Quasar 95 Club d’astronomie De Frouville

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Transcription de la présentation:

Quasar 95 Club d’astronomie De Frouville SN 1054 JP. Maratrey - Octobre 2009

SN 1054 Au programme : Un peu d’histoire Comète, nova ou supernova ? Identification Découverte du rémanent La nébuleuse du crabe L’étoile centrale

Un peu d’histoire SN 1054 est l’une des 8 supernovas de notre Galaxie dont des témoignages écrits nous sont parvenus. L’étude de ces témoignages anciens débute au 19ème siècle. La famille Biot, Jean-Baptiste, puis son fils Edouard, sinologues, traduisent des passages du traité d’astronomie de l’encyclopédie chinoise en 348 volumes (Le Wenxian Tongkao).

Un peu d’histoire En Chine : Les chinois nomment ces astres qui apparaissent spontanément et temporairement dans le ciel, des « étoiles invitées ». C’est pendant le règne de l’empereur Song Renzong, de la dynastie Song (960-1279), que SN 1054 est apparue. Les témoignages écrits datent de plus d’un siècle après l’évènement. 6 d’entre eux sont dignes de confiance, se recoupent parfaitement, et ont été par la suite confirmés par d’autres témoignages d’autres provenances. En 1942, Jan Oort, convaincu que l’ « étoile invitée » chinoise est la nébuleuse du Crabe décrite par Charles Messier, compile de nouveaux témoignages de l’observation.

Un peu d’histoire En Chine : Le premier et le plus important témoignage est le Wenxian Tongkao (l’encyclopédie chinoise). Le texte indique : « Ere Zhihe du règne, première année, cinquième mois lunaire, jour jichou. Une étoile invitée est apparue au sud-est de Tianguan*, peut-être à plusieurs pouces de distance. Après plus d’une année, elle s’est dispersée et a disparu. » Le royaume Khitan, au nord de la Chine et de la Mongolie, rapporte aussi SN 1054, en précisant que cette apparition ne peut représenter qu’un personnage important (le roi). Par déduction logique, la disparition de l’étoile invitée prédisait la mort du roi. Ce qui arriva effectivement… L’interprétation de ces documents amènent à placer l’arrivée de la supernova le 4 juillet 1054. Elle fut visible en journée pendant 23 jours, et deux ans de nuit. * Tianguan est l’étoile  Tauri

Un peu d’histoire Au Japon : 3 textes japonais mentionnent l’étoile. Le principal est l’œuvre d’un poète. Les autres, moins précis en sont probablement inspirés. Le poète en question s’appelle Fujiwara no Teika (1162-1241). Il décrit l’étoile invitée dans son journal intime. C’est semble-t-il après l’observation d’une comète qu’il s’intéressa à ces objets. Il rapporte entre autres SN 1054, SN 1006 et SN 1181. La date qu’il mentionne correspond à la période du 30 mai au 8 juin 1054 du calendrier julien. Les spécialistes suspectent une erreur* sur la dénomination du mois japonais, et conservent la date du 4 juillet. La position de l’étoile correspond avec celle des chinois. * Si cette période est la bonne, l’étoile est en conjonction avec le Soleil, ce qui la rend invisible… Les deux autres témoignages japonais reprennent cette erreur, confirmant la recopie du texte du poète.

Un peu d’histoire Le monde arabe : Plutôt intéressés par les phénomènes astronomiques réguliers, périodiques et prévisibles, les arabes ne se sont que très peu intéressés aux astres imprévisibles comme les comètes ou les supernovas. Le seul témoignage a été retranscrit par Ibn Abi Usaybi’a (1194-1270) d’après un document non retrouvé à ce jour de Ibn Bultan. Il place la supernova dans la constellation zodiacale de Gémeaux, ce qui est correct en tenant compte de la précession. Le texte est contradictoire quant à la date de l’apparition de l’étoile. Il en précise deux. La bonne est celle correspondant aux eaux basses du Nil, sujet évoqué dans le texte. De plus, ce texte précise que l’apparition de l’étoile invitée a déclenché une épidémie meurtrière, épidémie en cohérence avec la date de juillet 1054

Un peu d’histoire En Europe : Contrairement à la supernova de 1006, abondamment commentée en Europe, celle de 1054 n’a laissé aucune trace exploitable. Une des hypothèse (invérifiable) avancée est que des évènements tels que l’excommunication du patriarche de Constantinople, Michel 1er (le 16 juillet 1054) auraient censuré la retranscription d’observations. Plus plausible est le fait que les documents de cette époque ne sont pas écrits par des astronomes, mais par des érudits sans connaissance de l’astronomie, et auraient donc éliminé tout ce qu’ils ne comprennent pas.

