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Section 2 - Du Traité de Rome à la politique monétaire commune L'intégration monétaire européenne est apparue rapidement nécessaire au bon fonctionnement.

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1 Section 2 - Du Traité de Rome à la politique monétaire commune L'intégration monétaire européenne est apparue rapidement nécessaire au bon fonctionnement des marchés relativement décloisonnés des biens et services. On peut distinguer deux grandes étapes de l'unification monétaire de la CE : - l'intégration monétaire imparfaite : du traité de Rome au Système monétaire européen ; - l'intégration monétaire complète : la réalisation de la monnaie unique à partir de 1999.

2 A - L'intégration monétaire européenne avant l'Union monétaire Dans le traité de Rome, les dispositions monétaires prévues étaient brèves et assez générales  gestion par les EM de leur politique de conjoncture et de balance des paiements. Le traité mentionnait la coordination des politiques économiques, prévoyait le concours mutuel et annonçait la libération des mouvements de capitaux pour permettre le bon fonctionnement de la zone européenne d'intégration (libération des mvts de capitaux qui au final se révèlera bien problématique !). L'intégration monétaire, dont le SME est à ce jour l'expérience la plus longue, n'est pas faite de progrès continus : ce système a été précédé en particulier du rapport Werner du 8/10/1970 définissant les conditions d'une UEM intégrale mais sans monnaie unique ou du Serpent monétaire européen à partir d'avril 1972.

3 1 - L'expérience du Serpent monétaire européen Les accords de Washington de décembre 1971 élargissaient les marges de fluctuation entre le $ et les monnaies tierces de ± 1 % à ± 2,25% autour de la parité officielle  risque de perturber gravement les échanges intra-CEE. A cette époque, c'est par l'intermédiaire de leur cours vis-à-vis du $ que sont établis les cours des monnaies européennes entre elles (écart instantané entre 2 monnaies européennes pouvant atteindre 4,5%). L'accord de Bâle du 10/4/1972 permettait de resserrer les marges de fluctuation des monnaies européennes entre elles à ± 2,25% autour de la parité déclarée (graphique 3).

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5 Ce mécanisme réduisait les marges de fluctuation des monnaies européennes entre elles et faisait fluctuer ce bloc dans l'intervalle de 4,5 % autorisé par les accords de Washington (le serpent dans le tunnel). Après le choc pétrolier de 1973, une période de désordres monétaires intervient dans la CEE. Des difficultés macro-économiques internes et externes apparaissent dans les EM: déséquilibres extérieurs, chômage, inflation, insuffisante coordination des politiques économiques. En 1977, l'intégration commerciale européenne est menacée d'éclatement. Le Conseil européen de Bruxelles de décembre 1978 décide d'adopter un nouveau système monétaire, le Système monétaire européen. Le 13/3/1979, les textes relatifs au Sme se substituent aux dispositions relatives au Serpent monétaire.

6 2. Les caractéristiques du Système monétaire européen Le nouveau système monétaire tente de pallier les insuffisances de l'expérience précédente du Serpent monétaire et restera en vigueur jusqu'au 31/12/98. Cet accord de change fondé sur une monnaie - panier, l'Ecu, essaie d'instaurer une symétrie des obligations entre partenaires européens autour de changes fixes mais ajustables par accord mutuel pour tenir compte des réalités économiques. L'Ecu est défini comme un panier de 11 monnaies, qui a été gelé le 1er novembre 1993 par le traité de Maastricht. Au 1/1/1990, l'Ecu équivalait à 0,6242 DM + 1,332 FF + 0,2198 FLN +151,8 LIT + 3,431 FBL + 0,1976 KRD + 0,008552 £IRL + 6,885 P.ESP + 0,08784 £GB + 1,44 Dr + 1,393 E.PORT (les francs belge et luxembourgeois étant une seule et même monnaie).

7 La quantité initiale de chaque devise dans l'Ecu a été déterminée à partir de la part relative du Pib et de celle du commerce extérieur intra-communautaire de chaque EM dans l'ensemble de la Communauté. Les changements de parité des monnaies ont modifié leur poids dans l'Ecu  révision statutaire de sa composition tous les 5 ans. Ces ajustements ont été supprimés par le traité de Maastricht (article 109 G) et les monnaies des Etats de l’élargissement du 1/1/95 (Autriche, Finlande et Suède) n’ont pas été incluses dans le panier Ecu. Ces révisions, mutuellement acceptées, ne pouvaient pas modifier la valeur externe de l'Ecu. la grille des parités bilatérales. Dans ce système de changes fixes, chaque monnaie européenne avait un cours pivot rattaché à l'Ecu. Le croisement des cours pivots bilatéraux des monnaies communautaires permettait la détermination de la grille des parités bilatérales.

8 L'application à chaque cours pivot bilatéral de la bande de fluctuation autorisée (± 2,25 % ou ± 6 % pour les monnaies à marge large flottant avant la mise en place du Sme) définissait les limites bilatérales d'intervention. Après la crise monétaire d'août 1993, ces marges ont été élargies à ± 15 %. Les EM se sont engagés à maintenir leur monnaie à l'intérieur de la marge définie par ces limites. Dès qu'elles sont atteintes, les opérateurs se tournent vers les autorités monétaires qui fournissent toute quantité nécessaire de monnaies communautaires, à ces taux de change garantis. L'obligation d'intervention illimitée est contrainte par le montant des réserves de change et des possibilités de crédit progressivement accrues. Les interventions intra - marginales sont possibles : ces opérations facultatives à l'initiative des BC ont surtout concerné les pays dont la monnaie s'affaiblissait.

9 3. Les résultats du Système monétaire européen Le bilan du Sme fait apparaître une situation contrastée : des résultats plutôt positifs ont été obtenus en matière de stabilité des taux de change et de désinflation (cette dernière étant un phénomène largement international). Le Sme marque pour ses participants la fin des dévaluations compétitives. Les analyses statistiques sur la volatilité des taux de change montrent qu' après l'instauration du Sme, la volatilité des taux de change a fortement diminué entre les devises participant à l'accord de change. Celui-ci a amorti les perturbations financières qui ont aggravé l'instabilité des changes dans le SMI.

