Service d'Anesthésie-Réanimation Hôpital Saint-Antoine Seuils transfusionnels et mortalité péri-anesthésique André LIENHART Service d'Anesthésie-Réanimation Hôpital Saint-Antoine & Université Paris VI Groupe de travail Afssaps « RPC/ transfusion de GR » Groupe « Enquête mortalité Sfar-Inserm »
Seuils transfusionnels et mortalité péri-anesthésique André LIENHART Service d'Anesthésie-Réanimation Hôpital Saint-Antoine & Université Paris VI Groupe de travail Afssaps « RPC/ transfusion de GR » Groupe « Enquête mortalité Sfar-Inserm »
Les seuils : une notion critiquée situations différentes selon l’hémorragie, le patient importance des signes d’intolérance, de la volémie mais reste incontournable
Les limites de l’hémodilution données de la littérature Hb Ht (g/dl) (%) Donnée Référence Valeur la plus basse publiée avec survie sans transfusion (sous coma et hypothermie induits) 1,4 3,7 Brimacombe, 1991 Seuil critique du transport de l'O2 chez un patient (décédé à 1,6 g/dl) 4 van Woerkens, 1991 Seuil peranesthésique d'apparition d'anomalies du segment ST chez des sujets ASA I ou II 5 Singbartl, 1992 Seuil périopératoire de surmortalité chez les témoins de Jéhovah non cardiaques dans la littérature 1970-1993 5 Viele, 1994 Seuil à partir duquel la mortalité diminue par transfusion (Nigeria) (≈ 6) 20 Harrison, 1985, 1988 Taux préopératoire à partir duquel apparaît une surmortalité chez les témoins de Jéhovah si le saignement dépasse 500 ml 8 Carson, 1988
Études « pivot » de la littérature - Carson et coll, 1998 : rétrospectif, 8 787 fractures du col . [Hb] : 8 – 10 g/dl : 55,6 % ont été transfusés < 8 g/dl : 90,5 % . La transfusion entre 8 et 10 g ne modifie pas la mortalité - Carson et coll, 1998 : prospectif, 84 fractures du col ; [Hb] < 10 g . Gr. 1 : Transfusion si symptômes ou [Hb] < 8 g/dl . Gr. 2 : Transfusion si [Hb] < 10 g/dl . Pas de différence de morbidité ou mortalité - Hébert et coll, 1999 : prospectif, 838 malades de réanimation, 2001 : individualisation des cardiaques . Gr. 1 : Transfusion si [Hb] < 7 g/dl, puis 7-9 g . Gr. 2 : Transfusion si [Hb] < 10 g/dl, puis 10-12 g . Pas de différence de morbidité, y compris chez le cardiaque Pas de conclusion chez le coronarien instable - Wu et coll, 2001 : rétrospectif, 78 974 infarctus 65 ans . Mortalité si Hte < 30 %
TRANSFUSION DE GLOBULES ROUGES HOMOLOGUES : PRODUITS, INDICATIONS, ALTERNATIVES RECOMMANDATIONS 2002 La notion de seuil transfusionnel est critiquée, car la transfusion est une décision complexe, dans laquelle intervient notamment, outre le taux d’hémoglobine, la réserve cardiaque, l’estimation de la vitesse du saignement, la tolérance clinique. Toutefois, la notion selon laquelle il n’existe pratiquement pas de situation nécessitant un taux supérieur à 10 g/dl n’est pas remise en cause. Un seuil de l’ordre de 7 g/dl est généralement admis au cours de l’anesthésie des sujets sans antécédents cardio-vasculaires. Pour les patients ayant de tels antécédents, il n’existe pas de bénéfice démontré pour des taux supérieurs à 8 g/dl. Il apparaît raisonnable de conserver le seuil de 10 g/dl dans les cas de pathologie cardiaque avérée et menaçante.
