Gouvernance et rapports de pouvoir à l’hôpital 1. Les instances 2. L’hôpital au filtre de la sociologie des organisations 3. Une lutte de pouvoir 4. Les pôles
1. Les instances Le conseil d’administration La direction La commission médicale d’établissement Le conseil exécutif Conseils de service et conseils de pôle Les instances représentatives du personnel
Le conseil d’administration Arrête la politique générale de l'établissement, sa politique d'évaluation et de contrôle Délibère sur : le projet d'établissement et le contrat pluriannuel ; la qualité et la politique de sécurité des soins, les conditions d'accueil et de prise en charge des usagers ; les questions financières ; l'organisation interne de l'établissement, ses structures ; la politique sociale ; les questions immobilières ; les politiques de coopération et de réseau de l'établissement « Nouvelle gouvernance » ( « Hôpital 2007 »), le conseil d’administration se recentre sur les orientations stratégiques des hôpitaux, l’évaluation et le contrôle de leur mise en œuvre
La direction Pouvoir décisionnel fort Décisions relatives à la stratégie de l’hôpital, aux recrutements non médicaux, aux décisions d’achat, aux arbitrages financiers, de travaux, d’équipement Composée des directeurs fonctionnels (finances, ressources humaines, achat, qualité), des ingénieurs (travaux, biomédicaux, informatique), du directeur des soins infirmiers et de la personne chargé de la communication.
La commission médicale d’établissement Mission consultative à l’égard des questions d’ordre général ayant trait à l’organisation et au fonctionnement de l’établissement Autorité décisionnelle sur les questions à caractère individuel qui concernent les catégories de personnel qu’elle représente. En coordination avec le chef d’établissement (dans les hôpitaux locaux) ou le conseil exécutif (dans les autres établissements publics de santé), elle prépare les décisions dans ces matières
Le conseil exécutif Doit rapprocher le monde médical et le monde administratif Présidé par le directeur Associe à parité : - le directeur et les membres de l’équipe de direction - le président de la CME et des praticiens désignés par celle-ci, dont au moins la moitié doivent exercer des fonctions de responsable de pôle Nombre de membres limité à 12 dans les CH autres que les CHU, et 16 dans les CHU
Le conseil exécutif (2) Prépare le projet médical ainsi que les plans de formation et d'évaluation Elaboration, mise en œuvre et suivi du projet d’établissement du contrat d’objectifs et de moyens Contribue à l'élaboration et à la mise en œuvre éventuelle du plan de sauvegarde ou de redressement Donne un avis sur la nomination des responsables de pôle d'activité clinique et médico-technique et des chefs de services Désigne les professionnels de santé avec lesquels la commission des soins infirmiers peut conduire des travaux conjoints dans les matières relevant de ses compétences
Le conseil de service Institué dans chaque service ou département Permet l'expression des personnels Favorise les échanges d'information Participe à l'élaboration du projet de service ou de département et du rapport d'activité Faire des propositions sur le fonctionnement du service
Le conseil de pôle Equivalent du conseil de service au niveau du pôle Participe à l’élaboration du projet de contrat interne, du projet de pôle et du rapport d’activité du pôle, dans le respect de la déontologie médicale Permet l’expression des personnels, favorise les échanges d’information Fait toutes propositions sur les conditions de fonctionnement du pôle et de ses structures internes – notamment sur la permanence des soins et la mise au point des tableaux de service
Les instances paritaires Commission administrative paritaire : donne des avis « décisionnels » (avis toujours suivis d’effet) sur la carrière des agents titulaires Comité technique paritaire : équivalent dans le secteur public du comité d’entreprise, est consulté et émet aussi des avis quant à l’orientation de l’activité de l’hôpital et sa gestion financière Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail: également consulté s’agissant des questions relatives à son champ de compétence
2. L’hôpital au filtre de la sociologie des organisations L’empreinte religieuse de l’hôpital Une structure de travail très ancienne (la plus ancienne ?) Hôtel-Dieu de Lyon (549), de Paris (651) Médecins laïcs et externes ; paramédicaux religieux et internes Une institution charitable, humanitaire, aux mains de l’Eglise : confession à l’entrée Le temporel et l’intemporel L’appropriation du temps d’autrui comme marque de pouvoir
Les cinq parties constitutives de l’organisation selon Mintzberg le centre opérationnel (agents chargés de l’activité constitutive de l’organisation) le sommet stratégique managers, membres et président du conseil d’administration, comité directeur, et leurs assistants) la ligne hiérarchique opérationnelle (directeurs d’usines, responsables régionaux des ventes, chefs d’ateliers, responsables des ventes…) la technostructure (planification stratégique, comptabilité, contrôle, formation, recherche opérationnelle, ordonnancement de la production, méthodes…) les fonctionnels de support logistique (conseil juridique, relations publiques, relations sociales, recherche et développement, tarification, paie, réception, vaguemestre, restaurant d’entreprise…)
