Le comportement des volailles Comportement des volailles - module Ethologie - Parcours PA - promo 150 Le comportement des volailles Dorothée Bizeray-Filoche– Institut Polytechnique LaSalle Beauvais D. Bizeray-Filoche- LaSalle Beauvais - cours du 20/5/10
Objectifs de la présentation Comprendre comment le comportement d'un animal est impliqué dans la réussite d'une conduite d'élevage Découvrir que des problèmes de comportement peuvent signifier une difficulté de l'animal à s'adapter et que cela peut mettre en péril une production Se rendre compte que l'éthologie peut résoudre bien des problèmes…
Pourquoi s'intéresser au comportement des volailles ? Relation éloignée entre l'éleveur et ses animaux Éloignement accentué dans le cas des volailles Nombreux problèmes de comportement qui peuvent affecter la production
L'animal obligé de s'adapter Pour s'adapter à une situation, l'animal a 2 solutions : Modifier son comportement (externe) Modifier sa physiologie (interne) Si l'animal ne peut s'adapter à son environnement, on dit que son bien-être est affecté
D’où vient le poulet d'élevage ? -150 MA : Archéoptéryx - 3200 ans : domestication de la poule de jungle en Malaisie (Red jungle fowl) Vivait en petits groupes (1 ♂, 2- 3 ♀) Début XXème s : spécialisation des races Depuis 50 ans : intensification
Pourquoi avoir domestiqué Gallus gallus ? Croissance rapide Fort instinct grégaire Domestication Reproduction facile Réactivité à l'homme réduite
Sélection des caractères de production Comportement des volailles - module Ethologie - Parcours PA - promo 150 Sélection des caractères de production Depuis 50 ans, sélection intensive et réfléchie sur les caractères de production Obtention de lignées hyperspécialisées Poulets de chair Poules pondeuses D. Bizeray-Filoche- LaSalle Beauvais - cours du 20/5/10
Systèmes d'élevage des volailles Très grands groupes d'animaux (1/2) 2 types : Bâtiment en claustration Avec accès parcours
Systèmes d'élevage des volailles Très grands groupes d'animaux (2/2) Descriptif : Litière + mangeoires + abreuvoirs Jusqu'à 25 000 animaux Densité très forte (20-25 animaux/m²) Si parcours ou volière : Trappes pour aller à l'extérieur
Systèmes d'élevage des volailles En cage Poules pondeuses : Cage conventionnelle autorisée jusqu'en 2012 À partir 2012 : cage aménagée ou sol ou plein air Canards à gaver Cages individuelles interdites
Systèmes d'élevage des volailles Dans tous les cas Environnement physique Fortes densités ou espace restreint Milieu très homogène et pauvre 1 seul aliment Environnement social Pas de mère (apprentissage) Homogénéité des individus (1 seul sexe, 1 seul âge) Très grand groupe ou isolement
Les problèmes de comportement en élevage La sélection (consciente ou inconsciente) a fait que la majorité des animaux sont aujourd'hui capables de s'adapter aux conditions d'élevages Mais dans certains cas, on se trouve à la limite des capacités d'adaptation des animaux problèmes !