Comète, nova ou supernova ? Chez les chinois, une « étoile invitée » peut être une comète, une nova ou une supernova. Comment faire la distinction ? Une comète se déplace dans le ciel, contrairement aux deux autres astres. Les chinois sont précis : l’objet est resté deux ans à la même place. Une nova est un phénomène moins lumineux qu’une supernova. Celles qui sont visibles sont donc plus proches du Soleil et peuvent apparaître dans toute région du ciel. Les supernovas sont visibles de plus loin, et ont donc plus de chance de se trouver dans les bras de la Galaxie, dans la bande de la Voie Lactée, ce qui est le cas pour SN 1054. D’autre part, les novas sont visibles moins longtemps qu’une supernova. Les deux ans de visibilité indiquent que l’on a bien là une supernova.

Identification C’est à partir de 1921 que l’idée de l’existence de supernovas commence à faire son chemin. Carl Otto Lampland observe des changements dans la taille et la structure de la nébuleuse du Crabe. A cette époque, la nature des nébuleuses est inconnue et sujette à débats. En 1928, Edwin Hubble note que les changements de taille de la nébuleuse du Crabe suggère qu’il s’agit des restes d’une explosion stellaire. La rapidité de ces changements lui indique que l’explosion a eu lieu 9 siècles auparavant. Recoupant ces données avec les observations chinoises, il déduit que l’étoile invitée de 1054 est à l’origine de la nébuleuse du Crabe. En 1939, Zwicky et Baade mettent en évidence la nature extrêmement lumineuse des supernovas. La spectroscopie permet de mesurer la vitesse d’expansion de la nébuleuse, et d’estimer sa taille et sa distance. Nicolas Mayall l’évalue à 5 000 al. L’éclat de l’astre décrit par les chinois en 1054 mène naturellement à le considérer comme une supernova, dont le rémanent est la nébuleuse du Crabe, en expansion.

Découvertes du rémanent Le découvreur du rémanent de SN 1054, la nébuleuse du Crabe, est John Bevis* (1695-1771), médecin britannique et astronome amateur. C’était en 1731, 28 ans avant sa redécouverte par Charles Messier. Le retour de la comète de Halley est prévue pour mars / avril 1759. Le calcul de cette date revient à Nicole Reine Lepaute, Alexis Clairaut et Jérôme Lalande. Charles Messier, chasseur de comètes, croit l’avoir découverte dans le Taureau. L’observation sur plusieurs jours lui indique que l’objet en question est fixe, et n’est donc pas une comète, mais une nébuleuse. Pour éviter toute confusion, il décide de répertorier tous ces objets nébuleux afin de ne pas les confondre avec des comètes. C’est son célèbre catalogue, qui comporte aujourd’hui 110 objets, et dont le premier, M 1, est justement la nébuleuse du crabe. Les Herschel (William et Caroline) notent son observation à plusieurs reprises. William conclut qu’il s’agit d’une agglomération d’étoiles… * John Bevis est le premier et le seul astronome à avoir décrit l’occultation d’une planète du système solaire par une autre, en l’occurrence celle de Mercure par Vénus le 28 mai 1737.

La nébuleuse du Crabe Le rémanent de la supernova SN 1054 s’appelle la nébuleuse du crabe, suite à l’allure d’un dessin réalisé par William Parson (Lord Rosse) en 1844. Ses autres noms sont M1, NGC 1952, et Taurus A ou Taurus X-1 en référence au pulsar qu’il abrite.

La nébuleuse du Crabe La nébuleuse du crabe de nos jours, vue par Hubble

La nébuleuse du Crabe La nébuleuse du crabe de nos jours, vue par Hubble. Structure filamenteuse.