Le schéma type d’une organisation selon Mintzberg
Cinq types d’organisation suivant le poids relatifs des composantes Entrepreneuriale simple Mécaniste Divisionnalisée Bureaucratie professionnelle Innovatrice ou adhocratie
Les parties clés des types d’organisation Type d’organisation Partie clé Entrepreneuriale simple Sommet stratégique Mécaniste Technostructure Divisionnalisée Ligne hiérarchique Bureaucratie professionnelle Centre opérationnel Innovatrice ou adhocratie Fonctions de supports logistique
Les quatre premiers types d’organisation Organisation entrepreneuriale ou structure simple Organisation mécaniste Organisation innovatrice ou adhocratie Organisation divisionnalisée
La bureaucratie professionnelle L’organisation type
Les caractéristiques des bureaucraties professionnelles Partie clé de l’organisation : centre opérationnel Séparation tranchée entre professionnels et non professionnels Spécialisation horizontale importante Regroupement en unités par fonction et par marché Planification et contrôle faibles Seuls mécanismes de liaison observables dans la partie administrative Ligne hiérarchique contrôlée par les professionnels Centre opérationnel caractérisé par un travail qualifié, standardisé, empreint d’une grande autonomie individuelle
Les tensions entre composantes Opposition entre identité professionnelle et identité institutionnelle Le professionnel s’identifie plus avec sa profession qu’avec l’organisation où il la pratique Propension des professionnels à obtenir, en plus du contrôle sur leur propre travail, le contrôle collectif sur les questions administratives qui les concernent Les administratifs ne conservent leur pouvoir qu’à deux conditions : que leur action serve efficacement les intérêts des professionnels ; que les questions stratégiques soient sous le contrôle de ces derniers
L’hôpital, une bureaucratie professionnelle Division entre professionnels (soignants) et non professionnels (non soignants) Centre opérationnel constitué par les médecins (surtout) et les filières médico-technique et soins/rééducation Au sommet stratégique : le Conseil d’administration, la commission médicale d’établissement (CME) et le conseil exécutif Techno-structure : département d’information médicale ; cellule de contrôle de gestion ; certains membres de la direction des finances Fonctions de support logistique tenues par la filière technique et la filière administrative Deux lignes hiérarchiques
Organigramme simplifié d’un établissement public de santé filière méd. technique filière soin, rééducation filière administrative Personnel d’assistance et d’exécution Agents Diplômés (laborantins, préparateurs en pharmacie, manipulateurs en radiologie…) (sages-femmes, infirmières DE, infirmières spécialisées…) Cadre Adjoint des cadres supérieur Coordinateur général Attaché d’administration Directeur adjoint Ingénieur chef d’établissement Interne Chef de clinique assistant Praticien hospitalier adjoint au chef de service méd.-technique clinique/ filière technique Commission médicale d’établissement
L’architecture institutionnelle d’un EPS
Organigramme simplifié d’un établissement de santé privé filière médico-technique filière soin/rééducation filière administrative Personnel d’assistance et d’exécution Agents Diplômés (laboratins, préparateurs en pharmacie, manipulateurs en radiologie…) (sage-femme, infirmière…). Cadre supérieur/cadre chef d’établissement chef de service médico-technique clinique/ Attachés, vacataires, temporaire, libéraux, associés… Encadrement administratif
L’analyse stratégique des organisations : quatre principes L’individu refuse de n’être qu’un instrument au service de l’organisation : il se comporte comme un stratège en se ménageant une zone d’autonomie autour de lui, la zone d’incertitude La rationalité de l’individu dans l’organisation est toujours contingente et limitée (l’individu arrête son choix à la première solution satisfaisante qui se dégage) Le pouvoir est une relation d’échange qui fait l’objet de négociations La somme des relations entre les acteurs constitue un système d’actions concret que l’analyse stratégique a pour vocation de révéler
L’analyse stratégique des organisations : trois concepts Le système d’action concret la zone d’incertitude le pouvoir
Le système d’action concret L’organisation inscrit son existence et son activité dans un environnement en perpétuelle mutation Face à cette évolution incessante, elle doit procéder à des ajustements selon un rythme que ne peut suivre son organisation formelle, stable et/ou inerte L’adaptation aux évolutions de l’environnement de l’organisation se fait donc par le biais des relations entre les membres de l’organisation Ces ajustements ne sont pas naturels, ils sont construits. Un système d’action concret est donc à définir : « (…) comme un ensemble humain structuré qui coordonne les actions de ses participants par des mécanismes de jeux relativement stables et qui maintient sa structure, c’est-à-dire la stabilité de ses jeux et les rapports entre ceux-ci, par des mécanismes de régulation qui constituent d’autres jeux » (Crozier, Friedberg)
Le pouvoir « Le pouvoir de A sur B se résume en la capacité de A d’obtenir que B fasse quelque chose qu’il n’aurait pas fait sans l’initiative de A. » Le pouvoir du « demandeur » vers le « demandé » Du « demandé » vers le « demandeur » Pouvoir et capacité de rétorsion Pouvoir et responsabilité
