnes que nous avons rencontrées font état de certains comportements adoptés au quotidien pour se maintenir en bonne santé mais nous avons également pu observer qu’elles sont à même de choisir ou même de construire les environnements dans lesquels elles évoluent. Ainsi le choix du médecin ou de l’approche thérapeutique adoptée revient fréquemment dans nos entretiens. Car même si comme Camille, 49 ans elles ont « l’impression d’avoir appris des choses » sans pour autant se « prendre pour un médecin non plus », il ne saurait être question de l’« écouter aveuglément ». « Ce n’est pas un hasard si je suis avec ce médecin » nous déclare Eliane, 47 ans car avec lui il est possible de « négocier » et « on peut discuter » car il faut avant tout être « d’accord quand on met quelque chose en place ». Jules, 40 ans, nous explique quant à lui que s’il a « besoin d'un dermato » il appelle quelqu’un : « Tu connais un bon dermato ? » car selon lui « le choix se fait par cooptation » Mais souvent, on se soigne seul et on adapte l’environnement dans lequel on se soigne en fonction de sa propre sensibilité comme nous le confie Lucie, 41 ans qui se soigne ainsi que ses enfants avec les plantes « des trucs assez classiques parce que je ne considère avoir la connaissance et le savoir pour pouvoir aller plus loin. Donc j’utilise des formules toutes faites vendues en pharmacie. J’ai des bouquins qui ont été écrits sur les soins par les plantes. De temps en temps quand j’ai un enfant qui a une gastro, je regarde ce qu’on peut lui donner autre que les pansements pour l’estomac » Le mitan de la vie est également parfois l’occasion de privilégier des environnements plus en accord avec soi-même comme pour Nathalie, 41 ans qui a choisi récemment de devenir consultante car « c'est un rythme de vie, un équilibre de vie qui me satisfait davantage que quand j'étais salariée. J'ai pas les transports, je n’ai pas des contraintes horaires fortes. Ce qui pour moi était assez, un peu pénible quand même et du coup j'ai l'impression de pouvoir mieux gérer ce qui n'est pas de l'ordre directement de la santé mais un bien-être »
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Trois pôles en interaction
Facteurs personnels Environnement Comportement Ce sont aussi les environnements qui impactent directement les attitudes des individus, leur motivation ou encore leurs perceptions comme l’illustre Camille, 49 ans qui nous explique comment confrontée à une situation nouvelle - l’irruption de la maladie dans la vie de son père atteint d’un cancer - elle a été amenée à apprendre certains gestes médicaux - répondant ainsi à sa demande pour lui venir en aide. C’est dans ce contexte bien particulier, qu’elle a pu ainsi développer de nouvelles compétences. Cette autre femme de 47 ans, Christelle, se souvient de l’arrivée de son premier enfant et de la façon dont son nouvel environnement a pu modifier durablement sa perception de la santé : « Il y a eu un déclic. Il faut être une bonne maman. On prend alors conscience de la maladie et de la bonne santé » Ce sont parfois des épisodes de maladies vécus soi-même ou chez un proche qui influencent durablement les individus. Ainsi cette femme nous raconte que lorsque son père s’est fait opérer, elle a ressenti le besoin de savoir et qu’elle s’est mise à la recherche d’informations sur Internet développant ainsi de nouvelles connaissances. Parvenues au mitan de leur vie, les personnes que nous avons rencontrées évoquent souvent le besoin de contrôler davantage l’environnement dans lequel elles évoluent. Nathalie, 41 ans, nous explique que vieillir lui a permis de prendre du recul, d’avoir une meilleure connaissance des choses et de leur fonctionnement, y compris d’elle-même et qu’ainsi elles peuvent devenir « un peu plus choisies et que c’est un peu moins lourd » Ainsi, l’expérience des années qui passent est souvent décrite comme permettant de changer sa perception de la vie comme pour Solange 50 ans car désormais « Il faut savoir se préserver et prendre ce qui est bon pour soi. Trier et ce qui est pas bon, laisser de côté. On sait ce qui est bon pour soi, on sait ce qu’on veut. On sait ce dont on n’a pas envie » Cette nouvelle perception lui a permis en changeant son regard « sur les autres et sur ce qui nous entoure » d’être plus à l’écoute de son corps et ainsi d’aménager son environnement : « Aujourd’hui, j’ai envie d’être plus en phase avec les demandes physiologiques du corps. Apprendre à prendre du temps pour soi. Savoir dire non car on se fatigue à dire oui à tout le monde et on ne se préserve pas en disant oui à tout et à n’importe quoi et ça on l’apprend avec maturité et avec l’âge »
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Je vous remercie pour votre attention ….
« On dit souvent qu'en vieillissant ça va mieux. On avance dans la vie, on a plus de recul. On a une meilleure connaissance des choses, du fonctionnement, y compris de soi-même et du coup ça peut devenir un peu plus choisi et un peu moins lourd. Il y a aussi une réflexion qui s'alimente et c'est une réflexion qui peut partir de quelque chose de très prosaïque aussi bête que je suis rouillée, j'ai mal au dos, c'est insupportable. Alors j’ai essayé de faire du sport mais j'arrivais j'étais déjà épuisée et du coup je n'y arrivais pas donc à un moment je me suis dit : laisse tomber et arrête de te sentir coupable de ne pas y arriver » Nathalie, 41 ans
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