10 Les réaménagements, notamment la réévaluation continue du mark, répondent aux modifications des fondamentaux (évolution des coûts et des prix des pays partenaires). Après la crise de change de 1993, les marges de fluctuation des monnaies européennes ont été élargies à ±15% autour de leur cours pivot (excepté la parité florin - mark), instaurant de fait le principe d'un flottement des monnaies. De façon générale, les difficultés de change se sont accrues après la libération des mouvements de capitaux dans la CE en juillet 1990 : c’est une manifestation du triangle d'incompatibilité (impossibilité pour un pays de bénéficier simultanément d'une autonomie de sa politique monétaire, de la liberté de circulation des capitaux et de conserver des taux de change fixes ; seuls 2 de ces objectifs peuvent être atteints en même temps).

11 Les crises de change récurrentes traduisent la dégradation de l'ancrage sur le mark de monnaies d'EM ne devant pas conduire de politique monétaire restrictive en raison de leur taux de chômage élevé. Globalement, l'existence du Sme a permis de renforcer la convergence de la politique économique des pays membres de la CEE, convergence que l'on peut qualifier d'alignement sur la politique monétaire allemande. L'Allemagne a imposé sa politique monétaire et les pays inflationnistes de la Communauté ont dû défendre la parité nominale de leur monnaie contre le mark. Le résultat a été le suivant : les monnaies fortes sont celles qui ont eu tendance à se déprécier en termes réels tandis que les monnaies faibles ont au contraire tendu à s'apprécier en termes réels.

12 C ETTE TENDANCE À LA SOUS - ÉVALUATION DES DEVISES FORTES ET À LA SURÉVALUATION DES DEVISES FAIBLES CONSTITUE UNE CARACTÉRISTIQUE MAJEURE DU SME. Cette asymétrie de fonctionnement a constitué la principale limite à son efficacité. Les BC dont la monnaie tendait à se déprécier sont en général intervenues à l'intérieur des marges autorisées, à l'exception de la Bundesbank dont le choix anti-inflationniste  pas d’intervention pour freiner l'appréciation de sa monnaie à l'intérieur du système. De plus, au cours des périodes de tension, ce sont plutôt les pays à monnaie faible qui ont relevé leur taux d'intérêt alors que les taux d'intérêt allemands restaient inchangés (jusqu'à l'accord de Nyborg de 1987). La cohésion du SME a été assurée davantage par une coordination des politiques monétaires via une gestion concertée des taux d'intérêt dans les EM que par des interventions sur le marché des changes.

13 Une hiérarchie des rôles est apparue : les taux d'intérêt allemands ont été modifiés en réponse aux taux étasuniens et aux évolutions du change du dollar. En règle générale, les taux français et italiens ont été ajustés en fonction des mouvements des taux allemands et des tensions sur le marché des changes européens. Cette situation a gêné les politiques macro-économiques nationales en maintenant un différentiel d'intérêt positif par rapport à l'Allemagne. Les critères monétaires de Maastricht (inflation, taux d'intérêt et taux de change) se sont opposés à ceux de déficit et d'endettement, le respect des premiers entraînant une dégradation des seconds.

14 Au total, le Sme apparaît surtout comme un dispositif de convergence des économies, répondant aux objectifs de la 1ère étape du projet Delors d'Union économique et monétaire (Uem) de juin 1989. Cette convergence est davantage nominale que réelle, c'est-à-dire que les économies ont fonctionné de façon plus harmonisée mais avec un écart important de leurs structures productives (retards de convergence réelle) qui aurait dû se traduire par un report de la date d’entrée en vigueur de la zone euro.. Une telle situation rendait inévitable l'apparition de chocs économiques asymétriques dans l'Union monétaire qui allait suivre, union monétaire réalisée sans se doter des outils de politique économique nécessaires à sa réussite.

15 B - L'intégration monétaire complète : la réalisation de la monnaie unique Le principal problème en union monétaire concerne le traitement des chocs économiques internes dans un contexte de perte de l'instrument du taux de change. Cette question est abordée par la théorie des zones monétaires optimales. Elle énonce qu'une zone monétaire optimale regroupe des pays qui parviennent à corriger leurs déséquilibres réels à l'intérieur d'un espace à monnaie unique malgré la perte du recours au taux de change national (un instrument d'ajustement aux chocs économiques étant désormais perdu, la variation des taux de change intra-communautaires). La théorie des ZMO indique les conditions économiques qui doivent exister dans les Etats de la zone monétaire pour que les coûts d'ajustement aux difficultés économiques des pays de cette zone soient nuls ou les moins élevés possibles.

16 1 - Les enseignements de la théorie des zones monétaires optimales Plusieurs critères de définition d'une ZMO existent, qui n'ont pas la même signification. Certains étudient les conditions de l'ajustement économique dans le contexte de perte de l'utilisation du taux de change national. D'autres identifient les conditions économiques qui rendent l'utilisation du taux de change national inutile ou inopérante. Les premiers sont les plus fondamentaux : ils indiquent que la flexibilité factorielle est une condition indispensable pour qu'une union monétaire puisse annuler les coûts des chocs économiques et être ainsi optimale.

17 a - L’optimalité par la flexibilité factorielle R. Mundell montre que la flexibilité du travail est une variable essentielle d'ajustement dans une union monétaire (mobilité géographique ou/et variation du taux de salaire). Soit un monde à 2 pays mono - producteurs A et B, aux prix domestiques rigides, liés entre eux par un taux de change fixe. Une perte de compétitivité - prix dans le pays A  achat des produits du pays B. Le pays A  sous-exploitation de son potentiel productif, hausse du taux de chômage et déficit de sa balance commerciale. Le pays B  surcharge des capacités de production, élévation de l’inflation et excédent de la balance commerciale. En union monétaire, ce déséquilibre ne peut être corrigé que par la flexibilité factorielle (salaire ou mobilité géographique). Dans le pays A, la hausse du sous-emploi  baisse du taux de salaire. Dans le pays B, la croissance économique  une meilleure rémunération du travail.  L'ajustement économique : dans le pays A, le prix de la production baisse,  les produits de ce pays plus compétitifs  hausse de la demande domestique et dans le pays B, baisse de la demande domestique due à l'élévation du prix de la production.

