Tabac, Alcool, Cannabis et Fertilité DES Gynécologie Médicale P.BARRIERE, C.SPLINGART, T.FREOUR CHU NANTES
Les substances licites, alcool et tabac, demeurent les produits les plus consommés dans la population, que ce soit en termes d’expérimentation ou d’usage quotidien Parmi les drogues illicites, le cannabis reste de très loin la substance la plus consommée (usage régulier : plus d’un million de personnes)
Les niveaux d'usage des drogues en France en 2010 - Exploitation des données du Baromètre santé Tendances n° 76, OFDT, 6 p. Juin 2011François Beck, Romain Guignard, Jean-Baptiste Richard (INPES) Marie-Line Tovar, Stanislas Spilka (OFDT)
tabac
TABAGISME - Evolution Augmentation récente du tabagisme en France, alors qu’il était en baisse depuis plus de 20 ans Augmentation de la prévalence du tabagisme quotidien se révèle assez forte parmi les femmes (de 23,0% à 26,0% ; p<0,001) En 2010, un quart des femmes et un tiers des hommes de 15 à 75 ans déclarent fumer habituellement. Environ 5 % déclarent fumer occasionnellement.
TABAGISME - Evolution
TABAGISME ET FECONDITE NATURELLE Méta analyse : 10928 fumeuses comparées à 19179 non fumeuses OR infertilité = 1.6 à 2.2 OR grossesse = 0.66 Étude de population : 15000 grossesses Fréquence DNC>12 mois augmentée de 54% chez les fumeuses Effet proportionnel à la dose Effet du tabagisme passif aussi néfaste que le tabagisme actif Méta-analyse d’Augood incluant 12 études entre 1985 et 1997 selon des critères stricts d’inclusion, population de 30000 femmes ( 10928 F / 19179 NF). 8 études de cohorte: OR = 1,42 (IC: 1.27 – 1.58) / 16 études cas-contrôle: OR = 2.27 (1.28 - 4.02) 9
TABAGISME ET FECONDITE NATURELLE Survenue de la ménopause plus précoce de 2 à 4 ans en moyenne. FSH augmentée (+66% tabagisme actif, +39% tabagisme passif) Dose de FSH nécessaire plus haute
TABAGISME ET AMP Étude prospective de Klonoff-Cohen concernant 221 couples suivis sur 5 ans. (Hum Reprod, 2001) Couples dont l’un ou les 2 membres fument aux couples de non fumeurs : 2.4 fois + de risque de ne pas avoir de grossesse 3.8 fois + de risque de ne pas avoir de naissance Revue de la littérature fumeuses en AMP (Waylen et al, Hum Reprod Update, 2009): Taux de grossesse évolutive par cycle : 45% Taux de naissance vivante : 45% Taux de fausse couche : x 2.5 GEU : x 15
TABAGISME ET MARQUEURS DE LA RESERVE OVARIENNE : L’ AMH Diminution de l’AMH sérique chez les fumeuses Pas de modification de la FSH ou de l’E2 Effet dose dépendant Freour et al, RBMonline, 2008
TABAGISME ET MARQUEURS DE LA RESERVE OVARIENNE : CFA Pas de modification du CFA total (2-10mm) Mais modification de la répartition des diamètres des follicules antraux avec augmentation du % de follicules de diamètre > 6mm chez les fumeuses Recrutement plus précoce ? Freour et al, Arch Gynecol, 2012
Hypothèses physiologiques Effet trans-générationnel : effet délétère démontré chez l’animal de l’exposition au tabac in utero sur la réserve ovarienne (Kilic et al, J Matern Fetal Neonatal Med, 2012) diminution des cellules souches dans les gonades indifférenciées du fœtus en cas de tabagisme en début de grossesse (Mamsen et al, Hum Reprod, 2010)
Hypothèses physiologiques Altération directe des follicules primordiaux (Tuttle et al, HR, 2009; Jurisicova et al, JCI, 2007; Gannon et al, Toxicol Sci, 2012) Sobinoff et al, Toxicol Appl Pharmacol, 2012
Hypothèses physiologiques Impact sur la fonction et la prolifération des cellules de la granulosa (Paixao et al, J Ovarian Res, 2012) Inhibition de l’aromatase (Barbieri et al, 1996) Diminution de la concentration intrafolliculaire en AMH (Fuentes et al, Chemosphere, 2012)
