Environnement, Ressources et Conflits Négociations Internationales sur le Climat Instruments, Mécanismes et Conflits Changement climatique 3
Introduction Un paradoxe central L’action d’un seul pays dans la lutte contre le changement climatique est inutile Mais la participation de certains est également absolument nécessaire Conséquence: les Etats les plus pollueurs sont aussi ceux qui ont le plus de poids dans la négociation. La traduction d’un consensus scientifique en une action collective Lente et logue construction d’un consensus scientifique La coopération internationale sur le changement climatique est avant tout une coopération scientifique.
Le besoin et les difficultés de la coopération internationale Le changement climatique comme un ‘mal’ public global La protection du climat ne peut-elle être fournie que par la coopération internationale ? La coordination des politiques nationales pourrait-elle suffire ? Difficultés de la coopération internationale Tragédie des Communs Dilemme du prisonnier Passager clandestin > Nécessité d’un régime climatique: ensemble de règles et d’instruments
Trois mécanismes de coopération internationale Catalyseurs d’action collective, mais aussi de disputes
1. Le GIEC Etablie en 1988 par l’OMM et le PNUE Ouvert à tous les membres de ces deux institutions Tâche principale: évaluer les risques liés au changement climatique. Produit principal: les rapports d’évaluation. Environ 2500 scientifiques (bénévoles), désignés par leurs gouvernements.
Structure du GIEC
Le processus scientifique Le GIEC ne mène aucune recherche directement Les rapports d’évaluation ne sont que des synthèses de travaux déjà publiés. Triple peer-review Au moment de la publication initiale Puis par le GIEC Puis par les représentants des gouvernments (SPM) Les rapports sont donc des documents à la fois scientifiques et politiques, soumis à une double approbation.
Commentaires et critiques Les rapports du GIEC, évangiles de la science du climat ? L’autorité du GIEC est lourdement remise en question ces temps-ci: ‘climate gate’, erreur sur les glaciers de l’Himalaya, etc. GIEC visé en tant qu’acteur politique Comment traiter ces critiques et y répondre ? Est-il possible, est-il permis de douter de la science du climat ? Consensus minimal A contrario, les rapports sont-ils trop prudents et conservateurs ? Vers une réforme ? Réforme du processus scientifique, notamment des scénarios Réforme de la composition du GIEC
2. La Convention-cadre des Nations unies sur le changement climatique (UNFCCC) Résulte à la fois des travaux du GIEC et du sommet de Rio, premier accord international sur le climat. Choix entre deux options possibles: Un traité global sur l’atmosphère Un traité spécifique pour le changement climatique Objectif général: la stabilisation des concentrations de GES à un niveau qui éviterait toute interférence dangereuse avec le climat. Mais qu’est-ce qu’une ‘interférence dangereuse’ ? Deux principes-clés: Responsabilité commune mais différenciée Capacités respectives.
Traité non contraignant: Pas de limite impérative pour les émissions de GES Seule obligation: inventaire des GES à réaliser chaque année Trois mécanismes importants: Protocoles impératifs Division entre pays de l’annexe I (et annexe II) et pays en développement COP doit se réunir chaque année
3. Le Protocole de Kyoto Complément impératif de l’UNFCCC Ouvert à signatures en 1997, entré en vigueur 8 ans plus tard Conditions: 55 parties, and 55% des émissions de CO2. Plus de 180 pays ont ratifié. Seuls 37 doivent réduire leurs émissions.
Architecture générale du Protocole Terme fixe: première période a expiré en 2012 Objectif général: réduire les émissions de GES des pays de l’Annexe I de 5.2% par rapport à 1990 (année de référence) Principes fondateurs: responsabilités communes mais différenciées + capacités respectives Distinction entre pays de l’Annexe I et pays non-Annexe I. Mécanismes flexibles Centré sur l’atténuation, adaptation presqu’absente du texte.