18 . Une autre solution existe pour résorber le choc subi par le pays A : les travailleurs de ce pays peuvent émigrer dans le pays B pour y satisfaire la demande de travail excédentaire. Cette solution élimine le chômage dans le pays A et résorbe le sous-emploi dans le pays B, sans variation du taux de salaire dans les deux pays. Selon R. Mundell, la mobilité du travail à l'intérieur de la zone fournit la voie d'ajustement dans un système de changes complètement fixes (ou à monnaie unique).

19 Une autre voie d'ajustement, plus discutable, réside dans la mobilité du facteur capital. En 1973, J.C. Ingram souligne la voie d'ajustement permise par la mobilité du capital. La résorption des chocs économiques peut s'effectuer par transfert de capitaux financiers de la zone en expansion vers la zone en récession d'une union monétaire. Mais dans un contexte de globalisation financière, la libération des capitaux ne lève pas l'indétermination sur leur destination parce que ceux-ci auront tendance à s'allouer dans les zones offrant les meilleures conditions de sécurité et de rémunération. Ce critère doit donc être utilisé avec prudence dans la définition d'une zone monétaire optimale.

20 b - L’optimalité par la convergence économique Les critères non liés à la mobilité factorielle rendent compte des évolutions économiques des Etats et de leur convergence, phénomènes de nature à faciliter le renoncement à l'utilisation du taux de change intra-communautaire : - le degré d'ouverture des économies (McKinnon, 1963), mesuré par le rapport entre les biens échangeables et le Pnb, révèle l'opportunité de création d'une union monétaire. Plus ce rapport sera élevé, plus les pays membres de la zone d'intégration régionale auront intérêt à avoir des taux de change stables (ou une monnaie unique) qui faciliteront le développement des échanges.

21 - l'importance de la diversification de l'appareil de production est soulignée par P. Kenen (1969) : un pays dont la structure productive est plutôt spécialisée a intérêt à choisir un système de changes flexibles pour endiguer les pertes de compétitivité affectant ses activités (critère de la diversification sectorielle). En revanche, un pays dont les industries sont diversifiées sera concerné par des chocs sectoriels de compétitivité, éventuellement forts, mais, sur un plan macro-économique, ils seront plus atténués. Ce pays peut alors adopter un système de changes complètement fixes parce que la crise ne peut être que sectorielle. Dans une économie diversifiée, la diminution de la demande n'affectera en fait qu'un faible % de ses exportations et l'impact sur l'emploi sera réduit. L'ajustement s'effectue par la mobilité intersectorielle du travail si un recours à la modification du taux de change n'est plus possible.

22 - Le critère des préférences homogènes. En 1986, C. Kindleberger indique que des échanges commerciaux importants à l'intérieur d'une zone intégrée révèlent que les pays ont les mêmes préférences à la fois pour les marchandises échangées et pour les biens collectifs. Ces préférences identiques ou homogènes concernent surtout le choix des objectifs-clés d'une politique économique, en particulier la lutte contre l'inflation.

23 Toutefois, l'arbitrage inflation - chômage peut différer d'un pays à l'autre, entraînant des coûts d'ajustement dans l'union monétaire. Ceux-ci n'existent pas dans l'analyse monétariste où l'inflation est un phénomène purement monétaire sans effets réels, n'impliquant aucun coût. La Commission européenne a négligé la relation inflation – chômage (courbe de Phillips), doutant de sa réalité dans l'UEM. Cette conception  choix monétariste des critères de convergence de Maastricht (absence de tout indicateur relatif au chômage, par exemple).

24 Ces critères nominaux sont les suivants : - inflation : elle ne doit pas être > de plus de 1,5 % à celle de la moyenne des trois EM les moins inflationnistes ; - déficit budgétaire: il ne doit pas être > à 3 % du Pib, sauf s'il est en diminution régulière ou en cas de circonstances exceptionnelles ; - dette publique : elle ne doit pas être > à 60 % du Pib, sauf si elle diminue vers le seuil de référence; - taux d'intérêt à long terme : il ne doit pas être > de plus de 2 points au taux moyen à long terme des 3 Etats membres les plus performants en matière de stabilité des prix ; - change : faire partie du Sme depuis au moins 2 ans avec respect des marges de fluctuation normales entre les monnaies participant à ce système, sans dévaluation de la monnaie par rapport à celle d'un autre EM.

25 Ces critères exercent une contrainte de fonctionnement pour les économies désirant participer à l'union monétaire. La convergence réelle n'est pas recherchée (sauf dans le LT par la politique des fonds structurels, ce qui reste très insuffisant), d’où l’existence de chocs asymétriques générateurs de coûts de fonctionnement de l’union monétaire. - le critère d’intégration fiscale. H. G. Johnson propose en 1972 un critère de définition d’une ZMO lié à la possibilité d’absorption d’un choc économique par des mécanismes budgétaires stabilisateurs. La perte de revenu issue d’un choc économique est alors partiellement compensée par le jeu des stabilisateurs fiscaux automatiques (moins d’impôts et plus de transferts). Une ZM est optimale si la compensation budgétaire permet d’y amortir un choc asymétrique. Dans les fédérations existantes (F. Zumer, 1998), le budget central amortit spontanément de l’ordre de 10 à 42 % d’une récession régionale (de 10 à 40 % aux USA, 12 à 24 % au Canada, 33 à 42 % en Allemagne).

