DIAGNOSTIC D’UNE ULCERATION DE LA LANGUE
PLAN : DEFENITION – GENERALITEES RAPPEL DIAGNOSTIC POSITIF DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL DIAGNOSTIC ETIOLOGIQUE : Ulcérations uniques Ulcérations multiples CONCLUSION.
DEFINITION- GENERATITEES : Perte de substance qui intéresse la muqueuse linguale ; allant de la simple érosion épargnant la couche génératrice de l’épithélium jusqu’à la destruction profonde du chorion et du tissu sous jacent. On en distingue deux aspects : Ulcérations multiples Ulcérations uniques +++→ cancer de la langue ? Biopsie.
II- RAPPEL : Anatomique : La langue est un organe musculo-muqueux situé dans la cavité buccale, implanté sur un squelette ostéo-fibreux qui comprend : l’os hyoïde Deux membranes fibreuses: le septum lingual et membrane hyo-glossienne. Soutenu par une sangle musculaire composée de 17 muscles : Un muscle impaire : le muscle lingual supérieur 08 muscles paires, symétriques : amygdaloglosse, hyoglosse, glosso-staphylin, genioglosse, pharyngoglosse, styloglosse, linguaux, transverse. Prenant des insertions osseuses : os hyoïde, la mandibule, apophyse styloïde et le palais.
muscles extrinsèques de la langue:
La langue présente deux parties séparées par le V lingual: la langue mobile appartenant à la cavité buccale la langue fixe ou base de la langue appartenant à l’oropharynx. 02 faces : face dorsale : 2 /3 ant parsemé de papilles linguales. 1/3 post tapissé par les amygdales linguales. face ventrale : lâche, riche en glandes salivaires accessoires, on retrouve le frein de la langue sur sa ligne médiane avec des veines ranines de chaque coté.
- VASCULARISATION : La langue est richement vascularisée Artérielle : Principalement assurée par l’artère linguale supérieur, collatérale de la carotide externe, elle donne 03 branches majeures : - l’artère dorsale de la langue - l’artère sous linguale - l’artère linguale profonde Accessoirement, par l’artère palatine ascendante et l’artère pharyngienne ascendante. Le drainage veineux se fait par la veine linguale ou veine ranine dans le tronc veineux thyro-linguo-fascial qui se jette ensuite dans la jugulaire interne. Le drainage lymphatique de: la pointe se fait vers les ganglions sous mentaux et sous mandibulaires, la parties moyenne vers les ganglions sous mandibulaires, le fond de la langue se draine vers les ganglions rétro angulo-mandibulaires et la chaîne jugulo-carotidienne.
INNERVATION: 03 types : 1. Motrice : - le nerf grand hypoglosse (XII) innerve tous les muscles de la langue sauf le stylo glosse et le palato glosse innervés par le nerf glosso pharyngien (IX) et le facial (VII). 2. Sensitive : - le nerf laryngé (provient du vague X) et le glosso-pharyngien (IX): innervent le fond de la langue. - Le nerf lingual (provient du V) : innerve les 2/3 ant de la langue 3. Sensorielle: -le nerf lingual et le nerf corde du tympan qui provient du nerf facial (VII) innerve les 2/3 antérieur -Le glosso-pharyngien innerve le 1/3 postérieur de la langue.