Kyoto et l’Europe Toutes les ratifications des pays européens déposées simultanément le 31 mai 2002 UE comptée comme entité individuelle. L’UE produit environ 22% des émissions de GES. S’engage à les réduire de 8% d’ici 1990. Considérée comme ‘le bon élève’ de Kyoto. L’UE a choisi d’être traitée comme une ‘bulle’, ce qui lui a permis de mettre en place un marché interne du carbone. Objectifs différenciés: France: 0% Allemagne: -21%. A réduit ses émissions de 17.2% entre1990 et2004. UK: -12.5%. Devrait également atteindre son objectif.
Différents engagements
Mécanismes flexibles Aspect innovant du Protocole de Kyoto Les mécanismes reposent sur le marché, plus que sur les Etats. Souvent critiqués pour leur ‘libéralisme environnemental’ Trois mécanismes: Marché du carbone (‘cap and trade’) Mécanismes de Développement Propre (MDP) Mise en Œuvre Conjointe (MOC)
Le marché du carbone: Le système européen d’échange des permis d’émissions. Principe général: maximisation de l’efficacité économique – aux dépens de l’éthique ? Les industries reçoivent des quotas d’émissions de la part des gouvernements. Application du principe du ‘pollueur-payeur’ Le système a démarré en 2005, les 27 pays y participent. Problèmes: Prix du carbone très volatil Ne couvre qu’environ la moitié des émissions européennes de CO2 Trop de quotas sur le marché Seconde phase en à partir de 2013, dont les modalités doivent encore être déterminées.
Mécanisme de Développement Propre Cherche à combiner développement et climat, équité et efficience. Efficacité économique: les coûts d’abattement sont moins chers dans les pays en développement. Fonctionnement: Alternative aux réductions domestiques Permet aux pays de l’Annexe I d’investir dans des projets de réduction d’émissions dans les pays en développement, contre des crédits d’émissions. Emission de nouveaux crédits d’émissions : les Réductions d’Emissions Certifiées (REC)
Distribution géographique des projets MDP
Critiques Sur la réalité des émissions évitées Principe d’additionalité Incitation naturelle à déguiser la réalité Surtaxe et surestimation Crédits illimités Un pays pourrait complètement externaliser ses efforts Transfert d’émissions ? Objectifs de développement ? Presque pas de projets MDP en Afrique
Mise en œuvre conjointe Mécanisme similaire au MDP, mais entre pays de l’Annexe I En d’autres termes, avec la Russie et l’Ukraine Emissions d’Unités de Réduction d’Emissions (ERU) Ce ne sont pas des nouveaux crédits d’émissions, le budget carbone n’augmente pas. Processus long et fastidieux Donc souvent réservé aux grosses industries
Quelques mots sur Kyoto Kyoto reste essentiellement un accord entre pays industrialisés, où les pays en développement sont relégués au balcon: Pas de limites sur leurs émissions Ne bénéficient pas vraiment des mécanismes flexibles Traité centré sur l’atténuation, pas sur l’adaptation.
Une brève histoire des négociations Comment s’organisent les négociations ? COP tenue chaque année Mais négociations entre les COPs, et en dehors des COPs Pays divisés en plusieurs groupes, pas toujours cohérents UE Groupe de l’Ombrelle G77 Afrique AOSIS Négociation segmentée en différents problèmes Règle du consensus: on ne vote pas
Période 1 – La construction de Kyoto UNFCCC Ouverte à signature en 1992, entrée en vigueur en1994. COP1 - Berlin 1995 Mandat de négociation de Berlin, qui mène à Kyoto COP2 - Genève 1996 Accord sur mécanismes flexibles et objectifs de moyen terme COP3 - Kyoto 1997 Protocole de Kyoto: les pays s’accordent sur des limites de leurs émissions pour la période 2008-2012.
Période 2 – Flirt avec l’échec COP4 - Buenos Aires 1998 Echec. COP5 - Bonn 1999 Aucun progrès significatif. COP6 – La Haye2000 Controverses sur les puits de carbone, sanctions, and et financement de l’adaptation. L’UE rejette le compromis, les négociations sont suspendues.
