Sociologie des sciences IEP Toulouse 2ème année Vincent SIMOULIN

PARTIE 3 : Science et demande sociale III Critiques et remises en cause. A) Un échec du programme fort ? B) L’affaire Sokal et ses conséquences.

A) Un échec du programme fort ? Raymond Boudon, Maurice Clavelin. Le relativisme est-il résistible ? Regards sur la sociologie des sciences. Paris, PUF, 1994.

une représentation "hypersocialisée" des sciences Les opposants ont montré que le mode de raisonnement des « fortistes » consistait à n'observer que les causes sociales en ne considérant pas les raisons scientifiques qui poussaient aussi les chercheurs à repousser ou à accepter telle ou telle théorie, à faire comme si les causes sociales étaient les seules agissantes.

La raison du succès (Boudon) Si les explications sociologisantes de la science dominent, c'est parce que le scepticisme est une valeur dominante de notre temps. En effet, il permet de respecter toutes les opinions de façon strictement égalitaire en les désignant comme seulement locales. Bien que fausse, la nouvelle sociologie des sciences serait "utile" car elle présente une vision de la science qui récuse cette inégalité que les sociétés modernes ont tant de mal à tolérer.

B) L’affaire Sokal et ses conséquences. Yves JEANNERET. L’affaire Sokal ou la querelle des impostures. Paris, PUF, 1998.

Les faits En 1996, le professeur Sokal, physicien, a réussi à faire publier un faux article (« Transgressant les limites : vers une herméneutique de la gravité quantique ») par une revue de « cultural studies » : Social Text. Il révèle la supercherie et accuse les « postmodernes » (Derrida, Lacan, Lyotard, etc) d’obscurité et d’avoir publié son texte car il était obscur et employait le jargon à la mode. L’affaire provoque un débat mondial sur le relativisme et la pensée postmoderne.

Une confusion croissante L'affaire apparaît vite comme une preuve décisive non seulement de l'incompétence d'une revue, mais de celle du domaine des études culturelles, puis du postmodernisme et du relativisme et parfois même de la "gauche intellectuelle" sous influence française. Le débat apparaît donc très confus et plus personne ne sait vraiment sur quoi il porte.

Les incohérences de Sokal Sokal a adopté la méthode de ses adversaires, en construisant un double texte et en luttant sur le terrain de l'interprétation. Sokal veut montrer que le relativisme a tort de refuser tout universel, de tout mettre sur le même plan, mais il fait pareil en utilisant son simulacre pour toutes sortes de combats pas toujours bien inspirés.

Une image du temps présent l'affaire Sokal, après avoir fait grand bruit entre 1996 et 1998, va s'éteindre et on peut dire que, si les relativistes ont perdu en crédit, Sokal a échoué à redonner à la logique, la raison et la preuve une place incontestée. Le "programme fort" a perdu de sa force de conviction, mais il n'y a pas vraiment d'alternative, de paradigme concurrent qui ait encore émergé.