La nébuleuse du Crabe Caractéristiques principales : Situation : Constellation du Taureau Coordonnées : AD 5h 34’ 31.97’’ Dec 22° 00’ 52.1’’ Taille angulaire : 6’ x 4’ Distance : 6 300 al Diamètre : 11 al Vitesse d’expansion : 1 500 km/s

La nébuleuse du Crabe Caractéristiques principales : Les filaments sont les restes de l’atmosphère de l’étoile, et sont composés principalement d’hydrogène et d’hélium, mais aussi de carbone, d’azote et d’oxygène, de fer, de néon, de soufre. Ces éléments apparaissent dans le spectre de la nébuleuse, et ce sont eux qui donnent ses couleurs à la nébuleuse. La température des filaments est comprise entre 11 000 et 18 000 K. Leur densité est de 1 300 atomes/cm3. Depuis sa première observation scientifique les astronomes l’ont vue évoluer en taille angulaire. La mesure de la vitesse d’expansion permet de calculer l’âge de la nébuleuse, c’est-à-dire le moment où l’étoile a explosé. Le calcul donne une date dix ans plus tôt que les observations chinoises. Cet écart serait dû à une accélération de l’expansion au cours du temps, si l’on tient compte du vent stellaire de l’étoile centrale. Au centre de la nébuleuse, trône le résidu de l’étoile, une étoile à neutrons.

L’étoile centrale Autres noms de l’étoile centrale : NP 0532, PSR B0531+21, PSR J0534+2200 Au centre de la nébuleuse, on trouve une étoile peu brillante (en fait, une deuxième est visible). Elle a été identifiée par Rudolphe Minkowski en 1942 par l’étude de son spectre. Ce dernier est très inhabituel, ne ressemblant pas aux spectres des étoiles « classiques ». En effet, elle émet dans toutes les longueurs d’onde, des ondes radio aux ondes gamma. C’est l’une des étoiles les plus étudiées. Cette étoile centrale est un pulsar. Il a été découvert en 1968 par le radiotélescope de Green Bank (USA). Ce télescope a détecté dans la nébuleuse du Crabe un astre qui émet en radio à intervalles rapprochés, mais réguliers. Un signal est reçu toutes les 33 millisecondes. Un pulsar est une étoile à neutrons, résultat de l’explosion d’une supernova. L’étoile en question, avant d’exploser, devait avoir une masse comprise entre 8 et 12 fois celle du Soleil. En dessous de 8 masses solaire, les étoiles donnent des naines blanches accompagnées de nébuleuses planétaires. Au dessus de 12 masses solaires, la composition chimique des rémanents est différente.

L’étoile centrale Au moment de l’explosion, l’étoile expulse violemment ses couches externes qui deviendront le rémanent. Le résidu est extrêmement petit, très chaud, tourne très vite et est sujet à un champ magnétique colossal. Voici les caractéristiques du pulsar : Vitesse de rotation : 30 tours / seconde Taille : entre 28 et 30 km de diamètre Masse : 2 masses solaires environ Champ magnétique : environ 108 Tesla Luminosité : 75 000 fois celle du Soleil Densité : 1 milliard de tonnes/cm3

L’étoile centrale Le processus d’émission d’un pulsar est représenté sur le schéma suivant : L’étoile tourne autour d’un axe qui n’est pas celui du champ magnétique. L’émission a lieu dans la direction du champ magnétique, dans un cône creux. Si l’observateur est dans le prolongement de l’émission, il reçoit un signal périodique.

L’étoile centrale Le résultat vu de la Terre est le suivant : Les deux pics principaux correspondent au passage des deux bords du cône dans l’axe de visée. Ce schéma se reproduit à l’identique toutes les 33 millisecondes. Ces impulsions sont notées dans toutes les longueurs d’ondes. Elles sont synchrones et en phase.

L’étoile centrale Aux abords du pulsar, de la matière tourne rapidement et forme un disque responsable des émissions des courtes longueurs d’ondes (très énergétiques). Ces mouvements sont détectables sur des courtes durées, comme le montrent ces vues de Hubble sur moins de 4 mois. Les vaguelettes se déplacent à la moitié de la vitesse de la lumière.

L’étoile centrale La pulsar du crabe émet du rayonnement sur tout le spectre électromagnétique, sur au moins 18 ordres de grandeurs. C’est l’un des rares pulsars à être détectable aussi bien en radio, en optique visible, en X et en gamma. La rotation ralentit avec le temps, du fait de son magnétisme. Il se comporte comme un aimant tournant. Les lois de l’électromagnétisme montrent qu’un tel « dipôle » émet de l’énergie sous forme de rayonnement. Cette émission d’énergie se traduit par une diminution de sa vitesse angulaire. Combinaison d’une image de Hubble en optique (en rouge) et de Chandra en X (en bleu) De plus, on note de très légères variations dans la vitesse de ralentissement, variations appelées « Glitches », sans doute dus à des réajustements de la structure interne de l’étoile.