un épithélium pavimenteux pluristratifié non kératinisé. B HISTOLOGIE : La muqueuse linguale est formée : un épithélium pavimenteux pluristratifié non kératinisé. Un chorion composé de 02 couches : une couche superficielle dite papillaire une couche profonde conjonctivo-élastique riche en vaisseaux et en glandes salivaires accessoires. Sa face dorsale est tapissée par 02 sortes de papilles : Les papilles gustatives : les papilles caliciformes ; forment le V lingual les papilles fungiformes ; en avant du V lingual les papilles foliées, inconstantes, sur les bords de la langue les papilles tactiles : papilles filiformes réparties sur toute la surface de la langue
C- PHYSIOLOGIQUE : La langue joue rôle dans : la phonation,mastication, déglutition, gustation et dans le développement du maxillaire et de la mandibule. Présence d’une flore bactérienne commensale : Aérobies strictes Anaérobies strictes Levures ; parasites Virus
III- DIAGNOSTIC POSITIF : A- Interrogatoire : Age du patient+++ Mode de début et d’évolution Signes fonctionnels : Dysphagie marquée pour les aliments chauds et acides. Sensation de corps étranger, brûlure ou picotement. Douleur ou gène à la mastication ou à la mobilisation de la langue. Otalgie réflexe Crachats striés de sang Hyper sialorrhée Haleine fétide. Signes généraux : amaigrissement, fièvre, AEG
ATCD pathologiques : Terrain alcoolo tabagique Notion de contage tuberculeux Notion de MST (syphilis, VIH) Terrain néoplasique Notion de prise de médicaments, corticoïde, antimitotique, Soins dentaires,
B- Examen clinique : L’inspection : nécessite des bonnes conditions d’examen, doit préciser : La coloration de la muqueuse autours de l’ulcération : Rouge vif sans limites précises en faveur d’un cancer Fin liseré rouge en faveur d’une lésion aphtoide Pale, lilas en cas d’ulcération tuberculeuse Forme de l’ulcération : arrondie, ovalaire, polycyclique, Les bords de l’ulcération Taillés à pic dans la syphilis. Décollés ou polycyclique dans la tuberculose. Irréguliers dans le cancer. Le fond de l’ulcération : Bourgeonnant et saignant au contact cas du cancer. Recouvert d’un enduit blanchâtre dans la tuberculose. Propre, rouge, lisse, suintant cas de syphilis. on termine l’inspection par celle de la muqueuse bucco pharyngée et l’état de la dentition, en cas d’ulcération de la base de la langue on utilise le miroir laryngé.
La palpation : bi digitale, doit apprécier : la souplesse ou l’induration de la base de l’ulcération. Le caractère saignant au contact. Palpation des aires ganglionnaires à la recherche d’adénopathies cervicales dont on doit apprécier le siège, la taille, la mobilité, la sensibilité, la consistance et l’état de la peau en regard. on termine par un examen ORL et somatique complet. C- Examens complémentaires : Prélèvement pour étude cytobactériologique FNS, VS Sérologie : VIH et syphilis. IDR à la tuberculine Étude cytologique par grattage à la recherche de cellules malignes à compléter toujours par une étude histologique. La biopsie devant toute lésion suspecte
IV- DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL : langue fissurée congénitale les glossites et les états de dépapillation (anémie de BIERMER, avitaminoses A et C). glossite exfoliatrice marginée ou langue géographique. Leucoplasie et muguet.
(Enduit blanchâtre caractéristique Condidose linguale (Enduit blanchâtre caractéristique du condida ) (anémie de Biermer) langue géographique
V- DIAGNOSTIC ETIOLOGIQUE: A- Ulcérations uniques :
1- Aphte buccal vulgaire : après sensation de brûlure apparaît une ulcération de moins de 01 Cm de diamètre, peu profonde, fond jaunâtre, entouré d’un liseré rouge vif ,sans signes généraux et souvent récidivante. 2- Aphte géant : ulcération de 01 Cm de diamètre, caractérisée par une évolution traînante avec une guérison obtenue au prix d’une cicatrice rétractile.
3- Ulcération traumatique : elle est très fréquente, souvent douloureuse Siége le plus fréquemment aux bords de la langue, en regard de l’agent traumatisant (dent délabrée, prothèse dentaire…) dont elle épouse la forme. C’est une ulcération à bords réguliers, fond rosé, base souple ne saigne pas au contact, une adénopathie satellite est fréquente. La suppression de l’agent causale entraîne la guérison en 15 jours sinon la biopsie s’impose. Généralement on retrouve un terrain sous jacent : - sujet grabataire - morsure de l’épileptique lors des crises comitiales. cas particulier : maladie de Riga Fede : ulcération qui survient chez le nourrisson, les incisives inférieures entraînent une irritation Chronique de la face inférieure de la langue lors des tétés.
maladie de Riga Fédé morsure de l’épileptique
4- Ulcération néoplasique : Il s’agit d’un carcinome épidermoide dans 90% des cas Survenant en moyenne après l’age de 40 ans Chez un sujet présentant des facteurs de risques : - terrain alcoolo tabagique+++ - mauvais état de la denture. - hygiène buccale médiocre - condidose chronique - dénutrition et hypovitaminose (A et C) - lésions précancéreuses .
Cliniquement : - gène à la mastication et à la déglutition - mouvements limités de la langue - hyper sialorrhée - haleine fétide - otalgie réflexe l’examen retrouve : - une ulcération à bords irréguliers, - base indurée, étendue en profondeur, - fond bourgeonnant et saignant au contact. - entourée d’une muqueuse rouge vif, - adénopathies satellites indolores et fixes. Diagnostic confirmé par l’étude histologique Traitement chirurgical + radio chimiothérapie. Pronostic dépend : l’extension de la lésion.- Altération de l’état général.