26 Un budget fédéral ne permet d’absorber qu’une fraction minoritaire d’un choc sur le revenu régional. Il ne constitue donc qu’une réponse partielle et très insuffisante à la résorption des coûts sociaux qui résultent des chocs asymétriques. Qu’en est-il de l’optimalité de la zone euro ? Des indices d’optimalité partielle de la zone euro existent, appelant des mécanismes correcteurs forts. - en ce qui concerne la mobilité du travail, les comparaisons internationales suggèrent que celle-ci est faible entre pays membres de l’UE. La mobilité du capital au sens d’Ingram n’est pas davantage réalisée. - le degré d’ouverture des économies (Mc Kinnon) est vérifié dans la zone euro. Les dévaluations inopérantes du SME valident la pertinence de l’abandon du taux de change national comme instrument d’ajustement à des chocs de compétitivité-prix dans les économies concernées.

27 - le degré de diversification sectorielle (Kenen) est en partie respecté dans la zone euro actuelle (excepté en Irlande et en Finlande,…). - le critère des préférences homogènes (Kindleberger), traduit par les critères de Maastricht (convergence nominale des économies), n’est qu’en partie vérifié, notamment si l’on se réfère à la période actuelle de non-respect des critères de déficit budgétaire et de dette publique. Ce critère ne prend pas en compte la convergence réelle des économies (celle des systèmes productifs) dont l’insuffisance est source de chocs asymétriques redoutables dans l’union monétaire. - le critère du degré d’intégration fiscale (Johnson) n’est pas vérifié. Il n’y a pas de budget fédéral de la zone euro (il existe un budget général de l’Union européenne, pluriannuel et en équilibre, c’est-à-dire un budget sans fonction stabilisatrice, …).

28 Cette question est d’importance parce que la thèse de Frankel et Rose (1998) d’endogénéisation du processus intégrateur européen en particulier monétaire n’est en réalité pas à l’œuvre (l’intégration monétaire produisant elle-même les conditions de son optimisation par davantage d’intégration). La thèse de P. R. Krugman (1993) selon laquelle l’intégration économique aboutit à plus de spécialisation, de concurrence et de chocs asymétriques est davantage vérifiée. Les tests empiriques récents montrent que, si effectivement les cycles économiques semblent bien corrélés pour les grands pays de la zone euro (condition d’efficacité de la politique monétaire), en revanche, leurs systèmes productifs donnent lieu principalement à un commerce intra-branche vertical (et non pas horizontal), source de coûts d’ajustement semblables à ceux des échanges interbranches.

29 Dans ces conditions, pour lutter contre les inévitables chocs asymétriques, la politique monétaire doit être complétée par une politique budgétaire fédérale forte (non envisagée aujourd’hui). Toutes les politiques d’allocation des ressources seraient alors centralisées de façon à pallier les inégalités de développement économique qui se creusent dans la zone euro (Grèce, Espagne, Portugal, Italie, France d’un côté, Allemagne, Pays-Bas, Autriche, etc d’un autre côté)  autant dire une tâche hors de portée de l’UE actuelle… qui implique une refondation de celle-ci. 2 - La politique économique en union monétaire L'insuffisante convergence économique des Etats membres crée l'apparition de chocs asymétriques dont l'origine est multiple (chocs de demande, d'offre, chocs périphériques dus aux effets d'agglomération des activités dans les régions déjà développées, etc.). Comment les traiter ? a - Le contexte général du policy mix européen

30 Ces déséquilibres sont traités par les politiques économiques de la zone euro : d'une part, par les politiques budgétaires nationales contraintes par le budgétarisme des Etats qui les conduit à soutenir l'activité par l'assainissement des finances publiques et, d'autre part, par le Pacte de stabilité et de croissance (1997) et le Pacte budgétaire européen (2013). Le PSC veut éviter qu'une politique budgétaire laxiste d'un Etat ne pénalise les autres Etats par son impact sur les taux d'intérêt de la zone. Il s'appuie sur la notion de déficit public excessif et indique qu'un dépassement du seuil de 3% est possible (événement majeur, imprévisible et exogène au pays -catastrophe naturelle- ou récession sévère). Ce Pacte suggère la recherche par les nations européennes de soldes budgétaires équilibrés ou excédentaires en situation normale. Les EM ont ainsi une marge de sécurité (jeu des stabilisateurs automatiques en récession).

31 Le budget général de l'UE ne joue pas le rôle de stabilisation des chocs asymétriques dans l'Union monétaire. Son évolution vers un budget fédéral peut fournir les moyens de cette action, solution écartée par les Etats. Un budget fédéral n’est pas pour autant la panacée contre les chocs asymétriques (moins de la 1/2 du choc sur le revenu régional compensée par un tel budget). La politique monétaire commune relève de la Banque centrale européenne (Bce), qui naît le 1er juin 1999 à Francfort en remplacement de l’Institut monétaire européen. Elle exerce une tutelle sur les Banques centrales des pays de la zone euro, avec lesquelles elle forme l’Eurosystème (Bce et Instituts d’émission des Etats membres de l’UE). L'action de la Bce s'appuie sur l’utilisation de 3 grandes catégories d’instruments (facilités permanentes, open market, réserves obligatoires) en vue d'un objectif final de stabilité des prix.

32 L’une des difficultés des autorités monétaires est de résoudre la contradiction entre la nécessaire unité de cette politique et les divergences économiques entre EM (chocs asymétriques). Néanmoins, la Bce demeure l’institution la plus appropriée pour répondre aux chocs symétriques affectant la zone euro (récession généralisée en Europe). La politique de change concerne le contrôle des fluctuations quotidiennes de l’euro sur les marchés des changes, au moyen de déclarations publiques des dirigeants de la Bce orientant les anticipations des opérateurs et d’interventions de l’Eurosystème sur ces marchés. Elle détermine aussi le choix entre une politique de change active (contrôle effectif de la valeur du taux de change) ou passive (pratique du "benign neglect").

33 La meilleure articulation possible entre politique monétaire et politique budgétaire, c'est-à-dire la recherche d'un policy mix optimal, se heurte à la difficulté suivante: si la politique monétaire est unique, en revanche, la politique budgétaire, prérogative nationale, est contrainte dès l’origine par le Pacte de stabilité et coordonnée au sein du Conseil Ecofin. En fait, le policy mix ne peut que s'ajuster sur les décisions du pôle monétaire, ce qui ne laisse pas d'autres solutions que l'assainissement des finances publiques  le policy mix européen praticable n'est donc pas adapté au traitement des chocs asymétriques.