Capacité d’action et possibilité d’agir Responsabilité finale Irresponsabilité finale Capacité de nuisance Pouvoir limité sur autrui Pouvoir maximal sur autrui Incapacité de nuisance Sous le pouvoir d’autrui Hors d’une relation de pouvoir
Les sources de pouvoir Quatre sources de pouvoir correspondant aux différents types de sources d’incertitudes particulièrement pertinentes pour une organisation Issu de la compétence Issu des relations organisation/environnement Lié à la transmission des informations pertinentes Lié à l’utilisation et à la transformation des règles organisationnelles
Trois moyens d’exercice du pouvoir La coercition La rémunération L’allocation et la manipulation de rétributions symboliques
Les zones d’incertitude « Le pouvoir réside donc dans la marge de liberté dont dispose chacun des partenaires engagés dans une relation de pouvoir » Aucun individu n’accepte d’être considéré comme un simple ustensile Chacun poursuit des objectifs propres qui ne sont pas nécessairement conformes à ceux de l’organisation L’objectif des individus engagés dans une lutte de pouvoir est d’accroître leur marge d’autonomie en restreignant celle des autres Importance est liée à celle que revêt cette zone d’incertitude pour l’organisation
L’hôpital, toujours une bureaucratie professionnelle ? Une « double dualité » Deux légitimités, avec composante interne et externe, qui ne se plaquent pas sur les deux filières hiérarchiques Trois composantes professionnelles : médicale, soignante et administrative
3. Une lutte de pouvoir L’hôpital confronté à la rareté depuis le début des années 1980 L’organisation support transformée en organisation dirigeante Les administrateurs professionnalisés aux yeux des professionnels La réaction de l’organisation soignante La lutte de pouvoir entre organisation soignante et organisation dirigeante La « Dysorganisation » L’impuissance relative du management La dispersion du contrôle des dépenses
4. Les pôles Un apport certain : une tentative de dépassement de l’esprit de clocher hospitalier « Patrimonialisme » et « féodalité » hospitalière « Biologie A et biologie B » Association des soignants à la gestion des unités de soins et de l’établissement
Les précédents Services Fédérations de médecine Centres de responsabilité Amendement « liberté » (organisation des soins et fonctionnement médical de l’hôpital dans le respect du projet d'établissement) Les départements (1984 à 1987) en remplacement des services
Les mirages de la nouvelle gouvernance Des facteurs de crise toujours présents Un changement d’échelle des difficultés ? Une déconcentration des insuffisances organisationnelles ? Une exportation des difficultés financières ? La coexistence des services et des pôles Un niveau supplémentaire de décision Un « patrimonialisme » de pôles ?
Bibliographie CROZIER M. (1986), « L’analyse stratégique appliquée en milieu hospitalier : pertinence et méthodologie », Gestions hospitalières, n° 261, décembre, p. 787-791. CROZIER M., FRIEDBERG E. (1977), L’acteur et le système, Editions du Seuil, Paris. CROZIER M., FRIEDBERG E. (1987), [Le pouvoir comme fondement de l’action organisée], in CHANLAT J. F., SEGUIN F. (Ed.), L’analyse des organisations. Une anthologie sociologique, tome II, Les composantes de l’organisation, Gaëtan Morin Editeur, Boucherville, p. 377-396. FRIEDBERG E. (1988), « L’analyse sociologique des organisations », Pour, n° 28. HOLCMAN R., (à paraître), « La dysorganisation, un fonctionnement sous-optimal recherché par ses acteurs et qui les satisfait », Revue française de gestion. HOLCMAN R., (2007), La fin de l’hôpital public ?, Rueil-Malmaison, Lamarre. HOLCMAN R., (2006), « L’avènement de la gestion par pôle, dernier avatar de la lutte de pouvoir à l’hôpital ? », Gestions hospitalières, n° 456, p. 329-337.
Bibliographie (2) HOLCMAN R., (2006), L’ordre sociologique, élément structurant de l'organisation du travail. L’exemple des bureaucraties professionnelles : ordre soignant contre ordre dirigeant à l’hôpital, Th. Doct. Sciences de gestion, Paris, Conservatoire national des Arts et Métiers. MINTZBERG H. (1982), Structure et dynamique des organisations, Editions d’organisation, Paris. MINTZBERG H. (2003), Le pouvoir dans les organisations, Editions d’organisation, Paris. MINTZBERG H. (2004), Le management. Voyage au centre des organisations, Editions d’organisation, Paris. SMITH H. L., (1970), [Un double système d’autorité, le dilemme de l’hôpital], in HERZLICH C. (textes présentés et commentés par), Médecine, maladie et société, Ecole pratique des Hautes études-Mouton, Paris, p. 259-262. VINCENT G. (1988), « La répartition des pouvoirs à l’hôpital. Synthèse de la législation hospitalière », Journal d’Economie médicale, n° 3, p. 169-176.
Liens Lien Adresse internet APM International (agence de presse) http://www.apmnews.com/main.php Dossier L’Express « Les dix plaies de l’hôpital » http://www.lexpress.fr/info/sciences/dossier/sante/dossier.asp?ida=442756 Fédération hospitalière de France http://www.fhf.fr/ Focus (agence de presse) http://www.agence-focus.fr/ Hospimedia (agence de presse) http://www.hospimedia.fr/page.php Ministère de la santé www.sante.gouv.fr Robert Holcman (site personnel) www.robertholcman.net