Marie CURT Journée du CRTLA - Rennes- 4/02/2011 Troubles des apprentissages après un traumatisme crânien chez l’enfant. Tu as mis ton casque ? TROP TARD ! Marie CURT Journée du CRTLA - Rennes- 4/02/2011
EPIDEMIOLOGIE (1) Une des 1ères causes de décès et de handicap durable chez l’enfant Problème majeur de santé publique Incidence difficile à estimer, environ 1,5/1000 chez les enfants de moins de 5 ans et 5,5/1000 chez les plus de 5 ans. (Orliaguet, 1996) 1ère cause de décès chez l’enfant soit 1/3 des décès de l’enfant et l’adolescent. Etude de Mac Kinlay, 2008 Incidence sous estimée ? Étude cohorte en Nouvelle Zélande TC 1750/100000 dont seulement 30% avaient consulté à l’hôpital ! Sous évaluation des TC répétés soit 15 à 30% Fréquence Mortalité TC graves (GCS <9) 9% 25% TC modérés (GSC 9-12) 11% 0,4-4% TC légers (GCS >12) 80% 0-2%
EPIDEMIOLOGIE (2) Etiologies : Sex Ratio: Facteurs prédisposants: AVP ++ ; piétons > mobylettes … Chutes (table à langer, lit, mezzanine, escaliers...) Avant 1 an : Syndrome du bébé secoué ! Sex Ratio: Garçons: accidents 4 fois plus fréquents et plus violents que les filles. Facteurs prédisposants: Contexte social défavorisé Tendance à plus de difficultés comportementales pré traumatiques chez les TC légers.
Particularités du TC chez l’enfant (1) Difficultés d’apprécier la gravité du TC: GSC, Amnésie post traumatique Difficulté de leur utilisation chez l’enfant Société française de neurochirurgie: Léger : GSC 13-15, +/- PDC initiale, pas d’APT, pas de signe neurologique focal, pas de fracture du crâne Modéré: GSC 9-12, PDC 30min-6h; APT 24h à 14 jours Grave: GSC < 9; troubles de la vigilance, PDC > 24h Définition TC léger (OMS, 2004) GSC 13-15 Confusion ou désorientation PDC<30min APT<24h Anomalie transitoire de l’examen neuro (Crise convulsive, lésion intracrânienne non chirurgicale, signe focal transitoire)
Particularités du TC chez l’enfant (2) Mécanismes : Volume tête/corps élevé et musculature axiale peu développée mouvements grande amplitude lésions axonales diffuses Tissu cérébral moins myélinisé plus de lésions des fibres longues. Lésions primaires + secondaires (œdème cérébral ++, HTIC, choc hypovolémique)
Particularités du TC chez l’enfant (3) Evaluation des séquelles difficile: Les troubles cognitifs et comportementaux peuvent n’apparaître ou ne devenir évidents qu’après un long délai. Comparer l’enfant à ce qu’il aurait dû devenir sans l’accident: Perte d’une fonction acquise non acquisition de fonctions qui auraient dues se mettre en place
Particularités du TC chez l’enfant (4) Remise en cause du principe de Kennard: meilleur pronostic chez enfant après une atteinte cérébrale acquise en raison d’une plasticité plus importante Non ! Faibles acquis au moment de l’atteinte cérébrale. Aires cérébrales immatures ou en cours de développement sont plus vulnérables Dans les TC graves: Meilleur pronostic vital et moteur que chez l’adulte: mortalité 18-25% vs 50% MAIS déficits cognitifs plus sévères chez enfant que l’adulte Pronostic d’autant plus mauvais que l’enfant est jeune et qu’il y a une atteinte des fonctions exécutives ++
Troubles cognitifs (1) Evolution temporelle: Déficits importants à 3 mois du TC Récupération partielle à 1 an mais moins nette après TC sévère Puis stabilisation des progrès voire ralentissement des acquisitions Sévérité des troubles fonction de l’intensité du TC, de l’âge de l’enfant au moment du TC. Enfant jeune TC grave Lésions diffuses
Troubles cognitifs (2) Domaines les plus déficitaires: QI performance, mémoire antérograde, mémoire de travail, vitesse de traitement, fonctions exécutives. Troubles attentionnels Négligence spatiale unilatérale: Décrite chez l’enfant après TC, moins fréquente que chez l’adulte mais pouvant atteindre 13% TC sévères A.Laurent Vannier, 2003;2006 Chez l’enfant peut souvent être en lien avec un trouble attentionnel. Teddy bear cancelling test
