Quelques repères éthiques pour faciliter la prise de décision

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Transcription de la présentation:

Quelques repères éthiques pour faciliter la prise de décision V Morel EMASP CHU Rennes

Un peu d’histoire Une tradition médicale hippocratique Un corpus scientifique Un corpus moral Une laïcisation de la société La prédominance de la science De nouvelles questions posées Le MPR est en permanence traversé par des questions éthiques Finalité des traitements Capacité de récupération Limitation de traitement 2

Éthique appliquée « L'éthique qui est le travail que je consens à faire avec d'autres, sur le terrain, pour réduire, autant que faire se peut, l'inévitable écart entre les valeurs affichées et les pratiques effectives » J-F Malherbe 3

Éthique appliquée Travail : ça ne se fait pas tout seul « L'éthique qui est le travail que je consens à faire avec d'autres, sur le terrain, pour réduire, autant que faire se peut, l'inévitable écart entre les valeurs affichées et les pratiques effectives » Travail : ça ne se fait pas tout seul Je consens : on ne peut forcer personne à l’éthique Avec d’autres : cela suppose la pratique du dialogue et la recherche de la vérité à plusieurs Sur le terrain : la réflexion doit être concrète et adaptée à notre vécu 4

Ethique appliquée « L'éthique qui est le travail que je consens à faire avec d'autres, sur le terrain, pour réduire, autant que faire se peut, l'inévitable écart entre les valeurs affichées et les pratiques effectives » Pour réduire : ne pas rechercher l’objectivité, bénédiction de l’arbitraire L’inévitable écart : reconnaître d’emblée notre propre imperfection, c’est à dire notre humaine condition Les valeurs affichées : mon idéal, ce que je vise Les pratiques effectives : ce que j’ai réussi à faire et à ne pas faire tous les jours, donc mes frustrations 5

Comparaison éthique, morale et droit Porte sur le bon et le mauvais Porte sur le bien et le mal Porte sur le légal et illégal Répond à la question : comment vivre ? Répond à la question : que dois-je faire ? Répond à la question : comment régler les conflits en société ? recommande commande Contraint et protège Impératif hypothétique. Dépend des circonstances Impératif catégorique s’applique de manière universelle S’applique de manière universelle pour les lois et selon les circonstances par l’application des juges 6

Éthique principaliste Les principes définition Les règles Les limites d’autonomie «le médecin doit se régler sur la licence que lui donne le malade » Respect des choix des positions personnelles des décisions qui en découlent. Dire la vérité, Respect de la vie privée protéger la confidentialité obtenir le consentement L’indifférence, le consumérisme de bienfaisance « je dirigerai le régime des malades à leur avantage suivant mes forces et ma capacité » L’obligation d’agir pour le bien-être des autres Prévenir le mal enlever le mal promouvoir le bien L’aliénation, la déresponsabilisation, l’abus de pouvoir non malfaisance  « Et je m’abstiendrai de tout mal » L’obligation de ne pas faire de mal aux autres Éviter le mal de justice «  et en toute justice »  L’obligation de traiter tous les hommes de la même façon À chaque personne : Sa part égale, selon ses besoins, selon ses efforts, selon sa contribution, selon son mérite 7

Quelques exemples de conflits Bienfaisance et autonomie: transfusion et Témoin de Jéhovah Bienfaisance et non malfaisance : l’acharnement thérapeutique en réa Bienfaisance et justice: question de la disponibilité des organes Autonomie et justice: femme de confession musulmane refuse d’être prise en charge par un homme 8

Les différentes conceptions de l’autonomie Origine du pouvoir autonomie Les conséquences médicales Conception anglo-saxonne Le juge La jurisprudence Liberté individuelle auto -détermination des préférences Refus de soins possible le consentement suffit Conception française Le législateur la loi Le vouloir de ce qui est universalisable Celui qui fait des choix opérationnels n’est pas véritablement autonome Le consentement ne suffit pas à justifier l’intervention sur le corps 9

Éthique de conviction L'action se réfère à des impératifs auxquels il s'agit d'obéir. Ex : interdit de tuer, traiter chacun comme un égal Théorie philosophique déontologique : on nous demande de toujours respecter certaines règles et cela indépendamment des conséquences possibles. La déontologie est une éthique de la conviction qui accorde une valeur morale aux moyens C'est ainsi qu'un acte éthique ne peut jamais être jugé sur ses résultats. 10

