Les mémoires de la Seconde guerre mondiale L’historien face à la mémoire de la guerre Terminale L – Histoire leçon 1
Problématique : Après 1945, la France est dans un paradoxe. C’est un pays meurtri par la guerre et l’Occupation, blessée par les exactions du régime de Vichy (= maréchal Pétain). Mais en 1945 c’est aussi un « vainqueur » : place au Conseil de sécurité de l’ONU, pas d’occupation américaine. C’est de Gaulle qui impose sa version : Vichy a été un régime illégitime, seuls les gaullistes résistants l’ont été. Cette mémoire de la guerre prend trois aspects : la Résistance, Vichy, la Shoah
I- Le « résistancialisme » dès 1945 1- Mythification et mystification Cette expression d’Henry Rousso désigne le mythe gaulliste d’une France massivement résistante entre 1940 et 1944, alors que la majorité est restée passive : Mémoire héroïque, qui met en valeur des figures comme Jean Moulin ; Mémoire unanimiste : tous les partis sont d’accord avec cette version de de Gaulle, y compris les communistes (parti des « 75 000 fusillés »).
Mais cette construction politique permet de cacher d’autres réalités : Mauvais choix initiaux : ligne Maginot, déroute militaire de 1940 et exode, armistice… Importance de la collaboration de l’Etat représenté par Vichy : déportation des juifs, STO, livraison de matériel aux allemands, Milice chassant les résistants… Epuration des collaborateurs de Vichy « oubliée » : procès, femmes tondues…
Communistes résistants seulement après l’invasion de l’URSS en 1941 Rôle des américains dans la libération minimisée. Génocide juif noyé dans le sort des autres déportés : peu de survivants, fort traumatisme
2- Le rôle minoré de Vichy Robert Aron, Histoire de Vichy : la collaboration de Pétain a protégé la population des exactions nazies et ainsi préparé la libération. Résistants mis en valeur (Moulin, Mocquet…) mais pas les autres victimes : mémorial du Mont Valérien. En 1956, censure du film Nuit et brouillard d’Alain Resnais, car il y est expliqué que les juifs internés étaient gardés par des policiers français. Panthéonisation de Jean Moulin en 1964.
II- La remise en cause à partir de 1968 1- L’après De Gaulle Remise en cause dans les années 1970 : la nouvelle génération n’a pas connu la guerre. Contestation de De Gaulle : CRS=SS en 1968… Mort de de Gaulle en 1970. Mémoire : le chagrin et la pitié d’Ophuls, qui est très critique envers Vichy et la société française antisémite
Lacombe Lucien, de Louis Malle : histoire d’un paysan français qui aide la Gestapo. La France de Vichy par Robert Paxton, 1973 : rôle actif de Vichy dans la déportation des juifs 1961 : procès Eichmann, filmé : génocide juif
2- Procès, négationnisme Juif=victime, dans Shoah, de Lanzmann, 1985 (10 h !) Négationnisme dans les années 80 : antisémitisme politique pour remettre en valeur le régime nazi. 1987 : procès Barbie, chef de la Gestapo de Lyon 1990 : loi Gayssot contre le négationnisme (Faurisson, le Pen…)
1995 : discours de Jacques Chirac au Vél’d’Hiv : responsabilité de l’Etat français. Rupture avec les gaullistes, car Vichy n’est plus considéré comme illégitime. 1997 : procès Papon, haut fonctionnaire de Vichy (87 ans !).
III- Les mémoires apaisées 1- Le devoir de mémoire Mémoire : souvenirs individuels ou collectif = partiel et subjectif. Mémoire apaisée, distanciée aujourd’hui et assez bien connue : devoir de mémoire Mémoire particulière de la Shoah . Justes, Pb des Tziganes Résistance : référence morale 2007 : lecture de la lettre de Guy Mocquet (Sarkozy).
2- Le travail de l’historien Complexe, car événements récents, dont les témoins disparaissent. L’historien ne fait pas revivre, il doit expliquer. Intervention lors de procès de négationnistes (Vidal-Naquet, Vernant)
3- Les lois mémorielles loi Gayssot condamnant la négation des crimes contre l’humanité (1990), loi reconnaissant le génocide arménien (2001), loi Taubira assimilant la traite négrière atlantique ou de l’océan Indien à un crime contre l’humanité (2001). Mais risque d’empiètement sur la liberté de recherche
Conclusions Mémoire de la guerre encore vivante. Récupération par nos présidents : Chirac ; discours du vél’d’hiv » Sarkozy : lettre de Guy Moquet Hollande : visite d’Oradour en 2013 avec le président allemand ; 2013, transfert de 4 résistants au Panthéon (Germaine Tillon, Geneviève Anthonioz-De Gaulle (qui ont été déportées à Ravensbruck), Pierre Brossolette et Jean Zay).