Troubles cognitifs (3) Difficultés de langage: narration, accès au langage élaboré, polysémie, sens figuré, second degré… Difficultés d’analyse de textes et discours (Chapman et al.2004) 23 enfants TC sévère vs 32 témoins appariés, revus à 2 ans du TC Moins de transformation d’informations, tendance à la paraphrase et répétitions, Mauvaise capacité à effectuer des inférences. Surtout si TC avant 8 ans
Troubles cognitifs (4) Mémoire Mémoire de travail Mémoire prospective (pouvant persister très à distance du TC coût cognitif important . McCauley 2004) Fonctions exécutives Attention Retentissement important sur la scolarité et les apprentissages ++
Troubles comportementaux (1) Immédiats ou différés Exacerbation ou apparition à l’adolescence Troubles comportementaux, sociaux et émotionnels Personnalité égocentrée, absence de tact social Discours et comportements impulsifs Désinhibition, Apathie, indifférence, défaut d’initiative Fatigabilité, irritabilité, lenteur
Troubles comportementaux (2) Etudes de cas Price et al. (1990) à propos de 2 enfants victimes de lésions cérébrales frontales bilatérales précoces Revus à l’âge de 24 et 28 ans Troubles sévères du comportement social, impulsivité au stimulus immédiat Immaturité Isolement social N’apprenaient pas de l’expérience ou des punitions Anosognosie Obtention du bac grâce à une guidance parentale ferme Inefficacité des ttt médicamenteux et psychothérapies
Troubles comportementaux (3) Bilans: Pas de trouble des fonctions instrumentales, QI normal Troubles des fonctions exécutives (TMT, Stroop, Go-no go) Hypothèse: Lésions préfrontales précoces déficit majeur de maturation des capacités de jugement, jugement moral métacognition, autocritique, raisonnement abstrait Capacité à changer de perspective Comportement chaotique car fonctions qui n’ont jamais été acquises et donc absence de développement d’une cognition sociale adaptée.
Troubles comportementaux (4) Encore plus que dans les troubles cognitifs, impact de l’environnement sur le comportement. Le fonctionnement familial pré et post traumatique diminuerait ou exacerberait significativement l’impact du TC. Capacité d’adaptabilité avant le TC: prédictive de la capacité d’adaptation post traumatique. Tu es tombé sur la tête, de faire des trucs pareils ? Euh… pas encore
Compétence sociale Ensemble des capacités contribuant à une interaction normale avec les pairs Percevoir et définir un problème, générer des solutions alternatives, anticiper et évaluer les conséquences de ses actes, choisir la meilleure solution et la mettre en œuvre. Chez l’enfant normal, capacité à générer des solutions alternatives à un problème serait le meilleur prédicteur d’un comportement adapté en société. Etudes de Warchauscky et al. 1997; Muscara et al. 2008 TC génèrent moins de solutions que les témoins Utilisation de stratégies indirectes Difficultés à intégrer des stimuli sociaux complexes Corrélation forte avec troubles des fonctions exécutives
Scolarité Etude sur le devenir scolaire à 5 ans post TC chez enfants victimes de TC entre 5-15 ans (Ewing Cobbs et al.2004) Echec scolaire fréquent à long terme Acquisitions plus nombreuses lorsque le TC est survenu tardivement Décélération des apprentissages chez les plus jeunes Retard qui s’aggrave avec le temps Facteurs prédictifs Peu d’effet de la durée du coma ni niveau socio économique troubles cognitifs et comportementaux au 1er plan
Les TC légers (1) Syndrome post commotionnel: Céphalées ++, fatigabilité, ataxie, flou visuel, nausées Troubles cognitifs :troubles d’attention, troubles mnésiques, difficulté de concentration troubles du comportement : irritabilité, anxiété, dépression, trouble du sommeil, émoussement affectif Complications à long terme rares 80% des troubles initiaux disparaissent en quelques semaines Importance de dépister ceux dont les troubles s’inscrivent dans la durée