Éthique conséquentialiste Théorie philosophique conséquentialiste : on demanderait directement ou indirectement la promotion du meilleur état des choses possibles Les conséquences de nos actions sont ici seules à prendre en considération. Nous sommes ainsi dans une approche utilitariste qui est une doctrine qui cherche à évaluer de manière objective les actions humaines C'est une éthique de la responsabilité qui ne s'intéresse qu'aux fins et n'est pas regardante sur les moyens. 11

Éthique procédurale Comment, lorsque les acteurs ne partagent pas totalement la question du bien, arriver malgré tout à pouvoir prendre des décisions moralement justes  L’élaboration pragmatique et négociée d’instrument de régulation établie en commun qui garantisse les décisions. La procédure employée devient par la même source de valeur 12

Éthique de la discussion Le langage comme cadre nécessaire constitue ici l’exemple même de la procédure Habermas «  je dois soumettre ma maxime à tous les autres afin d’examiner par la discussion sa prétention à l’universalité » Questions: Ce temps de la discussion est-il toujours possible ? Cette vision de la discussion entre personne rationnelle en situation de parfaite égalité peut sembler utopique Le fait d’obtenir un consensus est-il suffisant pour être certain de la justesse de la décision ? 13

Éthique de la vertu S’intéresse moins à la prise de décision qu’au caractères des décideurs Exemple de vertu: la compassion, la sollicitude 14

Le triangle éthique de Ricœur Visée éthique Le bon Principes Le devoir Situation indications Visée d’une vie bonne Sens, Finalités Valeurs Normes et lois Maximes, impératifs, interdits Ligne de conduite Conflits de valeurs Décider le mieux ou le moins mal possible JE Soi Estime de soi Mes valeurs, mes priorités, mon préférable Test d’universalisation Mise à l’épreuve de mon préférable  Impératif catégorique Confrontations culturelles Universel / particulier Diversité culturelle TU autre Avec et pour autrui Sollicitude pour l’autre Ses préférables Réciprocité des libertés Reconnaissance mutuelle Interdits : du meurtre, de l’inceste, du mensonge Respect d’autrui et de sa dignité ; règle d’or Humanité = fin en soi et pas seulement moyen Cellule de conseil Groupes d’aide à la décision éthique Sollicitude pour l’autre, pour plusieurs, respect des règles / respect de la liberté IL chacun Dans des institutions justes Visée du bien commun Recherche du bien vivre ensemble Socialisation des valeurs Règles contractuelles Partage équitable Codes déontologiques Droits de l’homme Débat public Débat démocratique (Media, Parlement) Conflit entre les institutions et la conscience morale 15

1.1 Un peu d’histoire octobre 1903, l’assemblée générale des médecins de l’État de New York mit à l’ordre du jour la question de l’attitude à adopter face aux incurables et une majorité se prononça même pour un droit à l’euthanasie En Allemagne, le parlement examine en 1913 déjà un projet de loi prévoyant le droit, pour les malades incurables et souffrants, d’être euthanasiés après accord d’un tribunal et consultation d’une commission d’expert une grande enquête interne est organisée en décembre de 1913 à juillet 1914 par le Docteur Lucien Gron, Directeur de la Gazette médicale de Paris La question de l’euthanasie n’est pas une question récente. Dire que l’on parle de ce sujet dès le début du XX siècle ne veut pas dire qu’il est approuvé par l’ensemble de la communauté médicale . DR Morel le 19/03/10

1.2.1 définition de l’euthanasie Si le mot a une étymologie grecque [il s’agit de « la bonne mort »], cette antiquité ne doit pas faire illusion c’est Bacon, un médecin anglais qui l’emploie pour la première fois en 1663 en évoquant le rôle positif que les médecins pourraient jouer dans la fin de leurs semblables. Contrairement au glissement sémantique, l’euthanasie ne renvoie donc pas dans un premier temps à une mort provoquée, avancée, mais à une mort douce, soulagée. Le glissement sémantique se fait à la fin du XIXe, début du XXe siècle pour aboutir à la définition suivante : l’euthanasie est l’action de donner délibérément la mort à un malade, à sa demande, afin de soulager des souffrances jugées insupportables. DR Morel le 19/03/10

