DU de Carcinologie Clinique Dépistage des cancers DU de Carcinologie Clinique 8 octobre 2009 Sylvie GUERIN Institut Gustave Roussy guerin@igr.fr
Dépistage du cancer But : trouver des maladies à un stade précoce, avant que la personne ne présente des symptômes de cette maladie. Intérêt : Mettre en évidence un facteur de risque, une lésion, une maladie à un stade précoce afin de la traiter, d’en éviter les séquelles et de réduire la mortalité spécifique 3
Types de dépistage Dépistage de masse : examen proposé à la population générale définie seulement en terme de sexe et d’âge, sans symptôme ni facteur de risque particulier (sauf peut-être fumeur pour dépistage du cancer du poumon) Dépistage individuel : à l’initiative de l’individu dès lors qu’il y a un symptôme ou un antécédent familial
Propriétés d'un examen de dépistage Facile à réaliser Inoffensif Bien toléré Bon marché Peu de faux positifs Peu de faux négatifs
Test de dépistage Malades Non malades Test + Vrai Positif (VP) Faux Positif (FP) VPP*= VP/(VP+FP) Test – Faux négatif (FN) Vrai Négatif (VN) VPN*= VN/(FN+VN) Sensibilité = Spécificité = VP/(VP+FN) = VN/(FP+VN) = Probabilité que le test soit Probabilité que le test soit positif chez les malades négatif chez les non-malades La sensibilité et la spécificité sont des valeurs données par le fabriquant du test. Plus les valeurs sont proches de 1, meilleur est le test. Ce qui intéresse le médecin est la probabilité pour que la personne soit malade sachant que le test est positif, c’est ce qu’on appelle la valeur prédictive positive (VPP). De même la probabilité pour que le test soit négatif sachant que la personne n’est pas malade est appelée la valeur prédictive négative (VPN). * Probabilité que la personne soit malade sachant que le test est positif * Probabilité que la personne ne soit pas malade sachant que le test est négatif
Examen de dépistage évalué en Évaluation Examen de dépistage évalué en termes de sensibilité et spécificité Programme de dépistage évalué si dépistage état pré-cancéreux : - nombre de cancers évités - nombre de décès évités si dépistage cancers : - nombre d’années de vie gagnées
Evolution de la maladie Etat préclinique Etat clinique Phase de latence To understand screening, you must recognize that the target disease is a dynamic process that evolves over time. The dz process starts at some point before signs or symptoms begin. In the case of cancer, onset is often defined by molecular changes in a cell’s DNA, which occur long - sometimes decades - before the cancer produces and signs or symptoms. At some later time, the dz process may become detectable by a scr test, such as mammography or CT. At yet later points, the dz produces signs or symptoms and eventually caused death or some other adverse outcome. For simplicity sake, I will mainly focus on the adverse outcome of death. The time period between S&S and D is the CP while the time period between O and S&S is the PC. The time period between D and S&S is the DCPC and is an important concept in screening. Apparition de la maladie Détectable par le test Signes ou symptômes Décès par maladie ou autre cause
Quand faut-il dépister ? Apparition de la maladie Dépistage efficace Phase de latence Dépistage Apparition de la maladie Détectable par le test Signes ou symptômes Décès par maladie ou autre cause For screening to be effective, the target disease must have a critical point, and this critical point must occur during the DPCP.
Quand faut-il dépister ? Apparition de la maladie Dépistage inefficace Phase de latence Dépistage Apparition de la maladie Détectable par le test Signes ou symptômes Décès par maladie ou autre cause For screening to be effective, the target disease must have a critical point, and this critical point must occur during the DPCP.