Tabagisme et fertilité masculine Effet plus difficile à évaluer « stress oxydatif » à l’origine de la détérioration de la qualité du sperme Altération membranaire Fragmentation ADN nucléaire et mitochondrial Taux d’aneuploïdie
Tabagisme et fertilité masculine Résultats contradictoires Diminution: Numération ( ↘ moyenne de 22%, effet dose-dépendant) Mobilité Tératospermie Les résultats restent toutefois dans les normes Impacts des autres modes de consommation du tabac
Tabagisme et fertilité masculine 1,5 à 2 fois plus de risque de troubles erectiles
Tabagisme et fertilité masculine Impact positif de l’arrêt ↗ numération, mobilité ++, vitalité ↘ des troubles érectiles
Tabagisme Qualité embryonnaire Altération du développement embryonnaire précoce chez les fumeuses Littérature disponible : pas de différence pour les critères morphologiques conventionnels Objectif de l’étude : comparer le développement embryonnaire précoce à l’aide de l’Embryoscope en fonction du statut tabagique des femmes. Etude de cohorte observationnelle rétrospective Utilisation des critères morphologiques habituels, et des critères cinétiques prédictifs définis localement
RESULTATS (1) 135 couples : 23 fumeuses (139 ovocytes), 112 non fumeuses (729 ovocytes) Pas de difference entre les groupes, sauf pour l’AMH et le CFA significativement plus bas chez les fumeuses Pas de différence pour les aspects biologiques habituels (maturité ovocytaire, fécondation, morphologie à J3) 23
RESULTATS (2) Différences significatives : t3 t4 t5 t8 * Différences significatives : t3 t4 t5 t8 Intervalle t3-t2 * * *
RESULTATS (3) Analyse de survie : Les embryons des fumeuses atteignaient les stades : 3-cellules (p=0.01) 4-cellules (p=0.05) et 5-cellules (p=0.02) significativement plus lentement que les embryons des non fumeuses
RESULTATS (4) % d’embryons avec des caractéristiques morphocinétiques optimales (classe A / sous-classe A+) taux d’implantation Au final, le taux de grossesse évolutive était significativement plus bas chez les fumeuses (9%) que chez les non fumeuses (30%) (OR: 0.2, p=0.04)
Autres données Le tabagisme est un facteur prédictif indépendant de naissance vivante après transfert d’un blastocyste (Dessolle et al, Hum Reprod, 2011) Effet embryonnaire ? Endométrial ? Les 2 ? Le tabagisme passif est aussi délétère que le tabagisme actif (Benedict et al, Hum Reprod, 2011) Evolution de la réserve ovarienne variable selon l’ethnie (Schuh-Huerta et al, Hum reprod, 2012) 27
ALCOOL
ALCOOL La consommation moyenne d'alcool pur par habitant de 15 ans ou plus est estimée à 12,4 litres en 2009. En 2010, 4 adultes/10 entre 18 et 75 ans présentent une consommation d'alcool à risque (dont ¼ un risque d'alcoolisation excessive chronique). Risques 2 à 3 fois > hommes / femmes
ALCOOL – Evolution La baisse des usages quotidiens de boissons alcoolisées (de 16 % en 2005 à 12 % en 2010 Stabilisation des niveaux de consommation occasionnelle (hebdomadaire ou moins fréquente)
Alcool -Femmes Femme : Altération taux E2 (E2 à p de 1verre/jr (augmentation de l’aromatisation de la testostérone) et Pg Anovulation Altération de la phase lutéale Altération de l’implantation Altération dev blastocystes
Alcool -Femmes Diminution de fécondabilité de 4% / verre conso pour chaque cycle (OR: 0.96) Allongement du DNC proportionnelle à la quantité
Alcool -Femmes Consommation pendant la grossesse Augmentation du risque de fausse couche Prématurité Petit poids de naissance Mort fœtale Syndrome d’alcoolisation fœtale