Les problèmes de comportement en élevage En parallèle de la sélection, les capacités d'adaptation des animaux ont diminué et leur comportement a évolué Poulet de chair : Augmentation de la sensibilité aux maladies et de l'appétit Diminution libido, activité et agressivité Poules pondeuses : Augmentation agressivité, nervosité, picage, stéréotypies
Déviations comportementales évoquées aujourd'hui Picage Activité et troubles locomoteurs Stéréotypies des reproducteurs Utilisation des parcours Transitions alimentaires Conclusions
Le picage D'abord picage des plumes Puis cannibalisme Conséquences : Gentle feather pecking Severe feather pecking Puis cannibalisme Conséquences : Impact sur l'image de marque du produit Déclassement des carcasses Morbidité et mortalité
Le picage Surtout chez pondeuses, label et dindes Risque augmenté dans les "élevages alternatifs" Problème renforcé par l'abandon des cages conventionnelles en 2012
Le picage : les solutions Debecquage Efficace mais conséquences sur le comportement importantes Lunettes Anneau, etc.…
Le picage : les solutions Enrichissement du milieu : dévier le picage des congénères vers le picage d'objets inanimés Brins de paille et plaques métalliques chez le dindon (Martrenchar, 2001) le nombre d'individus piqués 10 % de blé entier dans l'alimentation peu efficace (Mirabito et al, JRA 2003)
Le picage : les solutions Diminuer l'intensité lumineuse au minimum Mais solution fortement critiquée par les défenseurs du bien-être animal
Le picage : les solutions Sélection génétique Comportement héritable Très variable selon les souches Évaluations possibles : Nb de coups de becs donnés aux congénères État d'emplumement Performances de ponte et mortalité Picomètre automatique + plumeau en cage individuelle (mis au point par Bessei, 1997)
Sélection de lignées PIC + et PIC- (Chapuis et al, JRA 2003) Trois cycles de sélection sur le nombre total de coups de becs donnés au leurre Lignée PIC+ pique beaucoup Lignée PIC- pique peu Méthodes : Chaque lignée répartie dans 16 cases de 30 animaux Mesures emplumement (0 = plumage parfait, 7 = peau dénudée) et qualité viande
Sélection de lignées PIC + et PIC- (Chapuis et al, JRA 2003) Emplumement et aspect viande meilleurs chez PIC+ par rapport à PIC-… a priori paradoxal ! Possibilité de sélectionner animaux actifs au picomètre (= élément de l'environnement) pour diminuer le picage des congénères (= élément social)
L'activité des volailles de chair Animaux sélectionnés pour leur vitesse de croissance Hyperphagiques Hypoactifs D'où : Beaucoup de temps passé couché ° temps en contact avec litière : risques pododermatites poulet dindon
Troubles locomoteurs (TL) en élevage de poulets de chair Comportement des volailles - module Ethologie - Parcours PA - promo 150 Troubles locomoteurs (TL) en élevage de poulets de chair valgus Conséquences : Pertes financières Non respect du bien-être animal Recommandation du Conseil de l'Europe, Annexe II, 1995 : "… prévenir l'apparition de problèmes de pattes ... et l'activité des oiseaux devrait être encouragée ... L'élevage industriel de poulets de chair produit de nombreux poulets boiteux. Ces poulets sont en général atteints de troubles locomoteurs , comme vous pouvez en voir un exemple sur cette photo. La fréquence élevée de poulets atteints de troubles locomoteurs a 2 types de conséquences : d'une part, des pertes financières importantes pour la filière avicoles à cause de la mortalité et de la morbidité élevée des animaux et qui coûte par exemple à l'industrie américaine jusqu'à 120 millions de dollars par an. D'autre part, ces boiteries semblent très douloureuses pour les animaux. A ce titre, la prévention contre les troubles locomoteurs fait partie des recommandations du conseil de l'EUROPE pour améliorer le bien-être en élevage. D. Bizeray-Filoche- LaSalle Beauvais - cours du 20/5/10
Origine des troubles locomoteurs Troubles d'origine multifactorielle Génétique Croissance Exercice Poulet standard Label Rouge Coupes du cortex tibial