34 Les gouvernements nationaux peuvent alors vouloir recourir à des mesures nationales de traitement de leurs difficultés spécifiques: ainsi, la Finlande (tissu économique est peu diversifié) a créé en novembre 1997 un fonds national de stabilisation des chocs économiques, indépendant du budget des administrations publiques et permettant de contourner la contrainte du Pacte de stabilité.

35 b - La crise actuelle des dettes souveraines de la zone euro Elle vérifie partiellement les modèles de crise de change de troisième génération dans la mesure où la crise de change de la zone euro n’est pas avérée (l’euro fort a pénalisé les économies divergentes de cette zone, tout particulièrement les pays périphériques ou d’Europe du Sud, certains d’entre eux profitant aujourd’hui de la dépréciation de l’euro).

36 La crise économique internationale de 2008 a fait apparaître de sérieuses divergences économiques au sein de la zone euro (19 membres depuis le 1/1/ 2015 avec l’adhésion de la Lituanie). Un certain nombre de pays ont enregistré des déficits de finances publiques significatifs (Grèce, Portugal, Espagne, etc) dans un contexte de faible croissance économique et de forte hausse du chômage. En 2014, la France se trouve toujours au-dessus du seuil de 3 %, avec un déficit public égal à 4 % du PIB. À la fin du deuxième trimestre 2015, la dette publique de la France s'établit à 2 105,4 milliards d’euros, soit 97,6 % du PIB. Quatre États européens ont réalisé un excédent public en 2014 : le Danemark (+ 1,2 %), l’Allemagne (+ 0,7 % et un ratio Dette publique/PIB égal à 74,7 % en 2014), l’Estonie (+ 0,6 %) et le Luxembourg (+ 0,6 %).

37 En matière de solde des transactions courantes, le graphique ci-dessous fait apparaître qu’au sein de la zone euro, la France et l’Allemagne ont des résultats opposés en 2011 et 2014. A noter la bonne performance de pays de la zone euro sensibles à la dépréciation de l’euro, de pays hors zone euro tels que la Suède ou le Danemark et les résultats dégradés de pays spécialisés dans et hors zone euro.

38 Après les effondrements bancaires américains, les marchés des liquidités ont été affectés. A partir de 2008, la BCE a rompu avec les règles imposées par ses statuts et a injecté plusieurs milliards d’euros dans le circuit monétaire européen, pour contrer la crise de liquidité qui frappait les banques européennes. Simultanément, les Etats ont maintenu leurs dépenses publiques dans un objectif contra-cyclique. Des milliards d’euros de dépenses publiques  injectés pour lutter contre les risques de récession. Le financements des déficits budgétaires ont inquiété des prêteurs doutant de la faculté de remboursement des pays emprunteurs. Les Agences de notation ont dégradé les dettes souveraines et les banques. La crise grecque est alors intervenue avant celles de l’Irlande, du Portugal, de l’Espagne, de l’Italie…

39 Les accords monétaires européens existant à l’époque ne prévoyaient pas ce type de situation. Le Fonds de stabilisation européen est né de cette crise. Le 10 mai 2010, un Fonds de Stabilisation de 750 milliards d‘euros est créé, approvisionné comme suit : 60 milliards d‘euros provenant de la Communauté européenne, autorisée à emprunter au titre de l’Assistance Financière, garantis par le budget européen (Mécanisme européen de stabilité financière ou MESF); 440 milliards apportés par les EM de cet accord sous forme de garanties (la G-B ne s’y joint pas, n’étant pas membre de la Zone euro) via la création d'un Fonds européen de stabilité financière (FESF) et 250 milliards apportés par le FMI. Le premier bénéficiaire de la solidarité européenne, l’Irlande, a reçu un volume global de 85 milliards d’euros, cofinancés par le FE S F et le FMI.

40 Le Fonds européen de stabilisation, mis en place à la suite de la crise des dettes souveraines en mai 2010 afin d’éviter à la Grèce le défaut de paiement, a été remplacé par le Mécanisme européen de stabilité (MES) qui est entré en vigueur le 27 septembre 2012. L'assistance financière prévue par le Mécanisme européen de stabilité est conditionnée, depuis le 1er mars 2013, à la ratification par l'État concerné du Pacte budgétaire européen instaurant une règle d'or budgétaire devant prendre effet dans les droits nationaux, sous forme de dispositions contraignantes et permanentes de préférence constitutionnelles, au plus tard le 1er janvier 2014.

41 Le Mécanisme européen de stabilité (MES) est un instrument de solidarité financière permanent qui peut intervenir sur les marchés pour aider, soit un État membre de la zone euro menacé de faillite, soit une banque devant être recapitalisée, à condition que l’EM concerné ait ratifié le Pacte budgétaire européen (ou TSCG). Le MES peut intervenir quand les taux d'intérêt d'un État membre deviennent insupportables et menacent la stabilité financière de la zone euro. Le MES fait l'objet d'un traité ratifié par les États membres de la zone euro, agrafé au traité de l'UE.

42 La capacité de prêt du MES est de 500 milliards d'euros en 2014. En y ajoutant les prêts non utilisés du FESF (200 milliards d'euros), le MES est de 700 milliards d'euros, soit l'équivalent de celle du FMI. Le capital du MES est composé de 80 milliards d'euros de fonds propres et de 620 milliards d'euros de capitaux «appelés», c-à-d empruntés selon les besoins sur les marchés. Les fonds propres du MES doivent toujours représenter au moins 15 % de ses emprunts. À tout moment, la capacité du MES pourra être augmentée si les États le décident.