Les TC légers (2) Etude rennaise H.Le Tallec ,2006 Etude descriptive des enfants victimes de TCL âgés de 5 à 15 ans, pris en charge au CHU de Rennes sur 6 mois, évaluation téléphonique à 3 mois post TC 72% des enfants présentent un syndrome post commotionnel (restriction d’activité, fatigue, troubles attentionnels, troubles du sommeil et céphalées) 12% des enfants ont une baisse de leurs résultats scolaires Mise en évidence d’un lien significatif entre au moins 1 symptôme cognitif à 3 mois et un profil prémorbide de troubles attentionnels
Les TC légers (3) Eléments prédictifs de l’apparition syndrome post commotionnel profil prémorbide de troubles attentionnels GCS < 15 à l’entrée une lésion à la TDM cérébrale Pas de lien significatif entre le fait d’avoir été hospitalisé et la présence à 3 mois de syndrome post commotionnel (différent littérature) 11% enfants déjà victime de TCL pas de lien significatif entre cet ATCD et symptômes post commotionnels à 3 mois
Les TC légers (4) Etude Mc Kinlay, 2002 Cohorte de 1265 enfants nés en 1977 en Nouvelle Zélande 132 TCL entre 0 et 10 ans. Intérêt: cohorte avec donnée prospectives pré traumatiques, et groupe témoin Pas d’effet du TC sur l’intelligence générale et les capacités scolaires Groupe des TCL hospitalisés (<48h) revus à 10-13 ans Fréquence plus élevée de troubles attentionnels, d’hyperactivité, de troubles du comportement Par rapport aux TCL non hospitalisés ou TCL>5ans ou témoins
Les TC légers (5) Evaluation à 14-16 ans: Plus de THADA (OR= 5,18) chez les TCL <5 ans hospitalisés Troubles des conduites (OR=4, 95) Abus drogues, alcool (OR= 3,70) Evaluation à 25 ans, superposable avec troubles humeur (OR=3,68) Pas d’effet significatif chez les patients TCL > 5ans
Devenir à très long terme Anderson et al. 2009 : étude rétrospective TC entre 0 et 16 ans admis en neurochirurgie entre 1983 et 1999 124 patients recontactés (50%) entre 18 et 30 ans soit en moyenne 13, 7 ans post TC 60 TCL 27 TC modérés 37 TC sévères Résultats: 3 fois moins d’obtention du bac que pop générale 2,3 fois moins de diplômes universitaires 2,1 fois moins d’emplois qualifiés et 1,7 fois plus de chômage Surtout TC sévères mais tous degrés de sévérité
Prise en charge (1) Multi-intervenants, importance de la continuité des soins Impact sévère et durable sur les capacités cognitives, sociales, académiques et professionnelles Les déficits peuvent apparaître après un long délai quand les fonctions sont censées être mâtures. Cohérence du projet Evolution imprévisible des besoins: Suivi à long terme Agir sur les difficultés Prévenir les complications
Prise en charge (2) Rééducation débute souvent à l’hôpital Contacts précoces et répétés avec les professionnels de ville Enfant et sa famille: acteurs au 1er plan Importance de préparer la sortie ++ Ecole: rôle crucial Avant: renseignements, compétence scolaire, comportement Pendant: dès que possible, adaptée, personnalisée, aide à l’élaboration du projet de sortie Après: pas trop tôt, « handicap invisible » , recul. Adaptations: temps/ rythme/ fatigue; Importance du médecin scolaire: suivi et lien Intérêt des réseaux de soins
Prise en charge (3) Mise en place d’un protocole de suivi des TCL à Rennes Enfants admis aux urgences GSC< 15 Lésion traumatique au TDM initial Profil prémorbide pathologique Impact haute énergie consultation spécialisée dans les 2-3 mois Repérage des accidents domestiques graves avec transmission d’un courrier au médecin de PMI Information écrite remise aux parents
CONCLUSION Séquelles après TC peuvent être importantes Nombreux domaines sphère cognitive Compétence sociale : fonctions exécutives ++ Comportement Conséquences Scolarité, insertion à l’âge adulte Survient après tous types de TC Ne pas négliger les TC légers Dépister et accompagner Développer des réseaux de soins avec un suivi au long cours Prévention !
Je me suis cogné la tête! Çà m’inquiète Si çà t’inquiète, J’ai mal et il y a tout qui tourne… Je suis fatigué Je ne peux pas travailler Çà m’inquiète Si çà t’inquiète, çà m’inquiète aussi…