Quand faut-il dépister ? Apparition de la maladie Dépistage inutile Phase de latence Apparition de la maladie Détectable par le test Signes ou symptômes Décès par maladie ou autre cause For screening to be effective, the target disease must have a critical point, and this critical point must occur during the DPCP. Dépistage
Les biais de la détection précoce Avance du diagnostic Vitesse d’évolution Surdiagnostic
Les biais de la détection précoce Avance du diagnostic Vitesse d’évolution Surdiagnostic
Biais de l’avance du diagnostic Sans dépistage Signes ou symptômes Décès par maladie ou Autre cause Apparition de la maladie Survie L’avance du diagnostic augmente la survie mesurée à partir du diagnostic, par décalage du point de départ Test positif Avec dépistage Avance du diagnostic Apparition de la maladie Returning to our time line of disease, lead time bias is easiest to understand if we consider a hypothetical disease for which there is no effective rx. Suppose an individual is first diagnosed with this deadly disease after he becomes symptomatic and dies some time later. The length of his survival is represented by the distance between when he was diagnosed because of symptoms and when he dies. However, suppose the same individual had been screened and his disease were detected earlier. Even though he dies at the same time, his survival time from diagnosis has been increased by the lead time afforded by screening but screening has not prolonged his life. Lead time bias would not be much of a problem if we could accurately estimate lead time. However, we cannot accurately estimate lead time and it varies considerably, depending on the aggressiveness of the tumor. This variability introduces another bias.
Avance du diagnostic Le dépistage détecte la maladie pendant la phase de latence, avant qu’elle ne devienne symptomatique Si la survie est mesurée à partir du diagnostic, le dépistage va toujours améliorer la survie, même si le traitement est inefficace Phase de latence ?????????? 14
Eviter le biais de l’avance du diagnostic Le biais n’est présent que si on compare la survie de malades dépistés à la survie de malades non dépistés à partir du diagnostic (dépistage pour les premiers et symptômes pour les seconds) Pour éviter ce biais, il faut mesurer la survie à partir du tirage au sort dans un essai ou à partir d’une autre date fixe
Les biais de la détection précoce Avance du diagnostic Vitesse d’évolution Surdiagnostic
Vitesse d’évolution En général la vitesse de progression d’un état à l’autre varie selon les individus Signes ou symptômes Rapide Maladie détectable par le test Lente Length bias, where “length” refers to the duration of the detectable preclinical phase. Suppose we have two types of a certain tumor, a rapidly progressing form (R) and a slowly progressing form (R), which grows half as fast. The arrows represent the duration of the DPCPs for the tumors, that is, the time from which a tumor is first detectable thru screening to the time at which it becomes symptomatic. The slowly progressing tumors have a longer arrow -twice as long - because they exist in the DPCP for a longer period of time. Let us also suppose that these two types of tumor have the same incidence so that we have an equal number of short (R) and long (R) arrows. If we perform a screening test (R) at some random moment in time (R) Temps
Vitesse d’évolution Les cas qui progressent lentement sont détectés préférentiellement par le dépistage TEST Dépistage Rapide Lente we will detect twice as many slowly progressing forms as Temps
Vitesse d’évolution En général la vitesse de progression d’un état à l’autre varie selon les individus Les cas qui progressent lentement sont détectés préférentiellement par le dépistage La proportion accrue de cas moins agressifs dans le groupe détecté par le dépistage conduit à une meilleure survie, même si le traitement est inefficace 19
Les biais de la détection précoce Avance du diagnostic Vitesse d’évolution Surdiagnostic
Surdiagnostic Définition : Diagnostic d’une maladie semblable à une vraie maladie mais asymptomatique et qui ne serait jamais apparue au cours de la vie de la personne si elle n’avait pas été dépistée : - elle n’aurait jamais causé de symptôme - la personne meurt d’une autre cause Conséquences : - Le résultat du traitement d’un cas de surdiagnostic ne peut qu’être un succès - Le traitement peut avoir des effets indésirables 21
