EVALUATION DE L’APPLICATION DE LA LOI SALDUZ Conclusion et recommandations SPC Emilie DEVEUX An RAES Journée d'étude « Vers où Salduz nous mènera-t-il ? » 14 novembre 2013
CONSTATS ET CONCLUSION
En définitive, l'application de la loi Salduz s’est, tout bien considéré, bien déroulée – Conjointement avec tous les acteurs, un système opérationnel a été élaboré – Les exigences Salduz se sont ancrées dans les habitudes de la police – Un certain respect s'est davantage développé entre les différentes catégories professionnelles – Des liens de collaboration se sont tissés entre le barreau et la police Néanmoins, l’application de la loi Salduz présente également des difficultés ainsi que des points critiques. Certaines dispositions de la loi et certaines pratiques peuvent être améliorées.
Droits Salduz : application/réglementation/difficultés Déclaration des droits : – Pour la plupart des suspects : claire et compréhensible – Acteurs : droits répétés trop souvent – Groupe de pilotage : proposition de limiter la répétition de la notification - attention particulière pour les suspects vulnérables, les analphabètes et les personnes présentant un handicap - traduction de la déclaration dans des langues supplémentaires Notification succincte des faits : – Quelques suspects ne l'ont pas reçue, certains par leur avocat – Arrêt Cour constitutionnelle n°7/2013 du 14/02/2013 : interprétation de la loi : également informer l'avocat des faits - accès au dossier répressif toutefois pas estimé indispensable
Information d’une personne de confiance : – Demandée par quelques suspects (membre de la famille, parfois l'employeur) - notion de « personne de confiance » pas toujours bien comprise – Chiffres : JI et PR ont reporté l'information de manière très exceptionnelle – Groupe de pilotage : pas nécessaire de régler légalement les modalités (pour la fixation d’un délai/l’information systématique du PR ou du JI) Assistance médicale : – La majorité des suspects ne l‘a pas demandée ; il arrive que la police même la propose – Groupe de pilotage : loi suffisamment claire sur le fait que le suspect doive en faire la demande (ce n’est pas un automatisme) - acteurs (sauf le barreau) opposés au règlement légal des modalités (moment et manière dont doit se dérouler l’examen médical) - discussion : frais de justice ou non ?
Assistance de l'avocat (concertation confidentielle (CC) - au cours de l'audition) : Renonciation : – Chiffres : la moitié des suspects majeurs CAT IV a envisagé une renonciation (la majorité d'entre eux ne l‘a pas confirmée) environ 30 % y ont effectivement renoncé – La police et quelques parquets : remettent en question le contact téléphonique de renonciation et soulignent la lourdeur de la procédure – Groupe de pilotage : maintenir (provisoirement) en attendant (transposition dans le droit belge de) la directive-UE relative au droit d'accès à un avocat – Arrêt Cour constitutionnelle : disposition relative à la possibilité de renoncer pas annulée Dérogation au droit à l’assistance par PR/JI : – Chiffres : PR et JI n'ont refusé l'assistance que de manière exceptionnelle – Arrêt Cour constitutionnelle : disposition relative à la dérogation à l'assistance pas annulée
Assistance : – Chiffres : environ 70 % ont souhaité une assistance auprès de la police, un avocat n'a pas toujours été trouvé (pour assistance/contact de renonciation) : NL 90,9 %, FR 41,3 % – assistance effective devant JI : 76,6 % et devant PR : 67,4 % – Plupart des suspects ont trouvé l'assistance utile (selon CC, devant JI/JJ) – Groupe de pilotage : pas indiqué de réserver l’assistance uniquement pour l’audition devant JI - CC : garder les deux possibilités, à savoir sur place et par téléphone – Arrêt Cour constitutionnelle : CC : limite de temps non déraisonnable, durée de 30 min. pas exagérément courte interprétation de la loi : doit éventuellement pouvoir durer plus longtemps que 30 min., mais limitée au regard des exigences de l’enquête dans des circ. exceptionnelles (p.ex. recours à un interprète)
Infrastructure, rôle de l'avocat à l'audition et incidents : – Chiffres : problèmes d'infrastructure plutôt exceptionnels pour la CC et plutôt peu d'incidents signalés au cours de l'audition – Acteurs policiers et judiciaires : incidents concernant principalement la place de l'avocat, les interventions ou plaidoiries actives, l'attitude de dénigrement - quelques plaintes contre des agents de police – Groupe de pilotage : attendre (transposition dans le droit belge de) la directive-UE relative au droit d'accès à un avocat avant de préciser plus le rôle de l’avocat – Arrêt Cour constitutionnelle : disposition relative au rôle de l’avocat pas annulée l'avocat pas cantonné à un rôle purement passif, a des possibilités d’intervention (certes limitées)
