Les limites de l’accompagnement dans le dispositif du RSA S. Laguérodie et J-L Outin Journée Revenu universel et minima sociaux Centre d’économie de la Sorbonne 3 mai 2016
Introduction Les nouveaux principes inscrits dans la loi: – Généralisation et renforcement de l’accompagnement (composante des « droits et devoirs ») – Gouvernance décentralisée avec le département chef de file de l’insertion (obligation d’un PDI et PTI) – Priorité donnée à l’insertion dans l’emploi (« Le revenu de solidarité active a pour but (…) d’inciter à l’exercice d’une activité professionnelle et de lutter contre la pauvreté de certains travailleurs », art. L loi du 1 er /12/2008) Evaluation problématique (données statistiques) des effets de l’accompagnement: taux de contractualisation? Taux de retour à l’emploi? Problème de l’accompagnement comme nouveau principe des politiques publiques alors que outils institutionnels limités et gouvernance publique peu claire
1/ Mobilités internes et externes au dispositif Conception linéaire de l’insertion: « Le bénéficiaire du revenu de solidarité active a droit à un accompagnement social et professionnel destiné à faciliter son insertion durable dans l'emploi. » (Art.L ) Parcours professionnels et rôle différencié du RSA: – Pas seulement les entrées-sorties du dispositif entre le début et la fin de l’année (évolution du stock) – Mais mouvements infra-annuels: appariement de 2 trimestres consécutifs pour capter les entrées-sorties du droit payable ou du dispositif ou changement de type de RSA (données CAF) La crise accroît les transitions internes
– Mouvements par rapport au dispositif : 1/3 sort au moins une fois du dispositif au cours d’une année, presque 1/3 change de composante dans le dispositif – Cela est dû aux variations de ressources des bénéficiaires : variation des revenus d’activité (40%), changement situation familiale (15 %) – Ces mouvements cachent des situations différentes selon le type de RSA : Stabilité des bénéficiaires du RSA socle (70 % y restent sur toute l’année) même si 20 % d’entre eux n’y sont pas restés continûment; 1/4 d’entre eux est passé par le RSA activité au cours de l’année et 1/4 sorti au moins une fois du dispositif Plus grande mobilité des RSA activité seul : 66 % connaissent une mobilité au cours de l’année contre la moitié pour l’ensemble des bénéficiaires : 42 % sont sortis du dispo, 46 % sont encore au RSA activité seul soutien durable aux travailleurs à bas salaires et accompagnement transitoire face à des difficultés d’insertion professionnelle Instabilité des RSA socle et activité : près des ¾ connaît une mobilité au cours de l’année : 60 % sont passés à une autre composante (rsa seul ou rsa activité seul) et 30 % sont sortis au moins une fois du droit payable
Les transitions internes ont été fortes au début du dispositif (entre 2009 et 2010), se sont stabilisées et sont de nouveau en hausse depuis Près de la moitié des changements de composante entre deux trimestres concerne les mou vements du RSA socle (« socle seul » et « socle et activité ») qui est le reflet de l’instabilité des droits.
2/ La question de l’orientation segmentée Priorité du législateur à l’insertion professionnelle (IP), insertion sociale comme étape vers l’emploi (« Art.L Le président du conseil général oriente le bénéficiaire du revenu de solidarité active : « 1° De façon prioritaire, lorsqu'il est disponible pour occuper un emploi au sens des articles L et L du code du travail ou pour créer sa propre activité » vers le service public de l’emploi (…) « 2° Lorsqu'il apparaît que des difficultés tenant notamment aux conditions de logement, à l'absence de logement ou à son état de santé font temporairement obstacle à son engagement dans une démarche de recherche d'emploi, vers les autorités ou organismes compétents en matière d'insertion sociale. »)
Les ressources institutionnelles de l’orientation: – Etude réalisée en dans le département du Nord avec entretiens auprès des acteurs de l’insertion (responsables de l’action sociale eu CG, travailleurs sociaux dans des associations conventionnées avec le dpt, instructeurs des dossiers dans CAF et CCAS, référents Pôle Emploi, ) : une quinzaine d’entretiens réalisés – Enquête FlashRSA 2015 de la DGCS – Enquête DREES auprès des conseils départementaux (en cours)
a/ Une orientation « industrielle » et la déperdition des allocataires
Schéma du dispositif d’orientation des allocataires du RSA Source: Laguérodie, Outin. Le RSA au défi de sa mise en œuvre, CES, 2012.
L’orientation professionnelle dominante dans le département 55 %12,5 %
Sur les personnes entrées dans le dispositif RSA en 2010: – 84,5 % ont été orientés fin 2010 – 1/3 a été orienté automatiquement (sur critères administratifs de proximité avec le marché du travail) vers l’IP – Les 2/3 sont proposés au diagnostic: Diagnostics demandés: 85 %, diagnostics non demandés: 15 % (dossiers en cours mais raisons problèmes de santé des allocataires, problèmes budgétaires, pbs informatiques) – Après diagnostic, 53 % sont orientés vers l’IS, 37 % vers l’IP, 10 % non orientés (non présentation de l’allocataire, diagnostics non retournés)
Sur les personnes orientées vers Pôle Emploi: 67 % sont inscrites à PE à fin 2010 absence à la réunion d’information + non inscription après réunion Sur les personnes orientées vers l’IS : 60 % ont signé un CER à fin 2010
La perception des acteurs: Les bénéficiaires: non compréhension des enjeux de l’inscription à PE (obligation nouvelle, découragement/marché du travail, décalage de perception entre leur situation et l’orientation) Les référents Pôle Emploi: font état de situations instables (aller-retours entre IP et IS) et non adaptées (non disponibilité sous 15 jours) d’où accompagnement non prioritaire (non relance des individus) Les travailleurs sociaux: remise en cause de l’insertion séquencée
b/ Adaptation des pratiques D’après l’enquête Flash RSA 2015, une minorité de CAF et de CG pour l’orientation (19 et 13 %); plus de la moitié des départements a développé une grille d’orientation De nombreux départements se sont affranchis de l’orientation cloisonnée et ont mis en place une orientation socioprofessionnelle (64 % des départements répondants de l’enquête Flash) et dans une plus faible mesure une orientation santé (21 %)
3/ L’accompagnement dans le cadre d’un système d’acteurs polycentré « Le bénéficiaire du revenu de solidarité active a droit à un accompagnement social et professionnel adapté à ses besoins et organisé par un référent unique » (Art.L ) Les logiques différentes des acteurs de l’accompagnement Les difficultés de l’accompagnement renforcé Les difficultés budgétaires