Alcool- Hommes Altération sécrétion testostérone et spermatogénèse Interférence avec l’axe hypothalamo-hypophysaire Altération testiculaire consécutive Diminution des caractères sexuels secondaires Dysfonctions érectiles Hypofertilité
Alcool- Hommes Paramètres spermatiques Variations variables selon les études Délai de liquéfaction ↗ Asthénospermie ↘ volume ↘ concentration ↗ tératospermie Action au niveau central Récepteurs GnRH hypophysaire → ↘ [LH] interaction avec activité LH β endorphine → suppression production testostérone testiculaire et augmentation apoptose Etat pro-inflammatoire
Alcool- Hommes Altérations testiculaires Spermatogénèse sensible à l’alcool Poids testicules < chez alcooliques chroniques Libido diminuée (>2-3 verres par semaine → troubles érectiles (OR : 2.27, 95% (CI)=1.28-4.03)
Alcool Exposition prénatal Altération du développement des cellules de Sertoli ↘ concentration en spermatozoïdes ≥ 4.5 verres /sem → ↘ 32% concentration (/< 1 verre /sem) ↗ volume et numération pour une conso 1 - 1,5 verres/sem
Alcool Exposition prénatal Cryptorchydisme (OR : 3,1 ≥ 5 verres/sem) , syndrome de dysgénésie testiculaire ↘ méthylation ilots CpG du gene H19, plus importante pour 2éme generation
CANNABIS
CANNABIS de très loin la substance la plus consommée En 2010, environ un tiers des adultes âgés de 18 à 64 ans déclare en avoir déjà consommé au cours de leur vie. La proportion de personnes ayant expérimenté le cannabis est maximale entre 26 et 34 ans pour les hommes, 18 et 34 ans pour les femmes
Cannabis Fertilité masculine Rôle clé du système des Endocannabinoïdes Delta-9-tetrahydrocannabinol (THC) altère la spermatogénèse et la production de testostérone (action par l’intermédiaire des mêmes récepteurs que les endocannabinoïdes) Anandamide (AEA) et 2-arachidonoylglycerol (2-AG) sont les endocannabinoides les mieux caractérisés (eCBs) Activités biologiques distinctes au niveau du systeme nerveux central et périphérique (action comparable à celle du THC)
Cannabis Fertilité masculine Action par l’intermédiaire de récepteurs aux cannabinoides (récepteur couplé à une protéine G) 2 types CB1 : SNC, ovaire, utérus, placenta, testicule, déferents, prostate,tissus endocrine pérphérique et neurologiques CB2 : lymphocytes…, neurones, trophoblaste, cellules reproductives
Cannabis Fertilité masculine Des éléments du système des Endocannabinoïdes ont été identifié dans le plasma séminal, les cellules de Leydig et de Sertoli , les cellules de la lignée germinale des spermatogonies aux spermatozoïdes. ‘‘evolutionary’ role” : checkpoint ↘ de la mobilité Modulation de la réaction de capacitation ↘ réduction de la fusion de la membrane spematique avec celle de l’ovocyte
Cannabis Fertilité féminine Effet inhibiteur sur la folliculogénèse Effet sur la fécondation, le transport dans les trompes, l’implantation et le maintien de la grossesse Développement d’un phénomène de tolérance chez les utilisatrices chroniques Dépendant du moment d’administration dans le cycle
Cannabis Fertilité féminine Régulation du transport des spermatozoïdes dans les trompes (cellules epithéliales) AEA : composant clé dans la liaison de l’embryon et de l’endomètre assurant la synchronisation embryon/endomètre facilitant l’implantation au cours de la « fenetre d’implantation »
Cannabis Fertilité féminine
Cannabis Fertilité féminine
Conclusion Importance de sensibiliser à l’arrêt Augmentation des chances de grossesses (en AMP et naturellement) après l’arrêt Impact sur les générations futures