Origine des troubles locomoteurs Troubles d'origine multifactorielle Leterrier et al 1998 Réduction des TL Poids vif 3 6 semaines Génétique Croissance Exercice ? Entraînement sur tapis roulant (Reiter et Bessei, 1998, Thorp et Duff, 1988) Densité osseuse Vascularisation de la plaque de croissance
Effet bénéfique de l'exercice Comportement des volailles - module Ethologie - Parcours PA - promo 150 Effet bénéfique de l'exercice Poulets peu actifs : jusqu'à 80% du temps passé couché à l'âge d'abattage (5-6 semaines) Augmentation de la distance entre mangeoires et abreuvoirs (Haye et Simons, 1978) Augmentation des déplacements Diminution des troubles locomoteurs En effet, il faut savoir que le poulet a un niveau d'activité spontanée assez faible, particulièrement à la fin de l'élevage. Ainsi à l'âge d'abattage, vers 5-6 semaines, un poulet peut passer jusqu'à 80 % de son temps couché La stimulation de l'activité physique du poulet a un effet bénéfique sur les pattes. Ainsi, Haye et Simons ont augmenté la distance mangeoire abreuvoir et ont forcé les animaux à se déplacer plus. Cette stimulation de l'activité physique des animaux a permis de diminuer le % de poulets atteints de troubles locomoteurs. FEED D. Bizeray-Filoche- LaSalle Beauvais - cours du 20/5/10
Mais comment augmenter l'activité locomotrice de poulets "paresseux"? Enrichissement de l'environnement (objets à picorer, litière à gratter, perchoirs) Effet positif transitoire sur le cpt qui disparaît après 3 semaines Pas d'effet sur troubles locomoteurs Variabilité dans l'aliment Alterner 2 aliments différents (énergie/protéine ; blé/T soja) : alimentation séquentielle Diminuer la croissance au démarrage (restriction) et laisser la croissance compensatrice récupérer du retard effet bénéfique sur santé
Stéréotypies des reproducteurs Que sont les reproducteurs lourds ? Production de viande SELECTION MÂLES viande FEMELLES reproduction Reproducteurs chair Lourds Poulets de chair standards "Broilers" Vitesse de croissance Indice de consommation Masses pectorales
Caractéristiques des reproducteurs Dimorphisme élevé entre ♀ et ♂ Agressivité des ♂ envers les ♀ Abattus à 18 mois Sélectionnés pour une vitesse de croissance rapide obésité ° performances de reproduction ° pbs de santé (pbs cardiaques et orthopédiques) Solution : restriction alimentaire Objectif : courbe de croissance pondeuse Mais potentiel : courbe croissance poulet de chair standard PV = 50 % du PV si ad lib
Reproduction et contrôle de la prise alimentaire Reproduction et contrôle de la prise alimentaire (Seigneurin & De Reviers 1996) Restriction - 20 % sous l'Ad Lib À partir de 3 semaines À partir de 6 semaines 20 40 60 80 5 10 15 8L:16D Sperm output (x 109) Age (sem)
Problèmes induits par la restriction alimentaire Forte motivation alimentaire : Ingestion de la ration quotidienne en moins de 15 minutes Expression d'une frustration : activité exploratoire, marche stéréotypée et toilettage
Stéréotypies des reproducteurs (Puterflam et al, 2003) 3 lots comparés SA : Poules reproductrices lourdes nourries ad libitum SR : Poules reproductrices lourdes rationnées L : Poules reproductrices à croissance lente nourries ad libitum Mesures : SS toutes les 5 minutes sur 3 périodes d'1 heure Mange, boit, immobile, marche, se repose, se toilette, pique l'environnement
Stéréotypies des reproducteurs (Puterflam et al, 2003) ** ** ** Comportement des reproducteurs 5 heures après la distribution du repas
Solutions envisagées Diluer la ration avec des fibres : solution +/- efficace Présenter la ration avec des fines particules pour hétérogénéité et temps passé à manger Utiliser des lignées adaptées à la restriction alimentaire, car forte variabilité entre souches "Enrichir" l'environnement
Utilisation des parcours en plein air Répartition des animaux (pondeuses et Label) très hétérogène Surconcentration animale, d'où : Dégradation esthétique du parcours Accumulation de fientes trop localisée Peu de maîtrise des risques de contamination