1.2.2 définition de la limitation de soins Elle consiste tout simplement à suspendre, ou à ne pas mettre en œuvre un traitement qui maintenait un malade en vie En effet, lorsque vous suspendez un traitement, la mort ne survient pas du fait que vous avez suspendu le traitement, Elle survient tout simplement du fait de l’évolution naturelle de la maladie (donner l’exemple de la réa et d’un AVC). En fait, c’était la vie qui était maintenue de façon « artificielle » par le traitement. On voit donc qu’il ne s’agit pas du tout de la même chose entre l’euthanasie et la limitation de soins. Dans le premier cas vous initiez et contrôlez le début du processus (administration de la drogue) et la fin du processus (la mort). Dans la limitation de soins, vous ne maîtrisez qu’un seul élément : le moment où vous acceptez que la maladie évolue spontanément. DR Morel le 19/03/10

1.2.3 définition du suicide assisté Le suicide, depuis le XVIIIe siècle, est autorisé. Nous avons donc toujours la liberté de nous tuer. Ne pouvons-nous pas légitimement nous interroger sur les personnes qui demandent à mourir de façon médicalisée alors même qu’elles pourraient passer à l’acte ? Il est rare que les patients dépressifs ou psychotiques, lorsqu’ils ne voient plus d’autre issue à leur souffrance que la mort, demandent à leurs médecins de les aider. 80 % des personnes qui ont effectué une tentative de suicide ne récidivent pas. Il s’agissait d’un appel au secours, d’un cri de détresse, entendu trop tardivement mais entendu tout de même. Hormis les très rares cas de personnes qui refusent la déchéance, la dépendance, liées aux situations de maladie ou de vieillesse, et pourtant inhérente à notre existence, la demande d’euthanasie est le plus souvent un appel au secours. La plupart des demandes d’euthanasie sont des appels au secours qui trouvent une réponse dans une prise en charge adaptée 8 fois sur 10 il s’agit tout simplement d’un traitement antalgique inadapté La plupart des demandes d’euthanasie relève d’une incompétence médicale DR Morel le 19/03/10

Quelques répères pour la dignité

1.3.1 conception dite « bourgeoise » Les nobles se souciaient de l’honneur, valeur qui dépendait de leur état, le noble par rapport au tiers état, le marquis supérieur au comte, mais le noble ne s’occupait pas de la dignité La notion de dignité est apparue vers l’année 1750 où les « bourgeois » ont essayé de promouvoir une nouvelle valeur qui était la dignité à l’époque ils considéraient que la valeur ne dépendait pas de leur état comme pour les nobles mais dépendait des conduites, donc pour être digne il fallait se conduire dignement et on a inventé le « digninomètre ». Alors, quelle conduite fallait-il avoir pour être digne, avoir une grandeur, une maîtrise, de la pudeur, de la tenue, de la retenue, de la contenance ? Au niveau moral, il fallait arriver à retenir ses envies comme le désir, la jalousie ; bien sûr se pose d’emblée le problème de ce qui se passe pour les personnes qui n’avaient plus cette contenance, pour les personnes qui étaient dépendantes ? Pour faire simple, on va définir au sein de la bourgeoisie des critères de dignité et l’on sera effectivement plus ou moins digne selon ce que l’on fait. Invention d’un « dignitomètre » par rapport à des repères partagés DR Morel le 19/03/10

1.3.2 conception religieuse dans la plupart des religions monothéistes tous les hommes sont dignes la dignité est absolue, intrinsèque, inaliénable, en lien avec un dieu. Très rapidement cette affirmation peut être fragile, car, si Dieu n’existe pas  On voit donc que l’affirmation monothéiste et plus précisément chrétienne de la dignité humaine est fragile car il faut que deux conditions soient réalisées, d’une part que Dieu existe et d’autre part que tous les hommes soient faits à son image et ressemblants (Dieu s’est fait homme). Si ces deux premiers préceptes ne sont pas réalisés, que devient la dignité humaine? Une dignité qui devient universelle Disparition du dignitomètre DR Morel le 19/03/10

Une dignité universelle, laïque et démocratique 1.3.3 conception kantienne une référence beaucoup plus laïque et démocratique de la dignité Kant dit que tous les hommes sont dignes, de la même dignité « car si les choses ont un prix, l’homme lui a une dignité laquelle est sans degré ni partie et cela serait vrai », même si Dieu n’existait pas. On voit donc que par rapport à la conception bourgeoise, Kant fait un geste extraordinaire de démocratisation de la dignité, il n’y a plus ce dignitomètre, nous sommes égaux en dignité. Il y a également une véritable laïcisation de la dignité par rapport au monothéisme puisque Kant dit « et cela serait vrai même si Dieu n’existait pas ». Lorsque Kant dit « sans degré ni partie » cela veut dire que l’ on n’est pas plus ou moins digne au sens qu’il y aurait des degrés à la dignité, non, on l’est ou on ne l’est pas, et nous le sommes tous. Une dignité universelle, laïque et démocratique DR Morel le 19/03/10

