R. c. Sioui R. c. Sioui, [1990] 1 R.C.S. 1025 Georges Sioui
Faits en litige : Les frères Sioui ont été trouvés coupables par la Cour des sessions de la paix d'avoir coupé des arbres, campé et fait des feux à des endroits non désignés dans le Parc de la Jacques-Cartier, ce contrairement au Règlement relatif au Parc de la Jacques‑Cartier ; Ils affirment qu'ils pratiquaient certaines coutumes ancestrales et rites religieux qui font l'objet d'un traité entre les Hurons et les Britanniques, le traité Murray.
Faits en litige (procédures antérieures): La Cour des sessions de la paix : Les frères sont déclarés coupables d’avoir contrevenu au règlement. La Cour supérieure : (appel de novo) leur condamnation est confirmée La Cour d’appel : Reconnaissance par une majorité de la validité du traité Murray, les frères sont alors acquittés.
Lois et articles Acte de capitulation de Montréal (1760), art. 40, 50. Acte de capitulation de Québec (1759). Loi constitutionnelle de 1982, art. 35. Loi établissant le Parc national des Laurentides, S.Q. 1895, 58 Vict., ch. 22. Loi sur les Indiens, L.R.C. (1985), ch. I-5 [auparavant S.R.C. 1970, ch. I-6], art. 88. Loi sur les parcs, L.R.Q., ch. P-9, art. 1c), e), 11. Proclamation royale, 1763 [reproduite L.R.C. (1985), app. II, no 1]. Règlement relatif au Parc de la Jacques-Cartier, (1981) 113 G.O. II 4815, art. 9, 37 [maintenant R.R.Q. 1981, ch. P-9, r. 2, art. 10, 38]. Traité de Paris (1763).
Question en litige : 1. Le document suivant, signé au nom du général Murray le 5 septembre 1760, constitue‑t‑il un traité, au sens de l'art. 88 de la Loi sur les Indiens, S.R.C. 1970, c. I‑6? 2. Si la réponse à la question 1 est dans l'affirmative, ce "traité" produisait‑il encore des effets juridiques le 29 mai 1982, au moment où les infractions reprochées ont été commises? 3. Si les réponses aux questions 1 et 2 sont affirmatives, les termes de ce document étaient‑ils de nature à rendre inopérants les art. 9 et 37 du Règlement relatif au Parc de la Jacques‑Cartier (décret 3108‑81, Gazette officielle du Québec, partie II, 25 novembre 1981, pp. 4815 et suiv.) adoptés en vertu de la Loi sur les parcs, L.R.Q., ch. P‑9, à l'égard des intimés?
Motifs Le juge Lamer : les tribunaux doivent faire preuve de flexibilité lorsqu'il s'agit de déterminer la nature juridique d'un document qui consigne une transaction avec les Indiens. Ils doivent tenir compte, en particulier, du contexte historique et de la perception que chacune des parties pouvait avoir à l'égard de la nature de l'engagement qui est rapporté dans le document étudié. Le général Murray avait la capacité, dans les circonstances de représenter la Grande-Bretagne afin de signer une entente valide avec les Hurons-Wendat, tout comme ces derniers
Suite :la reconnaissance du traité On doit pas avoir recours à une preuve extrinsèque pour interpréter un traité s'il n'y a aucune ambiguïté ou si cela aurait pour effet d'en modifier le texte par l'adjonction ou la suppression de certains termes. Cette règle s'applique aussi lorsqu'il s'agit de déterminer la nature juridique d'un document relatif aux Indiens. Toutefois, il faut faire preuve de plus de flexibilité car la question de l'existence d'un traité. Le document paraît ici ambiguë. Le contexte historique supporte même la proposition que tant les Britanniques que les Hurons pouvaient avoir l'intention de conclure un traité le 5 septembre 1760. Lamer réfère, en particulier, au désir avoué de la Grande‑Bretagne de s'allier le plus grand nombre d'Indiens possible.
Suite : L’absence de solennité ne permet pas de déduire qu’il n’y a pas eu de traité. Bien que la présence de solennités ne soit pas d'une importance cruciale pour l'existence d'un traité, qu'il est raisonnable de voir dans la présentation des ceintures lors de la conférence du 16 septembre précédant une ratification solennelle de l'accord de paix conclu quelques jours plus tôt. L’attitude postérieure des parties à l’égard du traité ne démontre pas nécessairement qu’il n’y a pas eu de traité.
Suite :Les effets du traité et portée Rien dans l’histoire plus ancienne ou récente ne permet de croire que ce traité a été éteint par un acte postérieur à sa ratification. il faut tenir pour acquis que les parties au traité du 5 septembre entendaient concilier le besoin des Hurons de protéger l'exercice de leurs coutumes et le désir d'expansion du conquérant britannique, que l'exercice des coutumes soit protégé sur toutes les parties du territoire fréquenté lorsqu'il n'est pas incompatible avec son occupation. Dans le cas présent, on pourrait circonscrire cet exercice au Parc de la Jacques Cartier.
Conclusion Le jugement Sioui servira par la suite de référence en matière de jugement impliquant l’interprétation des différents traités signés entre les autorités britanniques et les premières nations tout au long du 18ième et 19ième siècles Chef Wendat Nicolas Vincent Tsawenhohi