Enregistrement audiovisuel de l’audition : – Groupe de pilotage : Pas une alternative à l'assistance de l'avocat, mais un important moyen de contrôle Inscrire à l’article 47bis CIC Jugé indiqué pour les auditions sans avocat, idéalement même pour toutes les auditions réduit le risque d'incidents Il n'est toutefois pas jugé réaliste actuellement de rendre l'enregistrement obligatoire dépend de moyens nécessaires la webcam est une piste intéressante pour réaliser des enregistrements (en tenir compte lors d'une vague de remplacement des ordinateurs) Une analyse des coûts de conservation des enregistrements s'impose
Aide juridique gratuite : – Ordres des avocats : participation réduite des avocats à la permanence Salduz attribuée à l’incertitude quant à la rémunération – Arrêt Cour constitutionnelle : règles de l’aide juridique gratuite pas annulées Droit au silence : – Plupart des suspects n'ont pas fait usage de leur droit au silence - les avocats conseillent plutôt de parler – Police - chiffres : même constat pour les dossiers plus légers - davantage recours au droit au silence pour les dossiers plus graves – Groupe de pilotage : peut-on continuer à poser des questions ? aucune réglementation légale nécessaire, l’appréciation concrète revient à la jurisprudence
Reconstitution des faits : – Acteurs : problèmes signalés concernant le rôle de l'avocat – Groupe de pilotage : Clarifier le terme « accompagner » à l’art. 62 CIC / ne pas expliciter l'utilisation d'écrans vidéo Pas nécessaire de prévoir des exceptions à « l'accompagnement » Pas nécessaire (sauf barreau) de prévoir une sanction – Arrêt Cour constitutionnelle : disposition relative à l'absence de sanction pas annulée
Ordonnance de prolongation : – Chiffres : peu utilisée – Groupe de pilotage : Exclusion de la mini-instruction (intégration dans les exceptions prévues à l'art. 28septies CIC) Prévoir le mode de signification (art. 15bis LDP) Réforme de l’ordonnance de prolongation pas jugée indiquée immédiatement discussion liée au débat sur le délai d'arrestation de 24h Tous les acteurs (sauf barreau) favorables à une prolongation de 24h simplicité préconisée (pour éviter discussion/interprétation), pas de système de suspension plus particulièrement: prolongation générale jusqu'à 36 ou 48h
Interprètes : – Chiffres : appelés pour 20 % des auditions de suspects arrêtés – Acteurs : Problèmes à nouveau signalés concernant l'assistance des interprètes Suggestions émises en vue de la transposition de la directive- UE du 20/10/2012 relative au droit à la traduction et à l’interprétation dans les procédures pénales
Impact sur fonctionnement et collaboration acteurs: – Police : Lourdeur de la procédure et perte considérable de temps et de capacité Parfois des difficultés concernant l'utilisation de l'application web PL : réduction du nombre d'agents sur le terrain Procédure plus complexe pour les opérations de plus grande envergure bonne pratique PF : désignation d'un responsable Salduz PF : difficultés au niveau de la collaboration avec les services d’inspection spéciaux/douanes/JI proposition : explication de l'usage des droits Salduz par les services d’inspection spéciaux – Parquets : Sont davantage contactés par la police bonne pratique : souvent concertations (structurelles) police-parquet – Juges d'instruction : L'utilisation de l'application web n’est pas généralisée. Les avocats n'interprètent pas leur rôle de manière univoque. – Avocats : Impact des auditions de nuit sur le travail journalier bonne pratique : accords dans certaines zones de police avec les barreaux Incertitude quant au financement
– Problèmes liés aux auditions de catégorie III : Acteurs policiers et judiciaires : arriéré dans le traitement des dossiers - plus de PV sans audition Groupe de pilotage : éventuelle adaptation selon (transposition dans le droit belge de) la directive-UE relative au droit d'accès à un avocat – Problèmes relatifs aux suspects mineurs : Police : incertitude sur la consultation d'un avocat pour la catégorie III Groupe de pilotage : avocat de toute manière prévu pour les mineurs de catégorie III (prévu pour une future adaptation de l'application web) Arrêt Cour constitutionnelle : application aux suspects mineurs pas annulée – Auditions audiovisuelles de mineurs victimes/témoins : PF et groupe de pilotage : pas d'adaptation de la loi nécessaire, car technique d’audition de la PF adaptée avec communications de l’art. 47bis CIC mais Journéé d’étude Salduz 27/03/2013: pose encore un problème
Acteurs policiers et judiciaires : soulignent une baisse des privations de liberté, une réduction des mandats d'arrêt (MA) et une hausse des libertés sous conditions (LSC) Chiffres : légère baisse des MA - baisse également des LSC (selon arrondissements) Difficile dès lors de parler de tendances significatives et d'un impact clair de la loi Salduz Impact sur la détention préventive et la LSC
