Le temps emprunte sa couleur à nos états dâme… On aurait beau traverser la plus belle saison, si le cœur ny est pas, elle sera grise et morne… Musique: Autumn rose Ernesto CORTAZAR Prélude
Il fut un temps où lautomne marrivait en plein cœur comme un courant de grise mélancolie… Cette saison se coulait perfidement dans mes jours telle une intruse, une indésirable, une visiteuse à répudier… La nostalgie et lennui en ternissaient toute la splendeur…
Cette année, je suis entrée dans larrière-saison comme on samène à une fête…
Mes pas dans le feuillage mont conduite au-delà de toute attente…
Sous la voûte ambrée de cet imposant temple dor, dans un silence brillant et glorieux, mon corps sest reposé, mon âme a vibré…
Bien calée dans mon bonheur multicolore, la narine caressée par lodeur boisée, je me suis recueillie pour entendre les murmures de lautomne qui frissonnait autour de moi…
Et les feuilles de mon enfance se sont mises à valser dans mes pensées…
Feuilles fébriles qui frémissaient dimpatience sur leurs branches, en espérant léphémère liberté…
Feuilles moqueuses qui crépitaient sous nos pas lorsque, sur le chemin de lécole, nous empruntions la côte du pont bordée dérables…
Feuilles complices entassées en un gros coussin de fortune dans lequel se laissaient choir, avec une confiance émerveillée, nos petits êtres enjoués…
Feuilles flamboyantes que lon rassemblait en candides bouquets échevelés, cadeaux vitement improvisés pour nos professeurs qui jouaient si habilement le jeu de lémerveillement afin de contenter nos naïvetés enfantines…
Feuilles élues qui échappaient au tombeau de lhiver en trouvant refuge entre les pages discrètes dun livre…
Feuilles déesses aux lignes séduisantes, immortalisées dans la cire pour le bonheur de lœil averti…
Feuilles modèles que chatouillaient nos crayons maladroits pendant les cours de dessin des vendredis dautomne…
Feuilles chagrines des jours de pluie qui nous faisaient communier à nos propres tristesses…
Feuilles de la dernière chance, qui ornaient nos murs avant de se replier à tout jamais sur leur propre vie…
Feuilles graciles vivement soulevées par la main indulgente du vent qui leur épargnait le supplice des dents voraces du râteau…
Feuilles «Cendrillon», princesses déchues, qui assistaient, impuissantes, au déclin de la saison qui les avait si joliment parées…
Feuilles captives et attendrissantes que le temps retenait entre deux saisons…
Feuilles mortes, certes, mais si près de la Vie nouvelle qui déjà, bourgeonne… Nest-ce pas là une belle leçon de foi et despérance ? Merci davoir partagé avec moi ces précieux moments… Créations Gis Copyright © Tous droits réservés
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