Période 3 - Le sauvetage de Kyoto COP 6bis - Bonn 2001 Le Protocole de Kyoto est rejeté par les Etats-Unis. Ceux-ci participent comme observateurs. A la surprise générale, les négociations sont un succès, avec accords sur: Mécanismes flexibles: MDC et MOC(sans limite de crédits) Crédits pour puits de carbone Sanctions (obligation de ‘rattrapage’ à un taux de 1.3, suspension des droits de vente des permis d’émission) Financement (Fonds pour PMA + Fonds d’adaptation financé par taxe sur CDM)
COP 7 - Marrakech 2001 COP 8 - New Delhi 2002 COP 9 - Milan 2003 Accords de Marrakech sur: Date pour la mise en oeuvre de Kyoto : Jo’bourg 2002 Règles du marché du carbone Procédures de comptage et de recension Etats-Unis toujours observateurs COP 8 - New Delhi 2002 COP 9 - Milan 2003 COP 10 - Buenos Aires 2004 Réunion technique, période d’attente avant mise en oeuvre.
COP 11 / MOP 1 - Montréal 2005 COP 12 / MOP 2 - Nairobi 2006 Reprise des négociations politiques Mise en oeuvre du Protocole de Kyoto Début du ‘Convention Dialogue’ Plan d’action de Montréal COP 12 / MOP 2 - Nairobi 2006 Focus sur l’adaptation et le développement Premier accord sur fonds d’adaptation Pas d’accord sur une deuxième période d’engagement Rapport Stern
COP 13 / MOP 3 - Bali 2007 Questions principales: seconde période d’engagement + forêts Succès inattendu Accord de dernière minute sur une feuille de route Pas d’engagements chiffrés Mandat de négociation pour un nouvel accord sur le climat
COP 14/ MOP 4 – Poznan 2008 COP de transition Discussions portent principalement sur le Fonds d’Adaptation Calendrier de réunions jusqu’à Copenhague
COP 15 / MOP 5 – Copenhague 2009 Beaucoup d’attentes pour un résultat très décevant. Accord insuffisant en regard: Du contenu N’arrive pas à l’objectif de 2°C Du format Pas contraignant juridiquement Du processus Violations des règles UN
Quelle différence avec Kyoto ? Kyoto représente une forme de coopération internationale centrée sur le marché, Copenhague est centré sur les politiques nationales Les engagements actuels se traduisent par une hausse de température de 3.5°C. Accord entre 5 pays, violation du multilatéralisme Affirmation des pays émergents Diktat de la Chine Incompétence du gouvernement danois
COP 16/MOP 6 – Cancùn 2010 L’accord de Cancùn reprend les principaux points de l’accord de Copenhague. Objectif de 2°C Fonds Vert pour les pays en développement: 100 Mias $ / an à partir de 2020 Quelques progrès sur REDD+, MRV, transferts de technologie Quelle différence avec Copenhague ? Un accord négocié et pas imposé par certains Une confiance retrouvée Un processus multilatéral conforté
En attendant Paris COP 17 / MOP 7 – Durban 2011 Prolongation du Protocole de Kyoto, mais sans de nombreux pays industrialisés Accord sur le principe d’un traité global, avec des émissions limitées pour tous, mais dont les négociations ne commenceront véritablement qu’en 2015… pour une mise en œuvre en 2020. Accord sur la gouvernance du Fonds Vert… mais pas sur le financement. COP 18 / MOP 8 – Doha 2012 Une conférence pour rien ? Progrès sur le volet ‘Loss and Damage’, passés relativement inaperçus. COP 19 / MOP 9 – Warsaw 2013 Minée par les tensions: Sommet sur le charbon Ministre de l’Environnement renvoyé Retrait des ONGs
Quel régime climatique futur ? Le futur des négociations est extrêmement confus et incertain. Quel rôle pour la COP et UNFCCC? Accords régionaux et/ou sectoriels ? Un jeu dont les maîtres sont les pays émergents, mais qui dépend également du processus législatif américain. Et surtout, un processus qui prend beaucoup trop de retard…