Le Réalisme, Gustave Courbet L’exagération romantique de la sensibilité et de l’imagination ne sont qu’un échappatoire devant les réalités de l’époque. En 1846, le poète Charles Baudelaire réclamait « un peintre qui exprimât l’Héroïsme de la vie moderne » Gustave Courbet, son ami, en fait son crédo artistique, seul à l’époque. L’artiste moderne devrait se baser sur son expérience personnelle: « Je ne peux pas peindre un ange, car je n’en ai jamais vu ».
Première peinture traduisant le programme réaliste de Courbet fut Les Casseurs de pierre (1849). Si nous trouvons des sujets similaire dans la peinture de genre, la taille de cette toile est inhabituelle. Mais la technique de Courbet reste traditionnelle. Elle reçut la forte approbation de Prudhon, socialiste et anarchiste. La technique reste celle des Le Nain et Rembrandt, dont il admirait l’œuvre, et le naturalisme de Caravage. Courbet, Les Casseurs de pierre, 1849
Courbet, Un Enterrement à Ornans, 1849, 315x668 cm Un enterrement à Ornans choque: son grand format était alors réservé aux scènes historiques, mythologiques ou religieuses. Cette remise en question de la hiérarchie des genres fait assimiler l’art de Courbet à l’art «socialiste ». Les réactions sont violentes: «Le Laid en grandeur nature!» Courbet, Un Enterrement à Ornans, 1849, 315x668 cm
Alors que L’Intérieur de mon atelier: une allégorie réelle résumant sept ans de la vie d’un artiste (1854-1855, 352x587 cm) est trouvée vulgaire…
Nous avons vu que la nouveauté introduite par le réalisme est du domaine des thèmes et de l’importance de ces thèmes, la technique restant traditionnelle. Pour remettre en question la manière de peindre, et la manière de concevoir un tableau, il faudra aller plus loin, avec tout d’abord un autre grand peintre, Édouard Manet. Elle reçut la forte approbation de Prudhon, socialiste et anarchiste. La technique reste celle des Le Nain et Rembrandt, dont il admirait l’œuvre, et le naturalisme de Caravage. Courbet, Les Casseurs de pierre, 1849
Édouard Manet, Le Déjeuner sur l'Herbe, Une toile d’Édouard Manet a aussi été trouvée vulgaire, mais pour d’autres raisons: c’est Le Déjeuner sur l’herbe. C’est le fait de peindre côte à côte deux hommes habillés avec une femme nue, et à l’extérieur, avec un titre neutre qui ne justifie pas cette scène, qui a été trouvé choquant. 1863 Édouard Manet, Le Déjeuner sur l'Herbe,
L’explication de Manet Manet explique la nudité du modèle par le besoin qu’il avait de placer les tons chauds et laiteux d’un corps en contraste avec les habits noir et gris des hommes. Manet indique ainsi que la peinture a ses lois propres, le peintre ne doit pas imiter, transmettre fidèlement la réalité familière, mais doit se concentrer sur la réalité da sa toile.
Du côté technique, le modelé pauvre, le fond uni, la profondeur de champ nulle nous indique qu’il ne s’agit plus d’une « fenêtre Renaissance ». La peinture est avant tout une surface matérielle, une toile couverte de pigments. Manet, Le Fifre (1866)
Un manifeste d’autonomie de la peinture Le « Déjeuner sur l’herbe » semble dans ce sens être un manifeste visuel de la liberté de l’artiste: il affirme le privilège de la peinture de rassembler les éléments de son choix dans le but d’obtenir un effet esthétique. Manet parle de la « peinture pure », de sa croyance que les taches de couleurs, et non ce qu’elles représentent, sont la réalité première du peintre. Nous parlons aussi de la « Révolution de la tache de couleur » En cherchant les causes de cette nouvelle attitude, nous repensons à la découverte de la photographie. Si la photographie a confirmé la vérité objective de la perspective linéaire introduite à la Renaissance, elle a aussi donné une représentation exacte impossible à égaler: la peinture doit être libérée de la rivalité avec la photographie. Manet y arrive en insistant que la toile est avant tout une surface matérielle, couverte de pigments.
Un grand nombre de toiles de Manet sont les « peintures de peintures », les reprises des œuvres qu’il admirait…Dans son Olympia, peinte en1863, nous retrouvons l’influence des toiles de Titien, Giorgone, Goya…
Giorgone, Vénus endormie Vers 1505 Giorgone, Vénus endormie
Titien (1488-1576), Vénus d'Urbino Venus d’Urbino vers 1520, Venus endormie vers 1505 Titien (1488-1576), Vénus d'Urbino
Goya, Maya dévêtue, Maya vêtue, 1800-1803
1863 Mais l’Olympia de Manet est à nouveau un tableau qui choque… L’Olympia n’est pas une beauté surprise, honteuse ou complice, c’est une femme consciente et qui rend le regard.
Manet ava être la grande inspiration pour ses plus jeunes collègues, le groupe des impressionnistes, dont il va s’inspirer à son tour… Manet, 1872-73, Le Chemin de Fer
Dans son dernier tableau Le Bar aux Folies-Bergères, 1881-82, nous voyons toutes les préoccupations majeures des peintres de son époque:
De ses plus jeunes collègues, les impressionnistes, la façon de peindre cette toile (la touche rapide, et l’intérêt pour les jeux de lumière, reflets, scintillement, le choix de scène du monde des plaisirs). Mais du réalisme, une sensibilité aigue pour la réalité sociale de son personnage. Le Bar des Folies-Bergères, et Étude pour le bar aux Folies-Bergères, 1881-1882
Résumé: Courbet et le réalisme, Manet et l’autonomie de la peinture Si le réalisme remet en question le thème adressé par l’artiste, qu’il veut tiré de la réalité, de l’expérience vécue de l’artiste et de son temps, et la hiérarchie des genres, par la grande taille des toiles, mais garde par ailleurs la technique traditionnelle, Manet ouvre un nouveau sujet de débat: l’autonomie et la réalité matérielle de l’œuvre (d’une peinture en occurrence, surface plane couverte de couleurs) que nous verrons devenir le débat majeur de l’art depuis. Nous parlons de la révolution de la tache de couleur ou de l’autonomie de la peinture.
« L’autonomie de la peinture » En cherchant les causes de cette nouvelle attitude, nous repensons à la découverte de la photographie. Si la photographie a confirmé la vérité objective de la perspective linéaire introduite à la Renaissance, elle a aussi donné une représentation exacte impossible à égaler: la peinture doit être libérée de la rivalité avec la photographie. Manet y arrive en insistant que la toile est avant tout une surface matérielle, couverte de pigments. Nous y trouvons le point de départ d’une discussion qui va prendre de l’importance jusqu’à la fin du siècle, et rester pertinente jusque à nos jours: la question de la redéfinition de l’œuvre d’art, de son rapport à sa réalité matérielle et à l’horizon idéologique qui la produit.
Pour en savoir plus: Manet, va à son tour inspirer les peintres jusqu’à nos jours…, Ici, son Olympia, peinte en 1863
Yasumasu Morimura, Olympia after Manet
Manet, Le Bar aux Folies-Bergères, 1881-82
Yasumasu Morimura, Daughter of Art history, Theatre-a, 1990
Yasumasu Morimura, Daughter of Art history, Theatre-b, 1990