TRANSFUSION DE GLOBULES ROUGES HOMOLOGUES : PRODUITS, INDICATIONS, ALTERNATIVES RECOMMANDATIONS 2002 En résumé, avec toutes les réserves que la notion de seuil impose, les seuils suivants sont retenus (Accord professionnel) : - 7 g/dl chez les personnes sans antécédents particuliers - 8-9 g/dl chez les personnes ayant des antécédents cardio-vasculaires - 10 g/dl chez les personnes ne tolérant pas cliniquement les taux inférieurs ou atteintes d’insuffisance coronaire aiguë ou d’insuffisance cardiaque avérée. La transfusion est adaptée au débit du saignement observé, de façon à maintenir [Hb] > seuil
TRANSFUSION DE GLOBULES ROUGES HOMOLOGUES : PRODUITS, INDICATIONS, ALTERNATIVES RECOMMANDATIONS 2002 « Il est recommandé de surveiller régulièrement l’hématocrite ou, mieux, l’hémoglobine au cours d’une chirurgie hémorragique. »
TRANSFUSION DE GLOBULES ROUGES HOMOLOGUES : PRODUITS, INDICATIONS, ALTERNATIVES RECOMMANDATIONS 2002 Les urgences définies http://www.sfar.org/urgtransfobst.html - Urgence vitale immédiate pas de groupe s’il n’y en a pas pas de tube si l’on ne peut pas O nég. (ou pos.) sans hémolysine : sans délai - Urgence vitale pas de RAI s’il n’y en a pas des tubes pour vérification de groupe < 30 min - Urgence groupe et RAI conformes passe avant les examens de routine La solution n’est pas au dévoiement des procédures
Les seuils transfusionnels Anticiper Anticiper Débit du saignement per- et post-opératoire Délai pour obtenir le résultat d’hémoglobine Délai pour obtenir les CGR les plus compatibles
Seuils transfusionnels et mortalité péri-anesthésique André LIENHART Service d'Anesthésie-Réanimation Hôpital Saint-Antoine & Université Paris VI Groupe de travail Afssaps « RPC/ transfusion de GR » Groupe « Enquête mortalité Sfar-Inserm »
Arbre des mécanismes Imputabilité totale ou partielle de l’événement dont l’absence de récupération aboutit au décès Décès gestion des voies aériennes gestion de l’hypotension respiratoire neurologique cardiaque hypovolémie vraie hémorragie vasculaire choc cardiogénique anémie infarctus cardiaque vasculaire voies aériennes choc cardiogénique centrale obstructif rythme hypovolémie vraie hypovolémie relative poumons médicament. accès impossible obstructif ciment métabolique infarctus sepsis allergie sympath. gestion des pertes sanguines ≈ 100 / an embolie pulmonaire VAS bronche infection inhalation rythme hypoxie AG ALR trachée anémie hémorragie Imputabilité totale ou partielle Lienhart et al 2003
Arbre des mécanismes Imputabilité totale ou partielle de l’événement dont l’absence de récupération aboutit au décès Décès Quelle mesure de [Hb] per-op. ? Quelle logistique de PSL ? respiratoire neurologique cardiaque hypovolémie vraie hémorragie vasculaire voies aériennes choc cardiogénique centrale obstructif rythme hypovolémie relative poumons médicament. accès impossible obstructif ciment métabolique infarctus sepsis allergie sympath. embolie pulmonaire VAS bronche infection inhalation rythme hypoxie AG ALR trachée anémie Imputabilité totale ou partielle Lienhart et al 2003
Arbre des mécanismes Imputabilité totale ou partielle de l’événement dont l’absence de récupération aboutit au décès Décès Quelle organisation des examens post-op. en orthopédie chez un coronarien ? respiratoire neurologique choc cardiogénique anémie infarctus cardiaque vasculaire voies aériennes centrale obstructif rythme hypovolémie vraie hypovolémie relative poumons médicament. accès impossible obstructif ciment métabolique sepsis allergie sympath. embolie pulmonaire VAS bronche infection inhalation rythme hypoxie trachée hémorragie AG ALR Imputabilité totale ou partielle Lienhart et al 2003
Les seuils transfusionnels La vraie vie Des feuilles d’anesthésie sans résultat d’Hemocue® Des techniques complexes (cell saver®) sans Hemocue NFS demandée mais : prélevée à 08h, acheminée au labo à 10h résultat revenu à 13h, analysé à 16h prescription à 16h, acheminée à 17h produits disponibles à 20h : > transfusion après le départ des médecins ? sous-décalage de ST entre temps ?