Deux preuves de l’existence du surdiagnostic Dépistage du neuroblastome de l’enfant, étude allemande (Schilling FH et coll. N Eng J Med 2002; 346: 1047-1053) Dépistage du cancer du poumon : essai de radiologie et cytologie bronchique « Mayo lung project » The third bias related to early diagnosis and survival is …. (It should be pointed out that overdx is almost impossible to document in a living individual. When a case is treated, as it almost always is, long-term survival is attributed to the treatment and is labeled a cure. In the rare instances when it is not treated because of old age or other contraindication, the overdx case cannot be confirmed as such while the patient is still alive because, by definition, it must remain asymptomatic until the patient dies from other causes. These problems with documentation probably explain why overdx has received relatively little attention. )
Dépistage du neuroblastome 2ème tumeur solide la plus fréquente chez l’enfant La survie après neuroblastome a peu progressé depuis 20 ans Dépistage précoce pourrait diminuer la mortalité Risque : neuroblastome peut régresser spontanément
Dépistage du Neuroblastome Six régions d'Allemagne Autres régions 1,5 millions d'enfants nés 1,5 millions d'enfants nés entre 1993 et 2000 dépistés entre 1993 et 2000 Dosage catécholamines Pas de dépistage urinaires à l'âge de 1 an Neuroblastomes entre 12 et 60 mois trouvés par : Dépistage Diagnostic Diagnostic 149 + 55 Nombre total : 204 Nombre total : 143 Taux p. 100 000 : 14,2 Taux p. 100 000 : 7,3 Surdiagnostic : 7 p. 100 000, pas moins de stade 4 dans groupe dépisté/témoin, pas d'effet sur la mortalité
Cas du groupe dépisté (tous à 1 an) = la somme des Cas qui aurait été diagnostiqué à cet âge sans dépistage (normalement diagnostiqués) = nombre de cas incidents à 1 an dans le groupe control Cas dont le diagnostic est avancé = différence entre incidence après 1 an dans le groupe témoin et incidence après 1 an dans le groupe dépisté Cas qui représentent du surdiagnostic du au dépistage = le reste des cas dépistés
(n=99) (n=11) (n=39)
99 = 149 - 39 - 11
Deux preuves de l’existence du surdiagnostic Dépistage du neuroblastome de l’enfant, étude allemande (Schilling FH et coll. N Eng J Med 2002;346:1047-1053) Dépistage du cancer du poumon : radiologie et cytologie bronchique (Marcus et al. JNCI 2000;92:1308-16) The third bias related to early diagnosis and survival is …. (It should be pointed out that overdx is almost impossible to document in a living individual. When a case is treated, as it almost always is, long-term survival is attributed to the treatment and is labeled a cure. In the rare instances when it is not treated because of old age or other contraindication, the overdx case cannot be confirmed as such while the patient is still alive because, by definition, it must remain asymptomatic until the patient dies from other causes. These problems with documentation probably explain why overdx has received relatively little attention. )
Mayo Lung Project But : Evaluer un programme de dépistage intense (radiologie et cytologie) sur la mortalité par cancer du poumon Méthode : Tirage au sort de 9 211 hommes fumeurs, entre 1971 et 1976 : - Intervention : radio et cytologie crachat tous les 4 mois pendant 6 ans (75% compliance) - Surveillance habituelle : recommandation des mêmes tests annuellement 35
Premiers résultats (01/07/83*) The initial results of the MLP were very promising. They showed that more individuals were diagnosed with lung in the screened group than control group, 206 vs 160; a higher proportion of cases were resectable in the screened group, 46% vs 31%, and 5-yr survival was higher in the screened group, 31% vs 13%. Ethics initially questioned Powered to detect 50% LC mort reduction La mortalité n’est pas meilleure dans le groupe dépisté (Fontana : Respir Dis 1984, J Occup Med 1986, Cancer 1991)
Survie après cancer du poumon La survie est significativement meilleure dans le groupe dépisté (p=0,004) Survie Environ 31% à 10 ans versus 13% Années depuis le diagnostic de cancer du poumon
Extension du suivi : résultats au 31/12/96 (suivi médian de 21 ans) The initial results of the MLP were very promising. They showed that more individuals were diagnosed with lung in the screened group than control group, 206 vs 160; a higher proportion of cases were resectable in the screened group, 46% vs 31%, and 5-yr survival was higher in the screened group, 31% vs 13%. Ethics initially questioned Powered to detect 50% LC mort reduction