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44 Plus précisément, le MES peut apporter son aide financière de 4 façons différentes: renflouer un État qui ne peut pas se financer sur les marchés ; racheter de la dette d'État sur le marché primaire et secondaire; recapitaliser les banques via un prêt au gouvernement; accorder une ligne de crédit souple, qui garantisse tout ou partie de ses émissions sur les marchés. Notons que le Fonds européen de stabilité financière (FESF) poursuit ses programmes de prêts à la Grèce, l'Irlande et le Portugal. Il ne pouvait plus s'engager dans un nouveau programme d'aide après juillet 2013. Mais il existera encore de nombreuses années, le temps que toutes ses obligations arrivent à échéance. Indiquons au passage que le MES représente 700 milliards d’€ et les engagements sur instruments financiers à terme (Hors-bilan) des 4 banques systémiques françaises s’élevaient en 2011 à 95 922 milliards d’ € (le bilan de ces 4 banques atteignant 8349 milliards d’ €). Source : ACPR

45 Remarque : quel contenu du Pacte budgétaire européen ou Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG) ? C’est un mécanisme accepté par 25 des 28 États membres de l'UE sur la convergence de leur union économique et monétaire, notamment la zone euro. Le TSCG est entré en vigueur le 1er janvier 2013. L'article 3 de ce Traité fixe les principales dispositions de la discipline budgétaire : - principe de l'équilibre ou de l'excédent des budgets des administrations publiques ; - limite du déficit structurel autorisé portée de 1 % à 0,5 %, pour l'«objectif à moyen terme » que chaque pays de l'UE se fixe. Deux exceptions à la règle sont posées : - les circonstances exceptionnelles sur lesquelles le gouvernement n'a pas de prise ; - les États dont la dette publique est inférieure à 60 % du PIB peuvent avoir un déficit structurel de 1 %.

46 En septembre 2012, le conseil des gouverneurs de la BCE a autorisé des rachats «quantitativement illimités» d’obligations publiques de court terme (moins de trois ans) sur le marché secondaire. Mais pour bénéficier de ce programme, un pays devait solliciter l’assistance du FESF, laquelle était conditionnée à de profondes réformes économiques (marché du travail notamment). De plus, ces rachats étaient «stérilisés» – pour ne pas injecter trop de monnaie dans l'économie, la BCE retranchait ailleurs la somme consacrée à son programme de rachats de dettes publiques (précautions abandonnées avec la politiques de QE actuelle). Cela a favorisé une détente des taux d’intérêt. Les taux à dix ans espagnols et italiens, ont connu une nette baisse, bien que la situation restait inconfortable (moins de 4,5% pour l’Italie, niveau de mars 2012 pour l’Espagne).

47 Lors de la levée de fonds sur les marchés le 25/11/2012, la France a bénéficié de taux nominaux négatifs sur ses emprunts à 3 et 6 mois, et quasi-nuls sur un an. La sanction de l'agence Mood'ys (engagements financiers de la France envers des pays tels l’Italie) n’a pas eu d’impact négatif (taux d'emprunt à 10 ans de la France à leur plus bas niveau le jeudi 29/11/2012 : 2,03%). Aujourd’hui, dans un contexte macroéconomique plus dégradé, les conditions d’emprunt pour la France sont favorables sur les marchés financiers internationaux (taux d’intérêt légèrement négatifs -0,3% au 1/12/2015- pour des emprunts jusqu’à une échéance de 2 ans, 0,8 % pour une échéance de 10 ans en date du mardi 1/12/2015 (en Allemagne, ce taux se situait aux alentours de 0.6%).

48 Plus récemment, la BCE a tenté d’agir sur la croissance économique en proposant des liquidités aux banques commerciales. A noter en septembre 2014 le succès mitigé du TLTRO (Targeted Long Term Refinancing Operations ou opérations de refinancement ciblées à long-terme), un système de prêt à LT (4 ans) de la BCE aux banques européennes. Mais l’adjudication de mars 2015 a connu un succès relatif plus important (98 milliards d’€). Les prêts TLTRO sont bon marché: taux initialement fixé à 0,15%, ramené en janvier 2015 à 0,05% pour accroitre leur attractivité (banques pouvant s'endetter quasiment gratuitement). Les banques ne pouvant prouver qu'elles ont prêté au secteur privé rembourseront plus tôt l'argent emprunté au TLTRO (automne 2016 au lieu de septembre 2018) 

49  crédit au secteur privé bien incertain (désendettement des banques, achats de titres publics, investissements productifs déprimés par l’existence de surcapacités, etc). Au début novembre 2014, la BCE a procédé à des achats d’ABS (crédits titrisés, soit des prêts bancaires agrégés en paquets). Puis, en janvier 2015, elle a annoncé le lancement d’ un programme de Quantitative Easing (QE)  de mars 2015 à septembre 2016, achats d’actifs de 60 milliards d’ € chaque mois répartis en dette publique et en dette privée (soit plus d’1100 milliards d’ € de liquidités supplémentaires). 80% du risque sera supporté par la BCE elle-même, les 20% restant étant partagés par les BC des pays de la zone euro, limitant ainsi le degré de solidarité entre contribuables européens lors des futurs achats.

50 Une large part d’achats dévolue aux obligations d'Etat (européens) : 850 milliards d'euros au total. Comparé à la taille du marché des dettes souveraines (6700 milliards d'euros), le plan de la BCE n'est pas très important (graphique ci-après), même si le 3/12/2015, elle a décidé d’accentuer son rachat massif de dette par une extension de sa durée et un élargissement de la palette de titres (programme prolongé jusqu'à fin mars 2017 au moins). La BCE  injection de 1.500 milliards d'euros dans l'économie (soutien à la croissance et lutte pour une inflation plus forte). Le 10/3/2016, la BCE a porté son programme mensuel d’achat d’actifs publics et privés de 60 à 80 milliards d’euros. Rappelons que les marchés sont déjà abondamment pourvus en liquidités. La politique monétaire de la BCE pourrait ne pas être très efficace (trappe à liquidités) pour relancer une croissance économique dépendant davantage d’opportunités d’investissements productifs rentables.