1.3.4 conception hegelienne pour que cette dignité existe complètement, elle doit être reconnue par autrui sans pour autant que la reconnaissance fasse la dignité, elle préexiste à cette reconnaissance. La reconnaissance de la dignité me permet de passer de la dignité en puissance (comme rose non éclose par exemple), à la dignité en acte (la rose éclose). Ainsi, dirait Hegel, « en fin de vie, ma dignité, mon moi s’éveillent grâce à toi et au regard que tu portes sur moi », Il y a des regards qui font fondre le sentiment de dignité comme une neige au soleil, la dignité ne se perd et ne peut pas se perdre puisqu’elle est intrinsèque à la personne humaine ; en revanche, ce qui peut se perdre c’est le sentiment de sa dignité, si vous ne rencontrez que des regards hostiles, des regards qui vous assignent à votre corporéité déficiente vous avez l’impression que votre dignité se désactualise. Pour autant, il ne faut pas pour penser que le fait simplement de regarder avec plein de respect et d’amour autrui va faire que tout va bien aller alors que la vie est totalement dévastée et que la mort s’approche.. Le regard d’autrui pour passer d’une dignité en puissance à une dignité en acte DR Morel le 19/03/10

1.3.5 conception dite « moderne » C’est la conception par exemple d’une association comme l’ADMD. (Association du droit de mourir dans la dignité). La dignité est égale à autonomie, autonomie égale maîtrise. La perte de la maîtrise serait une perte d’autonomie et la perte de l’autonomie serait une perte de dignité. La perte de la maîtrise, l’incontinence, le polyhandicapé, la dépendance, seraient une perte de dignité dans cette conception de la dignité, je suis capable de définir ma propre dignité, c’est ce que dit très clairement François Caillavet (le président d’honneur de l’ADMD) « je suis capable de dire si je suis digne ou non et personne d’autre ». lorsque l’on devient dépendant, vieux, incontinent au fond de son lit (malade ou non), que devient notre dignité ? Conception qui, à mon sens, est peu compatible avec le métier de soignant Article 7 du code de déontologie « Le médecin doit écouter, examiner, conseiller ou soigner avec la même conscience toutes les personnes quels que soient leur origine, leurs moeurs et leur situation de famille, leur appartenance ou leur non-appartenance à une ethnie, une nation ou une religion déterminée, leur handicap ou leur état de santé, leur réputation ou les sentiments qu'il peut éprouver à leur égard ». Retour du « dignitomètre » à partir de ses propres repères DR Morel le 19/03/10

1.3.6 la déclaration des droits de l’homme Le prix Nobel Charles Richet qui (vice-président de la Société française d’eugénique) cite en 1921 « que c’est barbarie que de forcer à vivre un sourd-muet, un idiot, un rachitique, ce qui fait l’homme c’est l’intelligence ; une masse de chaire humaine sans intelligence humaine ce n’est rien, il y a là de la mauvaise matière vivante qui n’est ni digne d’aucun respect ni d’aucune compassion. Les supprimer résolument ce serait leur rendre service car ils ne pourront jamais que traîner une misérable existence » En réaction à l’horreur absolue, l’Homme avec un grand H. Le préambule de la Déclaration des droits de l’homme comporte : « Considérant que la reconnaissance de la dignité inhérente à tous les membres de la famille humaine et de leurs droits égaux et inaliénables constituent au fondement de la Liberté, de la Justice et de la paix dans le monde, l’assemblée proclame : - article 1er : tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits ». On voit donc que dans le cadre de la Déclaration des droits de l’homme, La dignité est donc une valeur inconditionnelle et incomparable attribuée à l’humanité telle qu’elle se réalise dans les personnes, il n’y a pas de degré dans la dignité, ce n’est pas un attribut abandonné au libre arbitre de chacun. Appréhender la dignité dans une conception dite « moderne » conduit à la faire dépendre de facteurs extérieurs comme l’âge, la santé, la beauté, la productivité. la dignité est tout le contraire d’une convenance personnelle, elle est l’affirmation que l’homme est reconnu comme ayant une valeur absolue et n’est donc au pouvoir de personne ni même de moi de nier cette dignité. DR Morel le 19/03/10