Résultats à long terme Légère augmentation de la mortalité par cancer du poumon dans le groupe dépisté (p=0.09 en 1996) Nombre de décès Années depuis le tirage au sort
Conclusion Le dépistage intensif (6 ans) n’a pas réduit la mortalité, même après ajustement sur 4 facteurs de risque du poumon Meilleure survie dans le groupe dépisté même si l’on prend la date de randomisation comme origine (ajustement sur l’avance du diagnostic) Biais vitesse d’évolution : plus de tumeurs opérables (stade précoce) dans le groupe dépisté Surdiagnostic : plus de cancers du poumon dans le groupe dépisté = le critère le plus important dans des essais de dépistage Black W. Overdiagnosis: an underrecognized cause of confusion and harm in cancer screening. JNCI 2000;92:1280-1 40
Mise en évidence du surdiagnostic Impossible à l’échelon individuel : aucune différence entre un cas de surdiagnostic et le traitement réussi d’une maladie asymptomatique Quelques exemples convaincants à l’échelon de la population : neuroblastome et poumon Indices de surdiagnostic : Incidence cumulée plus élevée dans le groupe dépisté Pas de différence de mortalité entre les groupes dépisté et non dépisté
Démonstration de l'utilité d'un dépistage : moyens directs Essai comparatif Etude cas-témoin
Dépistages des cancers démontrés efficaces Col de l’utérus : un frottis tous les 3 ans réduit d’au moins 90% la mortalité par cancer du col Sein : mammographie à partir de 50 ans réduit de 25 à 30% la mortalité par cancer du sein Colon-rectum : hemoccult réduit de 15% la mortalité par cancer colorectal
Dépistage du cancer du col de l’utérus Utilité de la cytologie démontrée par: - comparaisons géographiques - études cas-témoins Pas d'essai randomisé
Frottis % réduction Nb de frottis tous les taux cumulé en 30 ans Réduction du taux cumulé de cancer du col entre 35 et 64 ans selon la fréquence des frottis Frottis % réduction Nb de frottis tous les taux cumulé en 30 ans 1 an 93,3 30 2 ans 93,3 15 3 ans 91,4 10 5 ans 83,9 6 10 ans 64,2 3 D’après Day NE. In: Hakama et al. Screening for cancer of the uterine cervix. Lyon IARC 1986: 199-212.
Cancer du col utérin en France 12% des femmes déclarent n‘avoir jamais eu de frottis 40% des femmes de 18 à 75 ans déclarent n’avoir pas eu un frottis dans les 2 ans 1 600 décès chaque année Source : Baromètre Santé 2005 www.inpes.fr
Dépistage du cancer du sein Résultats
Dépistages des cancers démontrés efficaces Col de l’utérus : un frottis tous les 3 ans réduit d’au moins 90% la mortalité par cancer du col Sein : mammographie à partir de 50 ans réduit de 25 à 30% la mortalité par cancer du sein Colon-rectum : hemoccult réduit de 15% la mortalité par cancer colorectal
Essai comparatif : la HIP*-study * Health Insurance Plan Femmes de 40 à 64 ans d'une mutuelle Tirage au sort 1964-66 30 000 femmes 30 000 femmes examen clinique Surveillance + mammographie spontanée tous les ans, 4 fois Acceptent Refusent 20 000 10 000 Surveillance pendant 18 ans
Dépistage du cancer du sein Essais Effectif HIP 60 000 Suède 283 000 Édimbourg 45 000 Canada 90 000 Total 478 000
Dépistage cancer du sein : à quel âge commencer ? 50 ans et plus : réduction de 25 à 30% de la mortalité par cancer du sein, méta-analyse sur 300 000 femmes 40 à 49 ans : réduction du risque ? 180 000 femmes étudiées
Cancer du sein Environ 11 000 décès chaque année En 2005, 35% des femmes de 50 ans à 74 ans n'ont pas eu de mammographie dans les 2 ans Le nombre actuel de mammographies par an permettrait un examen tous les 2 ans pour toute la population de 50 à 75 ans
Dépistages des cancers démontrés efficaces Col de l’utérus : un frottis tous les 3 ans réduit d’au moins 90% la mortalité par cancer du col Sein : mammographie à partir de 50 ans réduit de 25 à 30% la mortalité par cancer du sein Colon-rectum : hemoccult réduit de 15% la mortalité par cancer colorectal
Dépistage du cancer colorectal Recherche de sang occulte dans les selles par Hémoccult, entraînant une coloscopie et l'exérèse des polypes et cancers colorectaux
Dépistage du cancer colorectal Essais randomisés : dans le Minnesota au Danemark en Angleterre en Suède
Essais de dépistage du cancer colorectal Essai Réduction Fréquence décès cancer dépistage colorectal Minnesota 33% annuel Funen 18% biennal Nottingham 14% biennal Suède 12% biennal Source : Towler BMJ 1998
Dépistage du cancer colorectal, pratique en France Ont déjà eu un Hemoccult : 30% des hommes de 50 à 74 ans 23% des femmes de 50 à 74 ans Dans les deux ans : 11% des hommes 9% des femmes Source : BEH 2008, d’après enquête décennale santé 2002-2003, échantillon de 6 599 personnes