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52 Selon P. Artus (Challenges du 30 janvier 2015), « le résultat le plus probable est que la BCE va générer de grosses perturbations financières, créer des bulles sur tous les actifs, en particulier sur les actions qui, aujourd’hui, sont à leur juste prix. Cette politique est dangereuse : elle rend l’institution de Francfort prisonnière des anticipations des marchés. Et elle risque d’aboutir à des taux d’intérêt négatifs, à des actions surévaluées, sans effet positif sur la croissance. Car, on l’a constaté de 2002 à 2008, la hausse des prix des actifs ne conduit pas les ménages de la zone euro à consommer davantage ou à épargner moins ». En revanche, cette politique d’abondance monétaire qui contribue à la baisse du taux de change de l’€  inflation plus forte, utile à l’activité économique et bancaire. Cela étant, un recul significatif du chômage (et de la pauvreté) ne devrait pas intervenir.

53 ANNEXES Annexe 1 - La crise de la zone euro ne peut pas être finie Annexe 2 - Quelques indications sur le risque bancaire

54 Annexe 1 - La crise de la zone euro ne peut pas être finie La crise de la zone euro ne peut pas être finie Patrick Artus, Le Point, 26/2/2013 Non, la crise n'est pas derrière nous ! Patrick Artus dénombre sept bombes à retardement qui peuvent à tout moment faire voler en éclats la zone euro. Plusieurs facteurs importants, pour nous, impliquent que la crise de la zone euro, quoi qu'en croient certains, ne peut pas être finie : les coûts de financement du secteur privé restent élevés, ils n'ont pas suivi les taux d'intérêt sur les dettes publiques ; le désendettement du secteur privé a peu avancé ; l'investissement des entreprises a chuté, d'où le recul de la capacité de production (du PIB potentiel) ; l'euro est toujours surévalué ; l'ajustement budgétaire est encore devant nous ; la mutualisation des dettes (par l'UE, par la BCE) est nécessairement faible à cause de l'absence d'union politique et les bilans des banques ne sont pas "nettoyés". N'en déplaise aux optimistes, il reste énormément à faire avant qu'on puisse dire que la crise de la zone euro est finie.

55 Beaucoup d'hommes politiques, beaucoup d'investisseurs annoncent début 2013 la fin de la crise de la zone euro. L'argument mis en avant est la création d'instruments de sauvetage des pays en difficulté (ESM, MES en français ; possibilité d'achat de titres publics par la BCE avec l'OMT), la création de "l'union bancaire", avec la possibilité pour l'Europe de recapitaliser les banques, avec la supervision européenne des banques. Les risques d'éclatement de l'euro ou de faillite bancaire ayant disparu, la confiance est revenue : niveau très bas de l'aversion pour le risque, baisse des taux d'intérêt sur les dettes publiques périphériques, baisse des primes de risque payées par les banques, remontée des cours boursiers et de l'euro. Nous pensons que ces évolutions révèlent la myopie de beaucoup d'analystes, car sept facteurs importants au moins impliquent pour nous que la crise de la zone euro n'est pas terminée. Sept facteurs montrent que la crise de la zone euro n'est pas terminée.

56 Premier facteur Les coûts de financement du secteur privé restent beaucoup trop élevés. Malgré la baisse des taux d'intérêt sur les dettes publiques, les coûts de financement du secteur privé de la zone euro restent très élevés par rapport aux perspectives de croissance en valeur (3,5 % contre 1 % environ). Ce niveau trop élevé des taux d'intérêt empêche le désendettement, déprime l'investissement et les prix de l'immobilier. Deuxième facteur Le désendettement du secteur privé a peu progressé dans la zone euro. Quand on compare la zone euro et les États-Unis, on voit l'énorme différence dans l'avancement du désendettement du secteur privé au détriment de la zone euro (aux États-Unis, l'endettement est revenu à son niveau de 2003 ; dans la zone euro, il a à peine baissé), ce qui est essentiellement dû au niveau trop élevé des taux d'intérêt par rapport au taux de croissance en zone euro vu ci-dessus. La lenteur du désendettement privé en zone euro explique largement l'absence de reprise de la demande : en un an, la demande intérieure a reculé de 2,5 % en volume dans la zone euro et crû de 2,3 % aux États-Unis.

57 Troisième facteur Le recul de l'investissement des entreprises et de la capacité de production de la zone euro. Avec la faiblesse anticipée de la demande intérieure et avec le niveau élevé des coûts de financement, l'investissement des entreprises de la zone euro a beaucoup reculé, de 15 % depuis 2008. Cela a une conséquence dramatique : au lieu de se redresser, l'offre de biens et de services de la zone euro se dégrade avec le recul de la capacité de production de l'industrie et du PIB potentiel. Il n'y a donc pour l'instant pas de signe de redressement productif dans la zone euro. Il est horrible que la capacité de production de l'industrie recule. Cela tue tout espoir de reprise de la demande intérieure qui ne ferait pas réapparaître les déficits extérieurs. Quatrième facteur La surévaluation de l'euro. Malgré la dépréciation de l'euro depuis 2008, l'euro reste surévalué en termes réels, de 15 % environ, ce qui continue à faire perdre des parts de marché à la zone euro.

58 Cinquième facteur L'ajustement budgétaire est encore devant nous dans la zone euro. Même si les politiques budgétaires de la zone euro sont restrictives depuis 2009, les déficits publics restent très importants et ne s'améliorent pas beaucoup en raison du recul de l'activité. Il reste donc un très grand effort d'ajustement budgétaire à faire, ce qui, dans une situation où le multiplicateur budgétaire est élevé (supérieur à 1), est très coûteux en termes de croissance. Prenons le cas de la France : une réduction de 4,5 % à 3 % du PIB du déficit public entre 2012 et 2013 va coûter plus de 1 point et demi de croissance.