Propositions de modification de la législation Acteurs : points de vue souvent contradictoires entre les catégories professionnelles (lignes de rupture traditionnelles) - souvent absence de point de vue univoque au sein même des catégories professionnelles Groupe de pilotage : – Pour beaucoup de dispositions, pas de nécessité de modification ou de modification immédiate : Consensus pour ne pas davantage régler légalement (bon sens - jurisprudence) ou pour maintenir simplement p.ex. notion « audition» Modification pour l'heure pas encore tout de suite indiquée pour des raisons pratiques/ou dans l'attente de (transposition dans le droit belge de) la directive-UE relative au droit d'accès à un avocat et jurisprudence p.ex. rôle de l'avocat – Consensus pour modifier la loi Salduz sur 3 points enregistrement audiovisuel de l'audition, « accompagner » lors de la reconstitution des faits, ordonnance de prolongation Forum de concertation : encore 1 point ajouté règlementation suspects mineurs Groupe de réflexion Salduz : encore 1 proposition terme « personne de confiance »
Groupe de pilotage-Forum de concertation : ne réaliser une réforme fondamentale qu’une fois la directive-UE relative au droit d'accès à un avocat est transposée dans le droit belge 3 ans pour transposition Arrêt Cour constitutionnelle : loi Salduz pas annulée : – concernant la délimitation d'attribution du droit à l’assistance la privation de liberté (pénale) est un critère pertinent raisonnablement justifié de ne pas prévoir d'assistance pour les auditions après MA et d'autres actes d'instruction JI peut autoriser l'assistance pour des auditions (suivantes) – absence notion « audition » les travaux parlementaires et le contexte législatif offrent une sécurité juridique suffisante
RECOMMANDATIONS
Loi Salduz : Évaluation : 1)Reconstitution des faits : clarifier le terme « accompagner » par un avocat (art. 62 CIC) 2)Réglementation claire pour les suspects mineurs 3)Régler l’enregistrement audiovisuel pour contrôle de l’audition (à l'art. 47bis CIC) 4)Ordonnance de prolongation : exclusion de la mini-instruction (en l’intégrant dans les exceptions de l’art. 28septies CIC) et prévoir la signification (art. 15bis LDP) Arrêt Cour constitutionnelle : 3 dispositions annulées (dés 1 er septembre force de chose jugée erga omnes ) projet de loi : 5)Pour les suspects non privés de liberté : communication prévue avant le début de l'audition, selon laquelle ils peuvent aller et venir à tout moment (complément art. 47bis, § 2, alinéa 1 er CIC) 6)Adapter de sorte que toutes les infractions de roulage punissables d’un emprisonnement d’un an ou plus appartiennent à la catégorie III droit à une CC avec un avocat avant la première audition (art. 47bis, § 2, alinéa 1 er, 3°CIC) 7)Adaptation de la sanction : supprimer le terme « seul » (art. 47bis, § 6 CIC) Groupe de réflexion Salduz : 8)Remplacer terme « personne de confiance » par « personne de contact » p.ex. (art. 2bis, §3 LDP) Adaptations ponctuelles loi Salduz/directives requises
Directives du Collège des procureurs généraux : Évaluation : Aucune adaptation fondamentale des directives nécessaire Arrêt Cour constitutionnelle : nécessaire d'établir d’urgence une directive à la suite des interprétations valable après publication arrêt au Moniteur belge le 11/03/2013 : 1)Notification succincte des faits : police, PR ou JI doivent également informer eux-mêmes l’avocat des faits au sujet desquels a lieu l’audition avant la CC 2)Durée CC : la personne arrêtée doit pouvoir obtenir une concertation avec son avocat qui dure plus de 30 min. mais qui est limitée au regard des exigences de l’enquête circonstances exceptionnelles (p.ex. appel à un interprète) – COL 9/2013 du 13/03/2013, addenda V à la COL 8/2011 : directive relative aux interprétations 1) et 2) et annulation 5) et 7) : – Version révisée 13/06/2013 de la COL 8/2011 – Modèles de procès-verbaux : adaptés en fonction de ces interprétations et des dispositions annulées version révisée 13/06/2013 addenda I à la COL 8/2011 – Schéma de procédure et protocole d’accord relatif au service de permanence : adaptés version révisée 13/06/2013 addenda III à la COL 8/2011
Déclaration des droits : – Évaluation : en règle générale, aucune adaptation nécessaire sur le plan de la formulation des droits – MAIS des adaptations seront nécessaires : pour les adaptations à l’actuelle loi Salduz (arrêt Cour constitutionnelle) après la transposition dans le droit belge de la directive-UE du 20 octobre 2010 relative au droit à la traduction et à l’interprétation dans les procédures pénales (pour le 27 octobre 2013 au plus tard) après la transposition dans le droit belge de la directive-UE relative au droit d'accès à un avocat
À l’avenir, réforme globale de la loi Salduz Réaliser une réforme globale de la loi Salduz avec la transposition dans le droit belge de la directive-UE relative au droit d'accès à un avocat : À préparer en temps utile et de manière proactive En concertation avec tous les acteurs, rechercher la solution la plus opérationnelle pour le terrain Compte tenu des possibilités/limitations budgétaires
Besoin de réformes fondamentales générales Modification de la Constitution : prolongation du délai d’arrestation de 24 heures pour le porter à 36 ou 48 heures Réforme de notre système judiciaire recherche en cours de l’Université de Gand concernant la réforme de la procédure pénale Réforme du système d'aide juridique gratuite Règlement relatif aux interprètes