Cancer de la langue
5- Ulcération tuberculeuse : - Réalise une ulcération douloureuse - siége : face dorsale de la langue - forme ovalaire, à bords décollés, polycycliques Diagnostic : orienté par la notion de contage, IDR à la tuberculine, la bascilloscopie des crachats et confirmé par la biopsie en mettant en évidence le follicule de KOSTER. Traitement : chimiothérapie antituberculeuse.
6- Ulcération syphilitique : A- Syphilis primaire : Chancre syphilitique : ulcération indolore, arrondie ou ovalaire, contours réguliers, fond lisse, translucide de couleur rouge, reposant sur une base indurée. Adénopathie satellite : non inflammatoire et ne fistulisant jamais. Diagnostic: est posé sur la notion de contage vénérien dans les 03 semaines précédents le chancre et la sérologie syphilitique positive un mois après la contamination. L’évolution est favorable en 04 semaines accélérée par les antibiotiques (pénécilline) Chancre syphilitique
B- Syphilis secondaire : stade de syphilide papuleux qui réalise une ulcération contagieuse creusante, infiltrée et étalée. Diagnostic : - examen par microscope à fond noir - sérologie syphilitique C- Syphilis tertiaire : c’est la gomme syphilitique ulcérée. C’est la phase latente, après le stade nodulaire, ramollissement puis ulcération et évacuation du sac gommeux, réalisant une ulcération ovalaire ; bords taillés à pic, fond jaunâtre, infectieux évoluant lentement vers une cicatrice rétractile, indélébile sans adénopathie satellite. A ce stade le traitement n’a aucune efficacité. syphilide papuleux
B- Ulcérations multiples : 1- Aphtose buccale : quelle que soit leur forme clinique, la lésion élémentaire est une ulcération arrondie ou ovalaire douloureuse, à bords réguliers entourée d’un liseré inflammatoire reposant sur une muqueuse saine, non infiltrée, sans adénopathie satellite. la guérison se fait spontanément en 8 à 10 jours avec possibilité de récidive. L’étiologie reste controversée, l’origine virale est discutée Facteurs déclanchant : - psychologiques (anxiété,) - alimentaire (chocolat, noix) -mauvaise hygiène bucco dentaire. - médicaments (antibiotique, aspirine, barbiturique) Formes cliniques : -Aphtose simple : quelques éléments de 2 à 5 mm de diamètre - Aphtose multiple : nombreux éléments, parfois fluctuents - Aphtose géante ou péri adénite de sutton : éléments de grande taille, fond nécrotique ; évolution traînante vers une cicatrice rétractile - Aphtose maladie : maladie de Behcet (autres manifestations cliniques)
2- Stomatite ulcéro-nécrotique : 2-1 Ulcération des agranulocytoses et des hémopathie malignes : Cas de neutropénie qui rend la cavité buccale vulnérable aux germes banaux saprophytes, réalisant des ulcérations nécrotiques à fond creusant, étendues en surface et profondeur, évoluant dans un contexte infectieux. Cas des stomatites des thrombopénies, réalisant des bulles hématiques pouvant s’ulcérer et donner un aspect ulcéro-hémorragique. 2-2 Ulcération et VIH : Réalise des ulcérations à caractère ulcéro-nécrotique récidivant et extensif. 2-3 Stomatite ulcéreuses médicamenteuses : Provoquées par certains médicaments : antimitotique, barbituriques et aspirine .
3- Stomatites vésiculo-buleuses : 3-1 Ulcération des grandes maladies bulleuses : Erythème polymorphe Affection cutanéo-muqeuse récidivante d’origine infectieuse ou médicamenteuse Après un stade bulleux survient des érosions très douloureuses, de taille différentes, associées à des signes généraux importants. 3-2 Virales : Rencontrées au cours de la primo-infection herpétique et le zona céphalique. Après rupture des vésicules, apparaît une érosion superficielle douloureuse à fond propre et à contours nets, associée à des adénopathies cervicales sensibles. Diagnostic est clinique. Traitement symptomatique antiviral 3-3 Autres maladies infectieuses : Typhoïde, scarlatine, rougeole, brucellose, coqueluche,… Réalisant des ulcérations peu profondes et très douloureuses
VI- CONCLUSION : L’ulcération de la langue est une affection fréquente, ses étiologies multiples doivent être connues afin de ne pas passer à coté d’une forme cancéreuse d’où intérêt de pratiquer une biopsie devant toute lésion suspecte permettant ainsi un traitement adéquat à temps.