59 Sixième facteur En l'absence d'union budgétaire et politique, le degré de mutualisation des dettes ne peut être que faible. Les marchés financiers sont redevenus confiants avec la mise en place de mécanismes de mutualisation des dettes publiques (du risque souverain) : ESM, OMT... Les investisseurs croient que cette mutualisation peut être massive (des centaines de milliards d'euros), ce qui éviterait tout risque de retour de la crise. Mais une mutualisation massive des risques souverains est impossible sans une avancée importante en termes d'unification budgétaire et politique. Les pays ne peuvent pas accepter de partager le risque souverain en l'absence de tout processus de contrôle centralisé des budgets, des politiques économiques structurelles des pays : le risque d'aléa de moralité est trop grand. Il n'y a pas en réalité d'assurance forte contre le risque de retour d'une crise des dettes souveraines dans la zone euro.

60 Septième facteur Les bilans des banques ne sont pas "nettoyés" dans beaucoup de pays de la zone euro. Pour que les entreprises puissent de nouveau être financées normalement, pour que les capitaux circulent de nouveau entre les pays de la zone euro, il faut que la confiance dans les banques revienne. Or, on voit au contraire, en Espagne, en Italie, au Portugal, la poursuite de la hausse des défauts des emprunteurs, la poursuite de la hausse des créances douteuses des banques. Elles représentent 11,4 % du total du bilan des banques en Espagne, 7,2 % en Italie. Tant que les banques sont en difficulté, elles payent cher leurs ressources et elles prêtent à des taux élevés aux entreprises, ce qui détruit l'investissement. Quoi qu'en pensent les optimistes, la crise de la zone euro est loin d'être finie. Pour l'obtenir, il faudra d'abord que les coûts de financement de l'économie reculent, donc, entre autres, que les bilans des banques soient "nettoyés". Il faudra, en conséquence, que l'investissement et la constitution de capacités reprennent ; que le désendettement du secteur privé progresse beaucoup ; que le taux de change de l'euro cesse d'être surévalué ; que le reste (massif) de l'ajustement budgétaire soit effectué et que le processus d'unification politique de la zone euro progresse pour que le risque souverain puisse être mutualisé.

61 Annexe 2 - Quelques indications sur le risque bancaire européen On peut noter que la fragilisation des banques européennes est due aussi à des engagements excessifs dans des opérations risquées telles que les CDS. Les couvertures de défaillance ou dérivés sur événement de crédit sont connus sous la désignation de Credit default swaps (CDS). Il s’agit de contrats de protection financière entre acheteurs et vendeurs, développés à partir de 1994 par la banque JP Morgan. L'acheteur de protection verse a priori une prime annuelle calculée sur le montant notionnel de l'actif à couvrir appelé de référence ou sous-jacent (ce montant étant également appelé encours notionnel du CDS), au vendeur de protection. Celui-ci s’engage à compenser a posteriori les pertes de l'actif de référence en cas d'événement de crédit précisé dans le contrat.

62 Sur le plan des flux financiers, cela s’apparente à un contrat d'assurance mais il s’agit d'une transaction non financée : sans obligation de détenir des fonds pour couvrir la transaction, le vendeur de protection reçoit des primes périodiques et augmente ses avoirs sans aucun investissement en capital si aucun événement de crédit n'a lieu jusqu'à maturité du contrat, c’est-à-dire son terme. Dans le cas contraire, événement plus ou moins probable mais très coûteux, il est contraint de faire un paiement contingent, donc de fournir des fonds a posteriori. Il s'agit donc d'une exposition hors bilan.

63 Les CDS ont été largement incriminés dans la responsabilité de la crise financière de 2007-2010 puis la crise de la dette dans la zone euro de 2011. Examinons maintenant un exemple de risque pays : le risque espagnol. Les banques françaises sont au 2ème rang européen des banques les plus exposées au risque espagnol. Selon la BRI, en mars 2012, l’exposition directe totale des banques européennes était d’environ 559 milliards d’euros dont 122 milliards d’exposition potentielle hors bilan (sous forme de produits dérivés, de garanties et de promesses de prêt). Or, près de 25% de ces encours appartiennent à des banques françaises, soit un total de 132,6 milliards d’euros.

64 Exposition du secteur bancaire français en Espagne (en milliards d’euros ; données à fin septembre 2011) Source : BRI, mars 2012 ; Source : BRI, mars 2012

65 Le secteur bancaire français est le 2ème plus vulnérable à l’Espagne, le 1 er étant le secteur bancaire allemand. Les banques des deux pays concentrent plus de la moitié de l’exposition du secteur bancaire européen (51%), soit plus de 336 milliards d’euros au total ! Le montant total du risque du secteur bancaire français correspond à 77% des capitaux propres des 4 grandes banques françaises : BNP Paribas, Crédit agricole, BPCE et Société Générale. La récession ainsi que la chute des prix immobiliers font monter les risques de défaut et de pertes pour les banques françaises, que ce soit directement à cause de leur exposition au secteur privé non bancaire (81 milliards d’euros) ou indirectement par l’intermédiaire de leur exposition aux banques en Espagne (26,2 milliards d’euros). Il fallait donc recapitaliser les banques espagnoles (aide financière de 37 milliards d'euros via le MES, système qui a pris en 2013 le relais du FESF et du MESF).

66 Plus généralement, le tableau ci-dessous évalue le risque global d’exposition des banques françaises aux dettes souveraines.

67 L’éventualité d’une crise systémique bancaire existe donc dans l’UE au regard de l’importance de leurs opérations risquées et peut se concrétiser, soit par le défaut d’un Etat sur sa dette souveraine, soit par une faillite bancaire en chaîne (contre laquelle les déposants ne sont que juridiquement garantis). Mais les pouvoirs publics européens (CE, responsables gouvernementaux) et les autorités monétaires (BCE, FMI) ont perçu ces menaces et ont adopté un dispositif d’assistance financière évitant pour l’heure la faillite d’un EM et palliant les difficultés du secteur bancaire en permettant la maîtrise des risques de bilan par une meilleure couverture en fonds propres. Notons à cet égard les mesures adoptées dans le cadre de l’union bancaire européenne. Quid cependant des risques hors bilan (possibilité pour les déposants d’endiguer les risques de perte en euros par des achats d’or ou de devises plus fiables telles le franc suisse, etc dans un contexte d’absence durable de croissance économique suffisante). §§§


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