Utilisation des parcours en plein air Méthodes d'études : Observation directe : % de poules sorties Surface maximale visitée Distance moyenne du bâtiment Densité en zone frontale Mesures simplifiées : Photos numériques Nombre de traversées de lignes parallèles à 20 et 40 m des bâtiments
Utilisation des parcours en plein air par les pondeuses (ITAVI) Entre 3,8 (situation caniculaire) et 8,8 % de poules présentes sur le parcours Environ 1500 m² visités (12% surface totale) Restent en général à moins de 20 m du bâtiment Concentration maximale dans les 5 premiers mètres devant les trappes Attirance pour les zones d'ombres
Aménagement des parcours de Label (Lubac et al, 2003) Implantation de taillis à très courte rotation de saules dans la moitié des parcours Canisses Tunnels
Aménagement des parcours de Label (Lubac et al, 2003) Parcours aménagé Parcours nu % poulets présents sur parcours à 11 sem 36,8% 18,6% Distance moyenne au bâtiment à 11 sem 32 m 21 m Surface visitée totale 2585 m² 1350 m²
Facteurs qui semblent influencer la sortie sur les parcours Facteurs physiques Abris Repères spatiaux Aliment sur le parcours Pelouse / foret Température Facteurs sociaux Facilité d'accès aux trappes Nb d'oiseaux dehors Hiérarchie sociale
Transitions alimentaires En élevage, parfois sous-alimentation ponctuelle juste après une transition alimentaire D'où : Chute de croissance Gaspillage aliment Ingestion litière pathologies
Transitions alimentaires Particulièrement dans les productions à durée longue (dindes) Pb important depuis interdiction MP d'origine animale car modification des caractéristiques physiques des aliments D’où étude des signaux modifiant le comportement alimentaire Réactions sensorielles Apprentissages alimentaires
Réactions sensorielles vis-à-vis de l'aliment Influencent le comportement à très court terme (<1 minute) Vision Acuité très forte Capable de rechercher un aliment et de guetter d'éventuels prédateurs simultanément Attirance pour particules brillantes et claires Vision tétrachromatique : rouge, vert, bleu, UV
Zones de la rétine riches en cellules correspondant à la perception des détails ("loupes") dans certaines parties du champ visuel Zone de vision binoculaire. En dehors de cette zone, chaque œil perçoit une image différente
Réactions sensorielles vis-à-vis de l'aliment Toucher Perception tactile par le bec, très riche en mécanorecepteurs 2/3 des coups de bec sont explorateurs Préférence pour particules : Grosses > miettes ou farine Tendre > rigide Lisses > rugueuse Homogènes > hétérogènes Olfaction / Gout Plutôt bonnes, mais difficile à distinguer entre eux Impact moindre sur les choix alimentaires Détectent différences entre umami, sucré, acide, salé, amer
Apprentissages alimentaires Apprentissage visuels, tactiles, et olfacto-gustatifs Association entre caractéristiques sensorielles de l'aliment et préférences alimentaires Apprentissages aversifs et appétitifs liées aux conséquences post-ingestives Aversion alimentaire conditionnée (LiCl) + efficace chez le jeune poussin que l'adulte Persiste au max 1 sem Apprentissage appétitif Attrait pour aliment + riches en energie ou mieux équilibrés en AA
Effet de l'expérience sur les préférences alimentaires
Effet de l'expérience sur les préférences alimentaires (Rouillé et al, 2003) Selon type de régime offert avant le test alimentaire : Alimenté avec des particules hétérogènes : meilleure adaptation à l'aliment nouveau Alimenté avec des particules homogènes : plus d'exploration, d'hésitation, de gaspillage et moins de consommation
Conclusion : 2 types de recherche envisagés Adapter l'animal à son milieu : Sélection pour des animaux avec des seuils de réactivité au stress + faible : Immobilité tonique Sélection d'animaux adaptés à la vie en groupe : Test du tapis roulant
Conclusion : 2 types de recherche envisagés Adapter le milieu à l'animal Occuper les animaux : dilution ration, travail pour récompense alimentaire, enrichir le milieu d'élevage Éviter les stress : cohésion des groupes, relation homme-animal, hétérogénéité de l'aliment
Le comportement des volailles : vers une solution d'avenir ?... FIN Le comportement des volailles : vers une solution d'avenir ?...