Les décès par hémorragie dans l’enquête Sfar-Inserm : Un exemple Patiente de 90 ans, ASA 3 (insuffisance coronarienne) Reprise de PTH programmée Péridurale plus AG avec intubation Hypotension traitée par éphédrine Saignement important per-opératoire Cell saver 750 mL retransfusés en per-opératoire Ringer Lactate + 1000 mL de macromolécules Hypotension persistante Pas de biologie per-opératoire Durée intervention: 7h30 Hypothermie à 32,3 °C en fin d’intervention Arrêt cardiaque Décès à J1 post-opératoire
Les décès par hémorragie dans l’enquête Sfar-Inserm : Un autre exemple - PTH chez un coronarien de 75 ans - Sortie de SSPI à 9,8 g/dl d’hémoglobine - NFS demandée pour J1 - Prélèvement dans la matinée, retours en fin de matinée malade vu après la fin des blocs - Sous-décalage de ST (Hb à 6,2 g/dl)
- [Hb] peu modifiée au moment de l’appel Hors enquête Sfar-Inserm mais dans des expertises - [Hb] peu modifiée au moment de l’appel (en hospitalisation ou SSPI) Temps nécessaire à [Hb] - Autres diagnostics évoqués (par exemple : embolie pulmonaire héparine) - Pas de remise en cause du diagnostic avant la catastrophe Refaire l’examen, si situation peu claire
Proposition de réponse : Les décès par hémorragie dans l’enquête Sfar-Inserm : Comment expliquer ce grand nombre relatif, non relevé dans l’enquête de 1980, alors que la sécurité a tant augmenté ? Proposition de réponse : - la sécurité Les « normes » améliorent - la lisibilité des écarts
« L’effet réverbère » « Norme » Écarts Écart
L’Évaluation des Pratiques Professionnelles c L’Évaluation des Pratiques Professionnelles – Retrouver dans le dossier la trace des éléments permettant l’analyse rétrospective : - concordance d’identité sur les documents, - [Hb] sur la feuille d’anesthésie ou de réanimation, ou avant la décision transfusionnelle, - motif des décisions en cas de transfusion, - traçabilité des produits. – Mesurer l’écart à la norme en terme de cible transfusionnelle (en plus : transfusion inutile, ou en moins : transfusion non faite au moment où [Hb] < seuil recommandé). – Analyser la qualité de la stratégie transfusionnelle. – Vérifier que l’information pré- et post-transfusionnelle est réalisée. – Évaluer la validité des demandes faites en urgence.
Les seuils transfusionnels Concrètement Feuilles d’anesthésie : résultats de l’Hemocue® Analyse au sein de l’établissement - de l’organisation des examens - de l’approvisionnement en PSL, en lien avec le site distributeur
Les seuils transfusionnels Une question réglée Celle qui ne l’est pas porte sur l’infrastructure permettant de les respecter, impliquant tous les maillons de la chaîne d’alarme et d’approvisionnement
L’importance de la logistique [Hb] (g/dl) Délai d’approvisionnement Prescription Réalisation Seuil transfusionnel Temps (min)
L’importance de la logistique [Hb] (g/dl) Délai d’approvisionnement Prescription Seuil transfusionnel Temps (min)
Illustration des « seuils » étage [Hb] (g/dl) 15 14 13 12 Transfusion avant 1990 11 Pathologie cardiaque avéré 10 9 Antécédents cardiaques 8 Transfusion conseillée 7 6 « Jusqu’ici, tout va bien… » (Mathieu Kassovitz) 5 Limite habituelle de tolérance 4 Perte de conscience 3 Derniers survivants 2 1 Logistique